Chapitre 6
Voilà plusieurs heures que Stiles avait commencé son service. Il rêvassait sa joue posée dans sa main. C'était une douce journée ensoleillée et il aurait largement préféré la passer au loft. Mais, il était à quelques jours du week-end qu'il avait préparé et ça lui donnait du courage pour affronter l'humour déplacé de son binôme qui lui lançait des boulettes de papier en ricanant. C'était d'une lourdeur incroyable alors, il prenait sur lui. Pour son travail, pour son père. Au lieu de s'énerver, il ramassa mollement toutes les munitions, se leva et les déversa sur le bureau de Flynn.
- Tiens, je te les rends. Ce serait dommage de perdre ces magnifiques œuvres d'art que tu as créées à la sueur de ton front au lieu de te concentrer sur ton travail. Ironisa-t-il sous l'œil perplexe de l'artiste.
Autour d'eux quelques rires étouffés vinrent accentuer la victoire écrasante du fils Stilinski. Flynn n'était pas le plus apprécié et quelques têtes lâches n'attendaient qu'une seule chose, qu'il soit remis à sa place et qui d'autre que Stiles, réputé pour sa répartie, pour le faire ? C'était un rôle commis d'office dont il ne voulait pas. Seulement, rien que cette fois, ça lui avait fait un bien fou. Son opposant ne trouva rien à dire et s'enfonça dans sa chaise l'air bougon. Au moins, il serait calme pour le reste de la journée. Vers 19h, il était temps de prendre une pause repas bien méritée, le jeune policier s'étira et au moment où il allait demander à son équipier s'il voulait un repas en particulier, Jordan déboula devant eux.
- Stiles, Flynn, accident de voiture sur la nationale entre le kilomètre cent et cent dix. Allez-y. Ordonna t-il gentiment. Des blessés légers.
- Mais c'est l'heure de manger, grogna le grand brun.
- Mayer, c'est pas le moment de râler. Stilinski est déjà prêt, lui.
- Ok mon capitaine, finit par abdiquer l'intéressé. Stilinski, on prend ma voiture.
Flynn était content de conduire, il arborait un sourire suffisant, sans doute se sentait-il supérieur et il ne le cachait pas du tout. Stiles ravala sa fierté et laissa tombé, il était au-dessus de ça. Le conducteur était parti dans une tirade narcissique que le passager n'écoutait pas. Il préférait fuir sa sensation d'étouffement en laissant divaguer son esprit. Il connaissait bien cette nationale, elle était longue et de nombreux virages très étroits la rendait particulièrement dangereuse. Elle était au bord de la forêt, il était donc conseillé de ralentir, mais très peu de monde respectait la limitation de vitesse. Lui-même, quand il était adolescent avait déjà laissé sa Jeep s'élancer un peu trop rapidement. D'un coup, Il se souvint de sa promesse qu'il avait faite la veille au soir. Il soupira, techniquement, il n'allait pas rentrer dans les bois, il allait juste à son liseré. Ce n'était donc peut-être pas nécessaire de l'indiquer. Mais en connaissant le caractère un peu bourru du loup, il hésitait.
- Hey oh, tu es réveillé ? Interrogea d'un air agacé son collègue.
- Hein ?!
- On est arrivé.
- Ah oui…
- T'es méga chiant Stilinski, tout le monde dit que tu es vif d'esprit, j'ai plus l'impression d'avoir un mollusque en face de moi.
- Si seulement les personnes se rapprochant intellectuellement d'une huître pouvaient se taire, ça m'arrangerait, maugréa t-il dans sa barbe.
- T'as dis un truc ?
- Ouais, merci du compliment.
En serrant puissamment sa mâchoire, il observa attentivement le lieu du drame. Une voiture grise était écrasée dans un fossé, de toute évidence, elle ne servirait plus beaucoup. Devant l'épave se trouvait un camion de pompier qui venait d'arriver, les secouristes s'occupaient déjà des victimes. Effectivement, de ce qu'il pouvait apercevoir, les plaies n'étaient pas très graves, mais les accidentées semblaient sous le choc. Les policiers descendirent de leur voiture et, après un coup d'œil au véhicule cassé, ils se rapprochèrent des victimes.
- Bonjour, je suis Flynn Mayer et voici Stiles Stilinski du bureau du shérif. Pouvez-vous nous expliquer ce qu'il s'est passé ?
- Je… Je m'en souviens plus beaucoup. S'excusa d'une voix frêle la conductrice enroulée dans une couverture thermique.
