Chapitre 3
Nathan.
C'est insupportable. La foule, le bruit, les gens !
Je ferme les yeux, à la recherche d'un semblant de calme intérieur mais bien sûr, Logan ne me laisse pas faire. Aussi bavard qu'attachant, il n'en rate jamais une pour débiter mots, sur mots, alors qu'on pourrait tout aussi bien profiter de la présence des uns et des autres dans un silence chargé de messages bienveillants et amicaux.
— Qu'est-ce que tu nous fais, là ? Tu la joues mystérieux et pensif, maintenant ? C'est ça ta nouvelle stratégie d'attaque pour attirer les minettes dans ton lit ?
Je dévisage mon ami de haut en bas, une envie de l'ignorer et de me fendre la poire.
Installés à la cafétéria, entourés de notre bande habituelle, je sens tous les regards se braquer sur moi, un jugement perceptible au fond de leurs regards scrutateurs. Au fil de ces quatre dernières années, peu importe la manière, parfois douteuse, pour arriver là où ils en sont, chacun des membres de notre bande hasardeuse a aujourd'hui trouvé sa moitié. Et malheureusement pour moi, ils se sont tous accouplés entre eux.
Brandon avec Ludy. Mais leur relation date d'avant que je ne les rencontre à la Fac alors eux, je ne leur en veux pas trop.
Amy avec Liam. Je ne comprends toujours pas comment ce dernier est passé de coureur de jupons affirmé à canard complètement gnangnan pour une Amy qui a laissé sa carapace de garce et de diva au profit d'une âme agréable et attendrie.
Logan avec Lylah. Le couple le plus mignon que j'ai eu à voir, je dois bien le reconnaître. Mais si je les trouve beaux à en mourir, leurs continuelles montagnes russes me donnent le tournis et leurs conflits sont si denses et si fréquents que j'ai tout simplement l'impression de faire partie de leur couple alors même que les relations et l'engagement représentent tout ce que je fuis comme la peste.
Et enfin, Jared et Hannah. Un couple fort que j'admire car ils ont fait preuve d'un courage sans pareil pour affronter leur passé et accepter de se donner une chance autant à l'un qu'à l'autre. L'aura de leur amour et leur complicité si flagrante qu'elle se remarque d'un simple coup d'œil, me donneraient presque envie de trouver ma moitié à moi aussi. Mais c'est comme ça : je suis un pessimiste avéré lorsqu'il s'agit de relations amoureuses.
— Pas besoin de stratégie en ce qui me concerne, c'est tout naturel chez moi.
Je balance cette phrase presque malgré moi dans un clin d'œil et me fais huer de Logan qui me brandit sa désapprobation face à mon arrogance.
— Cherche à te caser, mec, me dit Logan en haussant les épaules.
Il me déclare cette phrase de manière désinvolte mais si je m'attarde au doré de ses yeux marrons, je comprends que dans ses mots se cachent une sollicitude sincère. Je me demande seulement pourquoi, il tient tant à ce que je ne m'engage qu'à une seule personne alors que je peux si facilement vivre une vie légère et marrante, sans prise de tête et sans drame en courtisant femmes après femmes et même des hommes, parfois.
Avant de devenir le centre de l'attention de mes amis et de rentrer dans une séance de thérapie sur le pourquoi quant à ma réticence à m'engager sérieusement, je file en quatrième vitesse en direction de mon prochain cours.
S'engager ? Sérieusement ? Très peu pour moi.
Je suis loin d'être la figure du bad boy inaccessible tellement froid et sombre que d'un simple coup d'œil, on a l'impression qu'il te brisera. À vrai dire, je suis tout le contraire. Carrément accessible, je suis tellement sociable que je connais les trois quarts du campus. Je véhicule et traîne derrière moi, une aura chaleureuse et charmeuse qui attire comme des aimants les gens autour de moi.
Même lorsque je veux être seul.
Surtout quand je n'arrive plus à supporter le monde qui m'entoure.
Comme à l'instant. Trop de bruit dans la cafétéria. Trop de monde, aussi. Trop de perturbations, m'empêchant de penser calmement afin d'analyser mes états d'âme.
