Chapitre 29

Jedrek parvint à me faire entrer dans les quartiers de Kellan. Il était recroquevillé sur son lit, en chien de fusil. Je m'approchai à pas de loups, ignorant l'homme assis à la table qui regardait par la fenêtre d'un air absent.

Je m'assis sur le bord du lit, posant une main sur son épaule.

- Kellan ? l'appelai-je doucement.

Il repoussa ma main violemment. Il appuya sur l'hématome que j'avais sur mon avant-bras. Je grimaçai, tentant de ne pas en prendre ombrage.

- Est-ce que ça va, Kellan ? insistai-je, peu décidée à me laisser repousser aisément.

Il releva la tête, me jetant un regard noir comme l'encre. Ma surprise dut transparaître sur mon visage car l'éclat féroce dans ses yeux vacilla.

- Laisse-moi tranquille ! cracha-t-il. Tout est de ta faute !

- De... De ma faute ? bégayai-je.

- Oui ! Si tu avais rempli ta mission, papa n'aurait pas fait ça !

- Rien que le fait que je sois acceptée à la Cour est un miracle, Kellan. Jon ne pouvait pas croire qu'il allait regagner sa place auprès du Roi à travers moi ! Même toi, tu es plus intelligent que ça, Kellan. Tu devais te douter qu'il ne serait pas gracié.

Les larmes commencèrent à parler au bord de ses yeux. Mes doigts glissèrent dans ses cheveux et il s'appuya contre ma paume. Je bougeai sur le lit et il vint se blottir contre moi. Il éclata en gros sanglots et je le berçai avec douceur.

Il lui fallut près d'une heure pour se calmer. Je ne bougeai pas, me contentant de le rassurer sans piper mot. Il finit par s'endormir. Je le calai contre ses oreillers et rabattis la couverture sur lui.

Je quittai la chambre sans en savoir plus. Sans avoir véritablement pu parler à Kellan. Au demeurant, j'avais accompli ce que je voulais en allant le voir. Il s'était enfin laissé aller. Il avait pleuré et j'avais pu l'aider à se rassurer. C'était tout ce que je voulais.

Je soupirai, lasse. J'avais besoin d'un peu d'air. Au moins ça. Toutefois, un orage blanc se déchaînait à l'extérieur, me piégeant à l'intérieur. Je fixai les fenêtres avec une rage qui me faisait trembler. Je devais parler à Jon. Quel qu'en soit le prix. Il fallait que je comprenne pourquoi il avait agi ainsi.

Une main glissa dans le bas de mon dos. Je ne me retournai pas. Je savais que c'était Ryker. Lui seul oserait agir ainsi envers moi.

- Tout va bien ?

Je haussai les épaules.

- Je ne sais pas vraiment, admis-je. Je...

Je n'avais plus rien à dire. Si c'était le cas, je ne savais pas comment le dire. Il se rapprocha, se collant presque contre moi. Je ne le repoussai pas. Au contraire. J'accueillis sa chaleur et son odeur de cannelle avec plaisir. C'était sûrement la première fois qu'il se tenait aussi près de moi. Et j'aimais ça presque trop.

- J'ai cru comprendre que tu voulais voir Jon.

Je tournai la tête vers lui, abasourdie. Son visage fut soudain à quelques millimètres du mien. Je cillai, plus troublée que jamais, bien que je ne l'admettrai pas, même sous la torture.

- Comment... ?

- Je le sais ? sourit-il. Je sais tout, Sixtine. Et il ne faut pas être un génie pour deviner toutes les questions qui tournent dans ton crâne.

Je ramenai mon regard vers l'orage qui claquait contre les vitres. J'eus l'impression qu'il se rapprochait encore, si tant est que cela fut possible.

- Mon père m'a dit ce qu'il t'a demandé de faire. Tu ne peux pas faire cela. C'est ton père.

- Ce n'est pas mon père, contrai-je. Il me l'a bien fait savoir.

Sa main libre glissa sur ma hanche, me forçant à lui faire face. Ses yeux étaient si bleus, si calmes que je me sentis aspirée par eux.

- Il est la seule figure paternelle que tu aies jamais eue. Tu ne peux pas être l'instrument de sa mort.

- Il ne sera pas le premier homme que je tuerai.

Ces quelques mots furent plus difficiles à articuler que je ne l'aurais cru. Face à lui, avouer mes crimes de façon aussi limpide était une torture. J'étais une meurtrière alors qu'il était le Prince héritier...

- Cette fois, c'est différent et tu le sais. Il ne s'agit pas de n'importe qui.

- Je dois le faire. Si je ne le fais pas, le Roi va me chasser et je n'ai nulle part où aller. Je n'ai pas le choix.

- Je ne laisserai pas cela arriver. Je te le promets. Je vais parler à mon père. Il veut prendre sa revanche sur Jon à travers toi. Il pense que te voir activer le levier assénera un coup final à Jon.