Il s'agissait d'une femme blonde à peine plus jeune que Stiles, un trait noir habillait ses yeux en amande.
- Moi… non plus, bégaya son amie, une brune aux cheveux courts.
- Allez, ça date de quoi…? Quinze minutes à tout casser, à moins d'avoir des problèmes de mémoire, vous avez sûrement quelques bribes de souvenirs, non ?
- N'écoutez pas mon collègue, le jeune homme prit enfin la parole en s'agenouillant devant les jeunes femmes.
Il voulait sa voix douce et réconfortante. Il savait que brusquer des gens victimes de traumatisme ne rimait à rien. Intérieurement, il gifla son coéquipier.
- Regardez-moi, voilà, doucement. On comprend que ça ne soit pas facile, reprit-il en posant ses mains sur celles des deux amies. Prenez tout le temps qu'il vous faut. On va rester avec vous un moment, donc ne vous inquiétez pas, d'accord ?
Ses paroles trouvèrent leur chemin et les tremblements des deux femmes se calmèrent. Mayer souffla, la psychologie était une science obscure qu'il ne comprenait pas, peu étonnant quand on passe son temps à descendre les autres. La blonde ferma les yeux, fronça les sourcils et essuya les quelques larmes qui coulaient laissant un trait noir de maquillage sur ses joues. Puis, elle ouvrit les paupières pour fixer le regard noisette du gentil policier.
- Je conduisais tranquillement, Kim dormait à côté de moi. Et, d'un coup, il y a quelque chose qui a surgi devant la voiture. J'ai freiné et j'ai mis un coup de volant… je suis désolée.
- Vous vous souvenez ce qui est apparu devant vous ? Interrogea sereinement l'homme agenouillé.
- Je n'ai pas eu le temps de bien discerner ce que c'était… Mais… C'était blanc.
Le sang de Stiles ne fit qu'un tour. Blanc, comme la biche. Était-ce une coïncidence ? Était-ce autre chose ? Il avait au moins une dizaine de questions à poser mais il se recentra, il avait le désir de rester très professionnel.
- Vous rappelez vous à l'allure à laquelle vous alliez ?
- Euh.. Soixante-dix maximum. Je suis très prudente et on allait chez une amie… Pour… Une crémaillère.
- Bien. Je dois vous poser la question à cause de la procédure mais j'imagine que vous n'avez pas consommé de…
- Non ! Pas au volant. C'était mon soir. Ma coloc a bu un peu par contre.
- D'accord, je vous crois. Cependant, pour le dossier, on va tout de même devoir vous tester. Mais dites-moi plutôt. Cette "chose" blanche ressemblait-elle à une biche ?
- Oui ! Voilà ! Une grande biche ! Je… J'ai eu tellement peur… Heureusement, elle n'a pas été touchée.
- Ta voiture par contre… Répliqua la brune. Débile cette biche, il faudrait..
- Kim ! La stoppa la conductrice.
Le jeune policier la scruta avec étonnement, comment était-il possible d'avoir si peu d'empathie envers un animal ? Il souffla et mit ça sur le compte de l'alcool.
- Merci à vous de m'avoir fait confiance. Je laisse mon collègue reprendre le relais. Nous risquons de vous recontacter d'ici quelques jours ou semaines ! Essayez de passer une bonne soirée quand même.
- Merci monsieur, répondit la blonde en rougissant légèrement.
Sans vraiment faire attention à la réponse qu'il reçut ni au grommellement contrarié de son équipier, il s'éloigna pour observer la voiture plus en détail. Il espérait trouver quelque chose à se mettre sous la dent concernant l'animal mais, c'était peine perdu. Le véhicule ne l'avait pas heurté, il n'y avait donc aucune trace de cette rencontre. Sur son calepin, il marqua les informations qu'il avait pu récolter et se retourna vers la forêt. Il resta devant immobile, combattant l'attirance qui grandissait en lui comme si elle lui criait de venir s'y perdre. Il voulait en savoir plus sur la cause de l'accident. Son instinct lui hurlait de creuser encore plus. Puis, il secoua la tête et se ressaisit, il n'était pas seul. Ils devaient rentrer au poste écrire leur rapport. Pensif, il rejoignit son collègue qui l'attendait devant la voiture.
- Toi aussi, tu veux la voir cette biche ? Demanda Flynn avec un air particulièrement sérieux qui surprit Stiles.
- Euh oui… Tu veux qu'on aille faire un tour dans les bois ?
