Chapitre 4

Déjà une semaine s'était écoulée depuis qu'Isis avait fait la connaissance d'Ayas. À son plus grand étonnement, elle avait commencé à s'acclimater, non sans mal – elle devait le souligner – à cette vie plus modeste. Si elle avait détesté cela au début, l'épreuve ne lui paraissait plus aussi insurmontable. Elle avait appris à effectuer certaines tâches domestiques et ne pouvait s'empêcher d'imaginer la réaction qu'auraient eue ses parents s'ils l'avaient vue en cet instant. Elle avait dû mettre sa dignité de côté, mais cela lui avait permis de se fondre dans le décor.

Isis avait eu l'occasion de découvrir la cité, en accompagnant Ayas faire quelques courses à l'agora*. Située au sommet d'un promontoire rocheux, Théra surplombait l'océan. Le paysage avait quelque chose d'à la fois enchanteur et terrifiant. De loin, elle avait aperçu le palais. Avant même qu'elle n'ait eu la possibilité de poser des questions, on s'était empressé de lui chanter les louanges d'un roi bon et juste.

Quand Isis revint de sa promenade, Ayas lui retira le panier plein de figues et d'olives qu'elle tenait et s'exclama :

— Mon frère est rentré !

Visiblement, cette nouvelle la réjouissait tant qu'elle était incapable de en place. À peine rentré de sa précédente mission, Thyos avait dû repartir, au désespoir de sa sœur et au soulagement d'Isis. Leur première rencontre ne lui avait pas donné envie de le revoir de sitôt.

— J'en suis ravie pour toi. Je pense qu'il est préférable que je vous laisse vous retrouver. Je serai à la plage si jamais tu as besoin de moi.

Ayas la remercia et la suivit du regard tandis qu'elle s'éloignait. Elle déposa le panier sur la table, sans se dépareiller de sa mine radieuse. Elle était si heureuse d'avoir une amie avec qui profiter de ses journées. Elle détestait la solitude et, bien que ses amis ne vivent pas si loin, ils ne restaient pas avec elle au quotidien. D'autant plus que, malgré le peu de temps qu'elles avaient passé ensemble, elle s'était attachée à Isis. Il ne leur avait pas fallu longtemps pour nouer des liens d'amitié.

Ayas releva la tête lorsque des bruits de pas résonnèrent contre la pierre froide. Thyos avait insisté pour se changer à peine rentré et, comme elle n'avait pas encore eu la possibilité de l'embrasser convenablement, elle se précipita dans ses bras. Elle adorait cette bouffée de chaleur sécuritaire qui l'envahissait à chaque fois qu'elle se retrouvait contre lui.

— Comment va ma p'tite sœur préférée ?

Il chérissait tant ces instants durant lesquels le poids dans sa poitrine s'envolait. Il n'était libéré de ses fardeaux qu'avec elle.

— T'en as d'autres planquées dans tes affaires ? railla-t-elle. Ça va, mais je déteste quand t'es pas là.

Thyos s'excusa comme il le faisait chaque fois et dirigea la conversation vers un sujet moins sensible : les nouvelles de la ville. Il savait comme Ayas adorait les lui conter. Elle pouvait passer des heures à tout détailler sans jamais s'ennuyer.

Ce fut ce qu'elle fit. Et il en écouta chaque mot. Forcément, elle ne put s'empêcher de lui vanter les mérites de la femme qu'ils avaient retrouvée sur la plage. Son instinct rugissait à chaque fois qu'elle citait son nom, mu par une méfiance dévastatrice.

— Je sors, la prévint-il une fois qu'elle eut fini. Ça devrait pas être long.

Ayas plissa les yeux. Elle n'avait pas besoin de réfléchir bien longtemps pour savoir ce qu'il avait en tête.

— T'as pas intérêt à la brusquer. Je te connais...

— Ça dépend pas de moi, répliqua-t-il, énigmatique.

— C'est quelqu'un de bien, tu sais.

Thyos se retint de faire le moindre commentaire, son expression dubitative parlait pour lui. Il connaissait Ayas et son incapacité à voir le mal chez autrui.

— M'en veux pas, mais je vais me faire mon propre avis. Et si je veux la renvoyer à la garnison égyptienne, je le ferai. Au fait, ajouta-t-il avant de sortir de la maison, je vais rester quelque temps ; j'ai pas d'autre mission de prévue.