- Il s'en moque. Jon. Le Roi n'aura pas sa revanche ainsi. Que cela soit moi ou non... Jon s'en moque. Il rira à la face du Roi quand le moment viendra.

Ryker laissa échapper un long souffle qui joua dans mes cheveux. Je le regardai, si beau et si noble. Mon cœur était fou dans ma poitrine. Il était hors de question que Ryker le sache un jour. Il allait finir par me haïr lorsque je tuerai son père. Je ne pouvais pas me laisser piéger. Si je me laissais aller, une fois le moment venu, je penserai à lui et n'irai pas jusqu'au bout.

Je ne pouvais pas me le permettre.

- Je vais t'emmener jusqu'à Jon. Mais je resterai avec toi. Je ne te laisserai pas seule avec lui.

- Je peux me défendre.

- Je sais. Je resterai assez loin pour ne rien entendre mais je resterai.

C'était la meilleure offre que je pouvais espérer. Quelque part, l'idée de me glisser dans la prison de nuit me semblait plus judicieux. Mais après m'être renseignée, je savais qu'il valait mieux que Ryker organise la rencontre. Rien que le bruit que risquaient de faire les autres détenus ferait tout foirer.

S'il y avait une chose que j'avais bien compris à propos de la prison royale, c'était qu'il était impossible de s'y introduire discrètement. Il y avait tant de détenus qu'une femme ne passerait jamais inaperçue. Aussi douée que je pus être pour me faufiler, dans cet endroit sombre et surpeuplé... Je me ferais repérer avant d'avoir pu parler à Jon.

- Évidemment, ça ne se passera pas à la prison, continua Ryker, repoussant distraitement une de mes mèches derrière mon oreille. Je le ferai amener dans une des cellules du donjon.

- C'est très généreux de votre part, soufflai-je.

Il eut un sourire, son pouce venant caresser ma joue. Sa peau était moins douce que ce à quoi je m'étais attendue. Elle irradiait d'une chaleur telle que j'eus envie d'appuyer mon visage dans sa paume.

J'exhalai un souffle tremblant, luttant contre les palpitations dans ma poitrine. S'il continuait ainsi, je serais incapable de demeurer campée sur mes positions. Mes sentiments pulsaient, me paraissant plus forts à chaque rencontre avec le Prince.

- Ce n'est pas généreux, contra-t-il. C'est même tout le contraire. C'est par pur égoïsme que je le fais.

Je relevai les yeux vers les siens, surprise. Je ne m'étais pas attendue à une telle réponse.

- Penses-tu que je ferais cela pour n'importe qui ? C'est purement égoïste de ma part.

- Vous ne devriez pas agir ainsi. Vous savez que ce n'est pas correct. Je ne suis pas...

Il posa un doigt sur mes lèvres, m'empêchant de continuer. Il secoua la tête.

- Le fait que je sois le Prince héritier ne change rien à notre affaire, Sixtine. Ce n'est qu'un titre. Je ne suis pas qu'un titre. Ne le vois-tu pas ?

- Je préfère l'ignorer. C'est plus sûr. Autant pour vous que pour moi. Rien ne pourra jamais compenser le gouffre qui nous sépare. Et je suis la fille adoptive de Jon. Cela ne fait que creuser l'écart un peu plus.

- Sixtine...

Je reculai d'un pas, usant de tout le contrôle que je pouvais avoir sur moi-même. Je ne devais pas faillir. Il fallait qu'il comprenne que cela ne pouvait pas arriver. Jamais. Il se doutait sûrement des sentiments qu'il m'inspirait. C'était la seule possible raison pour laquelle il aurait pu revenir sur ce sujet après ce qu'il s'était passé durant le bal. Mais il fallait qu'il comprenne que je ne céderai pas.

Je tuerai son père. Lui donner l'espoir d'un avenir serait le trahir, l'utiliser de façon déloyale. Je regrettais le temps où il n'était qu'un pion pour m'assurer une place à la Cour. Tout était si facile à ce moment-là...

- Non, Votre Altesse. Nous ne pouvons...

Je ne terminai pas ma phrase, crispant mes mains sur le velours épais de ma robe. Je tournai les talons, bien décidée à m'éloigner de lui. Il me corrompait l'esprit. Je ne parvenais plus à envisager mon plan correctement avec lui dans les environs. Tout ce à quoi je pensais, c'était à lui, à mon cœur tambourinant contre mes côtes, à son parfum si royal.

Je trébuchai lorsqu'il saisit ma main et me ramena vers lui. Je dus me rattraper à lui pour ne pas tomber à ses pieds. Ses bras se glissèrent autour de ma taille, saisissant l'occasion.

