Chapitre 36
En de très rares occasions, la destructrice avait déjà défié Sunset auparavant. Cette rapidité époustouflante pour esquiver ses coups, elle la connaissait. Une frustration intense naquit en elle quand, après de multiples tentatives, sa lame s'abattit à nouveau sur rien d'autre que de l'air. Son sabre reprit sa place initiale, proche de son corps et prête à la charge.
Sunset attendait lui aussi, les muscles tendus. Derrière sa silhouette imposante se dessinait Sandra. La jeune femme était en vie, ce qui rassura Sydney. Elle n'était pas venue pour rien. Mais en même temps, elle s'en doutait, au fond d'elle. Peut-être même connaissait-elle déjà une partie de l'issue de ce combat. La seule inconnue à cette équation était sa propre survie.
Une seconde. Il avait suffi d'une seconde d'inattention de sa part pour qu'elle soit surprise par un violent coup de pied qui lui fit lâcher son arme. La lame émit un bruit métallique alors qu'elle heurtait le plancher bétonné.
Au deuxième assaut du vampire, Sydney encaissa une seconde attaque qui la propulsa lourdement dans la porte. Cette dernière s'ouvrit sous la violence du choc dans un craquement sinistre. La destructrice disparut dans le couloir, au grand dam de Sandra, qui ne pourrait plus suivre ce qu'il se passait. Ce qui était d'ailleurs la seule activité que lui permettait sa captivité.
Sunset disparut à son tour, visiblement déterminé à poursuivre ce qu'il avait commencé. Des bruits de luttes émanant du couloir indiquèrent que Sydney était toujours en vie. Mais pour combien de temps ? Elle était désarmée dorénavant. Seule face au vampire.
Sandra s'agita dans tous les sens, utilisant son corps pour faire pression sur ses liens, mais sans résultat. Une goule pénétra furtivement dans la pièce, et se dirigea à toute vitesse vers elle. Le corps de l'humaine se figea et elle n'obtint plus aucune réaction de ses membres. Paralysée.
Alors que la créature se jeta sur elle, elle ferma les yeux dans un dernier réflexe, pour le moins ridicule. Mais une seconde s'écoula et rien ne se produisit. Aucune douleur, aucun coup. Quand ses paupières s'ouvrirent à nouveau, Sandra se rendit compte que la goule s'affairait à couper ses liens à l'aide de sa griffe.
— Tu dois partir ! chuchota la goule.
— Hannah ? questionna Sandra après réflexion, encore sous le choc d'être en vie.
— Oui, sourit cette dernière. J'ai presque fini.
— Je suis soulagée que ce soit toi... Tes copines sont beaucoup moins sympathiques.
— Je sais. Mais personne ne doit savoir ce que je fais, sinon... sinon Sunset me tuerait.
Sandra la fixait, incrédule.
— Il ne veut pas qu'on éprouve de l'empathie pour une autre espèce que la nôtre. Je suis peut-être sa fille, mais il n'hésiterait pas à me faire du mal s'il apprenait ce que je suis en train de faire, acheva Hannah alors que les cordes cédaient brusquement.
Sandra manqua de tomber en avant, elle qui était soutenue depuis des heures par le poteau dans la même position. Sans attendre, elle se précipita vers le sabre encore au sol. Hannah la retint d'un geste rapide :
— Où tu vas ? Je t'ai dit de partir !
— Quoi ? Non ! Lâche-moi, je dois l'aider.
— Non, tu dois t'échapper, c'est ce qu'elle veut. Pourquoi tu ne comprends pas que vous n'avez aucune chance ? Sauve ta peau !
— Qu'est-ce que tout le monde a dans ce monde à prôner la lâcheté ?
Elle se dégagea d'un coup d'épaule. Hannah resta désabusée, avant de se résigner avec un "comme tu voudras" et de s'éclipser aussi discrètement qu'elle était entrée. La jeune femme attrapa le sabre, mais ne fut-ce que tenir le manche demandait une telle maîtrise pour ne pas se blesser avec la lame aiguisée de l'arme, qu'elle abandonna bien vite l'idée de s'en servir, sous peine de s'éventrer. Elle ne serait alors plus d'aucune utilité. Sydney ne pouvait pas utiliser quelque chose de plus simple, comme une arme à feu par exemple ?
Tandis qu'elle s'apprêtait à quitter la pièce, Sandra aperçut l'orchidée dans un coin, et lui vint alors une idée.
Pour gagner un combat, il ne faut pas être le plus fort, mais avoir plus de discipline que l'assaillant. Plus de maîtrise. Battre un adversaire ne repose pas sur ce qu'on peut lui infliger, mais sur ce que l'on décide de lui infliger.
Merci, Lucas.
***
Jessica et Nathan patientaient dans la voiture. C'était en effet les seules instructions qu'ils aient reçues : rester, pas bouger, sous aucun prétexte. Sydney était non seulement autoritaire quand il s'agissait d'obtenir quelque chose des gens, mais surtout elle devait avoir passé bien trop de temps avec son chien.
Ce dernier, jusqu'à présent calme et serein, se redressa subitement, les oreilles dressées sur sa tête massive. Les poils gris le long de sa colonne vertébrale se hérissèrent en une crête. Archimède bondit sur le siège avant et commença à aboyer. C'était des aboiements forts et menaçants.
Nathan se crispa sur la banquette arrière. Il ne quittait pas le canidé des yeux, la peur au ventre. Sa thérapie pour apaiser ses phobies en présence d'un pitbull venait subitement de prendre fin. Il cherchait son oxygène, sa respiration s'accéléra. Il étouffait dans ce véhicule. Jessica remarqua bien vite que le jeune homme était au bord de la crise d'angoisse, et lui proposa de se calmer.
Mais comment pouvait-on rester calme alors que le molosse pétait une durite à moins d'un mètre d'eux ? Son malaise était grandissant, et bien vite, il ne put plus lutter. Il fallait impérativement qu'il sorte. Son esprit ressassait sans arrêt des passages du film Cujo.
— Reste dans la voiture ! exigea Jessica, qui avait remarqué la main de son ami s'approcher de la poignée.
Sans aucune protestation orale, Nathan actionna la poignée et quitta le véhicule. Le chien en profita pour s'élancer dehors à son tour. Jessica tenta bien de le retenir au passage, mais il avait bien trop de force et se dégagea sans mal. Nathan, quant à lui, s'écarta largement du chemin d'Archimède.
Jessica rejoignit le jeune homme à l'extérieur, dans la pénombre, sans manquer de le fusiller du regard. Ils regardèrent tous deux le pitbull courir à toute allure vers les immeubles délabrés en contre-bas.
— Si jamais quelqu'un demande, que ce soit bien clair : c'est toi, et toi seul qui a ouvert cette portière. On est d'accord ?
Nathan acquiesça, l'air penaud.
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