EPILOGUE

Durant longtemps, les Hommes et les Dragons ont cohabité puis se sont détestés au point de se faire la guerre à de nombreuses reprises. Vint le jour où l'Homme fit confiance au Dragon et où le Dragon fit confiance à l'Homme. Ensemble, ils battirent un Monde et chaque Dragonnier s'accordait avec son Dragon, si bien que des dons leur étaient confiés et qu'une Armure leur était offerte.

Thearsis fut longtemps le dernier Dragon en vie à arpenter ces Terres, et son Armure fut prisée par bon nombres d'envieux. Pourtant, nous pensions qu'elle était l'Armure du Dernier Dragon. Cependant, des œufs de Dragons avaient éclos, trois nouveaux bébés, vifs et puissants. Thearsis, durant des siècles, avait construit autour de chaque vie, un but précis à chacun. Pour elle, il n'y avait pas d'Armures de Dragons.
Il y avait l'Armure des Derniers Dragons. Celle qui les protégeait, eux.


Après l'affrontement avec Kaïs, ce dernier disparut et ne donna plus signe de vie à personne. Il laissa Hystërys auprès de son frère Chaos et tous les deux reprirent leurs esprits peu à peu. Lorsqu'Aeria rejoignit son Dragon, ce dernier ne put cacher son excitation, ses piques se hérissaient, frétillaient, il rugissait et lui accordait bons nombres de câlins. Quant à Hystërys, il semblait quelque peu perdu et pour cause, il bénéficiait d'une immortalité, ce qui signifiait qu'il ne pourrait jamais disparaître et que pour toujours, les Dragons vivraient en ce monde.


Natanaël, en prononçant les mêmes mots que Kaïs lorsqu'il tenait Aeria dans ses bras et en y songeant si fort, avec tant d'espoir... donna à Aeria l'immortalité et supprima la sienne. Si bien que quelques cheveux blancs firent leur apparition. Natanaël vieillirait plus rapidement qu'un Homme ordinaire, à cause de son âge avancé mais il aurait quelques temps à vivre, à profiter et à reconstruire.

Le but à présent était de reconstruire les Landes à nouveau et Hazanel n'était pas épargnée. Le château du roi était effondré et une partie de la ville carbonisée. Pour les Landes, encore une fois, la végétation avait brûlé et cela prendrait des années avant que la verdure ne reprenne vie.

Malgré toutes ces victoires, la perte d'Anastasia attrista beaucoup Harold et Natanaël, elle avait sauvé une vie mais avait sacrifié la sienne.

Quant à Hervos, il put retrouver ses filles après cette bataille impitoyable. Il frappa à la porte de la Nourrice, lorsque celle-ci s'ouvrît, la petite Theodora sauta au cou de son père. Elle le serra si fort qu'il manqua presque d'air. Elle était si heureuse de le retrouver, après tous ces mois sans avoir de ses nouvelles. Quelques fois, Hervos avait cru ne jamais pouvoir revoir ses filles. Aujourd'hui, tout était terminé.

— J'ai un petit cadeau pour toi, souffla-t-il.

— Oh oui ! Un cadeau ! Un cadeau !

Hervos se redressa et le rugissement du Dragon immobilisa la petite fille. Une énorme créature aux écailles rougeâtres se posa dans les prés, non loin de la maison de la Nourrice, cette dernière restait bouche-bée, les yeux écarquillés.

— Hystërys ! s'écria la petite fille en courant en direction du Dragon.

Elle se colla contre sa gueule brûlante, ferma les yeux et caressa ses écailles rêches, le sourire aux lèvres. Ce Dragon, elle l'avait vu naître et aujourd'hui, il était gigantesque. Sans le savoir, Theodora devint la Dragonnière d'Hystërys et ce Dragon la suivrait toute sa vie.

Hervos avait finalement accepté leur présence, car après tout ce qu'ils avaient traversé, il avait finalement compris que les Dragons n'étaient pas fautifs des malheurs qui avaient tourmenté sa vie. Sa fille resterait protégée à jamais, auprès d'un Dragon immortel.


