Chapitre 3
Code d'honneur du chevalier :
1. Il a un comportement exemplaire guidé par les valeurs de la Chevalerie, la vaillance, la générosité, l'honneur et la courtoisie.
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Cette annonce vint foudroyer Mipha, lui bloquant net la respiration. Ce qu'elle redoutait le plus venait de se produire. Peut-être n'était-ce qu'une rumeur... Mais la réalité la rattrapa si brusquement qu'elle perdit sa bonne humeur et afficha une expression déconcertée.
- Comment un gringalet comme lui pourrait recevoir cet illustre titre ?! s'offusqua Revali en pointant le prodige hylien qui s'éloignait. Il n'a aucun pouvoir ! Et ce n'est pas avec une simple épée qu'il parviendra à protéger la princesse.
- Link est le meilleur épéiste du royaume, argua Urbosa en croisant les bras. Il est le seul à qui revient le droit de la protéger. Nous en saurons certainement plus ce soir.
La journée, déjà riche en émotions, venait de prendre une nouvelle tournure que chacun vécut différemment. Il n'y avait qu'Urbosa et Daruk qui se réjouissaient de cette nouvelle. De son côté, Mipha prenait soin de leur tourner le dos, certainement pour cacher ses yeux embués.
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- Vous avez fait vite, remarqua Rhoam Hyrule en voyant sa fille et le capitaine de la garde royale arriver dans la salle du trône.
La princesse, dont le visage fermé témoignait de son immense déception, s'inclina avec politesse devant son père tandis que Link posait un genou à terre, comme toutes les fois où il faisait face à son roi. Zelda lui jeta un bref coup d'œil, les sourcils froncés, puis reporta son attention sur le souverain d'Hyrule.
- Père, m'avez-vous choisi le Héros en tant que chevalier servant ? demanda-t-elle d'une voix froide.
La jeune fille ne voulait pas de Link pour ce titre. Il était bien trop fermé et inexpressif. Et son regard... Elle pensait percevoir du mépris à travers ses yeux d'un bleu glacial.
- C'est exact, approuva le roi en les rejoignant au centre de la pièce.
Les mains de sa fille se crispèrent bien que personne ne le remarqua.
- Je pense qu'il n'y a pas de chevalier plus apte que Link pour assumer ce rôle, poursuivit-il avant de prier le jeune homme de se relever.
Link se redressa, son cœur s'emballait malgré son manque d'expression. Jamais il n'avait été à l'aise en présence de son roi. Ce titre supplémentaire ne faisait qu'accroître sa pression due à ses grandes responsabilités.
- Père ! s'indigna la princesse en effectuant un pas en avant. Il est légitime que ce soit moi qui choisisse ! Laissez-moi trouver quelqu'un plus âgé, avec plus d'expérien...
Rhoam Hyrule balaya brusquement l'air afin de la faire taire, agacé.
- Vous n'avez pas votre mot à dire, rétorqua-t-il avec fermeté. Vous portez en vous un pouvoir divin. Il est hors de question qu'il vous arrive quoi que ce soit à cause d'un chevalier incompétent.
Le souffle de Link se bloqua alors qu'une boule se formait dans son ventre. Ces mots l'avaient blessé. Il sentait que le roi critiquait ses semblables, comme si la grande majorité d'entre eux n'étaient que de la chair à canon. Sa nuque se courba et son regard se posa sur les dalles de la salle. De plus, il avait parfaitement compris que la princesse Zelda ne voulait pas de lui. Un sentiment de détresse naquit en son sein, bien que cela soit presque imperceptible pour le jeune homme.
- Link, désormais, tu seras aux côtés de ma fille toutes les fois où elle quittera Hyrule, ainsi que dans l'enceinte du château si cela s'avère nécessaire. Est-ce bien clair ?
Le blond posa son poing au-dessus de son cœur puis inclina la tête en signe d'accord. De toute façon, il n'avait pas son mot à dire. Quand il osa regarder la princesse, celle-ci lui offrit un regard froid.
- Bien, allons rejoindre les autres prodiges pour leur annoncer la nouvelle, déclara le monarque en se dirigeant vers le couloir qui menait à l'extérieur.
Zelda, qui contenait le mieux possible sa colère, lui emboîta le pas en adoptant une allure presque brusque. Quant à Link, il les regarda quelques instants s'éloigner avant de les suivre, les traits de son visage paraissaient légèrement contractés. Tous trois, escortés par une poignée de gardes royaux, se dirigeaient vers l'une des nombreuses fontaines du château, là où les quatre autres prodiges les attendaient selon les dires d'une domestique. Non loin se préparait un buffet en l'honneur des futurs héros du royaume. Des cuisiniers se hâtaient d'apporter les derniers accessoires.
