12. Les premières heures à l'hôtel
Yves se préparait à monter dans le bus qui devait le conduire lui et les autres à l'hôtel Baie de palmier, se démarquant ainsi de la plupart des employés qui eux, attendaient à l'extérieur du cabinet. Pourtant, quand il faillit grimper à l'intérieur même du véhicule, il fut devancé par Natasha. Elle était apparemment déterminée à le surpasser dans tous les domaines. Mais malheureusement pour elle, Ian vint également la devancer. « Est-ce qu'on t'a déjà dit que tu jouais un peu trop les imbéciles parfois ? fulmina-t-elle.
— Est-ce qu'on t'a déjà dit que tu jouais un peu trop les moralisatrices parfois ? répliqua-t-il, d'un air taquin, en entrant fièrement dans leur moyen de transport. »
Sans se douter que celui qui se trouvait derrière elle se retenait de rire, Natasha se retint en revanche de sauter au cou du jeune farceur au moment où elle avait entrepris de l'imiter. Yves était sur le point de les succéder quand il vit Célia apparaître. D'un seul coup, il se perdit dans ses pensées. Il se rappela la dernière fois qu'ils avaient été tous les deux — en oubliant presque Brenda — et la manière dont ils s'étaient séparés : elle allant toute dépitée avec sa sœur, et lui suivant la sienne en ayant particulièrement remarqué le sourire en coin sur ses lèvres...
La façon dont la nouvelle arrivante le fixait le fit revenir à la réalité. Elle le regardait étrangement, comme si elle espérait quelque chose de sa part. Peut-être souhaitait-elle un compliment sur son changement de coiffure ? Mais pour son plus grand dam, ses seuls mots pour elle, prononcés avec une certaine timidité, furent : « Tu... Tu préfères passer la première ? » Célia perdit en une seconde une partie de la joie qu'elle avait en elle avant de l'entendre. « Non, répondit-elle cependant. Toi d'abord, vas-y. » Elle avait les yeux baissés. Ils demeurèrent face-à-face, sans bouger d'un centimètre, jusqu'à ce qu'Yves eût pris la décision de lui obéir. La pauvre démoralisée poussa un long soupir, s'engouffrant elle aussi à l'intérieur du bus.
Aux environs de seize heures, les quatre stagiaires étaient en train d'admirer, d'une façon qui leur était individuellement propre, ce lieu répertorié parmi les plus luxueux de la ville ; quatre étant donné que Jolie n'était pas présente, mystérieusement trop occupée pour accepter l'invitation de Madame Winnie. Cette dernière, par ailleurs, était en pleine conversation avec le réceptionniste lorsque Monsieur Éric la quitta afin de remettre à ses apprentis experts en droit les clés des chambres qui leur avaient été octroyées. Il commença par Célia, ensuite ce fut Natasha, puis Ian, et il termina par Yves. « En fait Yves, démarrait-il en lui donnant la petite pièce en métal, toi qui est si proche d'elle tu sais pourquoi Jolie n'est pas venue ?
— Heureusement d'ailleurs, murmurait Ian au milieu des filles, il y aurait sûrement eu des histoires vu la façon dont ils si sont proches ! » Au lieu d'être jalouse, Célia haussa les yeux au ciel conjointement avec Natasha. On aurait cru qu'elles avaient lu chacune dans l'esprit de l'autre. Yves aussi l'avait entendu mais il ferma les paupières pendant quelques tierces, s'efforçant à ne pas réagir. « Elle a dit qu'elle était tellement surchargée chez elle ces temps-ci qu'elle ne pouvait pas profiter de la fête avec nous, raconta-t-il.
— Ah, exhala le plus âgé, tant pis ! » Il repartit auprès de sa patronne.
« Elle n'aurait pas pu faire mieux comme argument valable pour cacher le fait qu'elle n'ait pas eu la permission de son époux ? » lança cyniquement Ian, conduisant une nouvelle fois l'ami de la jeune femme à faire l’autruche. « Toujours à te mêler de ce qui ne te regarde pas ? le brava Natasha.
— On est deux mon lapin ! allia-t-il en l'énervant, comme à son habitude.
— Arrête Ian Natasha a raison, le réprimanda également Célia.
— Quoi, je ne dis que la vérité ! Même si Yves ne l'a pas dit, je suis sûr que cette idée a dû à tous nous traverser l'esprit. »
Yves eut l'air de culpabiliser, donnant encore plus à Ian le sentiment de ne pas être en tort. « C'est compréhensible parce que franchement, avec une femme d'une telle..., beauté je...
— Tu ne pourrais pas te retenir un moment d'être aussi vulgaire ? Et puis, ça ne veut toujours pas dire que ça te concerne. » Les autres semblèrent remercier intérieurement Célia de l'avoir interrompu. « Qu'est-ce qui t'arrive Célia, fit-il, on dirait que tu es de mauvaise humeur aujourd'hui ?
