Chapitre 3

Île de Théra, Théra*

La taverne était aussi bruyante qu'à son habitude. Plutôt cosmopolite, elle poussait les différentes classes de la cité à se fréquenter, que l'on soit riche, pauvre, métèque ou encore ribaude. Seules comptaient les pièces d'or que l'on pourrait déposer pour payer sa bière ou son vin amer. Les rires graveleux se mêlaient aux exclamations grivoises, tandis que l'odeur âcre de transpiration masculine réchauffait la salle.

Toutes les tables en bois étaient occupées, si bien qu'un certain nombre de clients se contentaient de rester debout. Assis à l'écart, l'air concentré sur son skyphos*, il ne prêtait pas attention au raffut ambiant. Il siégeait là depuis plusieurs heures maintenant, se remémorant les détails de cette dernière semaine. Le plus dur, lorsque l'on partait pour exécuter quelque mission délicate, c'était de revenir et de reprendre sa vie comme si de rien n'était.

Il soupira et tenta de placer dans un coin éloigné de son esprit les images dérangeantes qui affluaient. À moins de deux tables de la sienne, les prémices d'une dispute firent leur apparition : des éclats de voix suivis du son caractéristique du bois qui rencontre le sol avec violence. Les bagarres n'avaient rien d'exceptionnel, mais pour une fois, il n'avait pas envie d'y être mêlé. Il se leva, vida sa boisson d'une traite et déposa une pièce à l'intention du tavernier.

Maintenant qu'il rejoignait son foyer, l'idée de revoir sa sœur l'emplissait de joie. Sept jours, ce n'était pas bien long, mais malgré tout, il avait pensé à elle à tous les instants. N'était-elle pas tout ce qu'il lui restait sur cette Terre ?

Avant même qu'il n'ait atteint la maison, une tornade rousse se jeta dans ses bras, manquant de le faire tomber. Son visage s'éclaira d'une lueur joyeuse tandis qu'il resserrait la pression autour du corps d'Ayas.

— Thyos ! s'exclama-t-elle contre son torse. Tu m'as trop manqué ! J'avais hâte de te revoir.

Un éclat de rire le secoua.

— Ça se voit ! Tu m'as manqué aussi, Ayas.

Elle entreprit d'énumérer tout ce qui avait meublé ses journées durant son absence et répéta un bon nombre de fois à quel point elle était ravie de le retrouver. Dès qu'il le put, il entra afin d'enfiler des vêtements propres et de poser les maigres effets qu'il transportait. Hestia* soit louée, il était heureux de rentrer chez lui ! Encore plus lorsque, en rejoignant la petite pièce à vivre, il remarqua les vivres qu'Ayas avait disposés sur la table. Maintenant qu'il y pensait, son estomac criait famine.

Ils plaisantèrent tout au long du diner et, une fois qu'ils eurent fini, elle l'entraîna à l'extérieur. Ils profitèrent de leur balade sous la lumière déclinante d'Hélios. Thyos écouta Ayas lui raconter inlassablement toutes les nouvelles de la cité. Il n'y eut pas un détail qu'elle lui épargna. Les mots filaient hors de sa bouche sans qu'elle ne lui laisse un instant de répit. C'est pourquoi, quand elle s'arrêta brusquement de parler et de marcher, le sang de Thyos ne fit qu'un tour.

— Ça va pas ? demanda-t-il avec inquiétude en tentant de suivre la direction de son regard.

Comme si elle revenait soudain à elle, elle montra du doigt la tache noire qu'elle fixait.

— Tu vois ça ?

— Ouais, ça ressemble pas à grand-chose. Des algues peut-être.

— Y en aurait pas que là si c'était ça, rétorqua Ayas.

Thyos soupira. La détermination qu'il lisait sur ses traits n'annonçait rien de bon.

— Si t'es sûre de toi, pourquoi tu me demandes ce que j'en pense ?

— Par curiosité. On dirait pas une forme humaine ? On devrait se rapprocher...

— Non, refusa-t-il en secouant la tête, y se fait tard, on devrait rentrer.

Ayas leva les yeux au ciel. Il était hors de question qu'elle reste dans l'incertitude ! Elle voulait savoir ce que c'était.