- Hein ?! Ah non, non, je disais ça comme ça. On rentre ? J'ai faim.
Le visage de son équipier reprit son expression stupide habituelle, si bien que le jeune homme pensait l'avoir mal observé quelques secondes auparavant. Comment un homme aussi intellectuellement limité avait pu lui paraître si intéressé. Non, ça devait être une vision de son esprit. Il commençait à être tard et, dans la pénombre, il avait dû se tromper. Il hocha la tête et monta dans la voiture. Ils roulèrent jusqu'au poste dans un silence complet. Le passager étonné du calme ambiant, dévisagea son conducteur qui avait un sourire bêta au visage.
- Pourquoi tu me regardes Stilinski ? Questionna le brun une fois qu'il s'était garé.
- Rien, rien. Je me demandais pourquoi tu souriais.
- Parce qu'elle était vraiment mignonne la blonde hein ?! Je vais essayer de…
- Stop, je ne veux pas en entendre d'avantage.
- Pff.
Le jeune policier souffla et sortit du véhicule de fonction, il se réprimanda d'avoir été assez naïf pour penser que son collègue pouvait faire preuve de réflexion quelques fois. Il n'était, décidément, d'aucun intérêt. Avant de pouvoir poser le pied dans le bureau, ils furent appelés pour tapage nocturne. Bien qu'ayant géré la situation avec brio, le duo avait terminé tard et au vu de la réaction courroucée de Mayer, ils avaient dépassé les vingt-deux heures. Stiles avait une sainte horreur de reporter au lendemain le bouclage de ses dossiers mais il n'en pouvait plus. Il devait fuir son coéquipier, d'ailleurs que ce dernier soit encore vivant à la fin de journée relevait du miracle tellement que la patience du fils du shérif était mise à mal. Heureusement, il put enfin souffler et rentrer chez lui. Il passa la porte du loft non sans une impression de vide.
- J'suis là…
- Oh, salut.
Derek était assis devant une table où il y était disposé deux assiettes, l'une ayant déjà servie et l'autre encore vide.
- Je suis désolé du retard… On a été appelé au dernier moment.
- Pas grave, le repas risque d'être un peu froid par contre. Je te laisse manger, demain je me lève tôt, je vais au lit.
- Tu es énervé ?
- Non. Te couche pas trop tard.
Le loup passa devant lui et déposa un doux baiser sur le front de son compagnon avant de monter les marches d'un pas lourd. Celui-ci, se retrouvant seul, dévora le dîner avec appétit en pianotant sur son téléphone. Il ne l'avait pas regardé depuis dix-neuf heures trente. Il découvrit avec tristesse qu'il n'était pas loin de minuit, il comprit, alors, l'agacement de son homme. Il constata aussi qu'il avait reçu deux messages.
"Deaton m'a donné rendez-vous demain matin à 9h devant Eichen House." - Reçu de Scott.
Il répondit à son meilleur ami qu'il serait là, lui aussi.
"Tu en es où ? Tu rentres bientôt ? Courage."- Reçu de Derek à 22h30.
"Et merde. T'es con Stiles." murmura t-il. Un élan de culpabilité l'engloba. Il avait l'impression de tout rater. Honnêtement, à la place de Derek, il aurait été hors de lui. Un petit message ne coûtait rien. Mais non, ça non plus, il n'était pas capable de le faire. Bon, son homme n'était pas du genre à dépérir sans lui c'est sûr. Seulement, il était très protecteur et ne pas avoir de nouvelles avait dû l'angoisser. Pire encore, le sourwolf avait eu assez de tact pour ne pas lui faire une scène dès son retour, là encore, il ménageait les sentiments de son petit ami au détriment des siens. Des larmes se formèrent au coin des yeux du châtain. Il ne méritait décidément pas la gentillesse du loup.
Il débarrassa la vaisselle et il se rendit dans la chambre le plus silencieusement possible. Il entendit la respiration calme et profonde du brun, il se déshabilla avec des gestes précis puis se glissa délicatement sous la couette. Il resta un moment les yeux dans le vide avant de ressentir une solitude amère lui piquer le cœur. Il se rapprocha le plus possible du corps chaud du lycan en essayant de ne pas le réveiller. Il avait envie de l'embrasser, sentir ses bras puissants l'entourer, respirer l'odeur de son cou et lui glisser des mots doux à l'oreille. Mais il n'en fit rien. À cause de lui, la nuit de son compagnon était déjà bien assez écourtée. Il refoula difficilement sa frustration et murmura un "Bonne nuit mon petit Derek.".
