Chapitre 15

— Je ne sais pas ce que tu t'imagines que je suis, mais oublie ça tout de suite et accélère ! s'énerva Sydney, encore amer d'avoir perdu sa place derrière le volant.

— Je fais ce que je peux, mais dans le noir c'est assez difficile je te signale !

— C'est pour ça que je ne voulais pas que tu conduises, maugréa la passagère.

Le bruit de ferraille du véhicule emplissait tout l'habitacle. Après un moment sans parler, Sandra revint à la charge :

— T'es un androïde ? Enfin, une androïde ?

— OK, t'es beaucoup moins normale que ce qu'il n'y parait au premier abord... Qu'est-ce qui te fait croire que je descends d'une longue lignée de grille-pain au juste ?

— C'est toi ! se défendit Sandra. Tout à l'heure, tu as dit que moi je sentais l'humain et que j'allais ameuter les goules alors que toi non... Du coup j'ai réfléchi et j'ai pensé au fait que tu ne dormais pas, que tu étais anormalement forte pour un être humain et tu as passé plus d'une heure dans la salle de bain. Je me suis dit que tu rechargeais tes batteries.

Sydney la fixait avec une expression entre l'exaspération et l'incompréhension.

— Mais t'inquiète, continua Sandra, ça m'arrange que tu ne sois pas humaine, comme ça je me sens en sécurité. Et puis je peux te dire plein de trucs, je suppose que tu es un peu comme un prêtre, tu dois garder le secret de la confession ou un truc du genre.

— D'accord... Mais je ne suis pas un robot, je suis humaine. Et à mon avis tu gères très mal ton choc émotionnel suite à la mort de ton copain pour inventer des trucs pareils.

— Mais puisque je te dis que cela m'arrange que tu sois en plastique ?

— Je te jure que je suis de chair et d'os, comme toi. C'est pour ça que tu m'as touchée tout à l'heure ? Tu vérifiais ta théorie ?

— Ah, euh.. Nan, ça c'est... oublie, bredouilla Sandra qui sentait le rouge lui monter aux joues.

— Alors tout d'abord, je ne suis pas plus forte que toi et d'ailleurs je pense même l'inverse, t'as étalé une goule à mains nues ! Ensuite, je dors la journée, vous étiez là, je n'ai juste pas dormi aujourd'hui. Et pour finir, j'ai passé autant de temps dans la salle de bain car je mets un produit qui masque l'odeur de transpiration à laquelle les goules sont très sensibles. J'en mets à chaque fois que je vais en territoire goule pour que je les repère avant elles.

— Alors... Tu es humaine ? interrogea Sandra, les yeux agrandit par la surprise.

— Pourquoi tu as l'air plus choquée que je sois humaine plutôt qu'un robot ? s'étonna la destructrice.

— Ben je m'étais faite à l'idée, je me sentais protégée, un peu comme si tu étais un Terminator... Mais un gentil qui protégerait les humains, pas de ceux qui veulent zigouiller Sarah Connor.

Sandra aperçut au loin dans l'obscurité la lumière jaune et chaude de la croix en bois en feu et dirigea le véhicule vers elle.

— Non, va à gauche ! ordonna Sydney.

— Mais on voit la croix enflammée au loin, la ville est par là !

— Je sais, c'est pour ça qu'on va à gauche. On ne rentre pas à Plainfields, le 4x4 laisse des traces, on ne peut pas prendre le risque de guider ces gars jusqu'à nous. Tu suis la lune, on en a pour quelques dizaines de minutes jusqu'à la prochaine ville.

Sandra s'exécuta, conduisant à travers l'obscurité, la pédale d'accélérateur enfoncée jusqu'au plancher. Elle n'avait jamais été attirée par la vitesse. Jamais un policier ne l'avait arrêtée, jamais la moindre amende n'avait franchie le battant de sa boîte aux lettres. Et là, ce soir, on exigeait d'elle qu'elle roule à tombeau ouvert sur un sol irrégulier, avec un vieux véhicule tout rouillé, qui ne possédait ni airbags ni ceintures de sécurité... Mon dieu, pas de ceinture de sécurité ! Cette simple lanière de tissu était son obsession, jamais elle n'avait omis de la boucler. Elle se sentait nue sans elle. Mais en fin de compte, ce n'est pas cela qui pourrait lui sauver la vie dans ce désert à presque 200 km/h. Sydney avait raison, elle devait faire un choc post-traumatique provoquer par la mort de Tim, car pourquoi une personne normalement constituée serait obnubilée par une simple ceinture de sécurité alors que des gars armés jusqu'aux dents les poursuivaient ?

Enfin, une croix enflammée apparut à l'horizon. Elle était bien plus grande que celle de Plainfields. La ville qu'elle annonçait était elle aussi bien plus imposante : ici, pas de champs, mais des grillages en double formant un large couloir dans lequel circulait librement de grands chiens noirs. Les bâtiments étaient vraiment hauts et nombreux. Cette ville ressemblait presqu'à une ville du monde de Sandra. Cependant, en retrait, ou pouvait voir ce qui s'apparentait à des entrées de mines : des armatures soutenaient le sol arides et des rails gigantesques s'enfonçaient dans la terre. Sandra comprit qu'elle avait vu juste quand elle lut l'écriteau en fer forgé au dessus de l'entrée principale : Steelcity. Il devait s'agir d'une ville "barrière" minière.

L'entrée était protégée par un grand portail métallique. Sandra immobilisa le véhicule devant ce dernier et deux hommes armés s'approchèrent à quelques mètres. Ce qu'ils avaient vu avait du leurs suffire car ils ouvrir la barrière et le 4x4 put s'engouffrer dans le bastion.

Sydney guida Sandra jusqu'à une petite ruelle plongée dans l'obscurité. La destructrice devait connaître cette ville à la façon dont elle s'y orientait dans le noir. Sandra gara le véhicule à l'endroit indiqué et coupa le moteur. Sydney sortie comme une furie, emmenant avec elle Archimède :

— Si on crève, ce sera de ta faute !

— Mais arrêtez de tous m'accuser de tout ! répondit Sandra en emboîtant le pas à son tour  à Sydney qui marchait dans la ruelle. Je veux juste reprendre ce putain d'ascenseur et retourner chez moi ! J'en ai marre des goules, marre des psychopathes obsédés sexuels, marre de Nathan, marre de Jessica, et marre de toi !

Sydney s'arrêta brusquement avant de reprendre sa route encore plus rapidement.

— Attends, je ne voulais pas dire ça... se radoucit Sandra, qui courut pour rattraper la seule personne capable de la ramener dans son monde.

— Vous les jeunes vous pensez que le monde vous appartient, que tout tourne autour de vous, mais personne n'en a rien à foutre de vous. Et tu es la personne la plus égocentrique que j'ai eu la malchance de croiser !

OK, donc elle est susceptible, pensa Sandra.

— T'es énervée, je comprends, mais t'es pas obligée de faire des sermons à deux balles. Avec ce genre de pensées, tu vas finir ta vie seule et avec plein de chats.

— Je te retourne le compliment, répliqua la destructrice.

— Non, moi ça risque rien, j'ai encore toute la vie devant moi contrairement à toi et je n'aime pas les chats.

Sydney soupira bruyamment pour signifier son exaspération. 

— Où est-ce qu'on va exactement ? demanda Sandra, essoufflée.  

— Vendre le 4x4, lui répondit sèchement Sydney.

— Mais comment on va retourner à Plainfields ?

— A pieds.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top