— S'il te plait ! On est pas pressé et pis... si c'est juste des algues, je te ferai un pain aux figues. Ça te va ?

— Un jour, faudra que t'arrêtes de m'acheter.

Elle éclata de rire et le poussa gentiment pour qu'il avance. À mesure qu'ils se rapprochaient, la forme vague se transforma en silhouette humaine.

— C'est pas aujourd'hui que j'aurai droit à mon pain aux figues, maugréa Thyos.

Sa sœur lui donna une tape pour le réprimander.

— C'est une femme ! Elle a dû faire naufrage. Faut qu'on l'aide.

Alors qu'elle faisait un pas en direction de l'inconnue, Thyos la retint par le poignet.

— On sait pas qui c'est. Elle pourrait être dangereuse.

La rousse soupira, définitivement exaspérée par l'attitude de son frère.

— Mais elle pourrait aussi pas l'être. On peut pas la laisser mourir ici, elle a besoin de soins !

— Parce que t'en as les compétences ? railla-t-il.

Le regard qu'il reçut en guise de réponse le dissuada de faire tout autre commentaire. Une quinte de toux secoua la source de leur dispute avant qu'elle ne retombe dans l'inconscience. Ainsi, elle n'était pas morte. Ça lui faisait une belle jambe !

— Porte-la jusqu'à ma chambre, ordonna Ayas d'un ton autoritaire, y a bien assez de place pour deux. On le faisait plus jeunes. C'est hors de question qu'on la laisse là !

Ce ton, il le connaissait : il ne pourrait rien dire pour la faire changer d'avis. Il pesta silencieusement contre les femmes bornées tout en obtempérant. La naufragée était légère. Elle devait avoir des plaies ouvertes puisque du sang tachait ses vêtements. Ayas se racla la gorge et lui jeta un regard sévère pour lui signifier d'arrêter son observation. Après tout, cette jeune femme était inconsciente.

Une fois que Thyos l'eut déposée avec délicatesse sur le lit, il se tourna vers sa sœur.

— Ton fardeau, ta responsabilité, grogna-t-il en se dirigeant vers la sortie.

Elle acquiesça mécaniquement, bien qu'il ne puisse pas la voir. Qu'il lui ait cédé sur la plage était une victoire certaine. Il se méfiait tellement des inconnus !

Elle reporta le regard vers sa patiente. Par où devait-elle commencer ? Elle l'examina avec peu d'assurance. Quelques taches de sang s'étaient étendues sur ses vêtements en la transportant, au niveau du buste et de la jambe droite. Le tissu encore humide avait l'air de coller aux plaies ainsi, Ayas entreprit de la dévêtir. Sa patiente grogna lors de la manipulation et, lorsqu'elle voulut la calmer, elle s'aperçut de l'ampleur que prenait la fièvre. Elle était bouillante ! Son inquiétude se fit grandissante alors qu'elle étudiait le reste de son corps.

Il y avait trop d'ecchymoses pour que la tempête à elle seule en soit responsable. Mais les marques bleutées n'avaient rien d'urgent. Pour faire tomber sa température, elle devait d'abord nettoyer les plaies et prier pour que cela suffise. La blessée était encore jeune, avec suffisamment de prières, elle devrait guérir. Heureusement qu'elle avait acheté un onguent à la vieille Ida lors de son dernier passage au marché. La coïncidence était surprenante, peut-être fallait-il y voir là un signe des dieux.

Quand elle eut prodigué les soins qu'elle pouvait,Ayas couvrit le corps de sa patiente d'un drap fin et sortit de la chambre. Àprésent, son destin était entre les mains des Moires*



Isis se réveilla encore dans une chambre qu'elle ne connaissait pas, le corps endolori. Elle regarda autour d'elle, sourcils froncés, et nota presque immédiatement la simplicité des lieux : un lit, une grande malle et une petite table. Rien de plus. Rien d'extravagant.

L'Égyptienne se redressa en essayant de rassembler ses souvenirs. La douleur qui lui vrilla le crâne ne dura que quelques instants. Le naufrage ! Que s'était-il passé pour qu'elle se retrouve ici ? Et qu'était-ce donc que cette tunique ? En plus d'être horriblement laide, la matière lui irritait déjà le corps.