Dans le calme de l'amphithéâtre encore vide pour les dix prochaines minutes, je prends place sur l'un des sièges rabattables. Et enfin, je peux laisser mon esprit divaguer en paix dans les souvenirs qui ne font que me parasiter depuis cinq jours.
Chinara a foutu la merde, putain.
Trois ans que je ne l'avais pas vu. Grâce à ses story Instagram, j'arrivais à suivre ses aventures, en Angleterre et en Corée du Sud. Curieuse de nature, elle n'avait tout simplement pas pu s'empêcher de participer aux programmes d'échange de la Fac, ce qui m'avait fait beaucoup de peine.
Pourquoi voulait-elle s'éloigner de moi ?
Je pensais qu'on s'entendait bien... Mais elle est partie. Et si je savais qu'elle était revenue depuis plus de quatre mois, je ne m'attendais vraiment pas à tomber sur elle, aussi près de chez moi. J'étais persuadé qu'elle faisait tout en œuvre pour m'éviter.
Et parce qu'une surprise ne vient jamais seule, Chinara était en larmes.
Complètement démunie et dépossédée de toutes forces, son chagrin, tellement perceptible que je le ressentais dans chaque recoin de mon corps et au plus profond de mon cœur, m'a désarmé, moi aussi.
Mais je me devais de me montrer fort. Car après tout le temps passé, tout le mal causé, elle avait quand même décidé de s'en remettre à moi.
Moi.
Alors que je lui ai fait du mal et que je le savais.
Même si je l'ai repoussé encore et encore, quand bien même j'avais envie d'elle.
Plus que d'avoir envie d'elle, c'est mon âme toute entière qui réclame sa présence. Mais ma raison, trop bornée, ne l'acceptera jamais.
Moi ? M'engager ? Auprès d'une seule fille ?
Jamais.
Même si elle est si belle qu'elle me hante et me tourmente. De par ses yeux d'une obscure clarté qui te poignardent avec sincérité l'étendue de ses émotions, si bien que j'en reste à chaque fois troublé, presque envouté, carrément à la merci de son regard de biche. Et c'est sans compter son nez et ses pommettes taillé à la perfection qui donnent un charisme fou à son visage. On dirait une poupée. Une poupée à la peau sucrée par un glaçage au chocolat et à la crème de noisette, décoré par une bouche en cœur gourmande, aussi rose que mon fruit préféré : la framboise.
Et oui, j'ai envie de la lécher, de la manger, de la faire mienne jusqu'à n'en rien laisser pour personne.
Mais je serais alors le plus gros hypocrite de ma génération.
Comment pourrais-je avoir le culot de ne serait-ce que ressentir l'envie de la faire mienne alors que je me donne à tout le monde ?
Plus jeune, plus vieille, en couple ou célibataire, brune, blonde, en chair ou en manque de forme, peu importe. J'aime me perdre dans les bras d'une femme, quelques fois d'un homme, dans des actes égoïstes et personnels, recouvert d'un voile illusoire d'amour.
Seulement le voile qui nous enveloppait avec Chinara devenait de plus en plus opaque, de plus en plus réel. Plus je passais du temps avec elle, moins j'avais envie de me donner à d'autres.
Et ça ne me ressemble pas.
Chinara a empoisonné ma manière d'être, ma façon de raisonner, d'un simple regard, d'un simple sourire. Un regard doux et empathique, avide de me voler tous mes secrets. Un sourire si apaisant que j'ai fini par lui en céder quelques-uns, finalement.
La douce emprise que Chinara avait sur moi, ne me plaisait vraiment pas. Car si tant est qu'elle m'était salvatrice, je sais aussi qu'elle m'écorchait le cœur d'une manière inexplicable. Je me devais d'y mettre fin, quitte à la blesser. Et tant pis si ça devait me faire souffrir moi aussi, dans le process.
Ça fait cinq jours que je l'ai trouvé à quelques kilomètres de chez moi. Cinq jours que nous nous sommes mélangés dans des actes qui ont refait battre mon cœur dans des sentiments que je me suis toujours interdit d'identifier. Cinq jours que je n'arrive tout simplement plus à me débarrasser du souvenir de ses lèvres charnues sur mon corps tout entier.
Désir, nostalgie, empressement, manque...
Putain, elle m'avait tellement manqué !