Le cri de joie de sa sœur lui soutira un petit sourire. Il aimait tant la voir heureuse. Et pour s'assurer qu'elle le resterait, il devait trouver l'Égyptienne. Ayas lui avait donné suffisamment d'indications pour qu'il n'ait pas la moindre difficulté. Elle était assise sur un rocher, ses bras entourant ses jambes fines. Ainsi recroquevillée, elle avait l'air d'une petite chose fragile, cassable à la moindre pression. Il ricana intérieurement. C'était peut-être l'image qu'elle voulait renvoyer, mais il n'était pas dupe.

Il céda à la pulsion qui le poussait à la détailler et s'approcha. Elle avait de superbes cheveux bruns dont les boucles folles virevoltaient au gré du vent. Pour que sa chevelure soit en aussi bon état, il ne faisait aucun doute qu'elle les soignait régulièrement. Ses yeux d'un vert émeraude éclatant fixaient un point qu'elle seule distinguait. Elle gardait la tête haute et le dos droit avec une telle élégance qu'il se demanda d'où elle venait. Pour sûr, ce n'était pas dans ses fréquentations douteuses qu'il côtoyait des femmes dans son genre.

Agacé par le fil que prenaient ses pensées, Thyos s'ébroua, attirant par la même occasion l'attention d'Isis. Elle pivota sur sa droite pour constater sa présence. Il fut surpris qu'elle ne baisse pas les yeux et la défia d'un regard de le faire.

— Serait-ce une habitude chez vous de vous montrer aussi affable envers les étrangers ? lâcha-t-elle au bout d'un moment, sans pour autant perdre ce duel.

Thyos resta impassible, si absorbé par son observation qu'elle se demanda s'il essayait de sonder son âme. Ce ne fut qu'après un moment incroyablement long qu'il consentit à lui répondre :

— On a pas eu l'occasion de se présenter comme il faut.

Une brise légère fit courir ses courts cheveux blonds sur son visage. Sa mâchoire se crispa lorsque son interlocutrice laissa une expression narquoise apparaître sur ses traits.

— Ah non ? Je pensais que vous considériez correct de menacer une inconnue avec un poignard ?

Ses yeux bleus tirèrent sur le gris lorsqu'une lueur dangereuse les anima, car il n'avait pas l'air d'éprouver du regret.

— C'est un akinakes*.

— Ça ne fait guère de différence, rétorqua l'Égyptienne.

— Si, c'est Perse et encore plus tranchant.

Il paraissait tellement satisfait de sa menace qu'Isis dut contenir un sourire. D'un geste suffisant de la tête, elle repoussa les mèches qui lui tombaient devant les yeux. Par cette provocation, elle lui faisait comprendre qu'elle ne le craignait pas. Au palais, elle avait l'habitude d'être entourée d'ennemis bien plus redoutables que lui.

— Thyos.

Son nom, lancé avec fermeté, clôtura leur échange silencieux.

— Isis.

Comme si connaître son identité lui donnait enfin la permission de le détailler, son regard le parcourut de haut en bas. Il était doté d'une mâchoire saillante, parsemée d'une barbe naissante dont la couleur s'assortissait à sa chevelure. Il avait la silhouette d'un soldat. Ses épaules carrées, bombées par des heures d'entraînement, laissaient place à des bras qui, à eux seuls, faisaient au moins le double des siens. L'arrondi de ses biceps se contracta lorsqu'il emmêla ses avant-bras l'un avec l'autre. Le chiton qu'il portait était l'un de ceux adaptés aux guerriers : d'une coupe courte, il lui descendait aux genoux et une ceinture de cuir lui permettait d'accrocher sa dague.

Ce détail la coupa dans son étude tandis qu'une idée germait dans son esprit.

— Cette fameuse dague que vous portez, elle...

— Akinakes, la reprit-il avant qu'elle ne puisse terminer sa phrase.

— Si vous voulez. Sert-elle à autre chose qu'à menacer une pauvre innocente ? Savez-vous vous battre ? précisa-t-elle comme il n'avait pas l'air de saisir.