— Rien, prétendait celle-ci en échangeant sans le vouloir une œillade rapide avec Yves, je dois juste être un peu fatiguée.
— Tu devrais aller te reposer alors, avant le début de la réception ! lui suggéra Natasha.
— T'as peut-être raison Natasha, on se voit ce soir dans ce cas ! »
Après avoir prononcé cette phrase, à l'intention de ses collègues (même de celui qui était manifestement à la base de son air renfrogné), Célia gravit les escaliers observée, comme à chaque fois, par ce dernier.
Quelques minutes plus tard Célia était allongée dans sa chambre, les yeux ouverts. Il était clair que ce n'était en aucun cas la fatigue qui l'avait poussée à monter, mais une contrariété qu'elle ressentait depuis qu'elle était arrivée devant le cabinet. Elle maudissait ce qu'elle éprouvait à ce moment précis, bien qu'elle savait qu'elle n'arrangeait rien en se remémorant à maintes reprises cette scène.
C'était alors qu'on avait frappé à sa porte. Surprise, elle se redressa sans pour autant s'empresser d'aller l'ouvrir. S'y axant à son rythme, elle découvrit, debout dans le couloir, un garçon d'hôtel. « Bonjour monsieur, le salua-t-elle.
— Bonjour, répondit-il, c'est bien vous mademoiselle Célia ?
— Oui c'est moi, il y a un souci ?
— Rien de grave, on m'a simplement chargé de vous remettre ce paquet. » Célia fixa avec étonnement ce qu'on lui présentait, mais le reçut quand même. « Merci ! », fut gratifié le livreur avant qu'il ne fît demi-tour.
La porte refermée, la jeune fille revint s'asseoir sur son lit et, ayant longuement hésité en premier lieu, elle avait ouvert finalement le paquet. Pendant quelques secondes, elle eut l'impression que son imagination avait débordé : c'était une robe, la fameuse robe couleur perle. Cette robe qu'elle pensait ne plus jamais revoir de sa vie et qui se trouvait, désormais, en sa possession directe. Célia ne put se retenir de crier de joie et de se tenir debout, sautillant dans toute la pièce, telle une enfant le matin de Noël. Elle était si heureuse, ne se demandant même pas d'où elle pouvait bien provenir. Ce n'était qu'après une dizaine de bonds qu'elle remarqua que la robe était accompagnée d'un billet, un bout de papier que son euphorie l'avait contraint à ignorer. Elle revint vers le lit et le ramassa. « Joyeux anniversaire Célia, lisait-elle, Yves. » Elle eut un tendre sourire, le relisant encore une fois pour être sûre qu'il était réel. Et elle qui avait pensé qu'il avait oublié cette date. Marchant jusqu'au miroir avec le vêtement, elle s'y contempla, toute contente. « Joyeux anniversaire Célia ! » se dit-elle à voix-basse.
Vers dix-neuf heures, Yves était le seul stagiaire à être prêt, alluré dans son costume bordeaux et une cravate de même couleur nouée autour du col de sa chemise noire. La fête avait alors commencé, avec trente minutes de retard par rapport au moment prévu au départ. Réticent à l'idée de se retrouver à l'intérieur de la salle sans ses collègues, il avait préféré attendre dans le hall qu'au moins l'un d'entre eux eût pu le rejoindre, refusant également de jouer sans le vouloir les fayots au détriment des autres — comme l'aurait sûrement et intentionnellement fait Natasha, si elle avait été à sa place. Celle-ci descendait d'ailleurs les escaliers et, ironie du sort, Ian le faisait exactement en même temps qu'elle. Yves s'en amusa, contrairement aux jeunes gens quand ils la constatèrent, et il faillit se glisser vers le lieu où se déroulait la fête lorsqu'il aperçut Célia à quelques pas du couple discordant. Il resta cloué sur place en train de la fixer, elle qui se déplaçait si gracieusement, vêtue de la robe que Mariam avait sciemment achetée afin d'obliger son frère à la lui offrir ; c'était ça le plan qu'elle avait en tête, et qui la faisait sourire au moment où les deux sœurs les avaient quittés.
Mais ça, Célia ne le savait pas. Elle n'était encore que la superbe fille qui ressemblait à une éblouissante sirène, grâce au vêtement qu'elle portait et à ces cheveux placés sur son épaule, qui lui donnaient l'air d'être sublimement mouillée. Cette superbe fille qui eut à peine le temps de voir Yves, avant de regarder vers un autre jeune homme, qui l'avait appelée, et qu'elle ne tarda pas à aller entourer de ses bras dénudés...
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