Avidité, mélancolie, luxure, soulagement.
Soulagé, tellement soulagé de la retrouver, enfin. De la sentir contre moi, de la sentir en moi.
Mon parfum sur son corps m'a rendu fou et mon nom dans sa bouche m'a carrément fait vriller.
Qu'est-ce qui est si différent chez Chinara des autres filles, qui me met tant hors de moyens ?
Dans mes bras, elle me tue.
Enfouis au fond d'elle, je me sens revivre.
Et alors que je me suis endormi, l'âme en paix, et le cœur apaisé, à mon réveil, je ne saurais identifier quoi exactement mais, quelque chose en moi s'est brisé.
Elle n'était plus là.
Elle m'avait abandonnée.
Et encore une fois, comment aurais-je pu avoir le culot de lui en vouloir ?
C'est moi qui l'ai abandonné le premier.
Me battre pour elle ?
Lui courir après ?
Lui envoyer ne serait-ce qu'un message ?
Je suis beaucoup trop lâche pour ça. Je ne suis pas un héros. Tellement loin d'être un prince charmant...
Moi, je suis un putain de dégonflé, effrayé par l'amour et complètement contre l'engagement.
Ce qui ne me donne pas le droit de m'intéresser à elle, pas même de lui demander pourquoi son âme était en sang au point de pleurer toutes les larmes de son corps.
Putain, pourquoi pleurait-elle ?
Ça me tue de ne pas le savoir. Depuis cinq jours, je me tracasse les méninges en théories toutes plus farfelues les unes que les autres pour essayer de répondre à cette question. L'hypothèse qui me fait le plus mal, c'est bien celle qui inclut un autre homme.
Pleurait-elle sous les mauvaises actions de quelqu'un qui aurait malmené son cœur ? Encore ?
C'est en devenant amis que nous sommes devenus amants et Chinara m'a parlé des hommes qu'elle a connu avant moi.
Chinara : une éternelle malchanceuse en amour. Et ça n'est certainement pas moi qui allait changer sa malédiction, au contraire. Mais elle me faisait tant de bien. Et je pensais naïvement qu'on pourrait profiter du moment présent sans penser à l'avenir.
Naïf j'étais, oui. Car c'est moi qui ai tout terminé lorsqu'elle m'a déclaré ses sentiments. Des sentiments si fort qui m'ont tout simplement effrayés. Mais j'étais prêt à les accepter si elle ne m'avait pas demandé en prime de carrément concrétiser notre relation et d'être entièrement dévoué à elle. Ça, je ne pouvais pas le lui céder. Je tiens à ma liberté plus que tout et elle voulait me la voler.
En trois ans, je pensais qu'elle avait fini par trouver ce mec prêt à se donner entièrement à elle. Ce mec qui aurait répondu à ses attentes et qui aurait été à la hauteur de tout l'amour qu'elle a à donner.
Chinara est indéniablement une personne qui mérite tout l'amour du monde. Elle a le cœur jusqu'au bout des doigts. Tellement soucieuse de faire le bien et surtout d'apaiser les âmes meurtries, que ce soit de simples inconnus ou encore ses plus chers amis, elle mérite plus que n'importe qui d'être traitée avec la même bienveillance. Et pour toutes ces qualités, je sais qu'elle est une âme facile à aimer. Voilà pourquoi je suis surpris de constater qu'elle ne partage sa vie avec personne.
Et si je suis sûr de cette affirmation, c'est parce que je sais que Chinara ne s'abandonnera jamais à la tromperie. Car elle en a subi les frais, et maintenant qu'elle sait comme la malhonnêteté de l'amour souille l'âme à vif, elle est tout simplement incapable de faire saigner le cœur de quiconque de la même façon.
Si seulement elle savait à quel point je ne la mérite pas, à quel point ma piètre personne ne vaut rien, elle cesserait de me considérer, de s'en remettre à moi...
Cette pensée m'effraie bien plus que je ne serais prêt à l'admettre. C'est Liam qui me ramène à moi en me tapant sur l'épaule tout en prenant place à côté de moi.
— Ça va, mec ? On dirait que tu as vu un fantôme ?
Ouais, le fantôme de la relation que nous avions avec Chinara me tue !
