Chapitre 12
- Stiles, Stiles, il faut que tu manges.
- Mmh ?
Le jeune homme ouvrit les yeux, devant lui se matérialisa l'image de son homme tenant dans sa main une assiette remplie.
- C'est adorable ça... Mais fallait pas...
- Mmh. Tiens, assieds toi.
- Merci, mon petit Derek.
Il s'assit difficilement, la tête lui tournait. Il prit le plat et enfourna une première fourchette dans sa bouche. C'était délicieux.
- J'ai dormi combien de temps ?
- Une heure environ, le temps que je prépare la purée et les haricots verts.
- Ça me fait du bien.
Le lycan rougit, baissa la tête et se frotta la nuque.
- Tu sais, hésita t-il. Pour tout à l'heure euh... je suis désolé... C'est possible que j'ai, légèrement, peur de perdre ce qu'on a construit tous les deux... Je m'attendais pas à ce qu'elle revienne. Ça me perturbe pas mal.
L'esprit encore embrumé de Stiles analysa les paroles de son compagnon étape par étape. Déjà, il sourit en écoutant ses excuses laborieuses, il n'était pas doué pour cela mais sa tentative le rendait plutôt attendrissant. Ensuite, il se sentit mal et sa joie s'effaça. Quand Derek parlait de son ex petite-amie, son regard était fuyant et sa voix tremblait. « Ça me perturbe pas mal. », que voulait-il dire par là ? Une question brûlait les lèvres de Stiles, une phrase si simple mais qui lui retournait l'estomac « Tu l'aimes toujours ? ». Il avait envie, non, besoin de la poser. Mais les mots ne venaient pas. « Allez Stiles, quatre petits mots, allez. » se répétait-il sans succès. Plus que cette interrogation, il en redoutait la réponse. Il appréhendait le visage emplit de doute de son amant, alors, il garda le silence. Son courage lui manquait, encore une fois. Il n'avait plus d'appétit et chaque fois qu'il glissait de la nourriture dans sa bouche, une douleur se déversait dans son œsophage. Les haut-le-cœur étaient de retour.
- Mange, insista doucement le loup tout en le dévisageant.
- Oui, merci.
Malgré le dégoût qui s'emparait de lui, il tenta de faire honneur au repas. Sans succès. Voyant l'hésitation de l'humain, le cuisinier déposa doucement l'assiette sur la table de chevet, retira son t-shirt et engloba Stiles dans ses bras pour le faire tomber dans le lit. Celui-ci sentait le souffle chaud du loup lui caresser les cheveux et son visage était collé contre son corps musclé.
- J'ai besoin de toi, l'hyperactif, lui susurra-t-il à l'oreille.
- Pourquoi tu me dis ça ?
- Rien, juste comme ça.
- Derek.
- Je sens de la tristesse.
- Tu ne veux pas me prêter tes pouvoirs loup-garouphiques ? C'est pratique des fois...
- Tu n'en as pas besoin, j'ai rarement vu un être aussi intelligent que toi...
- C'est le don des hyperactifs ça.
- Non... Je crois que c'est seulement le tien...
- Derek, dis, est-ce que tu penses que ça va changer quelque chose entre nous ?
- ... Oui... Mais je ne veux pas que tu me laisses... Pas toi... Pas encore...
- À vrai dire, ça serait plutôt le contraire...
- ...
- Hey ?
Le plus vieux avait sombré dans un sommeil profond. Il devait être épuisé, ça n'avait pas dû être une journée facile pour lui non plus. Apprendre qu'on est père du jour au lendemain, d'un enfant d'environ deux ans et demi, ça devait être usant. Surtout pour lui qui n'avait pas l'habitude d'ouvrir son cœur aussi rapidement. Mais Stiles en était sûr, son homme serait un papa poule. Il fallait juste un peu de temps pour qu'ils s'apprivoisent tous les deux. Lui, ce dont il doutait, c'était de la place qu'il occuperait dans cette famille décomposée. Beau-père ? Cela ne sonnait pas très bien dans son esprit. Il aurait aimé en parler avec Noah, il était souvent de bons conseils et avait de l'expérience à revendre en tant que parent. Cependant, il attendait le feu vert de son compagnon. Il ne voulait pas le brusquer et il n'y avait rien à faire d'autre que de le supporter autant que possible. Ses yeux se fermèrent indépendamment de sa volonté et lui aussi plongea dans un monde onirique.
