VIII
Marcus traversait les nombreux étals, se présentant avec évidence au marché. Les bruits qui courraient entre les murs et les étroites ruelles, sortis de la bouche de jeunes commères, satisfirent Marcus qui fut bien ravi de revoir ces bonnes habitudes.
⏤ Voyez comme c'est chanceux ! Voyez comme c'est bénéfique ! S'écria un vieil elfe qui vendait des artefacts très anciens selon les écritures de ses pancartes.
Un grand homme brun, vêtu d'un accoutrement qui devait coûter un bras, s'avança vers l'elfe en question.
⏤ Alors selon vous, ces oiseaux auraient appartenu à la déesse Cliodna ? Déclara le client avec moquerie.
⏤ Ils ne vieillissent jamais. Ces trois oiseaux magiques, se nourrissent exclusivement de pommes merveilleuses et leurs chants ont le pouvoir de procurer le sommeil éternel ainsi que de guérir les malades.
⏤ Cela me semble très gros, dit-il en triturant sa moustache.
⏤ Non seulement ils vous apportent un grande puissance, mais ils peuvent également servir d'horcruxes.
⏤ Me voyez-vous si insensé pour que j'envisage de séparer mon âme en plusieurs morceaux, invoquant de suite l'enfer de Pluton ?
L'elfe blêmit alors que ses yeux bleus ciels commençaient à perdre de leurs étincelles, et que ses longues oreilles tremblaient quelque peu.
⏤ Oh je ne voulais guère vous offenser. Il est vrai qu'un homme tel que vous, ne pourrait s'abaisser à des pratiques si abjectes.
De son côté, Marcus s'avança également vers le commerce d'objets anciens et sacrés. Il fut surpris de voir Titus Solonius converser avec le vendeur.
⏤ Titus, déclara-t-il ravi, c'est une joie de vous revoir.
Ils s'apprêtaient à se serrer la main en signe d'amitié, mais ils changèrent d'avis et optèrent plutôt pour une étreinte chaleureuse.
⏤ Cela fait huit ans mon cher, dit Titus tout de même ému de le voir.
⏤ Effectivement, approuva-t-il. Huit longues années entre les bras de notre mère Rome.
Les deux amis quittèrent le commerce, bras derrière les épaules, n'ayant pipé un mot en faveur du vendeur qui les fixa s'éloigner, le regard déconcerté.
"Ssûrement des modernistes sans culture..." Les jugea-t-il dans ses pensées, la fierté bien trop blessée.
⏤ Vous ne m'avez envoyé aucune lettre, signalant votre arrivée mon ami, dit Titus faussement indigné par cela.
⏤ J'ai toujours apprécié l'effet de surprise.
⏤ Avec cette intelligence si raffinée, vous nous enterrerez tous, plaisanta son ami ce qui le fit sourire.
⏤ Soit. Que dîtes-vous d'aller aux festivités que j'organise dans ma demeure ?
⏤ Ce serait avec joie.
Marcus s'arrêta devant une fissure creusée dans la pierre d'une bâtisse, où se trouvait à l'intérieur, la statue de la triple déesse. Il ferma les yeux, récita une prière en latin afin que les fêtes soient de bonne augure, avant de glisser quelques pièces aux côtés de la statue.
⏤ C'est une sage décision, approuva Titus en posant une main sur son épaule.
⏤ Un moderniste du nom de Malefoy a un jour proclamé que La Triple Déesse n'était qu'une invention des hommes, lui raconta-t-il ennuyé par ce souvenir.
⏤ Il est vrai qu'il peut se montrer arrogant et insultant. C'est assez ironique, cela dit. Il se considère tel un sang pure conservateur, or ses propos semblent progressistes.
⏤ Vous avez sûrement raison, sourit Marcus. Des sorciers tels que lui critiquent les nés-moldus, alors qu'ils ne sont pas mieux lotis qu'eux.
⏤ C'est tout de même difficile à croire. Des personnes ayant des dons magiques, sans parents sorciers ? Cela semble de toute évidence une bénédiction de la Triple Déesse, pourquoi alors certains nés-moldus n'ont-ils pas les mêmes capacités que nous ? Songea Titus.
