L'Argenté
Hey ! Bienvenue sur cette nouvelle que j'ai écrit pour un concours ! Je devais placer la phrase "c'est la pire erreur de jugement de toute ma vie" et je pouvais changer le temps. Je ne pense vraiment pas que je vais gagner, parce que ce qu'on écrit mes amis... C'est juste WAAAAAAA😍 Allez voir celle de lalinoute, sur son livre My World !
***
La scie coupait la planche avec aisance, le bras la menait avec force malgré son âge. Eugène allait avoir quatre-vingt-dix-sept ans dans quelques jours. Alors qu'il attrapait la ponceuse, des cris enfantins arrivèrent à ses oreilles.
- Papi ! Papi !
Il sortit de son atelier, une cabane en bois au fond du jardin.
- Je suis là Martin ! appela-t-il.
- Papi ! s'écria le garçon de huit ans en lui sautant dans les bras.
- Hé doucement, rigola Eugène. Il ne faudrait pas me casser !
Deux fillettes un peu plus jeunes accouraient elles aussi, suivies de loin par leur grand frère, Eliott, quinze ans. Les jumelles se jetèrent en même temps sur leur grand-père, le faisant basculer en arrière. Il se rattrapa de justesse au mur de sa cabane.
- Comment allez-vous mes petites chéries ?
- On veut l'histoire des loups !
- Ce n'est pas la réponse que j'attendais...
- S'il-te-plaît, supplièrent-elles. On a été très sages !
- Vous êtes sûres ?
Elles acquiescèrent avec conviction.
- Qu'en dis-tu, Eliott ?
Haussement d'épaule désintéressé de la part de l'adolescent.
- Ta mère n'est pas restée ?
- Boulot, marmonna Eliott.
- Tant pis... Elle n'aura pas de crêpes !
- Oui, des crêpes ! s'exclamèrent les trois petits.
Du coin de l'œil, Eugène aperçut le sourire du jeune homme à l'annonce du goûter.
- Rentrons, dit-il.
- Et tu vas nous raconter l'histoire ? redemanda Martin.
- Mais oui ! Quand on sera dans la maison, chenapan !
Martin, Anna et Lou partirent en courant vers la porte d'entrée. Eliott et Eugène se dépêchèrent de les rejoindre. Martin et les jumelles s'installèrent sagement sur le canapé, et Eliott s'assit à l'envers sur une chaise.
- Donc, si j'ai bien compris, vous voulez l'histoire des hommes-loups ?
- Oui, des loups-garous ! s'exclama Martin.
- Pas des loups-garous, des hommes-loups.
- C'est la même chose !
- Non, intervint Eliott d'une voix traînante. Les loups-garous ne deviennent des loups que lors de la pleine lune, et ils ne se maîtrisent pas, alors que les hommes-loups se transforment quand ils veulent et savent parfaitement ce qu'ils font.
- Comment tu le sais ? demanda Martin.
- Eliott adorait cette histoire quand il avait votre âge.
- Mouais, c'est des histoires de toute façon, bougonna celui-ci.
Eugène parut pensif un instant. Les trois enfants l'observaient, attendant le début de l'histoire.
- Hum alors... « Il était une fois une meute d'hommes-loups qui vivait au cœur d'une immense forêt. Ils avaient là-bas une vie paisible, rythmée par la chasse et par les premières transformations des jeunes. Koro était l'un d'eux : il était né il y a bientôt seize printemps. En se réveillant le lendemain, il serait donc un jeune loup. Il se coucha, anxieux et excité. Vint le matin. Il fut loup la journée entière et fit la fête avec sa meute. Tous louèrent son magnifique pelage argenté qui reflétait le soleil. Koro l'Argenté, le surnommèrent-ils. Le soir venu, il put retrouver forme humaine. Durant la nuit, il se leva, mis quelques vêtements dans une besace qu'il s'accrocha autour du cou, embrassa sa mère, son père et sa sœur, puis, reprenant une apparence de loup, s'enfuit dans le noir. Son rêve était de découvrir le monde dont ses parents parlaient avec crainte. Il courut des heures durant, enivré par la force du loup qu'il était maintenant. Il se sentait libre. Lorsqu'il arriva enfin à l'orée du bois, le soleil se levait, faisant étinceler sa fourrure. Il redevint humain, enfila ses vêtements, et contempla le paysage du haut de la colline. Un grand village se trouvait en bas. Il y descendit, et passa dans la rue principale. Les gens le dévisageaient. Il percuta quelqu'un, un grand homme d'une vingtaine d'années.
- Fais gaffe où tu marches, gamin ! gronda le géant.
Koro le regarda dans les yeux, nullement impressionné. L'homme prit cela pour un affront et commença à s'énerver. Mais une jeune femme arriva à ce moment-là.
- Paul ! Arrête !
L'homme se retourna.
- Tu n'as pas à me dire ce que j'ai à faire, Maria. 》
- Ooh elle a le même prénom que Mamie, coupa Martin.
- Chut ! soufflèrent les jumelles et Eliott.
《 - Où est l'honneur dans le fait de tabasser un garçon de quinze ans ? dit-elle.