En ouvrant les paupières, il comprit qu'il était dans un de ses rêves récurrents. Le même couloir blanc et froid, la même porte ouverte, la même chambre glaciale, le même petit garçon qui veillait sur sa mère mourante. « Forcément... » murmura-t-il. Il revécut les insultes, les sentiments de rejet et de solitude, l'envie profonde de disparaître et la haine débordante qu'éprouvait sa mère à son égard. Cette fois, il ne pleurait pas, il n'en avait pas l'envie. Il s'était endurci, il s'approcha du petit garçon et lui mit la main sur l'épaule. Il aurait aimé lui dire quelque chose mais sa gorge était serrée, il en était encore incapable. Le reste de son rêve était toujours flou, toujours incertain, il n'arrivait pas à débloquer ses souvenirs. Le cauchemar laissa place à un noir profond et il se réveilla doucement. La lumière du jour transperçait le volet et venait lui rappeler que sa réalité était aussi complexe que ses songes. Le lit était vide et la place froide. Cela devait faire un moment qu'il était seul. Un peu attristé mais compréhensif, il enfila des vêtements avant de descendre dans la cuisine. Le loft était silencieux mais une petite note trônait au milieu du bar. « Besoin de me défouler, je reviens. Sourwolf. ». Stiles sourit attendri par l'attention puis, décida, lui aussi, de sortir. Ses chaussures aux pieds, il partit faire son sport matinal. En chemin, il réfléchit à la possibilité de retourner au travail plus tôt. Leur week-end étant annulé et son compagnon ayant la tête ailleurs, il n'était pas sûr que ses jours de congés soient très utiles. Évidemment, il était peu probable que le shérif accepte facilement son retour mais lui ne voyait pas l'intérêt de rester à rien faire dans son appartement. Et il devait remercier Flynn. Il repensa à la gentillesse inattendue de son collègue, il se sentait plus à l'aise à ses côtés. Il restait tout de même prudent, on parlait de son collègue homophobe et limité.
Son esprit divagua encore plusieurs longues minutes avant qu'il ne se décide à rentrer chez lui. Il n'avait pas grand espoir d'y retrouver le loup mais, de toute façon, il avait pour projet de faire une série de renforcement musculaire. En pénétrant dans l'appartement, il eut la bonne surprise de voir le propriétaire déjà de retour.
- Salut beau gosse, le salua t-il heureux. Ça fait longtemps que tu es rentré ?
- Salut. Non, dix minutes.
- OK, ok...
- Stiles ?
- Derek ?
- J'étais inquiet.
- C'est vrai... Je pensais rentrer avant toi. Désolé.
- Mmh.
Le jeune homme s'approcha de son compagnon qui affichait une mine sévère, les bras croisés. Il posa son menton sur son torse, retroussa sa lèvre inférieure et prit un regard larmoyant.
- Pardon mon petit Derek... Je suis prêt à tout pour me faire pardonner.
- Allez viens, on prend le petit déjeuner.
En signe d'acceptation, le plus vieux passa sa main dans les cheveux du plus jeune qui adorait ce contact. Stiles approuva l'invitation du repas mais lui rappela qu'avant, il devait finir son programme sportif. Il se lança dans sa musculation quotidienne sous l'œil intéressé de son compagnon. Il enchaînait pompes et planches. Sa motivation était grandissante, il voulait être utile, il avait peur de ce qui allait arriver à Beacon Hills. À la fin de ses exercices, il se remit debout non sans une grimace de fatigue.