Près d'elle tout était plus simple, plus léger, moins difficile, tellement moins lourd à porter.
Chinara n'a jamais rien exigé de moi en fait, et je crois que c'est ce qui m'attirait le plus chez elle.
Que ça soit consciemment ou non, je sens bien que mon entourage attend de moi à ce que je sois toujours une source de bonne humeur. L'ami un peu marrant qui peut vite devenir amant. Celui qui saura trouver les bons mots pour instaurer un climat chaleureux et jovial. Et au diable mes propres sentiments dès lors que j'ai soudain envie de me retrouver seul, de fuir la foule, d'échapper aux discussions dénuées de fond, parce qu'alors je joue un rôle qui n'est plus le mien.
« Ça ne te ressemble pas ce silence, Nathan. »
« Fais-moi rire ! Embrasse-moi, chéri. Qu'est-ce qu'il t'arrive d'un coup ? »
«Qu'est-ce que tu nous fais, là ? Tu la joues mystérieux et pensif, maintenant ? »
Je suis condamné à être la personne qu'ils exigent que je sois, sans me laisser le choix. Et je suppose que c'est de ma faute. J'ai si longtemps mis un point d'honneur à profiter de la vie sans jamais laisser transparaître mes plus sombres sentiments que tout le monde a décrété que je n'en avais pas.
Tout le monde.
À l'exception de Chinara.
Elle n'a jamais attendu de moi que je me surmène à être quelqu'un que je ne voulais pas être et au contraire a toujours tout fait pour me mettre à l'aise en sa compagnie, tellement que son amitié m'a fait du bien avant de me charmer, de me séduire, de me rendre carrément fou !
Car elle est si belle que je ne pouvais tout simplement pas me contenter de ses accolades amicales.
Non.
Je voulais le plus intime de ses câlins, le plus précieux de ses baisers. Et je les ai eu, convaincu de pouvoir me débarrasser d'elle comme je le fais avec chacune de mes conquêtes.
Quelle blague !
Car non loin de la chasser, c'est moi qui l'ai retenue. Si fort, si longtemps que, forcément, elle s'est imaginée un avenir à mes côtés. Mais je suis aussi hypocrite que lâche. Et mon manque d'initiative pour nous donner une chance, l'a indéniablement blessée, je le sais.
— Sérieux, Nath' tu me files la trouille. Ça fait cinq jours que t'es dans la Lune.
Je pousse un soupir, agacé, fatigué. J'ai bien envie de lui dire de me laisser tranquille, de me foutre la paix et d'aller se faire voir, tiens, tant qu'on y est. Mais ça serait défouler ma frustration sur lui alors qu'il n'est en rien responsable de mes tourments de l'âme. Je ne peux m'en vouloir qu'à moi-même et c'est ça le plus frustrant.
— Ça fait cinq jours qu'aucune femme ne m'a offerte sa fleur, si tu vois ce que je veux dire. Je me sens seul.
Une vérité déguisée. Un putain de mensonge, en réalité.
J'ai remis les pieds dans le jardin intime de Chinara, habillé de plantes verdoyantes, parsemées des plus belles tulipes, des plus belles pivoines et orchidées, arborant de majestueux arbustes, digne du jardin secret d'Hauru dans Le Château Ambulant, que tous les autres prés ne me semblent être que d'immondes terrains vagues où pullulent de la mauvaise herbe.
— Case-toi une bonne fois pour toute. Ça réglerait une bonne partie de tes soucis.
— Plutôt crever.
Liam a sûrement raison. Mais je lui en veux plus qu'aux autres de me rabâcher l'idée de me poser sérieusement dans une relation. Lui, plus que n'importe qui, devrait savoir pourquoi j'y suis aussi réticent. Lui, plus que n'importe qui, devrait me comprendre et surtout prendre mon parti.
— Et tu mourras seul, mon pote.
L'image d'une vitre brisée se matérialise sur la surface de mon cœur et ce dernier se met à saigner dans un cri grisant qui me perce aussi les poumons.
Je fusille Liam du regard. Ce connard qui me sert de meilleur ami depuis plus de douze longues années, ne me connaît pas si bien que ça, finalement. Et ça fait mal, putain. Personne ne me comprend au bout du compte.