Aeria rencontra enfin son petit frère Amïlièn, elle passa plus de temps avec sa mère, apprit à la connaître, elle découvrit quelques cultures Daghvïiriennes.

Quant à Natanaël, un soir où les étoiles étaient hautes dans le ciel, il s'était agenouillé face à sa femme afin de la demander en mariage, pour de vrai cette fois.

— Je n'ai jamais fait cela à personne, avait-il confié. Cependant, je crois que nous devrions recommencer sur de nouvelles bases toi et moi. Commençons par nous tutoyer. Puis ensuite, marions-nous à nouveau, par consentement mutuel. Apprenons à nous connaître, encore... profitions de la vie qu'il nous reste.

— Natanaël...

Elle savait que sa vie à lui serait bien plus courte que la sienne, maintenant qu'elle était immortelle.

— Laisses-moi profiter de mes derniers jours comme j'en ai envie. Deviens ma reine. Un roi sans reine... cela n'a aucun sens.

Elle accepta cette demande et ils se marièrent sous les traditions Daghvïriennes, près d'une plage. Aeria portait une couronne de fleurs sur la tête et Natanaël, un bracelet. Irënia leur fit prononcer leurs vœux, sous les yeux d'un comité réduit. Natanaël était dorénavant roi avec Harold comme garde royal, néanmoins il préférait garder sa vie personnelle privée.


Les années passèrent, les ennemis qu'ils rencontrèrent furent brefs, principalement des pillards ou des rebelles, des hérétiques. Néanmoins, ils étaient rapidement arrêtés et jetés au cachot. La vie reprenait son cours dans les Six Terres, et le roi et la reine gouvernaient celles-ci, sans autres nobles à leur côté, afin d'éviter tout conflit de pouvoirs.

Les Dragons étaient libres d'aller où ils voulaient, parfois ils partaient des mois durant puis revenaient, l'air de rien, auprès de leurs Dragonniers. Une certaine paix s'était installée, même si un Royaume n'est jamais réellement en paix, les cauchemars des trois années passées à traverser les Six Terres et lutter contre bien des maux étaient derrière eux.


Cependant, ce qu'Aeria redoutait le plus arriva. Natanaël vieillissait et s'affaiblissait. Quand bien même son physique restait grâcieux, sa santé, elle, se détériorait. Il tomba malade, et sa femme demeura à son chevet nuit et jour, sans manger ni boire, pour ne jamais le quitter des yeux.

Alors qu'il était allongé dans son lit, Natanaël la regardait, elle et sa beauté hors du commun, une beauté qui ne fanerait jamais. Ils avaient vécu quelques années ensembles, sans avoir à se séparer ou se battre pour survivre et ces années furent les plus belles de sa vie. Il en oublia Gorgia, il en oublia la souffrance. Il profita de chaque instant, pour ne jamais en perdre une miette.

— Je t'en conjure, ne meurs pas... sanglota Aeria. Trouvons un moyen...

Elle tenait la main de Natanaël dans la sienne et déposa un baiser sur celle-ci, à la suite de quoi, elle posa sa main sur son ventre légèrement arrondi. Natanaël haussa les sourcils, l'air surpris.

— C'est impossible... souffla-t-il.

— Tout est possible en ce monde, tu le sais aussi bien que moi.

Aeria le savait, cette grossesse était le résultat de la métaphore proposée par Thearsis, lorsqu'elle tenait cet œuf dans les mains. Natanaël sourit et la prit dans ses bras. Malgré toute cette joie de se savoir prêt à devenir père après tant d'années à l'espérer, son chemin d'Homme prenait fin, ici, à cet instant.

— Aeria, je ne veux pas que tu me pleures. Vis ta vie, profites et partages tout ce que tu sais avec les autres. Tu verras notre enfant grandir, tu l'élèveras comme il se doit et construira un monde meilleur de jour en jour.

Il était difficile pour la jeune femme de retenir ses larmes en voyant son époux sombrer peu à peu dans la maladie et la mort. Elle était impuissante, spectatrice d'une perte qui la marquerait à jamais.