- Tu comptes rester figé comme ça longtemps ?
- Tu ne dors pas ?
- Si si. Mais une des nombreuses capacités des loup-garous c'est de pouvoir discuter en plein sommeil profond.
- Je dois être un loup refoulé alors, rigola de bon coeur l'humain.
Il marqua un blanc avant de se lover contre l'épaule de son amant. C'était comme s'il avait enfin retrouvé sa place, il reprit tout bas :
- Je suis désolé pour aujourd'hui…
- C'est rien. Je comprends et pour une fois, j'ai pu manger dans le calme.
- Tu m'as manqué, arriva à articuler le retardataire malgré la culpabilité qui lui serrait la gorge.
- Toi aussi…
La respiration du loup devint plus lente et profonde, il s'était endormi. Stiles renifla encore son odeur et s'enferma dans ses songes. Son cauchemar était de retour, toujours plus réaliste, toujours plus angoissant et toujours plus douloureux.
C'est le réveil de son amant qui le sauva encore d'une mort violente. Il eut du mal à ouvrir les yeux. Mais des cheveux lui chatouillaient le nez et un râlement qu'il ne connaissait que trop bien le motiva à émerger. Derek le serrait puissamment contre lui, il avait posé sa tête contre le torse du jeune homme et bougonnait des paroles inaudibles aux oreilles humaines. Le châtain sourit amoureusement et lui caressa les cheveux.
- Tu sais, mon petit Derek, si tu veux que je te réponde, il faut que tu parles plus fort.
- Mmh. Pas envie… Fatigué… Rester avec Toi.
- Il est quelle heure ?
- Six heures.
- Et il faut que tu sois au garage pour… ?
- Dans deux heures.
- Pourquoi t'es tu réveillé si tôt ?
- Courir. Pas envie.
- Tu sais qu'une phrase est généralement composée d'un sujet, d'un verbe et d'un complètement ?
En seule réponse, il récolta un grognement irrité et sentit l'étreinte se raffermir.
- On y va ensemble…?
- Mmh?
- J'ai besoin de me défouler aussi et il faut que je me lève, j'ai rendez-vous avec Scotty.
- OK…
Malgré la réponse positive, le corps chaud du loup resta immobile empêchant l'humain de bouger. Ce dernier, toujours un sourire attendri aux lèvres, embrassa les cheveux qui se perdaient sous sa bouche et lui caressa la nuque.
- Euh, ça risque d'être difficile de faire quoi que ce soit comme ça. Indiqua-t-il amusé.
- Je sais. Bon. Je te laisse partir, pour cette fois. Mais attends de voir ce week-end.
Derek desserra son emprise, s'étira et bailla. Il se leva en titubant et enfila caleçon, jogging, débardeur et un pull sans manches pourvu d'une capuche qu'il laissa tomber sur son crâne.
- Je t'attends en bas, dit-il mollement à son spectateur.
Celui-ci se dépêcha, il passa ses affaires de sport et descendit les marches rapidement. Il aurait bien aimé manger mais son compagnon était du genre à faire passer ses exercices physiques avant ses besoins nutritionnels. Ils partirent à petites foulées à travers plusieurs rues jusqu'à atteindre un parc encore désert à cette heure-ci. Dans moins d'une heure, il serait envahi de gens tous plus pressés les uns que les autres. Peu étaient les courageux qui décidaient de se dépenser si tôt. L'air frais du matin piqua les joues du jeune policier, il aimait bien ce contact énergisant parce qu'il savait qu'après, une bonne douche chaude l'attendait. Le brun était à ses côtés. Il faisait attention à rester dans la norme humaine pour ne pas attiser des rumeurs dérangeantes. Il avait gardé sa capuche, sûrement à cause de son asociabilité naturelle. Son visage était fermé et son regard était rivé sur le sol. Ils n'échangèrent pas un mot. Au bout d'une heure de footing, ils étaient de retour chez eux. Stiles était légèrement essoufflé, Derek lui restait stoïque.
- Douche, grogna le plus vieux en montant les escaliers.
- Et ben.. Mon loup s'est levé du mauvais pied… Je n'aime pas ça, chuchota le plus jeune.