Chinara te comprenait, elle. C'est toi qui l'as jeté.
Voilà que même mon moi intérieur me fait la guerre.
— Va te faire voir, Liam.
Je me lève d'un bond, prêt à carrément sécher le reste des cours de la journée, mais Liam me rattrape par le bras, pas intimidé pour un sou devant mon excès de colère.
— Peut-être un autre jour mais d'abord je veux m'assurer que tu seras bien là ce soir.
Je le dévisage de toute ma hauteur. Du haut de mon mètre quatre-vingt-sept, il me semble si petit assis sur son siège.
— Quoi, « ce soir » ? lui demandé-je la voix remplie de mépris.
— Je fête mon anniversaire dans un restau'.
J'ai l'impression de me manger une gifle imaginaire comme pour me réveiller d'une transe qui m'aurait coupé du monde réel. Vite, je sors mon iPhone de la poche arrière de mon cargo noir afin de consulter la date d'aujourd'hui.
Vendredi 13 septembre.
Une date qui n'augure rien de bon même si c'est l'anniversaire de mon soi-disant meilleur ami. Non pas que je crois à ces conneries de superstitions mais je préfère rester sur mes gardes. Je m'attends au pire des drames, à une catastrophe certaine.
— Chinara sera là ?
C'est à Liam de soupirer tout en fronçant les sourcils.
— Commence par me souhaiter un joyeux anniversaire avant de prévoir ton prochain coup d'un soir.
C'est bien mon meilleur pote et pourtant il est incapable de comprendre que j'estime Chinara bien au-delà d'une simple bonne partie de jambes en l'air. Pour lui, Chinara, c'est son amie. La seule fille avec qui il a réussi à tisser une amitié presque aussi forte que... la nôtre ?
Il l'a rencontrée en première année durant un programme d'échange en Espagne. Il faut croire que passer plus de la moitié d'un semestre à l'étranger, coupés de leurs familles et amis, les a rapprochés d'une manière qui m'échappe. Ils ne se connaissaient pas et aujourd'hui on dirait presque des frères et sœurs, aussi souvent en train de rire que de se chamailler.
Ma rencontre avec Chinara était inévitable. Et Liam m'avait mis en garde.
« Pas touche à Chinara. Je tiens vraiment à elle. Je n'ai pas envie de ramasser les pots cassés de tes merdes si jamais tu la blesses. »
Mais je l'ai blessée.
Encore une chose d'inévitable.
Alors je ne lui ai jamais raconté la profondeur de la relation que j'ai eu avec Chinara. Pas même les sensations qu'elle me faisait ressentir de par un simple regard ou à travers un chaste sourire. Et je suppose que Chinara a fait de même. Car Liam n'a l'air de se douter de rien.
— Joyeux anniversaire Liam. Désolé d'avoir zappé.
J'incite Liam à se lever avant de lui gratifier d'une accolade suivie d'une poignée de main, plus par automatisme que par réelle culpabilité. On se rassoit tous les deux, je sors mon ordi de mon sac tandis qu'il sort de quoi écrire du sien.
— Ouais, Chinara sera là.
Je fais abstraction de mon cœur qui loupe un battement, trop surpris de constater que c'est l'irritation qui enveloppe la voix de Liam et non pas l'excitation. Il devrait être heureux de la savoir présente ce soir mais ça n'a pas l'air d'être le cas.
— Qu'est-ce qu'il y a ? lui demandé-je alors.
Les sourcils de Liam se froncent sur son front et forment des plis de contrariété. Il claque la langue, soupire, cligne des yeux à plusieurs reprises avant de me regarder droit dans les yeux, une incompréhension perceptible sur chaque recoin de son visage.
— Elle est rentrée de la Corée du Sud en mai.
Je le lorgne avec attention l'invitant à aller au bout de son explication.
— On est en septembre.
— Oui, et ? demandé-je légèrement à bout de patience, ne comprenant pas où il cherche à en venir.
— Ça sera la première fois qu'on se voit depuis son retour, ce soir.
Je sens la frustration et le chagrin envelopper son être. Tandis que l'embarras se met à recouvrir le mien.
C'est sûrement ma faute.
Si j'avais encore un doute sur le fait de savoir si, oui ou non, Chinara cherchait à m'éviter, j'en ai maintenant la certitude.
