ღ Chapitre 11 - Tromsø (Partie 2) ღ
— Bjorn, un grand merci pour ton hospitalité. Le cadre est à couper le souffle : nous ne pouvions pas rêver mieux ! s'exclame Charlie, sur un ton enthousiaste.
— Tout le plaisir est pour moi. Cette expérience devrait rester gravée dans vos esprits longtemps !
— Je n'en doute pas. J'ai hâte de découvrir de visu ces aurores boréales dont on parle tant. Je dois d'ailleurs filer ; les garçons m'attendent.
Prête à atteindre la porte, elle se retourne à l'entente de son nom.
— Et, Charlie ! Encore merci de vous être joints à moi pour le dîner. Bonne nuit !
— Bonne nuit, conclut-elle, avant de refermer derrière elle.
Désormais enveloppée par l'obscurité de la nuit tombante, elle presse le pas. La température déjà fraîche à leur arrivée semble avoir encore baissé de plusieurs degrés Celsius. Frissonnante, elle remonte la fermeture éclair de son manteau épais et réajuste son écharpe.
Allez, Charlie. Tu peux le faire, s'encourage-t-elle par la pensée.
Prenant soin de bien poser les pieds à plat sur la terre durcie par le froid, elle parcourt les quelques mètres restants qui la séparent d'un des lavvo mis à leur disposition. Les volutes de fumée qui s'échappent du conduit d'aération de l'appareil de chauffage et s'élèvent dans le ciel dégagé la rassurent. Ses amis doivent être déjà installés douillettement !
Souhaitant elle aussi en profiter, elle prend une grande inspiration avant d'entrer et ouvre finalement la porte.
— Viens par là, Bambi. Le spectacle devrait bientôt commencer !
Se frayant un chemin jusqu'à Gabriel, elle se familiarise avec les lieux. Entouré de quatre couchettes, le poêle à bois se dresse majestueusement au milieu de la petite habitation. Bordé de murs en bois clair, le toit en verre leur permettra, sans l'ombre d'un doute, de ne rien louper de ce phénomène extraordinaire.
— Vous ne pensez pas qu'on verra mieux dehors ? s'enquiert soudain Lars. On pourrait s'enrouler dans les couvertures que nous a laissées Bjorn et prendre des photos.
— C'est maintenant que tu le dis ? bougonne Charlie, qui vient d'arriver tout juste dans le fond du lavvo. Malgré tout, je pense que c'est une bonne idée. J'aimerais beaucoup immortaliser le moment pour garder des souvenirs !
— Bon, alors on y va ! J'ai repéré un joli coin en arrivant tout à l'heure. Suivez-moi ! suggère Gustav.
En file indienne, ils sortent de leur logement si typique et gagnent le fameux lieu. Même les Norvégiens ont hâte d'admirer ces sublimes phénomènes ! Charlie, elle, ne tient plus en place. Elle se trémousse sur le rocher qui, malgré son long plaid tout doux, lui gèle déjà le postérieur.
Entourée de ses fidèles gardes du corps, Ruben et Gabriel, elle ne quitte pas des yeux la voute céleste.
— Bjorn nous autorise à allumer un feu de camp. Apparemment, nous sommes au bon endroit pour en faire un ! s'exclame Lars, qui revient de la maison du propriétaire.
Un plateau sur lequel repose des tasses de chocolat chaud ainsi que des chamallows entre les mains, il le dépose sur la surface plane d'une pierre.
— Parfait ! On aura un peu plus chaud, s'enthousiasme Gustav. Tu sais où on peut trouver du bois ?
— Le proprio rapplique avec des branches et des bûches. Il ne nous reste plus qu'à attendre, il ne devrait plus tarder.
Et, comme s'il avait été entendu, Bjorn arrive les bras chargés de ses trouvailles et commence à disposer le tout bien comme il faut.
— Avec ça, vous devriez apprécier d'autant plus cette captivante féérie ! Bonne soirée les jeunes ! s'exclame-t-il, après avoir allumé le feu à la création éphémère qu'il a dressée pour eux.
