10. La mise au point
Yves n'avait pas écouté ce que la jeune fille essaya de lui dire, - à savoir de ne pas l'importuner -, et l'avait suivie. Il lui emboîtait le pas et elle ne s'en était rendue compte que lorsqu'elle pressa la porte de la boite. Elle poussa un énorme soupir d'exaspération et le confronta immédiatement.
- Tu n'as pas compris ce que je sous-entendais à l'instant ? brailla-t-elle.
- C'est qui ce type ?
- Pourquoi ?
- Pourquoi ! répéta le jeune homme. Comment tu peux me le demander Célia ?
- Ce n'est pas une réponse Yves !
- Tu veux une réponse, s'énerva-t-il, et bien la voici : parce que je suis encore ton petit ami et que ça me met hors de moi de te voir avec lui parce que...
- Tu es jaloux ? Tu m'en veux parce que je suis la cause de ce sentiment insupportable ? C'est exactement ce que moi j'ai éprouvé en voyant Lilly te prendre dans ses bras quand elle est arrivée. Tu te souviens de ma réaction ? Tu n'as pas envie de faire pareil aujourd'hui ?
- Non Célia ; moi ce que je veux, c'est que tu me dises ce qui se passe alors que toi tu ne réclames aucune explication, que ce soit il y a quelques semaines ou maintenant !
- Et la seule solution qui t'es venue à l'esprit était de proposer qu'on fasse une pause ?
- Je l'ai fait pour que tu réfléchisses sur tes sentiments pour moi, pas pour que tu te jettes dans les bras du premier venu !
- Je n'arrive pas à réaliser que tu doutes de moi et de mes sentiments ! Tu crois vraiment que je suis ce genre de filles, hein ? Le genre..., avec lequel tu aurais directement décidé de perdre ta virginité ?
Yves fut stupéfait. Il semblait croire qu'elle ne ferait plus référence à Corinne, et le fait qu'elle eût mentionné le sujet, de cette manière en plus, le choqua énormément. Célia regretta rapidement en voyant son bouleversement. « Il vaut mieux qu'on se sépare Yves. » déclara-t-elle sur un ton un peu plus bas. Yves parut ne pas comprendre.
- On ne sait pas se faire confiance, et encore moins se parler ; renchérit-elle, non sans une pointe d'amertume dans la voix.
- Et selon toi c'est une raison suffisante pour qu'on puisse rompre tous les deux ? lui dit-il. Et que fais-tu de ces beaux moments qu'on a passés ensemble ? Que fais-tu de ce qu'on éprouve l'un pour l'autre ?
- Aimer n'est pas la seule chose qui compte Yves ; et ces beaux moments, ils peuvent devenir des souvenirs. Des souvenirs qu'il va falloir oublier pour pouvoir vivre en paix.
L'émotive qu'elle était ne put retenir les gouttes de larmes qui apparurent dans ses yeux et choisit de lui tourner le dos. « Je ne pourrais jamais t'oublier Célia, jamais. Et si tu m'aimais autant que tu le dis je suis sûr que tu aurais été capable d'ignorer les autres. N'abandonne pas Célia, ne permets pas qu'on se sépare toi et moi. » Il se rapprocha d'elle et l'obligea pacifiquement à le regarder. Il voulut l'embrasser et elle ferma les yeux ; ces yeux qui lui donnèrent l'illusion que les pleurs avait cessé. « Il..., il faut que j'y aille, voir si Freddy... » Elle se détacha de lui et se retourna tout doucement, comme si une partie d'elle n'en avait pas envie. Yves eut l'air résigné. Il était certain d'avoir tenté tout ce qu'il pouvait pour ne pas qu'elle parte, mais que ça n'avait servi à rien. Célia avait abandonné. Elle n'avait pas su croire en leur amour. Elle venait de le prouver en baissant les bras. Il la regardait héler un taxi, tristement, et c'était alors qu'il se posa intérieurement une question : « Et moi, qu'est-ce qui m'empêche de ne pas la laisser prendre ce taxi ? Qu'est-ce qui m'empêche d'être celui des deux qui mettra son orgueil de côté ? » Il n'attendit pas une seconde de plus et courut la rattraper. Juste au moment où il allait poser sa main sur son épaule, Célia fit demi-tour et ils entrèrent en collision. Ils éclatèrent de rire. Puis, plongeant leur regard dans celui de la personne qui se trouvait devant eux, Yves et Célia scellèrent leurs lèvres par un tendre baiser.
- Je t'aime Célia !
- Je t'aime aussi Yves et..., et..., tâtonnait-t-elle. Et... Orrrh au diable Freddy !
Yves tira Célia par la main. Ils entrèrent dans la chambre déserte et il l'embrassa encore et encore. Elle n'était pas contre. Elle l'avait extrêmement manqué et par ce geste enflammé, il le lui montrait. Une chose en entraînant une autre, Célia dut s'asseoir sur le lit de son amoureux et cette fois, elle s'y allongea volontairement en déboutonnant sa blouse pendant le baiser. Yves la détailla.