— Tu as fait de moi un homme bon. Tu as changé ma vision de ce monde. Pour cela, je ne te remercierai jamais assez. Tu es loin d'avoir été le poison que tu semblais être, tu as été un antidote. J'ai suffisamment vécu, et toi... toi... ta vie commence maintenant.

— Arrêtes...

— Je resterai auprès de toi, qu'importe la forme.

Natanaël serra sa main dans la sienne.

— Je ne te l'ai jamais dit, commença-t-il, et j'aurais dû le faire tant de fois...

Aeria ne le lâchait plus des yeux, parce qu'elle ne voulait pas que ce moment s'arrête.

— Je t'aime, Aeria Astassard.

Elle fondit en sanglots. Elle posa sa tête contre le torse de son époux, tous deux allongés dans le lit. Elle gardait sa main dans la sienne et pleurait, pleurait, pleurait... Ces mots, ces simples mots, elle les avait attendu si longtemps. Natanaël était son pilier, lui s'était battu pour elle et elle n'avait jamais perdu espoir pour lui. Elle pouvait entendre les battements de son cœur, irréguliers, de plus en plus faibles.

— Nous n'avons pas qu'une seule vie... marmonna-t-elle en fixant un point devant elle sans se détacher de lui.

Elle en était certaine.

Natanaël caressait doucement ses cheveux, puis, ses caresses devinrent plus lentes, tout comme sa respiration. Lorsque son cœur cessa de battre, ses caresses s'arrêtèrent. Aeria ferma les yeux, laissant couler ses larmes sans se redresser, sans oser le regarder, sans oser accepter sa mort, sa perte, à tout jamais.

— Je t'aime aussi...


Au dessus de leur château volaient les trois Dragons, en rond, comme une danse infinie, comme un bal funèbre, pour dire adieu à leur Dragonnier. Au Dräkir. À sa mémoire. La mémoire d'un héro.

Aeria accepta difficilement le deuil, elle resta enfermée dans sa chambre des jours durant, en pleurant, dormant, et pleurant à nouveau. Malgré tout, elle parvint à mener sa grossesse à terme. Elle mit au monde, avec l'aide de sa mère et ses servantes, une petite fille qu'elle prénomma Thearsis en hommage au Dragon Doré.

La naissance de son enfant raviva son cœur de chaleur. Sa fille arborait de beaux cheveux roux et de magnifiques yeux bleus, comme ceux de son père. Elle ressemblait à Natanaël et cette image la réconfortait, la faisait se sentir moins seule.


C'est seulement quelques mois plus tard qu'Aeria comprit ce que voulait dire Thearsis. C'est seulement quelques mois plus tard qu'Aeria croisa de nouveau le chemin de Filërys, le Dragon Vert. Comme Daniel plus de cinq cents ans plus tôt, elle reconnut, par l'étincelle qui traversa les yeux dorés du Dragon, que Natanaël n'était plus un Homme mais qu'il pourrait voir sa fille grandir malgré tout. Et elle comprit qu'elle ne serait plus jamais seule, sans son pilier. Cette simple pensée étira ses lèvres en un sourire soulagé.

C'est là toute la magie des Dragons : le sacrifice.


Et c'est ainsi que naquît le Dräkir.

Cet homme né d'une union ordinaire, devenu un héro.
Cet homme sans pouvoirs, devenu un Dragon.



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Je vous remercie d'avoir suivi cette histoire de son tome 1 à son dénouement final, qui je l'espère, vous aura touché autant que je l'ai été en l'écrivant.

Encore une trilogie qui s'achève, mais qui ne sera pas sans être améliorée au cours du temps. Comme vous le savez, sur wattpad ne sont publiés que les premiers jets de mes histoires !

Vous voilà prêts à devenir des Dragonniers dignes de ce nom !

Si vous avez aimé l'Armure du Dernier Dragon et que vous avez apprécié ma plume, n'hésitez pas à ajouter ma nouvelle histoire en cours à votre bibliothèque : L'Arbre de Vie.

Une histoire mêlant, fantasy, modernité, romance... avec deux personnages principaux au caractère bien trempé et à la quête torturée pour sauver leur Royaume, du Chaos.




À très bientôt mes chers Dragonniers !

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