En les apercevant, Revali croisa les ailes et claqua de la langue à l'adresse de Link. Urbosa, elle, s'empressa de se réjouir auprès de son amie mais Zelda fut loin d'être aussi enthousiaste qu'elle.
- J'ose espérer que le repas en votre honneur sera à la hauteur, dit le roi en observant d'un œil critique le buffet.
- Tant qu'il y a de la caillasse rôtie, moi, je suis content, le rassura Daruk avant de rire allègrement tout seul.
De son côté, Mipha épiait discrètement Link, en retrait, et se demandait sans cesse ce qu'elle allait bien pouvoir lui dire. La princesse zora voulait le féliciter mais elle savait très bien que ce n'était pas le véritable fond de sa pensée. Au loin, des cris retentirent et firent s'immobiliser tout le monde, sur le qui-vive. Personne ne voyait ce qu'il se passait et donc ne comprenait la situation. Pourtant, les cinq prodiges restaient sur leurs gardes, prêts à agir quelles que soient les circonstances.
Un puissant rayon blanc fendit l'air et fit voler un arbre centenaire en éclats à une quinzaine de mètres de là. La princesse Zelda poussa un cri de peur en reculant soudainement alors que tous les domestiques s'enfuyaient. Un autre rayon s'abattit sur la fontaine et détruisit une partie de la statue qui représentait un oiseau. C'est alors qu'un Gardien arriva à vive allure et les détecta.
- Madame ! s'exclama Urbosa en se plaçant devant elle afin de la protéger.
Un point rouge apparut alors sur le torse du roi en personne et le sang de tous se glaça.
- Par les déesses ! s'écria Revali face à la menace imminente.
- Père !! hurla Zelda, épouvantée.
Sans perdre une seconde, Link se précipita vers le buffet, s'empara du couvercle de la première marmite trouvée puis il bondit devant le roi. Au même moment, le Gardien réitéra son attaque. D'un coup, le jeune homme para le rayon, ce qui le renvoya par la même occasion. La machine le reçut de plein fouet dans l'ouverture qui s'apparentait à un œil puis elle s'écroula sur le côté, abattue. Link se redressa avec impassibilité sans lâcher du regard son précédent ennemi. De toute évidence, les Sheikahs avaient perdu son contrôle. Impa, elle aussi présente, s'empressa de courir vers le Gardien pour l'analyser en toute hâte.
- Link, c'est épatant ! le complimenta Daruk en posant une main sur son épaule. Tu es bien l'homme de la situation !
Le roi sortit enfin de sa torpeur, le teint pâle, puis regarda le Héros qui venait de le sauver. Comme lui, Mipha éprouva une grande admiration pour celui qui avait su prendre une décision rapidement.
- Cela ne fait plus aucun doute, jeune homme. Tu mérites bien ton nouveau titre de chevalier servant, affirma Rhoam Hyrule de toute sa grandeur.
- Tout de même, vaincre un Gardien de la sorte... souffla Urbosa, toute aussi surprise que les autres.
Revali, agacé, secoua la tête en lançant un regard noir à ce jeune péquenot qui faisait son intéressant à tout bout de champ.
- Quelle honte, siffla-t-il entre son bec.
Fort heureusement, personne ne l'entendit. Quant à la princesse, son regard s'était d'autant plus assombri. Par respect, elle remercia brièvement le Héros avant de rejoindre Impa pour comprendre ce qu'il était arrivé au Gardien. Son amie se montrait soucieuse.
- C'est bien la première fois que je vois cela, déclara la Sheikah en analysant les pièces de la machine. Nous ne sommes pas supposés perdre leur contrôle.
Impa se tint le menton, les sourcils froncés et le regard suspicieux. La princesse, toute aussi alarmée, fit le tour du Gardien mais ne trouva rien d'anormal.
- Une défaillance du système ? supposa-t-elle finalement.
- C'est possible. Cependant... Il m'a semblé voir une fumée rouge s'en échapper une fois vaincu.
La jeune fille, surprise, écarquilla les yeux en dévisageant son amie. Une... fumée rouge ?
- C'est inhabituel, finit-elle par dire. Il faudra soumettre nos observations au laboratoire antique de Faras. Pourras-tu lui écrire ? Je crains être très occupée dès demain...