Un grincement désagréable lui signala que la porte s'ouvrait et une jeune fille chétive s'approcha d'elle. Elle tenait entre ses doigts un linge soigneusement plié qu'elle déposa sur la table avant de lui jeter un regard.

— Oh, t'es enfin réveillée ! s'exclama-t-elle joyeusement.

S'adressait-elle à elle ? Il y avait un sérieux manquement au protocole... Isis pinça les lèvres, se retenant de lui faire remarquer qu'elle devait respecter son rang. Vraisemblablement, elle avait pris soin d'elle, ce n'était pas le moment de se montrer hautaine.

— Qui êtes-vous ? se força-t-elle à prononcer affablement.

— Ayas. Mon frère et moi, on t'a trouvée sur la plage. T'as dû faire naufrage, heureusement que les Moires ont eu pitié de toi. Je t'ai soignée comme j'ai pu.

— Vous m'avez sauvé la vie ! Merci. Où sommes-nous ?

— À Théra, pas loin de la cité.

Isis tiqua en entendant ce nom, leur précepteur l'avait déjà prononcé. Elle chercha dans ses souvenirs, à la recherche de quelques informations. Si sa mémoire ne lui faisait pas défaut, l'île de Théra était sous protectorat égyptien. Ainsi... elle risquait d'y croiser des soldats. Savait-elle autre chose ? Rien ne lui revenait. Elle réfléchit à vive allure. Tout compte fait, la présence des hommes de Kaï pourrait être utile. Son frère ne la croirait jamais assez stupide pour se réfugier à proximité de l'une de ses garnisons. Mais avant, elle devait en avoir la confirmation.

— Y a-t-il une garnison égyptienne sur l'île ?

Vaí*, acquiesça Ayas, à deux jours de marche. Faut monter à la cité et redescendre les rochers en coupant par l'Est. T'es pas de chez nous, pas vrai ?

— Non, en effet, je suis égyptienne.

Ayas avança et s'assit sur la peau de bête qui couvrait le lit.

— Tu parles drôlement bien notre langue.

La princesse chercha immédiatement un mensonge à lui fournir. Seule la haute société égyptienne parlait grec. Cette langue était obligatoire à la cour puisqu'on considérait l'égyptien comme le dialecte des basses classes. Il était impensable qu'elle lui dise la vérité. Tout d'abord parce qu'elle n'avait aucune idée de la fiabilité de ces gens et ensuite parce que ça pourrait les mettre en danger.

— Mon père était marchand. Il voyageait beaucoup et a tenu à nous apprendre le grec. Je vous suis très reconnaissante pour ce que vous avez déjà fait, mais... où sont mes vêtements ?

La Grecque pointa du doigt la table en bois.

— Ça m'a pris du temps pour les laver. J'ai pas l'habitude de ce genre de choses et les taches étaient tenaces. Y sont encore en train de sécher dehors, je t'ai laissé une de mes robes pour que t'aies du change.

Isis regarda dans la direction indiquée et sourit.

— Votre sollicitude me touche, Ayas.

— Dis-moi « tu », ça me met mal à l'aise.

Pour la première fois depuis que celle qui l'avait soignée était entrée dans cette pièce, elle l'observa. Ayas ne devait pas avoir plus de treize ou quatorze ans. Son corps frêle était recouvert d'un chiton* aux teintes bordeaux qui arrivait à mi-genoux. Le vêtement, bien que modeste, était orné de deux broches dorées et d'un cordon tressé.

Son visage juvénile étincelait de candeur. Ses yeux couleur pomme étaient rehaussés par une multitude de taches de rousseur qui couvraient l'arête de son nez ainsi que le haut de ses pommettes. Ses cheveux roux brillaient de mille feux sous la lumière du soleil. Ils descendaient en une cascade de boucles jusqu'en dessous de ses omoplates.

Isis secoua la tête pour reprendre le fil de la conversation. Elle aurait tout le temps d'analyser son nouvel environnement plus tard.

— Bien sûr, si cela peut vous... te faire plaisir, répondit-elle en souriant.

— Je vais te laisser te changer. T'as de l'eau pour ta toilette, à côté des vêtements, ainsi qu'un miroir. C'est le seul que nous ayons, mais je me suis dit que tu voudrais voir l'état de tes bleus.