- Qu'est-ce que tu fais Célia ?
- C'est bon, assura-t-elle en enlevant ses chaussures, il n'y a personne. Allons-y !
- Célia... Célia, l'arrêtait-il en se tenant debout, non je ne peux pas.
Elle se sentit offusquée.
- Qu'est-ce qu'il y a, je ne te plais pas ? Ce n'est pas ma faute si mon physique n'est pas...
- Non détrompe-toi, tu es magnifique, c'est juste que... J'ai l'impression que tu ne te rends pas compte de ce que tu t'apprêtes à faire Célia, en es-tu consciente au moins ?
- J'en suis consciente Yves. Je t'aime et c'est pourquoi je veux que ce soit toi le premier car je sais que tu resteras l'unique homme dans mon cœur.
II fut ravi de l'entendre dire ça ; mais il s'assit malgré tout à côté d'elle, qui était déjà dans cette position. « Je suis vraiment, vraiment fier de compter autant pour toi tu sais, démarra Yves, mais je dois me ressaisir maintenant que j'ai encore le contrôle de la situation. Je me suis laissé emporter par les événements il n'y a pas si longtemps et... » Il prit son souffle. « Célia le jour de la reprise des cours j'ai failli commettre avec toi la même erreur qu'avec Corinne, mais le fait que tu aies su me dire non m'a aidé à retrouver la raison. Je me rappelle encore de ta phrase de ce jour-là, je l'ai retenue : « Je suis une jeune africaine qui se respecte. » La première fois pour nous c'est sacré. Je ne t'en ai jamais parlé mais je garde toujours un très mauvais souvenir de la mienne. Je ne dis pas que c'était déplaisant ; mais lorsque nous étions tellement épuisés par ce que nous avions fait, j'ai posé ma tête sur mon oreiller. C'est là que j'ai pris conscience de la gravité de mon acte. J'avais l'impression d'avoir perdu toute ma valeur en tant qu'être humain parce je me suis laissé guider par mes pulsions, comme un animal. Je me suis mis à nu, de toutes les manières possibles, devant quelqu'un pour qui j'ai fini par découvrir que je n'éprouvais que de la passion. Je me sentais coupable et je l'ai détestée parce que, je sais que ça paraît bête, je me suis senti abusé par cette fille qui m'a conduit à renoncer à l'une des choses les plus importantes pour nous les chrétiens : notre chasteté. Quelque chose de banal, peut-être, et de ridicule pour beaucoup de gens de notre âge, mais d'extrêmement précieux en réalité vu que c'est une preuve d'amour que toute personne est censé offrir à celui ou celle qui passera le restant de sa vie avec elle. Il signifie qu'on s'est réservé, qu'on n'a attendu que cette personne : le grand amour. Je ne suis désolé de ne pas pouvoir te faire ce cadeau. » Célia était émue. Elle prit les mains de celui qui faisait battre son cœur et les mena à sa bouche afin d'y déposer une petite bise qui démontrait néanmoins son attachement pour lui.
- Après la mort de Corinne j'ai eu une nouvelle raison de culpabiliser, continuait-il. J'avais l'impression de m'être servi d'elle pour assouvir pleinement mes désirs malsains, et je ne veux pas que ça arrive avec toi. Je t'aime et je te respecte tellement que je préfère que tu gardes ce qui fait ton honneur en tant que femme, et surtout en tant que fille d'une famille comme la tienne, et la mienne. J'ai une sœur et honnêtement, je me sentirais plus que déçue si j'apprenais qu'elle a laissé un petit conard comme moi...
- Non arrête d'être aussi dur envers toi-même, déglutina-t-elle. Tu es quelqu'un de bien Yves et je ne le réalise maintenant. Tous les autres..., tous ceux avec qui j'ai été avant toi, en commençant par Steve, avaient tendance à me traiter comme si je ne vivais que pour eux. Et je t'avoue qu'il m'arrivait de croire que ça serait aussi le cas avec toi un jour où l'autre, surtout quand tu m'as repoussée devant tous nos camarades. Je n'ai pas essayé de te retenir parce que j'ai couru après Steve tant de fois par le passé que je me suis jurée à moi-même de ne plus le refaire pour qui que ce soit. Mais en ce moment je me dis que contrairement à lui, toi tu valais la peine d'être couru après.
Elle se jeta dans ses bras. « Je m'en veux ! » éclata-t-elle, en sanglots. Yves l'enlaça avec calme et gentillesse. Il y avait quelques minutes ils étaient sur le point de se séparer, à l'entrée de cette boite, et là ils se retrouvaient, dans cette chambre. Ils se réconciliaient, tranquillement, juste tous les deux, et ils étaient tellement heureux de le faire qu'ils en oubliaient les problèmes qu'ils leur restaient à régler, là, dehors.
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