CHAPITRE XX : Severus
Le maître des potions monte vers le bureau du professeur Dumbledore, qui a demandé à le voir, les pensées tournées vers la nuit à venir. Ce serait la pleine lune. Le soleil allait se coucher dans trois heures. Il devait demander au directeur la permission de se rendre à Ilvermorny pour soutenir Laura.
Tandis qu'il passe devant la grande horloge, un mouvement dans le ciel attire son attention. Un hibou noir vole à vive allure et se dirige vers lui. Severus s'écarte pour le laisser se poser sur la rambarde du balcon et remarque qu'il tient une lettre entre les serres, frappée du blason de l'école américaine.
Le cœur de Severus s'emballe : s'agit-il d'une lettre de Laura ? Si oui, cela voudrait dire que Potter lui a passé le mot.
Le sorcier s'en saisit en tremblant, manque de se faire pincer par le hibou et s'éloigne de lui pour lire le courrier.
Il reconnait l'écriture de Laura au premier coup d'œil.
« Harry m'a dit que vous vouliez avoir de mes nouvelles. Et bien voilà, je vous en donne : tout se passe bien ici pour le moment. J'ai été affectée aux Soins aux créatures magiques, mais j'aide aussi mon collègue Edward en potions. Je pense finalement devenir vraiment prof, et abandonner mon idée d'Auror. J'ignore encore quand je rentrerai en Angleterre. Si je rentrerai un jour. J'espère que Harry ne vous en fait pas voir de toutes les couleurs comme j'ai pu le faire. J'aimerais m'excuser pour ce comportement, d'ailleurs, mais pas par une lettre. Je préférerais le faire de vive voix. Si vous voulez me répondre, utilisez le hibou qui viendra avec la lettre : il connait le chemin jusqu'à Ilvermorny.
Laura. »
Severus ne savait que penser de cette lettre : il trouve du bon et du mauvais. Il sent aussi l'hésitation au début : pas de formule de salutations, preuve qu'elle ne savait sûrement pas comment entamer son courrier.
Ce qui le chagrine le plus, c'est de ne pas savoir quand ils vont se revoir. Mais elle aimerait qu'ils se revoient, pour lui présenter ses excuses.
Et c'est là le meilleur point de cette lettre, à ses yeux.
Avec un sourire, il pense que si elle est capable de s'excuser, il sera aussi capable de lui avouer ses sentiments. Si elle se donne la peine de lui écrire, alors que rien ne l'y obligeait, c'est qu'elle tenait un minimum à lui.
Severus doit tenter sa chance. Il le sait.
Il n'est plus le gamin terrifié de Poudlard ; la bande à Potter n'est plus là pour lui mettre des bâtons dans les roues.
Le seul obstacle entre Laura et lui, à part Voldemort, c'est Sirius Black.
Le parrain de Harry n'acceptera jamais qu'il la côtoie.
Severus se tourne pour chercher l'oiseau qui enverra la réponse, mais le hibou a disparu. Le maître des potions, frustré, laisse échapper un cri de rage.
Sans ce volatile de malheur, pas moyen de répondre à Laura !
Elle va encore croire qu'il l'évite...
Severus observe le ciel.
Pas le choix, il allait devoir se rendre à Ilvermorny ce soir pour aider Laura à surmonter la pleine lune, lui dire qu'il a bien reçu sa lettre et accepter ses excuses. C'était l'unique moyen pour lui de faire la paix avec elle.
Et d'avancer avec elle.
Avancer avec elle...
Ces trois mots nouent le ventre de Severus et lui font tourner la tête.
Oui, il en a vraiment envie.
L'heure n'est plus au jeu du chat et de la souris. Il le sait.
Mais comment aller à Ilvermorny ? Pas en transplanant, c'était bien trop loin. La seule façon qu'il voit, c'est soit un Portoloin, soit le réseau des feux de cheminée, mais cela implique d'aller dans le bureau de Dumbledore. Or, il sait que le vieux sorcier n'acceptera pas de le laisser aller là-bas.
Il n'a pas le choix : il doit trouver et ensorceler un Portoloin.
Pour cela, il doit faire appel aux capacités de Minerva McGonagall.
Rapidement, il se dirige vers sa salle de classe. Les cours sont terminés depuis une heure, mais elle doit être en train de corriger des devoirs. Il descend les escaliers, traverse les couloirs et débarque en trombe dans sa salle.
Heureusement, elle est encore là.
Surprise de le voir arriver ainsi, mais elle ne pose aucune question.
— Severus... ?
— Professeur, pouvez-vous me fabriquer un Portoloin pour Ilvermorny ?
— Je...
— C'est urgent !
Consternée, la directrice des Gryffondor n'ose pas contredire son collègue.