-;Je suis crevé !
- Bravo pour tes efforts.
- Oh, merci mon petit Derek, rougit le jeune homme.
- Mange.
Le loup lui proposa des toasts au beurre qui faisaient saliver Stiles d'envie. Son corps criait famine après avoir été autant sollicité. Tout en mangeant, il faisait part de ses réflexions à son compagnon.
- Tu sais quoi ? Je vais appeler Lana aujourd'hui et lui proposer un rendez-vous demain. J'aimerai vraiment lui parler de Scotty. Elle en saura sûrement plus, peut-être même qu'elle aura la solution ! C'est quand même bien d'avoir une sirène dans notre camp. Bon, je sais qu'Amalia est plus puissante mais sait-on jamais.
- Mmh.
- Après j'irais la voir elle, justement. Je pense le faire seul, Scott est déjà trop mal en point. Et j'ai peur de l'incidence qu'elle peut encore avoir sur lui. Sérieusement... Imagine un peu, choisir entre ton loup et ton humain... Avec les prochains combats qui nous attentent... Entre pouvoir protéger ta famille et tes idéologies... Quoi qu'en prenant la voix de l'humanité, tu mettrais ta famille en sûreté, mais de toi-même. Tu ferais quoi, toi ?
- Mmh mmh.
Son petit ami ne l'écoutait plus, l'hyperactif en avait l'habitude mais cette fois-ci, le lycan était pendu à son téléphone.
- D'ailleurs, je vais aider Peter à retrouver son pouvoir d'alpha et je vais lui demander de me mordre, ricana-t-il en sachant que l'idée fixe du vieux Hale à le transformer énervait particulièrement son compagnon.
-Mmh.
Sa tentative ratée, il observa en silence longuement le visage de Derek qui souriait bêtement devant l'écran de son téléphone. « OK, ça c'est pas normal. » remarqua-t-il intérieurement. C'était bien la première fois que cette situation arrivait.
- Hey oh ! Tu m'écoutes, Mr Derek Hale ?
- Hein ?! Euh ouais, ouais. J'espère que Lana nous en apprendra plus.
- Qui est à l'origine de ce sourire béat qui déforme ce beau visage ? Je dois m'inquiéter ?
- Non, non, c'est Braeden.
- Tu as son numéro ?
- Hier, pendant que tu jouais avec Nathan, elle m'a demandé le mien.
- Forcément... Grinça le jeune homme entre ses dents.
- Et elle m'a proposé qu'on se voit aujourd'hui pour manger ensemble à midi et peut-être aller au parc.
- Oh... OK.
- Elle m'a envoyé une photo du petit, regarde.
Sur l'écran de téléphone, il y avait Nathan, grand sourire sur un tricycle où des sangles l'attachaient solidement. La fierté d'être sur un bolide pareil se lisait clairement dans ses yeux.
- Il est vraiment adorable.
Stiles ne rajouta rien de plus. Il était terrassé par une tristesse envahissante. Que son homme ait d'autres choses en tête que leur couple, il pouvait le comprendre, que son fils devienne le centre de son monde, c'était normal. Mais ce qui le minait vraiment, c'était la place que prenait l'ancienne mercenaire. Il avait la douloureuse impression qu'elle s'accaparait son rôle, à lui. Il devait réagir et vite.
- ... Du coup cet après-midi... Hésita le brun.
- Ah oui oui, je comprends, amusez-vous bien.
- En fait, j'espérais que tu nous accompagnes.
- Hein ?!
- Ouais... Je... Je ne suis pas à l'aise... Et avec toi, j'ai l'impression d'être un peu plus à ma place... Et puis Nathan t'adore... Et, tu n'as pas dit que tu voulais clarifier la situation sur nous ?
- Avec tous ces arguments, je ne peux qu'accepter.
- C'est vrai ?! Tu veux bien ?
- Euh oui. Pourquoi ?