Je n'osai pas relever la tête. Il était trop près. Mon nez effleurait presque sa pomme d'Adam. Cependant, il ne semblait pas penser la même chose. Ses doigts s'enfouirent dans mes cheveux, orientant mon visage vers lui.

- Que... ?

Ma voix était trop aiguë. Elle dérailla sur une simple syllabe. Je ne parvins pas à la fin de ma question. Son regard était trop intense. Je fondais comme neige au soleil.

Il allait m'embrasser.

Je le sentais. Je le savais. Il allait m'embrasser et tout en moi était en guerre. Je voulais le laisser faire ; je ne devais pas le laisser faire. Mon devoir ou mes sentiments ? Pour une fois, ne pouvais-je pas faire quelque chose pour moi ?

Sauf que, réalisai-je, il ne s'agissait pas que de moi. Il s'agissait de lui et de moi. Je ne pouvais pas le laisser faire. Il me haïrait encore plus quand je tuerai son père. Il ferait faiblir ma main. Il me rendrait faible.

Mon dilemme intérieur fut réduit au silence par un raclement de gorge derrière moi. Ryker releva vivement le regard vers l'intrus. Je serrai fermement les paupières, sachant déjà qui nous avait interrompus.

- Qu'y a-t-il ? demanda sèchement Ryker.

Les lèvres pincées, je me défis de son étreinte, passant outre sa tentative de me retenir. Le charme était rompu. Mon esprit logique et stratégique retrouva sa place et mon cœur se serra, déçu.

- Le Roi vous demande, Votre Altesse, énonça froidement Jedrek.

- A-t-il dit pourquoi ?

- Non.

- Bien. Je suppose qu'il me faut y aller.

J'évitai le regard qu'il me lança. Je ne tenais pas à lire ses émotions sur son visage. Il hésita quelques instants avant de partir. Il souffla quelque chose àJedrek qui hocha simplement la tête.

Dès qu'il fut assez loin, je poussai un soupir interminable, m'affalant contre le mur. Jedrek se rapprocha, me fixant comme s'il essayait de lire dans mon crâne.

- Merci, dis-je.

Je fus fière de ma voix calme et posée. Il ne pouvait pas se douter de l'émoi qui m'agitait à l'intérieur. Ni de ma déception amère.

- Qu'ai-je fait ?

- Tu es arrivé au bon moment. J'ai beau faire, il ne lâche pas l'affaire.

Je le regardai appuyer ses paumes sur le rebord de la fenêtre à côté de moi.

- Il est amoureux de toi.

Mon cœur manqua un battement.

- Il est attiré par moi parce que je suis différente des ladies qu'il connaît. Rien d'autre. Et parce que je le repousse. Cela n'a rien à voir avec de l'amour.

- Je le connais. Si je te dis qu'il est amoureux de toi, c'est qu'il l'est.

- Cela lui passera. On le sait tous les deux. Il me haïra avant la fin de l'année.

Jedrek ne répondit pas de suite. Le silence s'étira, désagréable. Empli de non-dits.

- Tu sais, je me pose beaucoup de questions sur tes sentiments.

Le Capitaine de la Garde fixait le mur devant lui comme s'il tentait de comprendre un problème trop complexe.

- Mes sentiments ? répétai-je.

- Oui. Parfois, j'ai l'impression que tu ne fais qu'utiliser les gens pour assouvir ta vengeance. À d'autres moments, je me dis que tu ressens plus de choses que tu ne te l'autorises.

- Quel genre de choses ?

- Est-ce que tu aimes Ryker ?

- Non.

J'avais ménagé la petite seconde avant de répondre, modulé mon ton. Jedrek n'avait pas besoin de savoir que c'était un mensonge éhonté. J'ignorais comment il réagirait s'il l'apprenait et je ne pouvais pas me permettre de perdre son aide. Maintenant que je n'avais plus Sdan et ses Assassins, Gallagher ou Jon, il ne me restait que Jedrek. Si lui aussi m'abandonnait seule face à la tâche qui m'incombait...

- T'autoriserais-tu seulement à aimer quelqu'un ?

Son ironie me parut étrange. Cela ne lui ressemblait pas. Je décidai de passer outre. Ma tête pulsait, une migraine rôdant.

- Pas avant d'avoir tué le Roi. S'il existe encore un homme capable de m'aimer à ce moment, ce sera un miracle.

Je me redressai et rejoignis la salle d'études. La Princesse m'attendait. Il était temps pour elle de travailler sa géographie. Lui donner ce cours me força à me détacher de mes problèmes. Je reléguai tout dans un coin sombre et verrouillé de mon esprit, refusant de m'y abandonner.

Au demeurant, ma migraine se fit une place entre mes yeux, furieuse et brûlante. Elle était si intense à la fin du cours de la Princesse que ma vision en était altérée. Je fus bien contente de voir le Capitaine devant la porte lorsque je sortis.