Oh oui, elle connaissait la réponse et, vu son regard outré, il se demandait comment elle osait lui poser une telle question.

— Un homme qui sait pas manier une épée, c'est pas un homme.

Exactement ce qu'elle espérait entendre, sa raison commençait déjà à laisser place à son orgueil.

— Êtes-vous doué dans ce domaine ?

— Évidemment !

Bien que son visage restât assez neutre, il ne parvenait pas à masquer son agacement.

— Cela doit être vraiment difficile à apprendre.

Thyos la dévisagea. Elle incarnait l'innocence même. À quoi jouait-elle ? Se pouvait-il qu'elle soit vraiment intéressée par ses aptitudes martiales ?

— Ça requiert de la pratique, mais faut surtout avoir un bon professeur. Ça s'improvise pas, on y arrive avec l'entraînement. Beaucoup d'entraînement.

Isis hocha la tête, l'air captivé par ses paroles.

— Et... pensez-vous que vous en seriez un ? Un bon professeur, je veux dire.

Il ne put laisser passer cette chance de s'enorgueillir.

— Quand on est aussi bon, y a pas de doute possible.

Elle fronça les sourcils, pensive.

— Même si votre élève était une femme ? J'ai entendu dire que les femmes sont incapables de se battre, que c'est réservé aux hommes.

— Eh bien... C'est à l'homme de protéger sa femme, mais je vois pas trop ce que le genre a à voir dans l'apprentissage du combat.

L'Égyptienne pencha légèrement la tête et esquissa un sourire hésitant.

— Si j'ai bien compris, vous auriez suffisamment de talent pour apprendre l'art du combat à n'importe qui. Même à une femme comme moi ?

À l'évocation du mot « talent », son ego prit le dessus et il n'eut pas le temps de réfléchir avant de débiter :

— Oui, si on commençait demain, vous auriez les bases en moins de six mois. Cinq, même.

Avec satisfaction d'avoir obtenu ce qu'elle souhaitait, elle sauta sur le sable chaud.

— Parfait. Je vous dis à demain, alors !

Elle contourna Thyos et partit sans demander son reste. Elle préférait être déjà loin lorsqu'il prendrait conscience de sa ruse.

Il demeura interdit un bon moment, se repassant chaque réplique de leur échange. Une rage sans nom naquit dans son abdomen. Isis l'avait manipulé avec une telle facilité. Cette fille était dangereuse. Elle savait comprendre et employer ses faiblesses contre lui. Finalement, elle avait peut-être déjà acquis les bases de l'art de la guerre...

Fichu orgueil !

Thyos se retrouvait encombré d'une femme détestablequ'il devrait traîner à ses entraînements et prendre le temps d'encadrer. Il sejura d'utiliser ce laps de temps à bon escient. Il lui fallait percer sessecrets, car il en était maintenant convaincu, une telle manipulatrice nepouvait pas être quelqu'un de bien.


Isis se leva d'excellente humeur. Elle était enhardie par l'exploit qu'elle avait réussi la veille. Imaginer l'expression du visage de Thyos n'avait pas de prix. Elle regrettait même de ne pas être restée pour la voir en vrai.

— Dis-moi, Isis, t'as eu une discussion avec mon frère hier ? la questionna Ayas lorsqu'elle la rejoignit à table.

Isis prit la maza* que lui tendait son amie, amusée.

— Oui. Il m'a rejointe sur la plage.

— Donc, c'est ta faute s'il était d'une humeur massacrante après.

Ça ne ressemblait pas à un reproche, plutôt à une simple constatation.

— Il faut croire. Je pense qu'il n'a pas trop apprécié de devoir m'inclure dans ses entraînements à partir de maintenant.

L'ironie, palpable dans ses propos, provoqua un éclat de rire incontrôlable chez son interlocutrice.

— Comment t'as fait ? demanda-t-elle admirative, entre deux gloussements.

— Disons juste qu'il est bien trop arrogant pour que cela ne lui retombe pas dessus.

Ayas rangea la nourriture qui trônait encore sur la table, sans déperdre de son amusement.

— Je crois qu'il y a plusieurs choses que tu dois m'apprendre.