- Je ne pensais pas que tu allais abdiquer aussi facilement.
Derek avait un visage radieux. Le jeune homme ne pouvait pas y résister. Ils se préparèrent à partir. Le loup avait fait un effort vestimentaire, l'humain ne tarda pas à lui en faire la remarque, compliment qui fut accueilli par un sourire charmeur et par une explication plutôt simple : il voulait être bien habillé pour la seconde rencontre avec son fils et pour le jour où, son hyperactif, allait enfin révéler leur relation à quelqu'un d'extérieur à la meute. Ce dernier rosit légèrement, il avait rarement vu son homme aussi enthousiaste. Il se sentait un peu nigaud avec son t-shirt gris et sa chemise à carreau rouge mais il fut tout de suite rassuré par un murmure lui indiquant que sa tenue était appréciée, et même un peu trop. Il repoussa sans véritable entrain les avances de Derek. Il était l'heure de partir. Ils prirent la voiture du plus âgé qui la conduisait joyeusement.
Le restaurant choisi par Braeden était une pizzeria familiale avec un bruit de fond persistant qui fit tiquer le loup. C'était d'ailleurs étonnant que la belle brune n'ait pas pris en compte son caractère peu sociable, sans arriver à se contrôler, une sensation de satisfaction naquit en Stiles. « Tu ne le connais pas autant que moi. » ricana-t-il intérieurement avant de se rendre compte de la puérilité de sa pensée. Ils les trouvèrent facilement, Nathan sauta dans les bras de Stiles et l'ancienne chasseuse de prime parut légèrement déçue lorsqu'elle les salua.
- Vous êtes inséparables vous deux ! Déclara-t-elle fortement.
- Je préfère quand il est là, la coupa Derek.
- D'accord...
Les trois adultes commandèrent une pizza et un menu enfant pour le petit démon qui menait déjà la vie dure au jeune policier. Ils s'amusaient à colorier des papiers disposés sur la table. Rapidement, ce fut la main de Stiles qui servait de toile pour que le génie artistique du plus jeune puisse s'exprimer. Pendant ce temps, les deux parents étaient pris dans une discussion particulièrement sérieuse qui n'arrivait pas aux oreilles de Stiles. « Ouïe humaine inutile. » râla-t-il. Encore une fois, il avait l'impression de servir de nounou et de se retrouver face à un couple marié. Le repas fut servi et la mère reprit son rôle le temps de nourrir son fils. Le baby-sitter eut à peine le temps de manger son assiette que Nathan était pendu à son cou. Sans surprise, le père avait avalé son repas assez rapidement, sûrement pour fuir l'agitation ambiante. Une fois la note réglée par Derek, qui avait insisté pour tout prendre en charge, ils se dirigèrent vers un parc rempli de famille. Ils trouvèrent un coin tranquille pour se poser. Nathan avait décidé de courir partout, suivis de prêt par Stiles et sous le regard aimant de ses parents. Au bout de plusieurs minutes, le jeune policier était de retour, terrassé par l'énergie débordante de son jeune acolyte.
- Dis, Stiles tu es mon papa ? Lui demanda innocemment le garçon.
La question provoqua la surprise générale.
- Pourquoi tu me poses cette question, Nath ?
- Chez Nounou, les autwes ont un papa. Moi aussi je veux !
- Mmh, je ne suis pas ton papa mais tu sais, je suis sûr qu'il pense fort à toi et qu'il t'aime vraiment beaucoup, répondit l'intéressé en regardant Derek.
- Et toi ?
- Moi aussi je t'aime beaucoup, petit loup.
- Je suis un petit loup, ouiii ! On wejoue ?
- Je suis un peu fatigué, mais je crois que Derek ne l'est pas lui !
Stiles essayait de les rapprocher, qu'ils puissent passer du temps ensemble. Il savait que le père n'était pas assez confiant pour faire le premier pas, peut-être qu'avec un peu d'aide, la situation se débloquerait. Son compagnon saisit l'opportunité, il se s'avança vers son fils caché et se mit à sa hauteur.