— Vous voulez aller voir Laura..., comprend-elle.
— C'est la pleine lune et elle est seule là-bas ! Il lui faut de l'aide !
— Oui, oui... Mais Ilvermorny est protégée par des sortilèges qui empêchent les Portoloins d'arriver devant son portail.
— Je marcherai, décide Severus.
— Vous êtes sûr de vous ? Albus Dumbledore a bien dit que...
— Je me moque de ce qu'il a pu dire ! Je dois rejoindre Laura !
— Très bien...
Elle sort sa baguette et s'approche d'une paire de lunettes cassées. Elle s'en saisit et donne un petit coup dessus. Un halo rougeâtre sort de la baguette et pénètre l'objet, qui scintille avant de redevenir normal.
— Voilà. Par contre, il faudra que vous demandiez au directeur d'Ilvermorny un Portoloin pour le retour. Il ne marchera qu'une fois.
— Très bien. Merci beaucoup, professeur.
Il s'incline avec respect et pose la main dessus.
Aussitôt, il disparait dans un tourbillon.
Et réapparait dans une zone montagneuse couverte de forêts. Au loin, un château se tient sur une falaise. Severus en déduit qu'il s'agit d'Ilvermorny et se dirige donc dans cette direction. A chaque pas, son cœur s'emballe.
Après plus de trois semaines de séparation, il va enfin revoir Laura. Il sourit stupidement rien qu'à cette idée.
Il perd bien vite son sourire avant de se rendre compte qu'il lui faut plus de deux heures de marche avant d'atteindre enfin cette école.
Il traverse un voile magique et arrive devant la grande porte de bois. Il hésite un instant puis l'ouvre.
Severus arrive dans une grande pièce au toit en verre. Quatre statues décorent les lieux. L'une d'elles s'anime à sa venue : celle de l'Oiseau-tonnerre. Le maître des potions recule, intrigué.
— Oh, un visiteur, déclare tranquillement une voix.
Severus baisse la tête et voit une élève assise dans les escaliers. Elle joue avec sa baguette, qu'elle fait tournoyer dans sa main gauche.
— Je viens voir Laura Potter, dit Severus. Où est-elle ?
— La nouvelle prof de Soins aux Créatures Magiques ? Je ne sais pas, je n'étudie pas dans une de ses classes.
Elle se relève et range sa baguette. Severus la dévisage et note un air arrogant qui lui rappelle celui de Laura plus jeune.
— Mais le directeur est sûrement au courant, lui. Je peux aller vous le chercher, il me connait bien, ricane-t-elle.
— Pourquoi ?
— Parce que j'ai la fâcheuse habitude de m'attirer des ennuis. Ne bougez pas, je vous l'amène !
Elle monte trois marches avant de s'arrêter et de se retourner :
— Au fait, je m'appelle Rebecca Stone, élève de Troisième Année de la maison de l'Oiseau-tonnerre.
Elle désigne la statue qui a remué à l'arrivée de Severus.
— Et vous ? Vous êtes un sorcier britannique, vu votre accent.
— Quelle brillante analyse, ironise Severus. Je suis le professeur Rogue, je suis de l'école Poudlard.
— Oh, chouette ! L'école fondée par Serpentard, comme ici !
Severus lève un sourcil, surpris.
— Une descendante de Salazar Serpentard a fondé Ilvermorny, explique alors Rebecca. Puis, elle a caché la baguette de son aïeul quelque part autour des murs du château. Etonnant qu'un sorcier anglais l'ignore.
Cette fois, cette élève trop bavarde disparait à l'étage, laissant Severus à ses réflexions. Mais il ne reste pas seul bien longtemps.
Un autre sorcier arrive. Un enseignant, cette fois, à en juger par son âge. Il doit avoir la trentaine d'années, comme lui, et des cheveux noirs et bouclés, mi-longs, rejetés en arrière.
— Bonsoir... Oh... Nous nous sommes déjà vus à Poudlard, il me semble ?
Severus plisse les paupières et reconnait en effet l'un des sorciers qui avait assisté à la réunion avec Dumbledore, quand Laura fut affectée ici.
— Je suis Edward Hope, et j'enseigne les potions.
— Severus Rogue, maître des potions également.
— C'est Laura qui a demandé à vous voir ?
— Non, mais c'est elle que je viens voir.
— Navré, professeur Rogue, mais elle n'est pas à Ilvermorny en ce moment.
— Où est-elle ? demande Severus qui sent son cœur se serrer.
— En mission spéciale pour l'école, en Alaska.
Encore plus loin que ce qu'il croyait.
— Que va-t-elle faire là-bas ?
