Chapitre 16
Ce soir, alors que nous sommes tous dans la salle commune, Noé est encore aux abonnés absents. Jade a mis de la musique en arrière fond, alors que nous découvrons un nouveau jeu de société. Elle a téléchargé de vieilles musiques.
— Des années 1980, nous a t-elle annoncé.
— Où est ce que tu es allée chercher ça ?
— Il y a un vieux site sur le web qui répertorie toutes les musiques d'avant 2000.
— Un vieux site ? Il devrait être obsolète maintenant, non ? demande Taïs.
Jade rougit.
— Quoi ? Qu'est ce que j'ai dit de mal ?
— Non, en fait tu as raison. Il devrait être obsolète. Mais j'ai récupéré les données avant qu'ils ne se détruise.
— Attend...
Il la regarde en plissant des yeux.
— Ne me dis pas que tu es ce genre de personne qui traite les ordinateurs comme ces meilleurs amis.
Jade avoue :
— Bon, ok, je suis dada d'informatique !
J'ouvre des yeux ronds.
— Je sais, on dirait pas, dit-elle pour sa défense. Mais depuis toute petite je passe énormément de temps à coder ou à...
— Non, ne me dis pas que tu es une hackeuse ! S'exclame Taïs
— Je n'ai piraté que quelques fois..., avoue t-elle.
Elle nous raconte quelques anecdotes, de comment elle a, en seconde année de collège, afin de passer une matière, rajouté quelques points à l'une de ses notes dans son dossier scolaire.
— On sait maintenant pourquoi elle est ici, plaisante Taïs. Elle a piraté le serveur du gouvernement pour se mettre en haut de la liste des candidatures.
Nous rigolons. Jade augmente le son de la musique.
Every breath you take
And every move you make
Every bond you break
Every step you take
I'll be watching youEvery single day
And every word you say
Every game you play
Every night you stay
I'll be watching you
— Vous en pensez quoi ? Demande t-elle en avançant son pion.
— J'aime bien, ça change, j'admets.
Oh, can't you see
You belong to me?
How my poor heart aches
With every step you take?
— Bon sinon Miss Une Catastrophe Par Jour, qu'est ce que tu as encore fait aujourd'hui ? Me taquine Taïs.
Elodie lui raconte comment j'ai renversé le flacon dans le laboratoire.
— Bon, tu l'achètes ou pas cette maison, s'impatiente Logan.
Elodie écourte l'anecdote.
— Tu vois bien que je n'ai presque plus de billets.
J'ai du mal encore à comprendre le but de ce jeu de société. Comme pour celui d'avant-hier, il faut avancer son pion avec des dés. Mon personnage est un petit chien argenté très mignon. Mais en plus, il faut acheter le plus de places possibles, et ensuite y mettre des maisons.
— Vous pensez qu'ils faisaient comment avant pour payer avec des papiers ? Je demande. Ils devaient les perdre tout le temps.
— Tout le monde est pas aussi tête en l'air que toi, me dit Logan en lançant son dé.
La voix d'un nouveau chanteur retentit dans la pièce.
Oh, I wanna dance with somebody
I wanna feel the heat with somebody
Yeah, I wanna dance with somebody
With somebody who loves me
Oh, I wanna dance with somebody
I wanna feel the heat with somebody
Yeah, I wanna dance with somebody
With somebody who loves me
C'est une femme. Sa voix est vibrante, puissante. Jade chante à tue tête, ne respectant même pas les paroles.
Taïs est le premier qui perd, car il n'a plus de billets.
— J'en avais marre de toute façon, dit-il en remontant sur le canapé.
— Mauvais perdant, lui lance Elodie.
— Il est où ton colocataire ? Lui demande Jade.
— Noé ? Il a encore une migraine, il est cloué au lit là.
— Encore ? Il n'en avait pas déjà une hier ?
— Il m'a dit que souvent ça lui arrive plusieurs jours de suite, et puis ça ne lui arrive plus pendant des mois. J'imagine que le long trajet en avion a dû déclencher ses maux de têtes.
Cela me fait mal au coeur, de le savoir en peine alors que nous nous amusons autour d'un plateau.
Bientôt, de toute manière, ma liasse de billets commencent à s'amenuiser.
— Je vais aller voir comment va le grand malade, dit Taïs en se relevant.
— Je t'accompagne, je m'exclame en posant mes billets restants sur la table.
Elodie fronce les sourcils.
— Mais tu n'as pas fini.
— J'ai perdu d'avance. Et je voulais aller me brosser les dents de toute façon.
Je suis une très mauvaise menteuse.
Je fais semblant d'aller dans la salle de bain, tandis qu'en face, Taïs déverrouille la porte de sa chambre.