- Tu veux jouer à quoi Nathan ? Demanda t-il avec une douceur qu'on lui connaissait peu.
- Cheval !
- Allez, monte !
Le petit garçon monta sur les épaules du brun avec émerveillement.
- Woooah ! C'est haut ! Dewek, le meilleur !
Le petit défaut de langage de Nathan le rendait encore plus attendrissant. Poussé par ce compliment, Derek s'enhardit et s'éloigna rapidement. Le jeune homme se retrouva seul avec l'ex petite-amie de son amant. Il était très mal à l'aise.
- Ils sont mignons, s'extasia-t-elle.
- Oui très. Il va être un père génial.
- Tu sais... Je regrette d'être partie comme ça.
- Ah ? Fit-il sans grand intérêt.
- Oui... J'ai paniqué, à l'époque il n'avait pas forcément les mêmes attentes qu'aujourd'hui. Il était assez difficile à cerner... Derek et son tact naturel quoi.
- Et donc tu l'as quitté au lieu d'essayer de le comprendre ? C'est quoi cette mentalité ?! Il n'est peut-être pas très diplomate mais au moins, s'il a quelque chose à dire, il ne s'en cache pas !
- Je suis désolée si je t'ai froissé Stiles... Je ne voulais pas... blêmit-elle, un peu surprise par la réaction violente de son interlocuteur.
- Ah non, non... C'est juste que j'en ai marre qu'on lui trouve des défauts...
- Tu l'aimes beaucoup hein ?
- Moui, rougit-il en détournant les yeux.
- Moi aussi... D'ailleurs, tu sais s'il a quelqu'un ?
C'était la fameuse question, celle où il devait répondre par « Oui et cette personne c'est moi, et je ne le laisserai pas partir aussi facilement que toi. ». Mais aucun son ne sortit de sa bouche, il n'y arrivait pas. Il s'était tellement bridé qu'il ne parvenait plus à l'exprimer devant des personnes non proches.
- Je... Euh... Balbutia-t-il embarrassé.
- De quoi vous parlez ? Les interrompit la voix du destrier journalier.
- Braeden voulait savoir si tu avais refait ta vie.
- Et qu'est-ce que tu lui as répondu ? Sourit le loup plein d'espoir.
- Euh rien...
- Pff...
Derek était visiblement blessé, ses traits étaient tirés et son regard se durcit.
- Écoute Braeden, exposa-t-il calmement. J'ai quelqu'un dans ma vie et jˋaime sincèrement cette personne.
- Je vois, je vois... Mais je n'abandonnerai pas cette fois. Comme Stiles me l'a fait remarquer, j'aurais dû être plus persévérante à l'époque.
- Stiles ? Stiles t'a dit ça ? Vraiment ? S'indigna-t-il en levant les sourcils et en toisant le jeune homme.
- J'ai juste dit que tu méritais qu'on fasse plus d'efforts pour toi... dit l'intéressé en détournant le regard.
- Et bien si Stiles le dit... Conclut-il.
Nathan montrait des signes de fatigue et sa mère décida de rentrer. Bien entendu, cela lui déclencha une colère et ses yeux se tentèrent de nouveau en jaune. Pour éviter que les gens autour ne le remarquent, le père le prit dans ses bras et lui parla tout doucement.
- Tu sais Nathan, des fois on peut être très en colère. Je comprends ce que tu peux ressentir, moi aussi, ça m'arrive. Quand tu te sens comme ça, explique-nous pourquoi tu es en colère et on trouvera une solution.
- Veux pas te quitter !
-Pourquoi ?
- Pace que je veux jouer !
- Je comprends. Mais tu peux jouer avec ta maman en rentrant non ?
- Veux jouer avec toi et Stiles.
- Moi aussi je veux jouer avec toi. Promis, on recommencera très vite. Mais pour le moment, ta maman t'attend et elle veut aussi passer du temps avec toi.