— Je l'ignore. Le directeur ne m'a rien dit. Mais elle devrait être de retour d'ici un jour ou deux. Vous pouvez l'attendre ou bien repartir et nous vous préviendrons de son retour.
Severus réfléchit : comme le week-end vient de commencer, il sait qu'il a deux jours devant lui. Autant les passer ici. Ainsi, il échappe à une énième réunion de l'Ordre du Phénix, à subir les regards douteux de Black.
— Je vais attendre jusqu'à dimanche, décide-t-il.
— Parfait. Vous pourrez découvrir notre belle école. Je peux vous faire visiter.
Severus opine et emboîte le pas à son collègue américain. Tout en gravissant les escaliers, il ne peut s'empêcher d'être inquiet : pourquoi envoyer Laura dans un tel endroit ? Certes, elle a besoin de mûrir, mais c'est très dangereux ! Nul ne sait quelles horribles créatures rôdent dans le secteur...
A cet instant, Severus a envie de transplaner là-bas, mais il sait que ce serait stupide : l'Alaska est un état immense. Bien plus grand que le Royaume-Uni.
— Laura se plait, ici, l'informe soudainement Edward Hope. Malgré quelques collègues irascibles, mais je suppose qu'elle a eu l'habitude de côtoyer ce genre de personnages pendant ses années d'études.
Severus s'immobilise et plisse les yeux.
De qui parle-t-il exactement ? Laura lui a-t-elle déjà parlé de sa scolarité ? Et de lui ? Est-elle si proche de ce bellâtre stupide ?
Cela ne réjouit guère Severus, mais il ne fait aucune remarque.
— Notre professeur de Défense contre les Forces du Mal va bientôt prendre sa retraite. J'espère que c'est Laura qui aura le poste : elle pourra rester là.
Secrètement, Severus espère qu'elle reviendra à Poudlard.
Ou du moins en Angleterre.
— C'est la pleine lune, ce soir, déclare-t-il.
— Oui. Je sais que Laura en a peur. Mais ne vous inquiétez pas, je suis là pour la protéger. Je lui ai promis.
— Oui, sauf que Laura n'est pas là.
Cette fois, Severus perd patience et s'énerve :
— Je croyais qu'on l'avait obligée à venir ici pour la protéger de la pleine lune et de l'Appel qu'elle entend. Au lieu de cela, vous l'envoyez loin d'ici, seule, dans un endroit hostile. Vous voulez la protéger ou vous voulez sa mort ?!
Edward perd son sourire suffisant face à la rage qui anime Severus. Il baisse la tête et bredouille :
— Je... je ne choisis pas. C'est le directeur.
— Dans ce cas, je veux le voir !
— Le directeur est un homme très occupé.
— Le directeur est disponible, déclare une autre voix.
Edward et Severus se retournent. La jeune sorcière est de retour.
— Rebecca Stone ! Vous devriez être dans votre chambre !
— Je sais, professeur, mais il voulait voir le directeur, répond-elle en pointant Severus du doigt.
— Bien, filez dans votre chambre, maintenant !
Elle ricane mais obéit néanmoins.
Les deux sorciers gravissent plusieurs étages avant de débarquer dans le bureau du directeur, occupé à lire des parchemins jaunis par le temps.
— Bonsoir, professeur Rogue, dit-il en levant les yeux. Je suis surpris de votre visite, Dumbledore ne m'a pas prévenu.
— Parce qu'il n'est pas au courant.
Le directeur lève un sourcil, surpris, et repose sa plume dans son encrier. Il invite Severus à s'assoir et croise les doigts sur la table.
— Je vous écoute. Qu'avez-vous à me dire ?
— Je viens voir Laura Potter. Votre collègue vient de m'apprendre que vous l'avez envoyée en mission en Alaska, est-ce exacte ?
— Oui.
— Le soir même de la pleine lune ?
— Oui. Je pensais que cela ne poserait pas de problèmes.
— Pas de problèmes ? explose Severus, agacé. Elle redoute ces nuits-là ! Une ancienne puissance magique la poursuit ! Je pensais qu'elle avait été envoyée ici pour en être protégée !
— Albus Dumbledore ne m'a jamais dit que c'était pour cela qu'elle venait ici.
— Alors que vous a-t-il dit ?
— Deux choses : il veut que Potter développe ses pouvoirs au maximum de leur potentiel et qu'elle mûrisse. Et la deuxième chose...
— Oui ?
— Il ne voulait pas qu'elle côtoie certaines personnes car, selon lui, ces personnes peuvent la gêner ou la mettre en danger.
— Quelles personnes ? s'inquiète Severus.
— Vous-Savez-Qui et...
Il se passe la langue sur les lèvres avant de soupirer et de souffler à mi-voix :
— Vous, professeur Rogue.
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