Isis la remercia à nouveau et la regarda partir. Elle sortit rapidement du lit malgré ses muscles douloureux, trop heureuse de pouvoir se laver un peu. Elle se sentait crasseuse et le tissu commençait sérieusement à la démanger. Ses ablutions terminées, elle passa sa tenue avec plus de difficultés qu'elle ne l'aurait pensé. Elle avait l'habitude de se faire vêtir et dut s'y reprendre à plusieurs fois avant de réussir. La robe était similaire à celle d'Ayas, quoique d'une couleur plus vive. Le bleu du tissu resplendissait pour s'accorder avec le doré de la ceinture.

Elle prit le miroir et observa l'état de son visage. Il était encore possible de distinguer des bleus sur sa pommette droite ainsi que dans son cou. Elle plaça ses cheveux de façon à ce que ses boucles les masquent. Isis caressa le cobra qui ornait son biceps d'un geste machinal. Ce bijou, elle ne pourrait plus jamais le retirer. Elle était marquée à vie.

Une voix interrompit le cours de ses pensées, manquant de la faire sursauter.

— T'es très belle. Je... j'ai pensé que t'aurais faim. Tu veux venir manger ?

L'Égyptienne n'eut pas le temps de réfléchir que déjà les mots avaient franchi ses lèvres.

— Avec plaisir.

Les deux femmes se rendirent dans la pièce principale. Ayas déposa quelques fruits et un peu de gruau sur la table avant d'enjoindre sa protégée à se servir.

— Je t'ai pas demandé ton nom.

— Isis, répondit-elle en saisissant une figue.

Tandis qu'elle en retirait la peau, elle réfléchit à un mensonge qui expliquerait sa fuite et son naufrage. Car elle n'en doutait pas, ce serait la prochaine question d'Ayas.

— T'es pas obligée de répondre, mais... il s'est passé quoi ?

— Mon père est mort l'année passée. Comme nous n'avions plus que lui, mon frère est devenu mon tuteur. Il me déteste et cherche juste à détruire ma vie. Il a refusé toutes les demandes en mariage que j'ai reçues et s'est arrangé pour que je n'ai pas la moindre échappatoire. Il est devenu violent et... j'ai fini par fuir. Je devais rejoindre Byzance le temps de trouver une solution, mais comme tu peux le voir, ça n'a pas été une réussite.

La Grecque accrochée à ses lèvres parut captivée par son récit.

— Je suis vraiment désolée pour toi.

Isis haussa les épaules avec une indifférence feinte.

— Ne le sois pas. Les dieux en ont décidé ainsi, nous ne pouvons rien y faire. Quoi qu'il en soit, je ne serai pas un poids pour vous. Je vais m'en aller pour Byzance et retrouver ma cousine.

Ayas posa une main sur la sienne, le regard suppliant.

— Tu n'en serais pas un. Reste ici aussi longtemps que tu le souhaites, je pense pas que ce soit une bonne idée de rejoindre un membre de ta famille. Ton frère a pas l'air d'être un idiot, il va forcément y penser.

Elle n'avait pas tort. Isis baissa la tête. Quelle autre solution avait-elle ? Rester ici ? Elle préférait retourner entre les mains diaboliques de Kaï que de s'imposer une vie en dessous de sa condition. Pourtant... alors que cette pensée prenait toute la place dans son esprit, une pointe de curiosité apparut. Comment était-ce de vivre comme une personne qui n'était ni de descendance royale ni membre de la cour ? Peut-être pouvait-elle rester seulement quelques jours, histoire de satisfaire cette envie saugrenue de faire de nouvelles expériences.

Mais juste le temps de trouver un bateau pour Byzance.

— Tu as peut-être raison... J'ai besoin d'y réfléchir. Mais je ne veux pas être un fardeau pour toi. Je n'ai jamais eu à faire quoi que ce soit et...

Elle l'interrompit :

— Je peux t'apprendre. C'est pas compliqué et, à deux, c'est plus amusant que ça en a l'air.

Isis se mordit la lèvre. Ce n'était pas vraiment la proposition qu'elle attendait. Elle ne tenait pas à tenir le rôle des domestiques, mais un refus ne risquerait-il pas sa position ? Pour ne pas s'engager dans quelque chose qu'elle pourrait regretter, elle préféra changer de sujet.