Isis rit à son tour et l'aida à mettre de l'ordre. Tout semblait si simple, ici. Elle décida de sortir un peu et s'assit sur une pierre devant l'entrée. Elle ferma les yeux, aveuglée par le soleil qui lui brûlait gentiment la peau à cette heure de fin de journée. Il faisait étonnamment bon et elle aurait pu rester un long moment à l'extérieur si un nuage n'était pas venu assombrir le ciel. Elle ouvrit les paupières pour se retrouver face à Thyos. Il la dominait de toute sa hauteur et la dévisageait froidement.

Il lança à ses pieds le grand bâton qu'il tenait entre ses doigts. Le bout de bois retomba sur le sol dans un bruit sourd. Qu'attendait-il ? L'Égyptienne observa son hôte, le regard interrogateur.

— Levez-vous et prenez ce bâton, s'agaça-t-il. Ça m'énerve déjà assez de vous avoir pour poids mort.

Elle obtempéra à contrecœur. Jamais elle n'avait reçu d'ordre d'une autre personne que son roi et cela l'horripilait au plus haut point. D'autant plus qu'elle avait dû se concentrer pour comprendre les mots mâchés qui sortaient de sa bouche. Cela ne lui avait pourtant pas paru si compliqué la veille !

— Puisque vous parlez de poids mort, intéressez-vous à votre ego. Vous ne pouvez vous en prendre qu'à vous-même.

Sa mâchoire se contracta, mais il n'ajouta rien. Thyos tourna les talons et l'entraîna jusqu'aux pistachiers qui avaient observé leur première rencontre. Ils créaient un espace circulaire au bord duquel étaient déposées quelques armes. Il se mit face à elle, récupérant au passage un bâton identique au sien. Le Grec prit une grande inspiration pour calmer l'agacement qui bouillait en lui.

— Montrez-moi que j'ai tort. En garde !

Isis contempla ce qu'elle tenait entre les mains, ne sachant qu'en faire. Elle essaya de reproduire la posture qu'il adoptait. Thyos soupira et grommela entre ses dents :

Qu'Arès* me vienne en aide !

Il déposa son arme au sol et se plaça derrière son élève. Il étira ses épaules vers l'arrière et donna de petits coups dans chacun de ses pieds pour les écarter. Ce faisant, il expliqua calmement :

— Vous êtes pas grande, faudrait pas que votre adversaire en profite. Mettez votre poids sur vos talons, ouais, comme ça. Y sont plus stables et vous pourrez quand même bouger si besoin.

Le Grec revint face à elle.

— Pour tenir le bâton, mettez vos bras à votre largeur d'épaules. Bien. Essayez de me toucher pendant le combat, qu'on voit ce qui faut travailler.

Isis acquiesça, un peu hésitante. Thyos recula pour qu'elle puisse l'attaquer. Elle leva les bras, tentant de le toucher, mais il se décala et esquiva avec aisance. D'un geste, il lui demanda de recommencer. Il para et la désarma, sans la moindre pitié.

— Dans un vrai combat, vous êtes déjà morte, constata-t-il en ramassant le bâton.

— Si je savais me battre, je n'aurais pas besoin de votre aide et je ne serais pas en votre si agréable compagnie à essayer de manier un vulgaire bout de bois.

Son maître d'armes s'approcha lentement d'elle, une lueur dangereuse brillant au fond de ses yeux de glace.

— J'vous permets pas d'me parler avec tant d'hauteur !

Elle plissa les paupières son tour, le défiant de son regard émeraude.

— Ne pourriez-vous pas faire un effort lorsque vous vous exprimez ? J'ai du mal à comprendre ce que vous me dites. Si je dois davantage me concentrer sur votre diction que sur vos instructions, ça risque d'être compliqué.

La princesse crut quelques instants qu'elle avait réussi à le faire taire. Il la regardait sans rien dire. Cette réflexion rappelait à Thyos celles que sa mère lui faisait dans sa jeunesse. Il avait toujours eu des lacunes à ce niveau-là, mais ça empirait avec les émotions. Il ne savait pas les gérer et elles avaient tendance à ressortir lorsqu'il parlait, l'empêchant d'articuler correctement. Pendant un temps, il était parvenu à se débarrasser de cette manie, usant d'efforts et de concentration.

Les épreuves qu'il avait traversées avaient réduit ce travail à néant...