— Ne le prends pas mal, commencé-je dans le but de le rassurer et de me débarrasser de ma culpabilité, elle traverse peut-être quelque chose de très dur qui l'empêche de te consacrer du temps.
Un éclair vivace traverse ses yeux noisette assortis à son teint chocolat. Il plisse les yeux en même temps que ses lèvres généreuses, un air suspicieux collé au visage. Le rouge me monte aux joues mais je sais que si je détourne le regard maintenant, ça accentuera les soupçons que Liam semble déjà me porter.
— Vous vous êtes vus ? me demande-t-il prudent.
Je m'empare de mon téléphone et fait semblant de défiler les Story Instagram avant de tomber sur celle de Chinara.
— Non, lâché-je de manière détachée, je dis ça car elle est moins active ces temps-ci sur les réseaux, non ?
Je lui montre mon écran qui renvoie l'image d'une boisson Colombus - ma main à couper que c'est un chaï latte - et d'une main manucurée d'un camaïeu de couleurs brunes et beiges à l'effigie de l'automne à venir. Les doigts de Chinara sont recouverts de bagues argentées de toutes tailles et sur la photo prise de haut, dévoilant sa boisson recouverte de chantilly posée sur une table en bois aux côtés d'un carnet noir et de son ordinateur portable, on peut lire en lettres italiques : « back to my campus for my last year ».
La photo est parsemée ici et là de GIF et d'emoji. Chinara manie l'art de faire des Story et des post dits « Instagramable » à la perfection.
Liam s'empare carrément de mon téléphone, l'air de vouloir résoudre une énigme dont il peine clairement à trouver les indices. Je lui reprends mon iPhone des mains et le verrouille de peur de recevoir une notification qui ne lui donnerait que plus de matières pour me charrier, avant de lui expliquer :
— La plupart des cinquièmes années ont repris les cours il y a trois semaines. Or, il n'y a qu'aujourd'hui que Chinara poste cette story pour introduire le début de cette nouvelle année.
Liam desserre les sourcils mais en lève un, m'incitant à poursuivre.
— Soit, dis-je en levant mon index, elle a si peu de temps pour elle qu'elle n'est plus très active sur Insta, son réseau de prédilection, hein, je tiens à le préciser ! Soit, ajouté-je en insistant de mon majeur, elle a raté trois semaines de cours et là encore, ça n'est pas normal.
L'air suspicieux de Liam reprend forme dans ses yeux bruns avant de déclarer du bout des lèvres :
— T'as l'air de t'intéresser à elle.
Ne touche pas à Chinara !
Sa désapprobation est telle que je l'entends presque me crier ces mots alors qu'il ne fait que me scruter et m'analyser comme s'il cherchait à me voler mes pensées.
— Bof, j'essaie juste de te faire comprendre que son comportement n'est peut-être pas à prendre personnellement. Tu lui as demandé directement ce qu'elle avait ?
— Non, mais...
— Commence par ça, balancé-je, lui coupant sèchement la parole.
Tandis que l'amphithéâtre se remplit et que quelques filles et garçons me font de l'œil, Liam se pince les arrêtes du nez tout en poussant un soupir.
— Je trouve ton raisonnement tellement cohérent que ça m'énerve. D'où je me prends des leçons par un mec incapable d'entretenir de vraies relations ?
L'enfoiré.
Pourquoi décide-t-il de me torturer aujourd'hui ?
Il l'a peut-être oublié mais avant de sortir avec Amy, il n'était pas bien différent de moi. Il s'est ouvert à l'amour et ça l'a libéré de ses démons et c'est tant mieux pour lui. Néanmoins, tout ce mépris qu'il m'assène, et le fait de me prendre de haut ne me donne qu'une envie : le faire taire.
J'ai besoin de lui prouver que je saurais être heureux en vivant ma vie sans me donner à personne.
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on se retrouve bientôt pour la suite ❤️❤️
on n'oublie pas le daily commentaire et la daily petite étoile 🥹❤️ on se retrouve vite sur mon insta @booky_clemy pour la révélation des personnages!!
en attendant, je peux déjà vous montrer Liam et Logan nan???
allez!!
pleins de bisous ❤️❤️❤️
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