- Pwomis ?
- Foi de loup !
- Toi aussi ? Stiles a dit que j'étais un petit loup.
- Mmh, disons que je suis un grand loup !
- Ouii !
La frustration évacuée, la belle brune remercia son ex-petit ami du regard et n'eut aucun mal à rapatrier la petite terreur chez elle. Une fois que le couple d'hommes se retrouva seul, il régna une ambiance très pesante. Le plus vieux ne décrochait pas un mot et le plus jeune réfléchissait intensément. En effet, il avait le désir d'arranger les choses mais rien ne vint. Ils pénétrèrent dans le loft, tous les deux toujours muets. Mais ce silence angoissait énormément Stiles, il n'en pouvait plus. Rassemblant tout son courage, il bégaya :
- Tu, tu t'en es bien sorti avec... Nathan.
- Mmh.
- Je crois qu'il t'aime beaucoup.
- Stiles.
- Je suis désolé qu'il m'ait appelé papa, il ne voulait pas te blesser.
- Je m'en fous de ça.
- Ah ?
- Je suis content qu'il te considère comme un père potentiel au vu de notre... Oui, d'ailleurs, on est quoi pour toi ?
- Ben, on est un couple, répondit Stiles embarrassé.
- Ah bon ? C'est pour ça que tu as dit qu'on était colocataire, que tu n'as pas répondu quand elle t'a demandé si j'avais quelqu'un dans ma vie, et pire ! Que tu lui donnes de pseudos conseils ?
- Wow, autant de choses ?
- J'attends.
- Elle va finir par comprendre toute seule. Et je ne lui ai pas donné de conseils, j'ai juste...
- Je pensais que tu reviendrais sur ce que tu lui avais annoncé, que tu commencerais enfin à accepter de parler de nous...
- Je...
- Combien de temps ?
- Hein ?
- Combien de temps on va rester de simples amis aux yeux du monde ?
- Mais... On va pas dire à ton fils qu'on vient de rencontrer « Salut, lui c'est ton papa et moi je suis le chéri de ton papa ! » !
- Et pourquoi pas ?
- Bah... je ne sais pas comment il réagirait... Dois-je te rappeler qu'il n'y a pas si longtemps, on a vandalisé ton garage ?! Je n'ai toujours aucune piste !
- Arrêtes de te cacher derrière ça ! On parle d'un gosse ! À cet âge là, tu crois vraiment que ça le dérangerait ?!
- Tu ne sais pas... Quelle valeur lui a inculqué ton ex ? Tu connais son avis sur la question ?
- Non, mais...
- Et si jamais, elle décide que c'est contre nature ?! Tu ne verras plus ton enfant.
- Tu... Je... Tu...
Le loup fulminait sans réussir à trouver ses mots. L'humain le savait, ce n'était que des excuses qu'il se donnait. Il n'avait tout simplement pas trouvé la bravoure nécessaire pour affronter un potentiel rejet. Il avait toujours été comme ça, il ne devrait pas se soucier de ce qu'elle pouvait bien penser d'eux mais c'était plus fort que lui. Il ne pouvait que comprendre la fureur de son compagnon.
- Cette situation me fatigue Stiles, finit par expirer Derek.
- Je sais, je...
- Je vais prendre une douche.
Sa voix était cassante et glaciale. Il devait vraiment être à bout, et son départ de la pièce ne fit qu'accentuer la pesanteur qui s'abattait sur les épaules du plus jeune. Il souffla, conscient que sa lâcheté présageait une fin plus rapide que prévu à leur idylle. Il aurait pu y réfléchir, chercher une solution, affronter ses démons, il aurait pu le faire. Mais au lieu de ça, il se réfugiait dans sa zone de confort. C'était plus facile de se préoccuper des affaires des autres. Il composa le numéro de Lana.
- Bonjour, Stiles ! Comment ça va ?
- Bien et toi ?