— Ça va mec ? Demande t-il.
J'ai l'impression, en tout cas de ce que j'en vois par la petite ouverture entre la porte et le mur, que la chambre est plongée dans le noir complet.
Noé doit sûrement lui répondre à voix basse, car ce qu'il dit est inaudible à la distance à laquelle je me trouve. Alors que Taïs va refermer la porte, je lui lance.
— Demande lui s'il a besoin de quelque chose.
— Clarisse te demande si tu as besoin de quelque chose.
— Non ça va aller, j'entends Noé lui répondre.
— Tu peux aller te brosser les dents en paix maintenant, me dit Taïs en me faisant un clin d'oeil.
Je me réfugie dans la salle de bain. Une fois par semaine, nous devons nous nettoyer les dents avec une brosse à dent à ultrason. J'avoue que j'oublie de le faire la plupart du temps. Surtout parce qu'après, j'ai toujours l'impression que j'ai des fourmis dans mes gencives.
Je passe le bâton dont l'embout rejette de la lumière bleue sur mon émail, déjà en haut, puis en bas, un aller retour.
Quand je ressors, je tombe sur Taïs et Logan.
— Bonne nuit, je leur dis.
— Tu dors avec les filles encore ? Me demande Taïs.
— Oui, pourquoi ?
Maintenant qu'elles ont pris autant de mal à déplacer mon matelas, je ne me vois pas leur demander de faire le chemin arrière.
— Parce que je me disais que je pourrais déménager dans la chambre de Logan, à ta place. Comme ça, je laisse Noé tranquille.
— Il est si désagréable que ça ?
— Quand il n'a pas de migraines, ça passe encore, plaisante Taïs.
— Ce ne doit pas être drôle pour lui...
— Je trouve que tu le défends beaucoup, pour ce qu'il dit de toi...
— Qu'est ce qu'il dit de moi ?
— Rien oublie.
— Taïs, qu'est ce qu'il dit de moi ?
Taïs se tourne vers moi avec un sourire contrit :
— En tant qu'ami, je te préviens, tu n'es juste pas son genre de fille.
— Ça tombe bien, je dis piquée au vif, Il n'est pas du tout mon genre non plus.
Quand je rentre dans la chambre de Jade et Elodie, elles ne sont toujours pas revenues de la salle commune. Tant mieux, je vais pouvoir avoir un peu de calme. Je m'allonge sur le dos sur mon lit, et regarde l'actualité du jour. La météo annonce de grosses averses la semaine prochaine. Un président africain vient de se faire réélire. Et la doyenne humaine aura 123 ans cette année.
Sur les réseaux sociaux, des stars de télévision partagent leurs recettes pour cet été.
Je baille.
Alors que je vais reposer mon téléphone, il vibre. J'ai reçu un message sur le serveur connecté de l'Arche.
C'est avec surprise que je vois qui en est l'expéditeur. Noé.
« Finalement, si tu peux m'apporter un verre d'eau ».
Je me relève.
Dans la cuisine, je remplis un grand verre d'eau fraîche.
La porte de la chambre de Noé se déverrouille quand je toque. J'entre et le trouve allongée de tout son long sur le matelas, les yeux mi clos, le front plissé.
— J'ai ton verre d'eau, je dis à voix basse.
Il rouvre un peu plus les yeux.
— Tu peux m'aider à me redresser.
Je lui tends mes avant bras pour qu'il prenne appui dessus. Ses mains sont glacées, tellement que j'en ressens des frissons dans tout mon corps.
— Tu as froid ?
— Non, j'avais juste soif.
Je lui donne le verre que j'avais posé sur sa table de chevet. Il le porte à ses lèvres et prend une gorgée avant de le reposer.
— Merci, désolé de t'avoir dérangé.
— Il n'y a aucun souci, si tu as besoin de quoi que ce soit d'autre...
— Juste, de silence.
Alors je me tais.
Je ne sais pas combien de temps je reste à côté de son lit, à le regarder se rendormir. Son visage s'apaise et son souffle devient plus profond. J'allume la luminosité de mon téléphone au minimum, pour pouvoir repartir sans buter dans aucun objet. La lumière tombe sur le roman qu'il est en train de lire.
Ah ! Je vais enfin pouvoir connaître le titre !
J'éclaire un peu plus la couverture.
Gatsby Le Magnifique de F. Scott Fitzgerald.
Je ne connais pas, mais la couverture représente plusieurs personnes richement habillées, en train de danser.
Je repars en faisant le moins de bruit possible.
J'ai du mal à trouver le sommeil. Mais cette nuit, pas à cause de la pleine lune. Seulement de mon coeur qui bat un peu trop fort contre mes côtes.
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