Impa lui sourit en lui assurant qu'il n'y avait aucun souci. Les Sheikahs chargés du Gardien arrivèrent alors en courant, paniqués, et s'excusèrent mille fois pour les dégâts occasionnés. La princesse leur certifia qu'en absence de blessés, ce n'était pas aussi grave qu'ils l'imaginaient. Il faudrait pourtant faire quelques réparations... Lorsque Zelda revint vers le groupe de prodiges, le grand Daruk s'empressa de lui demander s'il y aurait une cérémonie officielle pour nommer Link en tant que chevalier servant.
Discrètement, les traits de la prêtresse royale se durcirent et elle regarda sur le côté avant que le Goron n'insiste davantage car il rêvait d'assister à un tel rituel. Puisque tout le monde semblait attendre sa réponse, Zelda se sentit presque obligée d'accepter. Cette idée plaisait à son père, elle le voyait bien. C'est pour cela qu'elle donna son accord malgré sa réticence refoulée.
Le soir, le buffet organisé fut un véritable succès ; tous les invités étaient ravis, Link le premier. Au coin d'une table, il ne cessait de se resservir à l'abri des regards. Les feuilletés qu'il dévorait n'avaient plus aucun secret pour lui. Une ombre se dressa alors derrière son dos et vint prendre le dernier met sur l'assiette, ce qui eut pour effet de figer Link. Le blond se retourna et découvrit un jeune homme d'une vingtaine d'années, un accordéon sur le ventre. L'inconnu possédait une chevelure d'un blanc éclatant contrastant avec ses iris rouges. Un membre du clan Sheikah qui faisait bien une tête de plus que le jeune prodige et qui était qualifié de fort charmant par certaines dames. Ses yeux en amande affinaient son visage et lui donnaient un côté mystérieux en parfait accord avec son statut d'artiste.
- Eh bien ? s'étonna l'inconnu en constatant le regard surpris de Link. Ce feuilleté n'attendait que moi.
Il s'empressa de le manger sans lâcher le Héros du regard puis il finit par esquisser un sourire.
- Alors c'est toi, le prodige des Hyliens ? Je m'attendais à un homme plus âgé.
Link fronça les sourcils, il se demandait bien pourquoi ce Sheikah prenait autant de libertés avec lui.
- Je me permets de te tutoyer, tu es bien plus jeune après tout. De plus, ce n'est point parce que je suis un poète que je ne dois pas te considérer comme mon égal, argua-t-il en haussant les épaules.
L'inconnu se racla la gorge et réajusta son instrument dont il était si fier.
- Mon nom est Cassius, se présenta-t-il dignement. Je suis le poète et le musicien de la cour. J'imagine que tu as déjà entendu parler de moi ?
L'absence de réaction de Link le fit tiquer et porta un certain coup dans son égo. Comment ça, ce garçon ne le connaissait pas ?
- Soit. Tout le monde n'est pas apte à comprendre la beauté des mots et de la musique, répliqua Cassius froidement.
Au loin, le rire de la princesse attira leur attention et fit soupirer le poète, sous le charme.
- La princesse est une fleur dont la beauté ne se tarira jamais, je crois bien, souffla Cassius en hochant la tête.
Il jeta un regard presque hautain au prodige.
- J'ose espérer que tu feras correctement ton travail. Et ne pense pas t'attirer ses faveurs. Tu n'es qu'un chevalier après tout. Elle n'a que faire du bétail envoyé à l'abattoir.
Les yeux de Link s'écarquillèrent tandis que la colère monta brusquement en lui. Les chevaliers, du bétail ?! Par réflexe, le Héros voulu dégainer son épée pour laver cet affront, mais sa main se referma sur du vide. De toute évidence, son arme était restée dans le château, gardée par son coffre. Cassius ne perdit pas plus de temps et s'en alla vers la princesse pour lui réciter les derniers vers composés en son honneur. Elle en fut sincèrement touchée.
- Tu ne devrais pas te laisser marcher dessus ainsi, Link... bredouilla une petite voix à côté du jeune homme.
Il tourna la tête vers son amie d'enfance, toujours aussi intimidée par sa présence. Les mains jointes, elle s'approcha de lui, soucieuse.
- Il n'a pas conscience des véritables devoirs des chevaliers, ni même du tien, le rassura Mipha avec maladresse. Ne te préoccupe pas de lui.
La princesse zora lui offrit un sourire chaleureux auquel il répondit par un hochement de tête. Au fond, Link était soulagé d'être compris. Un jour, ce dénommé Cassius comprendrait qu'être chevalier est un devoir de haute responsabilité relevant de la protection du royaume entier.
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Le jour suivant, suite à la demande de Daruk, les cinq prodiges se réunirent en dehors du château pour le rite du chevalier servant. Au centre d'une placette entourée par des piliers de pierre, Zelda récitait d'un ton monotone les paroles de ce rituel, autrefois si courant chez les nobles de la cour.