— Tout à l'heure, tu m'as bien dit que tu ne vivais pas seule ? Penses-tu que ton... heu mari ou que ta famille n'y verra pas d'inconvénient ?

Ayas laissa échapper un rire.

— Je vis avec mon frère. Il est pas souvent là vu qu'il travaille pour le roi et il pourra pas me refuser un peu de compagnie.

Cette dernière remarque amusa la princesse. Peut-être que ces quelques jours ne seraient pas si désagréables finalement.

Isis profita de la fin de leur discussion pour s'éclipser, prétextant un désir d'air frais. Son hôtesse l'y encouragea, bien qu'elle ne puisse pas l'accompagner. Heureuse de pouvoir se balader un peu, elle quitta la petite maison. Que le soleil lui avait manqué après ce séjour dans les geôles !

Isis suivit le chemin de terre, bordé de fougères et d'aloès, pendant quelques mètres avant de s'en détourner. Il descendait le long de la pente rocheuse et, au murmure des vagues qui lui parvenait, la princesse devina qu'il menait à la mer. Elle marcha en admirant la flore de l'île. Par-ci, par-là, elle reconnaissait des plantes : achillée, santoline, crassula. Tout cela pourrait lui servir à faire des décoctions médicinales comme on le lui avait enseigné. Elle nota mentalement les de ces plantes avant de reprendre sa route. Un peu plus loin, à quelques pieds de dénivelé, elle repéra des pistachiers aux branches tombantes. À travers les feuillages, une lumière chatoyante apparaissait et disparaissait. Intriguée, elle décida de s'en approcher.

Les bruits de la mer s'estompèrent, rapidement remplacés par une respiration lourde. Elle se décala pour voir au-delà des troncs d'arbre. Une silhouette masculine enchaînait mouvement sur mouvement avec souplesse et précision. Il semblait répéter, telle une danseuse qui fait et refait sa chorégraphie. Ses gestes, plutôt que de se synchroniser à une musique, reposaient sur son souffle. Bien que fascinée, Isis se força à se détacher de cette vision, ayant la désagréable impression de s'immiscer dans un ballet auquel elle n'était pas conviée.

À peine eût-elle fait trois pas qu'elle se retrouva plaquée contre un large torse, une dague menaçant sa gorge. Elle échappa un hoquet de surprise qui satisfit son assaillant. Resserrant sa prise, il siffla :

— Pourquoi vous m'espionnez ?

« L'espionner » ? Il était étrange d'avoir cela comme première pensée.

— Je ne vous espionnais pas, répliqua-t-elle d'un ton dur, semblable à celui d'une mère qui rabroue son enfant. Je me promenais et vous vous êtes trouvé sur mon chemin, voilà tout.

— Mentez pas !

Elle grimaça lorsqu'il bougea instinctivement, enfonçant un peu plus son arme dans sa peau.

— Par la grâce de Thot*, un peu de bon sens ! Je ne vous mens pas !

L'homme ricana avant de glisser tout contre son oreille.

— C'est marrant, je vous crois pas.

Isis l'imita, déclarant avec hauteur :

— J'avais eu vent que l'alcool rendait déraisonnable. Vous devez avoir un sérieux problème d'addiction.

Il s'apprêtait à lui exprimer sa façon de penser lorsqu'Ayas apparut. Au regard noir qu'elle lui lança, il relâcha sa prisonnière.

— On n'a pas fini, siffla-t-il à son intention.

Le guerrier ramassa ses affaires et échangea quelques mots discrets avec la nouvelle venue. Sans le moindre égard pour l'Égyptienne, il s'éloigna. Plutôt que de s'en offusquer, elle se rapprocha d'Ayas qui sourit devant sa mine déconcertée.

— Bien ! T'as rencontré mon frère, Thyos.


****

* Île grecque de la mer Égée, actuelle Santorin

* Gobelet ansé utilisé dans la Grèce antique pour boire.

* Déesse grecque du foyer.

* Au nombre de trois, les Moires sont des divinités qui personnifient le destin.

* « D'accord » en grec ancien.

* Tunique portée en Grèce Antique.

* Dieu de la sagesse chez les Égyptiens.



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