— Bonne soirée à toi aussi, Bjorn ! Promis, on ne t'embête plus !
Un sourire chaleureux sur le visage, il leur adresse un dernier signe de la main et s'éclipse, cette fois-ci pour de bon, dans son chalet en bois.
Les aurores boréales ne devraient plus tarder maintenant. Ce doit être l'affaire de quelques minutes tout au plus !
Ou peut-être pas finalement...
Ça y est !
Des traînées de couleurs dansant dans le ciel font leur apparition. Le vert fluorescent semble se propager au fur et à mesure du contact entre les gaz – l'oxygène et le nitrogène – présents dans l'air.
C'est sublime !
La bouche ouverte d'émerveillement, Charlie se rappelle soudain qu'elle avait prévu de prendre des clichés pour immortaliser cette curiosité lumineuse atmosphérique si particulière.
Rien que pour elle, Lars a mis en place un appareil photo professionnel qui repose sur un trépied. Il s'est même activé à faire quelques réglages pour que le rendu soit époustouflant. La technique de Charlie devra être irréprochable. Toutefois, en tant que véritable passionnée de photographie, la pose longue* n'a pas de secret pour elle.
— Mitraille donc ces merveilles avant qu'elles ne disparaissent, lui conseille Ruben.
Charlie semble déjà être partie dans son monde. Elle ne l'entend plus. Avec sérieux, elle pointe l'objectif vers le festival de couleurs et s'applique à tirer le meilleur de l'objet qu'elle utilise.
C'est déjà fini...
Encore sous le charme de ce qu'ils viennent d'admirer, Gabriel, Lars et Gustav prennent quelques instants pour savourer ces visions de rêves avant de se redresser.
— Bon, vous venez ? On va se coucher, nous...
— Je préfère rester encore un peu ici, si ça ne vous dérange pas, marmonne Charlie, la moue ennuyée.
— Moi aussi j'aimerais profiter encore un peu du feu de camp, murmure presque Ruben.
— Ne faites pas de bêtises tous les deux ! blague Lars d'un regard plein de sous-entendus.
Écarlates et éberlués par la boutade de leur ami, Charlie et Ruben bafouillent des paroles inintelligibles.
— N'importe quoi ! parvient à articuler Charlie finalement. Vous nous connaissez...
— Justement ! plaisante Gustav.
Grommelant dans sa barbe, Charlie les observe s'éloigner.
— Tu as une réputation de tombeur ? se risque-t-elle, le cœur battant à tout rompre dans sa poitrine.
— Non, du tout. Ils aiment juste me taquiner... Et toi ?
— En vingt-trois ans, je n'ai eu que deux copains. Tu sais, je ne suis pas le genre de fille qui plaît... se confie-t-elle, le nez baissé.
— Ne sois pas si dure avec toi-même, Charlie... Je suis persuadé que tu affoles la gente masculine...
— Je suis juste réaliste... articule-t-elle avec difficulté en raison du froid qui s'engouffre perfidement sous son plaid.
Remarquant qu'elle commence à grelotter, Ruben s'approche timidement d'elle. Puis, tout en douceur, il l'attire à lui et l'enveloppe en plus dans le sien.
Un peu de chaleur supplémentaire n'est pas de refus !
La tête reposant contre son épaule et les mains autour de sa tasse de chocolat chaud, elle ne pipe mot.
— Tu te sens mieux ?
— Oui, merci Ruben. Tu es un vrai radiateur à toi tout seul !
Amusé par sa façon de parler, il ne peut s'empêcher de resserrer un peu plus son emprise autour d'elle. Il aimerait tellement la protéger. Elle, qui semble aussi fragile qu'un oisillon...
*pose longue : Il s'agit d'une technique photographique permettant de donner un côté artistique à ses photos. L'objectif de départ est de ralentir, voire de flouter totalement, un sujet en mouvement. Il peut s'agir de personnes, de nuages, de voitures, cascades, un ciel étoilé, un cours d'eau, la mer, etc. De nuit, cela permet de transformer les sources lumineuses mobiles en trainées lumineuses.
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