— C'est vrai que votre parler est irréprochable. Je voudrais pas déranger la petite princesse que vous êtes !

Sa réplique la perturba. Avait-il découvert qui elle était ? Ou bien ne se basait-il que sur sa façon d'être pour se moquer d'elle ? Elle ne le savait pas. Ce qui l'étonna davantage fut qu'il acceptât de faire des efforts sur sa manière de parler. Elle n'aurait pas pensé pouvoir avoir un poids et l'en convaincre si facilement.

Elle ne répondit rien et attrapa le bout de bois que Thyos lui rendit. Ils recommencèrent plusieurs fois, avant qu'il ne perde patience.

— Par l'épée d'Arès, faites un effort ! Vous faites rien de ce que je vous dis. C'est pas un jeu !

— Je ne suis pas ici pour m'amuser, rétorqua-t-elle d'un ton glacial. J'ai parfaitement conscience que tout ceci est loin d'être un jeu. Vous me trouvez probablement jeune et peut-être que vous me trouvez sotte, mais vous ne me connaissez pas. Je suis extrêmement consciente de ce que je vous demande.

— Pas sûr que ce soit le cas, mais admettons, concéda Thyos. On commence par un essai de quelques jours, basíleia*.

Elle se figea à ce dernier mot. Elle avait l'habitude de l'entendre et, pourtant, dans sa bouche, il prenait un sens différent. Elle ne savait comment l'expliquer exactement, mais les fluctuations de son timbre grave n'avaient rien à voir avec celles des serviteurs du palais.

— Basíleia ? répéta-t-elle d'un ton narquois comme elle doutait qu'il eut deviné la vérité. Avouez simplement que vous avez oublié mon nom.

Il secoua légèrement la tête pour repousser les mèches blondes qui lui tombaient devant les yeux.

— Quand je voudrais dire votre nom, je le dirai.

— Mais c'est ridicule ! Vous appelez bien un arbre, « arbre ». Ou le soleil, « soleil ». J'ai moi aussi un prénom, pourquoi ne pas vous en servir ?

Thyos plissa les yeux, menaçant

— Y a des règles. Et la principale, c'est qu'ici, c'est moi le maître. Si je vous dis de sauter, vous sautez, de vous taire, vous le faites. Compris ?

Isis pâlit légèrement. Elle essaya de repousser l'image de Kaï qui s'imposait dans son esprit quand il lui avait tenu les mêmes propos. Elle acquiesça malgré tout, bien que ce fût difficile tant ce discours ressemblait à celui qu'elle avait fui.

— J'ai rien entendu.

Elle le foudroya du regard.

— J'ai compris !

En son for intérieur, il jubilait.

— Bien. J'espère que votre motivation suffira. On va pas juste pousser votre physique, votre mental va souffrir aussi. Vous allez vouloir me tuer pendant les prochaines semaines, c'est normal. Inutile de vous dire de pas le faire. C'est pas parce que vous êtes une femme que je vais retenir les coups. Votre entraînement sera le même qu'un homme. Ça va être dur et quand vous allez laisser tomber, vous me montrerez ce que je sais déjà.

— Je n'abandonnerai pas, fulmina-t-elle.

C'était une promesse tacite qu'elle se faisait. Si elle venait à en arriver là, elle n'aurait pas la moindre chance contre Kaï. Et lorsqu'il la retrouverait, car il le ferait, elle regretterait de ne pas s'être tuée.

— Faites pas des promesses que vous tiendrez pas, vous allez y mêler les dieux. Pendant les prochains entraînements, on va voir comment se déplacer sans bruit, se battre sans arme, puis avec, et surtout comment se défendre. Y aura un jour avec un entraînement, puis un jour sans. Vous paraissez faible, votre corps aura besoin d'un peu de repos, au moins au début. On verra si vous pouvez faire plus après.

Isis hocha la tête.

— Quand commençons-nous ?

Il ponctua le court silence d'un rictus railleur.

— Maintenant, basíleia.


***

* Principale place publique des villes grecques.

* « ἀκῑνάκης » en grec. Dague courte initialement utilisée par les Perses qui s'est ensuite répandue dans le monde entier.

* Petite galette de farine et d'orge.

* Dieu de la guerre chez les Grecs.

* « Princesse » en grec ancien.

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