Concentrée sur ses mots, elle n'entendait pas les chuchotements des autres prodiges, forts étonnés que la princesse soit aussi peu réjouie par cet événement. Daruk se sentit mal de lui avoir demandé une telle chose ; il ne pensait pas que cela la rendrait aussi peu enthousiaste. Tous se posèrent alors la même question : que s'était-il passé entre Zelda et Link pour qu'elle soit aussi froide envers lui ? Ils ne se connaissaient pourtant que depuis peu... Mipha en fut d'autant plus attristée. Voir son ami prendre autant à cœur sa mission alors que la princesse hylienne ne semblait pas l'apprécier...
Zelda ne put se retenir de soupirer une fois son discours terminé. Elle regarda le chevalier agenouillé. Elle ne parvenait pas à percevoir le fond de ses pensées, ni même la moindre expression chez lui. Pour elle, le Héros était insondable. La damoiselle commença à penser qu'il n'éprouvait aucune émotion humaine. Un être dénué de tous sentiments.
- Je vous remercie, Votre Altesse, la gratifia Daruk pour alléger l'atmosphère. Vous nous avez permis de voir un rituel presque perdu.
La princesse tourna la tête vers lui et l'inclina. Elle se demandait bien ce qu'elle allait faire dorénavant.
- Madame, j'aimerais discuter en privé avec vous, lui dit alors Urbosa avec sérieux. Nous retrouverons les autres prodiges ce soir, pour le dîner.
Zelda accepta et toutes deux partirent en direction du château, laissant derrière elles les quatre autres élus du roi. Bien embêté par la situation, Daruk tenta une nouvelle fois d'arranger les choses. Revali, lui, ne voulait même pas regarder son rival.
- Et si nous allions manger quelque chose en ville ? proposa le Goron, ravi par cette idée. J'ai vu plein de belles choses en arrivant !
- Excellente idée, l'approuva Mipha en sachant très bien que cela ferait plaisir à Link.
En effet, pour la première fois depuis qu'elle l'avait trouvé changé, elle vit ses yeux pétiller bien que le jeune homme resta impassible. Cela réchauffa le cœur de la princesse zora. Il fallut toutefois plusieurs minutes supplémentaires pour convaincre Revali de les accompagner. Ensemble, ils prirent le chemin de la citadelle en restant dans un silence paisible et agréable. Le chemin qui passait au milieu de la plaine leur apportait le bruit du froissement des brins d'herbes, des chants des oiseaux au loin. Seuls de rares nuages couvraient par endroits le ciel et amenaient un peu de fraîcheur en passant devant le soleil en ce mois de mars.
Le petit groupe se rendit à la première auberge qu'ils trouvèrent, tenue par une vieille dame et son fils. Ils commandèrent des boissons chaudes mais non alcoolisées. Les autres clients attablés dans la salle les regardaient à la fois avec étonnement et admiration. Ce n'était pas tous les jours que l'on mangeait sous le même toit que les prodiges !
- Nous sommes le centre de l'attention, leur fit remarquer Mipha peu à l'aise.
- Cela t'étonne-t-il qu'ils regardent le plus grand guerrier de tous les temps ? lui lança Revali en adoptant une fière allure.
Daruk hocha la tête.
- Je suis bien d'accord avec toi. Ils doivent être impressionnés par notre p'tit gars !
Le Piaf écarquilla les yeux tandis que la Zora dut se retenir de rire face à son expression. Revali jeta un regard noir à l'Hylien. Surtout que ce dernier n'avait pas même sourciller. À croire qu'il était une statue !
- Vous êtes si peu ouverts d'esprit que cela m'exaspère, maugréa le prodige piaf en croisant les bras. Vous finirez bien par comprendre.
- Et quatre boissons pour nos champions ! s'exclama l'aubergiste en arrivant, un plateau dans ses mains.
Elle leur servit les choppes, déposa une tranche de tarte devant Link puis s'en alla prendre une autre commande un peu plus loin. Le jeune homme entama son assiette avec avidité, sous le regard ahuri de Revali. Il n'y avait que son amie d'enfance et Daruk qui souriaient.
- Eh bien, eh bien ! rit le Goron en le regardant. Voilà quelque chose que le fiston aura gardé.
Le Piaf ricana.
- Mange, petit, le nargua-t-il sans gêne. Peut-être que ça te fera un peu grandir.
Link leva le regard vers lui, les sourcils froncés. Mipha, choquée, répondit à sa place :
- Surveille un peu tes propos, Revali, l'avertit-elle en le regardant durement. N'oublie pas qu'il est l'élu de nos déesses.
