13. Les vieilles connaissances
Yves hésitait à épier Célia, dont chaque éclat de rire le faisait frémir pas parce qu'elle lui plaisait, puisque c'était bien évidemment le cas, mais parce qu'il signifiait qu'elle s'amusait follement avec celui qui lui tenait compagnie à l'autre bout de la salle ; le même individu qu'elle avait accueilli dans le hall d'entrée et qui attisa, dès lors, la jalousie du jeune stagiaire. Pour se changer les idées, celui-ci avala une goulée du vin qu'il y avait dans son verre. « Quelle fête ringarde ! » se plaignit Ian, assis devant lui. Ils avaient tous été placés à la même table, Célia ne les ayant pas encore rejoints depuis la rencontre qu'elle avait faite en bas de l'escalier. Natasha, à côté d'Yves, releva sa joue de la main sur laquelle elle l'avait déjà posée afin de mieux fixer son adversaire favori : « Personne ne t'a forcé à y venir, lui dit-elle, tu n'avais qu'à faire comme Jolie et te trouver une bonne excuse ! » Il ne riposta pas. Natasha n'avait pas envie de l'admettre, mais pour la première fois de sa vie elle était d'accord avec Ian. Aucun des trois ne semblait apprécier cette fête en réalité. Elle regarda en direction de la table où était assise Célia, déçue peut-être de ne pas avoir reçue de vanne en retour, et soupira sans particulièrement s'adresser à l'un d'entre eux : « Au moins Célia, elle, semble beaucoup s'amuser ! » Encore une fois, Yves avait repris du vin. « Tu as l'air de beaucoup apprécier ce vin ? lui fit remarquer Ian après l'avoir observé.
— Oh ! trésaillit-il, surpris. Je ne le bois pas vraiment, c'est juste comme ça, aujourd'hui.
— Eh bien ! Je préfère la bière, normalement, mais tu me donnes envie d'essayer Yves. » Natasha leva les yeux au ciel, tracassant de ce fait celui qui venait de parler.
« Yves ! fit une fille en robe bleue qui passait derrière Ian.
— Imen c'est toi ? s'étonna Yves en se levant.
— Bonsoir ! » La ravissante jeune femme se précipita vers lui. Ils s'enlacèrent. « Mon Dieu tu as vraiment grandi on dirait ! dénota-t-il, en la détaillant de plus près.
— Arrête Yves tu me gênes, rit-elle en se cachant l'œil gauche. Ça fait seulement un an qu'on ne s'est pas vus !
— Oui mais tu n'es plus la petite fille de la dernière fois.
— Ne dis pas ça, je suis toujours une petite fille. » Il émit un léger rire. « Qu'est-ce que tu fais à cette fête d'anniversaire ? Et Mariam, elle est là elle aussi ?
— Non non, elle n'est pas là. Je suis ici en tant que stagiaire de ce cabinet.
— Stagiaire oh la la ! s'extasia ladite Imen. Il ne me reste donc que..., sept ans avant de pouvoir me retrouver à ta place, Dieu du ciel !
— Ah ah ! ricana Yves en lui montrant ses compagnons de table. Viens que je te présente, Imen voici Ian et Natasha, deux des personnes avec lesquelles j'effectue mon stage et Ian, Natasha, voici ma nièce Imen.
— Enchantée ! dit sèchement Natasha.
— Enchantée ! lui rendit Imen avec un grand sourire, n'ayant peut-être pas perçu son attitude ou ayant préféré peut-être se montrer aimable malgré tout.
— Content de te rencontrer, s'exprima Ian. Es-tu la fille de son frère ou celle de sa sœur ?
— Ah non non non ! réfuta-t-elle, amusée par cette hypothèse. Sinon ça voudrait dire que sa sœur m'a eu à un an !
— En fait, expliquait Yves en souriant, il n'y a que les liens du mariage qui sont à la source de notre parenté. L'époux récent d'une de mes tantes est le beau-frère de sa grand-mère.
— Ah, d'accord. » Ian la dévisageait silencieusement, ce que son oncle par alliance vit d'un mauvais œil. « Tu entends Yves, s'écria-t-elle en lui frappant le bras droit, ça ne te donne pas envie de danser la Salsa cette chanson ?
— Oui, répondit-il, ça me rappelle de nombreux souvenirs.
— Allons danser s'il te plait, il y a des gens qui le font !
— Je vois que tu aimes toujours autant danser Imen ?
— Oui et j'aime encore plus danser avec des partenaires aussi doué que toi, on y va ? » Il tenta de résister, mais Imen le tira si fort qu'il dut s'avouer vaincu. Yves se laissa guider par elle jusqu'à la piste et sa main jointe à la sienne, suivie d'un bon contact visuel, ils se mirent à frétiller au rythme de ce vieux classique de la musique mexicaine qui passait. Certaines personnes les regardèrent, ignorant presque ceux qui dansaient déjà avant eux. Elles étaient surprises, en particulier les membres du cabinet. Aucun d'entre eux ne pouvait se douter que celui qu'ils voyaient à peine remuer les lèvres, était capable de danser comme il le faisait en public ce soir.