- Que se passe-t-il ?

Il n'avait pas pu manquer la façon dont je plissais les yeux, évidemment.

- J'ai une vilaine migraine. Ce n'est rien. Je vais aller m'allonger un peu.

- Le Prince a fait installer Jon dans une cellule des donjons. Il veut que tu le rejoignes. Maintenant.

Je portai une main à ma tempe.

- Junia aurait-elle une concoction qui pourrait m'aider ? Je ne me vois pas faire face à Jon avec un tel mal de tête.

- Je pense qu'elle doit avoir ça. Allons-y.

Il m'escorta jusqu'à l'infirmerie. Certaines victimes de l'attaque du bal étaient encore allongés sur les lits. Junia se tourna vers nous lorsque nous entrâmes. Elle parut étonnée.

- Y a-t-il un problème, milady ?

- Elle a une migraine, répondit Jedrek à ma place. Tu n'as pas quelque chose qui traîne dans le coin ?

- Attendez-moi là. Je vais voir.

Je la regardai disparaître derrière l'un des draps qui avait été tendu pour séparer la pièce en plusieurs alcôves qui isolaient les victimes les unes des autres.

Lasse, je laissai le Capitaine me guider jusqu'à une chaise. Je m'assis sans résister. Nous patientâmes pour le retour de sa mère adoptive en silence.

Elle finit par revenir avec un verre rempli d'un liquide bleuâtre.

- Cul sec, m'ordonna-t-elle. Le goût est infect mais ça fera effet rapidement.

- Merci, Junia.

Elle me répondit par une courbette avant de repartir. Je bus la potion en une gorgée. Ce fut comme d'avaler de la boue acide. J'eus un violent haut-le-cœur, écœurée.

- Rejoignons Ryker avant qu'il ne se mette à penser qu'il t'est arrivé quelque chose.

- Elle ne mentait pas en disant que c'était infect, éludai-je en lui emboîtant le pas.

- Tant que ça te soulage de ta migraine, le goût ne devrait pas avoir d'importance.

- Il en a quand c'est dans ma gorge qu'il descend !

Il éclata de rire. C'était rare de l'entendre rire ainsi. Il rajeunit de quelques années, ressemblant plus à un adolescent qu'à un implacable Capitaine de la Garde. Ses yeux indéchiffrables brillaient, le haut de ses pommettes rosit. Toute son image de Capitaine dur et froid se fissura pour laisser voir une nature joyeuse et légère. Je venais de découvrir une part trop refoulée de Jedrek et je l'aimais assez.

Nous descendîmes dans les donjons. Trois gardes étaient à l'entrée. Ils s'écartèrent devant nous. Toutefois, je ne manquai pas leurs regards suspicieux. Ils se tairaient mais se posaient des questions. J'espérais qu'ils s'en tiennent à leur serment et ne divulguent rien de tout cela. Bien que, techniquement, je n'ai rien à me reprocher. C'était le Prince qui organisait cette rencontre. Je ne lui avais même pas demandé.

Jon était dans l'une des cellules les plus proches de la table des gardes. Ryker était assis sur l'une des chaises en bois, ses langues jambes étalées devant lui. Il se redressa lorsque nous arrivâmes.

- Je commençais à croire que vous vous étiez perdus en route, nous apostropha-t-il sèchement.

Je vis immédiatement que quelque chose avait changé en lui. Une noirceur inhabituelle rôdait dans ses prunelles bleues et il était aussi tendu qu'un arc.

- C'est de ma faute, Votre Altesse. J'ai demandé au Capitaine de m'emmener à l'infirmerie avant de venir.

- Vous êtes blessée ?

Changement d'attitude. Il parut sincèrement inquiet, me rejoignant en deux pas. Il se retint cependant de me toucher.

- J'avais une méchante migraine. Junia a eu tôt fait de me donner une concoction qui l'a fait s'évaporer sur le chemin.

- Bien, dit-il, peu sûr.

Il se racla la gorge, faisant un pas sur le côté.

- Jon est dans cette cellule. Nous serons à l'entrée des donjons. Il est enfermé mais s'il tente quoi que ce soit, criez et nous serons là dans la seconde.

- Merci, Votre Altesse, pour me donner l'occasion de lui parler.

- Ne me remerciez pas.

Il ne le dit pas mais j'entendis la fin de sa phrase. S'il avait pu, il aurait dit le « je ne le fais pas pour vous ». Je ne comprenais pas pourquoi son comportement s'était ainsi modifié en l'espace de deux heures.

Je m'inclinai et les deux hommes s'éloignèrent vers l'entrée des donjons. Pour l'instant, la dernière chose dont j'avais besoin de me soucier, c'était de ce qu'il se passait dans la tête du Prince héritier.

Je rejoignis Jon, bien décidée à comprendre le pourquoi de l'attaque du bal.

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