L'homme parut réfléchir, puis se tournant vers Koro, déclara :
- Ce serait ridicule de se battre. Tabasser des gamins n'est pas mon genre.
Puis il s'éloigna à grands pas. La femme le regarda partir, l'air agacée.
- Excuse mon frère, s'il-te-plaît. Il est un peu... Impulsif.
- C'est pas grave, bégaya Koro.
- Tu veux boire un coup ? Tu n'as pas l'air en forme.
- Euh oui, je veux bien... S'il-vous-plaît...
- Ne me vouvoie pas ! Nous avons presque le même âge ! rigola-t-elle.
Il la suivit dans une jolie petite maison où elle lui servit à boire et à manger. Il se décontracta assez vite, mis en confiance par la bonne humeur de Maria. Elle lui demanda son nom, et lorsqu'il lui répondit, elle le regarda bizarrement. Son père entra soudain dans la cuisine, et demanda agressivement qui était l'homme qui se trouvait assis à sa place. Maria lui mentit sur le prénom de Koro, et dit qu'il venait d'un village voisin. Le père partit comme il était venu. Maria s'excusa auprès de Koro pour ce mensonge. Il lui dit que ce n'était pas grave, et qu'il valait mieux qu'il adopte une nouvelle identité. Il lui raconta son histoire, omettant l'existence des hommes-loups. Il s'installa dans le village et devint apprenti maréchal-ferrant. Maria et lui tombèrent amoureux. Il demanda sa main. Koro construisit lui-même leur maison, en hauteur du village, sur la colline par où il était arrivé. Ils eurent trois enfants. Koro lui révéla son secret après la naissance du premier. Maria eut très peur. Elle hurla à Koro qu'il était un monstre, et s'enfuit. Elle revint un mois plus tard et lui demanda de prendre son apparence de loup. Koro obéit. Maria l'admira longuement, puis le serra fort dans ses bras.
- Je n'aurai pas dû réagir comme ça, s'excusa-t-elle. C'était la pire erreur de jugement de toute ma vie. Je t'aime, que tu sois un loup ou non. Pardonne-moi.
Koro redevint humain et l'embrassa. La vie se déroula paisiblement, sans qu'ils ne disent jamais à leurs enfants le secret de leur père. Ceux-ci grandirent et partirent. Puis Maria tomba malade. Après un calvaire de plus d'un an, elle mourut dans son lit, le loup argenté couché à ses côtés. Koro vécut dans sa maison en haut de la colline, seul. Ses enfants étaient tous partis faire des études et habitaient ailleurs. Il était à la retraite. La maison était vide. La personne qui partageait son secret n'était plus. 》
Un long silence s'ensuivit.
- C'est fini ? se risqua à dire Martin.
- Oui, dit Eliott. Personne ne connaît la suite de l'histoire.
- Mais... C'est triste !
Anna et Lou avait les larmes aux yeux.
- Elle est trop bien l'histoire, Papi, déclara Lou.
- Oui trop bien, confirma Anna.
- Je suis heureux qu'elle vous plaise.
Ils allèrent manger les crêpes. Alors qu'ils débarrassaient, le portable d'Eliott vibra.
- J'ai reçu un message de maman, on rentre à pieds.
- À pieds !? s'indigna Eugène. Elle est irresponsable !
- Ça va, c'est pas si loin, et puis t'as pas de voiture.
Alors qu'ils s'en allaient, Eliott se retourna. A l'orée de la forêt, une tache argentée attira son attention. Il crut voir un loup, puis secoua la tête.
- Les histoires de Papi me montent à la tête.
***
Eliott se réveilla en sursaut. Le réveil indiquait cinq heures trente. Il voulut se lever, mais son corps ne fonctionnait pas comme il le voulait, et il retomba lourdement sur son matelas. La panique commença à le submerger. Puis il croisa son regard dans le miroir accroché au mur. Un loup le dévisageait. Il sursauta violemment. Le loup fit de même. Eliott baissa la tête et observa ses mains, devenues des pattes. Il réussit à se lever et s'approcha doucement de son reflet. Il fit bouger chacun des muscles de son corps. Puis la peur revint brusquement. Il se noyait dans la masse d'informations olfactives, auditives et visuelles qui lui parvenaient. Sa fenêtre étant ouverte, il écarta les volets, sauta maladroitement par l'ouverture et atterrit sur la terre humide. Il courut, trébuchant souvent, habitué ni à ce corps, ni à cette vitesse. Il se rendait chez la seule personne qui pouvait lui expliquer ce qu'il se passait. Il surgit dans le jardin de son grand-père et, ne pouvant s'arrêter, se prit la porte d'entrée dans la tête. Sonné, il ne se releva pas immédiatement. Quand il se remit debout, la porte s'ouvrait. Eugène ne parut pas surpris de voir un loup devant sa porte. Il sourit et son corps se déforma. Un magnifique loup argenté apparut. Eliott, ébahi, regarda son grand-père. Les différents fragments de l'histoire se mirent en place.
- Koro l'Argenté, murmura-t-il.
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