Yves et Imen reproduisaient des pas digne d'un couple d'étudiants qui prendrait des cours sur le sixième art, et ça se voyait que chacun des deux était fier d'avoir l'autre pour cavalier. Ian et Natasha les observaient également, avec attention, quand Célia arriva à leur table avec son compagnon de la soirée. « Bonsoir les amis, les salua-t-elle gaiement.
— Bonsoir Célia, l'accueillit Ian. Tu es magnifique ce soir !
— Ça veut dire que je ne l'étais pas tout ce temps ? » Ian et le garçon qui se tenait à côté d'elle sourièrent à sa phrase tandis que Natasha avait produit un simple rire feint. « En fait lui c'est Ian et elle c'est Natasha. Et voici Léo, un ancien ami à moi.
— Un ancien ami ! s'étonna celui-ci. C'est comme ça que t'appelles tous les types avec lesquels tu es sortie ?
— Pourquoi crier qu'on était ensemble puisque je te rappelle que c'est toi qui as rompu ? rétorqua-t-elle (sans voir la surprise de Ian et Natasha) en lui donnant un coup de coude.
— Parce que tu l'aurais certainement fait si je ne m'étais pas décidé en premier, badina Léo. » Les deux autres paraissaient les trouver complètement anormaux elle et lui. « Enchanté Léo, dit tout de même Ian.
— Je le suis aussi ! fit-il en leur conduisant à lui serrer la main, à tour de rôle. Mais, Célia m'a dit que vous étiez cinq, pas trois ?
— C'est que Jolie n'a pas pu venir, pour des raisons personnelles. Quant à Yves... »
Ian pivota vers la piste de danse et les autres décidèrent de regarder dans la même direction que lui. Célia fut alors abasourdie, apercevant celui qui lui avait offert le splendide vêtement qu'elle portait en face d'elle. Au milieu de ces milliers d'inconnus, il avait les yeux brillants et l'air heureux comme jamais elle ne l'avait vu auparavant. Ou plutôt, comme jamais elle ne l'avait vu avec elle. « Whoaw, s'exclama Léo, il bouge plutôt bien ses hanches votre Yves !
— Bof, se blasait Ian, moi je trouve que c'est assez vulgaire ce genre de danse !
— Dis plutôt que tu es jaloux parce que tu ne saurais pas faire pareil ! suspecta Natasha, le poussant par cela à la fixer avec un air exacerbé.
— Tu sais quoi Léo, débuta celle qui était venue avec lui, j'ai un peu chaud. Et si on sortait faire une promenade un moment ?
— À tes ordres, ma reine de la soirée ! »
Célia eut un sourire à peine visible et tourna les talons. Inquiet, Léo décida de la suivre sans prendre le temps de dire au revoir à Ian, ou à Natasha. « Ils sont bizarres tous les deux, déclara celle-ci après leur départ.
— Ne fais pas comme si de rien n'était toi, divergea Ian en la regardant droit dans les yeux. Qu'est-ce que tu essayes de faire au juste ?
— Je ne vois pas du tout de quoi tu parles ! répondit narquoisement Natasha.
— Je parle des insinuations que tu te mets à faire subitement sur ma prétendue jalousie envers Yves, et de cette tête que t'as faite quand j'ai décidé moi aussi de prendre du vin. » Elle reprit en minaudant une petite gorgée de la boisson en question. « Je ne m'y attendais pas, dit-elle avec supériorité. J'étais surprise, c'est ça.
— Surprise, par quoi ?
— Par le fait que quelqu'un comme toi puisse prendre du vin parce que je suis certaine que tu ne supporterais pas ; la bière, ça c'est plus ton truc selon moi !
— Attends attends, qu'est-ce que tu sous-entends par là ?
— Que tu ne pourrais pas prendre plus d'une bouteille de vin sans finir par t'enivrer Ian.
— Tu ne sais pas du tout de quoi tu parles gamine, ricana-t-il en s'appuyant sur sa chaise. C'est plutôt toi qui ne pourrais pas tenir plus d'une bouteille.
— Et tu parierais combien ? »
Il indiqua du regard qu'il acceptait ce défi implicite et une commande fut passée, tandis qu'Yves revenait seul de la piste de danse. « Alors, tu as arrêté de faire ton frimeur ? l'attaqua Ian en essayant, sans vraiment y parvenir, de changer cela en blague inoffensive. Et elle est où ta nièce ?
— Elle a dû rejoindre son père ; dit-il, bien qu'il fût mis mal à l'aise. Ils ont apparement décidé de s'en aller plus tôt que prévu. » Un serveur apporta deux nouvelles bouteilles de vin que Ian et Natasha ne tardèrent pas à récupérer. En ouvrant la sienne, le jeune homme vit son collègue examiner la salle. « Si c'est Célia que tu cherches, enchérit-il à son intention, sache qu'elle vient de sortir avec ce type qui lui tenait compagnie, ce type qui n'est d'ailleurs nul autre qu'un de ses ex.
— Et j'ai comme l'impression qu'ils vont de remettre le couvert ce soir ! gloussa Natasha, en buvant de sa main droite un verre au bord du débordement total.
— Non ce n'est pas ça, mentit Yves, je voulais juste voir si Imen était déjà partie. »
Ian hocha la tête, tout en avalant lui aussi un verre presque plein. Dépité, Yves se rassit à sa place en reprenant ce même geste qu'il exécutait, avant la venue d'Imen.
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