- Je ne faisais que le taquiner, voyons.
Il sourit davantage, malicieusement.
- Rien de bien méchant, ajouta-t-il avant de boire une gorgée.
La princesse zora l'observa un long instant d'un air désapprobateur puis entama à son tour sa boisson, sous le regard un peu dérouté de Daruk. Il ne comprenait pas vraiment ce qu'il se passait et ne chercha pas à en savoir plus.
De son côté, Urbosa escortait la jeune prêtresse en lui lançant des regards discrets. La reine était morte il y a bien des années de cela, brutalement emportée par une maladie que les médecins ne connaissaient pas. La petite Zelda, bien que traumatisée et chamboulée, resta digne d'après de très nombreux témoignages. Et la suzeraine gerudo, dès ce jour-là, la prit sous son aile jusqu'à la considérer comme sa propre fille au fil des ans. Elle le percevait bien : depuis quelques temps, sa petite dame semblait plus soucieuse.
- Je vois bien que tout cela vous affecte, dit-elle à Zelda alors qu'elles passaient les portes des remparts internes. Peut-être vous faudra-t-il encore quelques semaines pour vous habituer à la situation.
- Tout s'est enchaîné si vite, Urbosa... souffla l'Hylienne en baissant la tête. La découverte des Créatures Divines et des Gardiens, l'élu de la Lame Purificatrice, le choix des prodiges, le rituel du chevalier servant...
Elle entremêla ses doigts, une boule se formait dans son ventre.
- Qu'ai-je fait dans tout cela ? Les années se sont écoulées si vite, je n'ai toujours pas réussi à éveiller mon pouvoir alors que tout le monde semble prêt autour de moi. Je me sens bien inutile...
Urbosa voulut la contredire mais elle n'en eut pas le temps car la princesse poursuivit.
- C'est pour cela que j'aide dans les recherches de Pru'ha, la sœur d'Impa. Même si je suis encore loin de percer tous les secrets de la technologie sheikah, je sens que nous approchons peu à peu de notre but !
Penser à ses travaux parvint à lui faire retrouver le sourire.
- Je serai heureuse d'annoncer à Père que nous sommes en mesure de contrôler les Gardiens et les Créatures Divines, affirma-t-elle avec sérénité.
Urbosa lui sourit puis reporta son attention sur leur chemin en reprenant un air grave. Il était évident que la princesse ne lui disait pas tout, notamment au sujet de son début de relation délicate avec son chevalier servant. Pourtant, la Gerudo sentait qu'il y avait autre chose : un événement qui concernait uniquement la princesse et le roi. Une fois arrivées dans le grand hall du château, Zelda demanda à la suzeraine ce qu'elle désirait lui dire, Urbosa ne se fit pas prier :
- Je suis inquiète, Madame, lui avoua-t-elle après avoir vérifié que personne ne les écoutait.
En effet, dans l'immense hall déambulaient sans cesse des soldats, gardes ou domestiques qui s'affairaient et parlaient de vive voix.
- L'une de mes espionnes m'a appris qu'il y avait du mouvement parmi le clan Yiga. J'ai bien peur qu'ils méditent pour nous voler notre trésor ancestral. Mais si ce n'était que ça...
Zelda s'arrêta, très concernée, et fronça légèrement les sourcils.
- Qu'y a-t-il d'autre, Urbosa ? l'incita à poursuivre la princesse.
La guerrière croisa les bras et posa son regard sur un étendard, au loin.
- Je crains que vous soyez l'une de leur prochaine cible. La résurrection du Fléau approchant à grand pas, vous êtes leur plus grande ennemie. Promettez-moi de prendre avec vous une escorte à chaque fois que vous quittez le château. Et dans la mesure du possible, que votre chevalier servant soit à vos côtés.
Zelda se crispa et détourna la tête, le visage sombre. Une escorte de chevaliers ferait l'affaire. Inutile de sortir tout un régiment pour elle ou de... déranger le prodige hylien. Les Yigas avaient pour habitude d'attaquer par surprise, tout seul ou éventuellement à deux.
- Madame, je vous prie de considérer mes paroles, insista Urbosa en la voyant hésiter. Nous ne pouvons pas nous permettre de vous perdre.
La blonde acquiesça et croisa de nouveau le regard de celle qu'elle considérait comme une deuxième mère. Le moindre faux pas ou enfantillage de sa part pouvait lui coûter la vie. Soit, elle redoublerait d'efforts envers son chevalier servant. Il avait encore droit à sa chance, après tout.
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