Il hésita quelques secondes puis suivit le même chemin que son homme. Il entendit l'eau couler, il se débarrassa de ses habits avec l'idée de partager la douche de son petit ami. Il se glissa sous l'eau chaude pour y découvrir le lycan sous le jet de la douche avec la tête baissée et la main appuyée sur le mur devant lui. Il semblait ailleurs, il n'avait même pas remarqué la présence du jeune homme. Celui-ci tenta de faire un peu de bruit pour se faire surprendre. Et son plan fonctionna. Des yeux gris l'examinaient d'un air perplexe.
- J'ai aussi le droit de me laver non ? Rétorqua t-il en haussant les épaules.
- Stiles… Qu'est ce que tu fais vraiment là ?
- Je viens de courir une heure, estime toi heureux que je me lave pour ne pas sentir le fennec.
- Stiles.
- Ok, ok. Tu n'as pas l'air bien. Je suis inquiet.
- Je suis juste un peu fatigué, c'est tout. Vivement ce week-end.
- Mouais.
- Mais tu sais ce que ta venue implique ?
- Comment ça ?
- Tu es lent à la détente. On est le matin, je ne me suis pas assez dépensé, et tu me suis sous la douche… L'eau chaude me donne des idées.
- Et c'est moi l'hyperactif hein. Répliqua-t-il rougissant légèrement.
Il essaya de cacher, sans réel succès, les battements de son cœur. Le visage de son amant lui confirma que la tentative s'était muée en échec et ils donnèrent vie à leur désir commun. Cette petite interlude improvisée avait creusé leur appétit. Les deux hommes propres et habillés se dirigèrent vers la cuisine. Une fois le petit déjeuner prit, Derek partit pour une journée de travail. Il souriait, preuve que son humeur s'était nettement améliorée. Le jeune homme était plutôt fier d'en être la cause.
Cependant, une fois seul, le cerveau de l'hyperactif s'accéléra, une question le titillait. Pourquoi Eichen House ? Il redoutait la réponse. Il n'avait pas envie de se retrouver face à la sirène. Il la craignait. Malheureusement il ne trouvait pas d'autres explications. Ils allaient revoir Amalia. Il frissonna et sa mâchoire se crispa en revivant les événements de cette nuit-là. Derek et son père sous emprise, Scott qui se montre sous un nouveau jour, Chris qui meurt, Derek qui se laisse emporter sous ses yeux impuissants, la solitude, la peur. Tout refaisait surface en même temps. Ça allait bientôt faire un an mais ses ressentiments ne le quittaient pas. Son cœur s'emballa, sa respiration se saccada, ses oreilles se mirent à bourdonner et tout son corps vibrait sans qu'il ne puisse le contrôler. Avec empressement, il trifouilla dans son téléphone et appuya au hasard sur son écran.
- Allo ?
- Je… Je…
- Stiles ?
- Pas bien… Angoisse…
- Hey, p'tit génie, t'es tout seul ? Il est pas là ton garde du corps antipathique ?
- Non.
- Ok, ok. Tu sais que je débarque dans moins d'un mois hein ? Trois semaines tout au plus. On va pouvoir se refaire des soirées comme avant. Ça va être cool. Tu me dois toujours un Karaoké, tu te rappelles de la musique qu'on avait massacrée ? J'ai plus le nom en tête là… Tu as toujours eu une meilleure mémoire que moi…
C'était faux. Stan avait une mémoire extraordinaire lorsqu'il s'agissait des choses qu'il aimait et ce moment-là avait été un tournant particulièrement décisif dans leur amitié. Mais c'était le moyen qu'il avait trouvé pour que son ami se raccroche à la réalité, qu'il se concentre sur autre chose que ses angoisses. Stiles en avait conscience mais il se laissa porter par l'idée du grand blond.
- C'était… C'était…
- Oui ?
- Friends will be Friends… De Queen.
- Ah, oui ! C'était ça ! Je m'en souviens maintenant. On avait été dans un Karaoké un peu miteux et c'était l'une des seules bonnes musiques qu'il y avait…
- Oui… Le patron était un con, il nous avait pris la tête.
- Et tu lui avais répondu par un monologue satirique, un peu de ce genre "C'est vrai qu'on exagère, on chante dans un Karaoké, quelle honte ! Excusez-nous monsieur de faire vivre votre commerce. La prochaine fois on boira notre bière dans un silence mortel, ça ne vous changera pas de votre ennui habituel.". Qu'est ce qu'on avait ri. Tu sais que je rigole encore en pensant à sa tête ce jour-là ? S'en prendre à Stiles Stilinski, le pauvre l'a vite regretté.
