Chapitre 29

L'adolescente courait vers la sortie de l'immeuble, le chiot dans ses bras. Arrivée à la porte, elle se saisit de la poignée, essoufflée. Après plusieurs tentatives infructueuses de l'ouvrir, la terreur naquit dans ses yeux quand elle se rendit compte que la porte était verrouillée. Un bruit dans son dos la fit sursauter. Le chiot, apeurée, émit de petits jappements aigus. Elle le serra encore plus fort contre sa poitrine et se retourna. Un cri s'échappa de sa gorge alors qu'elle se retrouvait nez à nez avec une créature cauchemardesque.

Sans réfléchir, elle esquiva les griffes qui s'abattaient déjà sur elle et fuit à toute vitesse jusqu'à la première porte qui se présenta dans le hall. Elle pénétra dans une vaste pièce et se dirigea vers la fenêtre que le mur du fond arborait. Sa main tremblante se saisit de la poignée. Cette dernière s'abaissa, ouvrant le battant. Son corps frêle s'insinua en dehors et l'air froid de la nuit l'enveloppa.

Sans hésitation, elle reprit sa course effrénée dans la pénombre. Elle ne sentait plus rien, ni ses jambes qui semblaient avancées toutes seules, ni la brûlure aux poumons que lui procurait chaque inspiration. Elle parcourut plusieurs rues désertes, avant de déboucher sur une étendue désertique. Un hurlement s'éleva non loin d'elle, qui provenait de la ruelle qu'elle avait quittée à l'instant. L'adolescente s'élança dans le désert, la lune pour seul horizon.


***


Cela faisait plusieurs minutes que Sydney fouillait compulsivement dans le peu de meubles qui constituait son mobilier. Elle était revenue en silence, et n'avait pas dit un mot depuis qu'elle avait franchi la porte. Jessica et Nathan attendaient au milieu de la pièce principale, la première les bras croisés, le second les mains dans les poches. La situation actuelle était on ne peut plus confuse dans leurs esprits, et Sydney ne semblait pas vouloir l'éclaircir.

— Tu penses qu'on devrait lui parler ? murmura Nathan à l'attention de Jessica.

— Peut-être... Vas-y.

— Hein ?! Pourquoi moi ? Vas-y toi !

— Nan, elle a un problème avec moi. Prouve que t'es un mec, va lui parler.

Nathan la dévisagea :

— Je pensais que t'étais féministe.

— Uniquement quand ça m'arrange, se défendit la jeune femme. Elle ne m'aime pas, je te dis. Demande-lui ce qu'on va faire.

— Mais qu'est-ce que tu veux qu'on fasse ? C'est vrai, on ne sait même pas ce qui se passe, là !

— Ben demande-lui ce qu'il se passe alors !

Sydney était agenouillée devant les placards de la cuisine et en vidait un de son contenu, visiblement à la recherche de quelque chose. Nathan s'approcha d'elle, avec l'air aussi sûre de lui qu'un agoraphobe qui aborde une rame de métro à l'heure de pointe.

— Est-ce que... tu aurais une cigarette ?

Sydney s'immobilisa. Elle se redressa ensuite lentement et se tourna vers le jeune homme qui avala sa salive bruyamment :

— Enfin, je veux dire... Je suis super angoissé, avec tout ça, j'ai besoin de fumer.

— Non, je n'ai pas de cigarettes.

— OK, c'est pas grave... Et pour Sandra ?

Sydney croisa les bras sur sa poitrine. Nathan se sentit soudainement tout petit face à celle qui faisait pourtant une tête de moins que lui. Ses yeux émeraude le dévisageaient sans répit. Il hésita à retourner au centre de la pièce et à se la fermer, mais il n'avait pas envie de subir une remarque sarcastique de la part de Jessica.

— J'ai besoin d'un véhicule, lâcha finalement la destructrice.

— Ah... euh... d'accord. Et... tu penses en trouver un dans ton placard ?

Jessica leva les yeux au ciel.

— Excuse-le, je pense que ses parents n'ont pas totalement fini le travail, intervint-elle en se rapprochant.

— Je pensais avoir encore de l'argent quelque part, pour en racheter un, se justifia la destructrice.

— Oh ! Si tu veux j'ai... quatre... cinq dollars ! s'exclama Nathan en brandissant cinq billets à l'effigie du président Georges Washington qu'il venait de sortir de sa poche.

Sydney resta impassible devant le visage satisfait du jeune homme.

— T'es un looser, lui fit remarquer Jessica.

— Quoi ? On sait jamais, peut-être qu'avec cinq dollars, ici, on peut s'acheter un pays !

— On est pas en Indonésie, rétorqua la jeune femme, dépitée.

Pour couper court à leurs chamailleries, Sydney sortit un billet de sa poche qu'elle posa sur le plan de travail, avant de se diriger vers sa chambre en les ignorant.

Les deux amis regardèrent la coupure, qui n'avait pas grand-chose à voir avec le dollar américain qu'ils connaissaient. Dessus, pas de portrait pompeux de Georges Washington, mais les symboles d'une croix, d'un revolver et deux mains entrelacées, avec indiqué en lettres capitales "one shillar". De toute évidence, la monnaie locale ne correspondait en rien à celle de leur monde.

— Elle est censée nous inspirer confiance ? souligna Nathan. Non, parce que je sais pas, mais peut-être qu'elle va nous offrir en offrande ou un truc dans le genre. D'ailleurs, personne ne nous dit que c'est pas elle qui a fait un truc à Sandra. Peut-être qu'on devrait partir tant qu'on le peut encore...

— Non, elle faisait pas la comédie tout à l'heure. Je pense justement qu'on devrait rester avec elle, et ne surtout pas faire comme Sandra, et sortir se promener dehors, dans un monde qui attend de nous bouffer tout cru à chaque coin de rue.

— Ouais, t'as sûrement raison.

— Reste ici, lui intima Jessica.

— Qu'est-ce que tu vas faire ?

— Ce que tu sembles incapable de faire.

Elle se dirigea vers la chambre. Sydney vidait désormais sa commode, et arrivée au bout de ses vêtements qu'elle avait éparpillés sur le sol à ses pieds, se laissa glisser le long du mur, comme abattue. Son visage était partiellement masqué par ses longs cheveux noirs, mais quand Jessica pénétra dans la pièce, elle releva la tête dans sa direction.

— Ce que Nathan a essayé très maladroitement de demander, commença Jessica, c'est qui c'est, Sunset ? Qu'est-ce que tu comptes faire ? On veut pas te brusquer, c'est vraiment très gentil de nous héberger, mais on ne sait pas trop ce qu'on peut faire pour aider...

— Je vais aller la chercher.

— C'est un bon début. Mais ça ne me dit toujours pas qui est Sunset, insista Jessica.

— C'est le chef des créatures qui ont tué votre ami.

— Oh... C'est un piège alors, c'est ça ?

— Oui, il veut ma peau, confessa Sydney. Mais c'est pas un problème. 

— C'est quoi le soucis, alors ?

— Je dois juste trouver une voiture. Et peut-être un peu d'aide. Je vais devoir passer au plan B : je connais quelqu'un en ville qui me doit une faveur. Et vous venez avec moi. Je vais vous faire reprendre ce putain d'ascenseur.

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