- Ça va, je suis surprise que tu m'appelles... Je pensais que tu étais...
- Il y a eu un petit changement de programme, tu es libre demain ?
- Euh oui, vers midi.
- Parfait pour moi, je te rejoins où ?
- Je t'envoie l'adresse d'un restaurant, ça te va ?
- Oui.
- Tu es sur que ça va... ?
- Juste un peu de fatigue.
- Te surmène pas trop hein.
- Moi ? Jamais. À demain Lana.
Il raccrocha, heureux de pouvoir penser à autre chose. Scott, il allait trouver la solution et tout rentrerait dans l'ordre. Ils combattraient l'armée de sociopathes avant que le FBI ne puisse découvrir quoi que ce soit et ça lui donnerait du courage pour tout assumer. Oui, c'était comme ça que ça devait se passer. Il ne voulait pas envisager que le cas de son meilleur ami était perdu, qu'ils allaient tout perdre dans la bataille et que sa relation se briserait. Il se forçait à positiver, il ne lui restait que ça. Tant qu'il était sur son téléphone, il demanda à son père s'il pouvait revenir travailler dès mardi parce que son emploi du temps avait changé. Son homme descendit à ce moment-là, torse nu portant juste un pantalon lâche en tissu.
- C'était qui au téléphone ?
- Lana. Je vais la voir demain.
- OK.
Sans rien ajouter, Derek se dirigea vers le congélateur pour préparer le dîner. Pas de plat préparé avec amour, pas de démonstration de talent de cuisinier, juste un repas réchauffé. Ce n'était pas si mal, la journée avait été difficile. À son tour, le jeune homme grimpa les marches pour se détendre sous une douche chaude. Il avait mis de la musique pour empêcher son cerveau de divaguer. C'était réussi. Il se concentra sur la voix énergique de la chanteuse, rangeant sagement ses problèmes personnels. Une fois celle-ci terminée, il rejoignit son loup, la boule au ventre. Les deux assiettes étaient servies, des gratins. Il s'installa à table et, toujours dans le silence le plus total, ils mangèrent.
- Merci pour le repas ! Tenta le jeune homme pour ouvrir la discussion.
- Mmh, répondit le lycan.
- Derek... Tu...
- Après manger, j'irais me coucher. Comme tu n'es pas disponible demain, je vais passer la journée avec Nathan.
- Et Braeden...
- Ça me paraît évident, oui.
Stiles n'avait pas très faim, son inconfort continuait d'augmenter. Il laissa la moitié de son plat alors que son conjoint avait déjà tout avalé. Celui-ci le salua avec distance et grimpa les marches pour s'enfermer dans la chambre. Seul et toujours en quête d'action pour divertir ses neurones, il nettoya la table et la cuisine. Trente minutes plus tard, il devait se rendre à l'évidence que tout était propre. Il se décida à rejoindre le dormeur, plus il montait les marches et plus ses nausées prenaient de la place au creux de son estomac. Si bien qu'arrivé dans le couloir, il resta un moment devant la porte close. Il n'osait pas l'ouvrir, il allait affronter la colère sourde de son petit ami et ça le terrifiait. Il essaya de s'apaiser en se rappelant qu'il habitait lui aussi ici et que cet endroit était également sa chambre. Il ouvrit avec délicatesse la porte et y pénétra en silence. Son homme était allongé, dos à l'entrée. Dans la pénombre, son triskel ressortait légèrement, son épaule supérieure se soulevait au rythme de sa respiration, elle était calme, il devait sûrement dormir. Ou du moins, c'est ce qu'il essayait de faire croire. Habilement, le retardataire se libéra de ses vêtements pour prendre place dans le lit conjugal. Dès qu'il fut installé, il ressentit la petite fissure qui les séparait. Innocemment, il se dit qu'elle était encore franchissable et qu'il réglerait le problème plus tard. C'est ainsi qu'il se réfugia dans un sommeil léger trahissant, malgré lui, son inquiétude grandissante.
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