- Pour quelqu'un qui ne se rappelle plus d'un titre de chanson, je trouve que tu as pas mal de souvenirs de ce soir-là.
- Et ta crise s'est arrêtée.
-... Merci Stan. Tu es un mec en or.
- Ben j'aurais bien revendiqué la place de meilleur ami mais elle est déjà prise par Scott et c'est une personne géniale. Donc j'accepte mon rôle d'éternel second.
- Pff n'importe quoi, ricana le jeune homme.
- Ah voilà, c'est ce rire là que je voulais entendre. Il me manque... Bon… Il faut que j'y retourne. Ça ira ?
- Oui, merci.
- Derien p'tit génie !
En raccrochant, Stiles se sentait mieux. Il arrivait à reprendre le dessus sur ses émotions. Son ami d'université était vraiment d'un soutien sans faille. C'était peut-être une bonne chose qu'il vienne s'installer dans le coin même si c'était pour gérer les affaires "spéciales" de Beacon Hills.
Il se frappa les joues et se concentra, il fallait être méthodique, pour Scott. Il se préparait mentalement à un combat violent tout en se dirigeant vers l'institut de santé mentale. Il ne pensait pas y remettre les pieds aussi tôt. Après tout, c'était un endroit qui lui rappelait des heures sombres où il cohabitait avec un être aussi dangereux qu'intéressant. Enfin, il n'avait pas le choix, Deaton avait sûrement ses raisons.
Il arriva sur les lieux avec dix minutes d'avance. Il en profita pour rassurer ses proches.
"Salut mon petit Derek, je suis arrivé devant Eichen House… Je n'aime pas cet endroit. Tu me manques."- Envoyé.
"Salut Stan. Merci encore pour tout à l'heure. Ça va mieux grâce à toi :)"- Envoyé.
"Ok, fais attention à toi. Toi aussi."- Reçu de Derek.
Le retour de la froideur légendaire du Sourwolf fit souffler d'embarras Stiles. Il voulait avancer le temps et qu'ils se retrouvent tous les deux seuls, du moins, s'il arrivait à ressortir vivant de ce rendez-vous matinal.
Quelqu'un toqua à sa fenêtre le tirant immédiatement de ses pensées. Il sursauta avant de se retrouver face à Peter et à son sourire supérieur. Il descendit sa vitre pour écouter ce qu'il avait à dire.
- Salut beau neveu. Je t'ai fais peur ? Tu m'en vois navré.
- Bonjour. Ça va, merci Peter, et toi ? Oh et surtout, qu'est ce que tu fais là ? Grommela Stiles.
- Je vois que la douceur de Derek est transmissible. Je vais bien. Deaton m'a appelé.
- Toi ? S'indigna le jeune homme.
- Et oui. Il pense que je peux vous aider.
- Naïf le druide.
- Ou clairvoyant.
- Les gens qui te font confiance en payent toujours le prix.
- Cette fois-ci, j'ai des choses à protéger, moi aussi.
Le regard du loup se durcit, signe qu'il voulait se montrer sérieux et sincère. Avec l'arrivée de Peter, les choses allaient devenir plus complexes que prévu. Mais l'humain se résigna, jusqu'à maintenant, l'intuition de l'émissaire avait été plutôt utile. D'ailleurs, lui et Scott arrivèrent quelques minutes plus tard. Le latino avait un visage inquiet mais semblait plus calme que ce que Stiles s'était imaginé. Peut-être se sentait-il soulagé que les choses avancent enfin ? En tant normal, le jeune policier possédait le don de traduire ses émotions d'un coup d'œil mais depuis quelque temps, ça lui était impossible. Il alla les saluer et une pointe d'anxiété commençait à l'envahir. Les deux vétérinaires s'isolèrent pour échanger quelques mots pendant que Hale et Stilinski se retrouvaient seuls.
- Fais attention, on entend ton cœur battre vite et tu sens la peur.
- Mh, j'aime pas cet endroit.
- Moi non plus, mais t'en fais pas. Je serais là pour vous protéger… Tu me vois comme un loup psychopathe, ne vaut-il mieux pas être avec moi que contre moi ?
- J'imagine.
- Tu peux le faire, Stiles.
Sa voix était douce et attentionnée, ça ne dura qu'un instant infime mais c'était suffisant pour que le jeune homme se débarrasse de son angoisse sous le poids de la surprise. Il allait répliquer quand les deux hommes les rejoignirent. Il était temps, le quatuor allait pénétrer dans Eichen House.
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