⏤ J'ai lu une hypothèse à ce sujet. Certains nés-moldus auraient été en contact avec des sorciers modernistes. Naturellement, un lien s'est instauré, et des pouvoirs magiques leur ont involontairement été transmis.
⏤ Je vois...
Les deux sorciers prirent quelques ingrédients, utiles tant pour les potions que pour les rituels, avant de disparaître dans une tornade obscure.
Ils se retrouvèrent sur les cotes des villas sacrées où tout Capoue était à leurs pieds. L'air était bien plus frais et respirable en altitude. Marcus ferma les yeux, accueillant cette douce fraicheur en lui, écartant la force des rayons infrarouges.
⏤ J'avais oublié à quel point Capoue était une région si aride, déclara Titus en marchant vers les villas.
⏤ Il est vrai que Rome semble bien froide en comparaison, admit Marcus.
⏤ Que dîtes-vous de manger avec nous ? Lui proposa Titus alors qu'il s'était arrêté devant chez lui.
⏤ Je ne pourrais refuser, accepta-t-il en souriant. Je pars prévenir ma femme et ma fille et on vous rejoint dans une heure.
Titus acquiesça alors que son ami partit vers sa villa.
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Le déjeuner s'était passé dans la courtoisie et la bonne humeur des cinq individus présents. Marcus avait discuté du fait qu'il était devenu le consul de l'Italie magique, et que ses nobles taches reprendraient dans quelques semaines, tout au plus, et qu'il devrait par conséquent repartir pour Rome. Il avait également informé à Licinia et à Tiberius qu'ils pourraient dorénavant étudier dans des collèges. Ils étaient plutôt ravis de cette idée, étant curieux de faire connaissance avec d'autres sorciers de leur âge. Titus, lui, n'avait cessé de lancer des regards quelques peu dérangeants envers Gaia qui ne s'était aperçue de rien, contrairement à sa fille qui commençait à avoir des soupçons envers Titus. Suite au repas ainsi qu'aux longues discussions politiques, Marcus et sa famille étaient partis.
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La nuit et sa fraîcheur, écartant l'aridité de Capoue, étaient tombées.
Titus et son fils Tiberius entrèrent dans la demeure des Decimare. L'agitation régnait. Un air oriental emplissait la pièce. Des plateaux flottaient tout seuls, des raisins entourant la tête d'un bouc.
Au centre de la villa, une bassine était disposée, où quelques danseuses faisaient onduler leurs ventres. Ce qui pouvait stupéfier certains sorciers, c'était lorsque les jeunes femmes parvenaient à faire vibrer leurs hanches, ainsi que l'ensemble de leurs corps, tout en tenant précairement des plateaux de bougies allumées sur chacune de leurs têtes.
Le plafond était absent, et en levant les yeux, les invités pouvaient contempler les magnifiques étoiles errant dans le ciel obscur.
De nombreuses tables étaient remplies de nourriture de tout genre : des crudités, des légumes, des fruits, de la viande, du poisson, des pâtisseries à base de miel, du mulsum, du vin miellé, de l'hydromel...
Tiberius rejoignit Licinia qui discutait avec d'autres sorcières de son âge.
⏤ Tiberius te voilà ! L'accueillit-elle en souriant.
⏤ Bien évidement, je ne pourrais manquer une fête où tu t'y trouves, sourit-il à son tour.
⏤ Voici Mary et Lucretia, fit-elle en indiquant deux sorcières qui semblaient excitées.
⏤ Enchanté mesdemoiselles, répondit-il en leur baisant la main.
Elles rougirent à la suite de cet acte, et Licinia se dit qu'elles étaient trop innocentes.
À en juger par leurs accoutrements, Tiberius devina facilement de quelle contrée elles venaient.
Mary avait de longs cheveux noirs tressés. Sa robe rougeâtre était si longue qu'on ne voyait pas ses pieds, le décolleté était rond, et les lacets pour maintenir le corset étaient de couleur or. Sa peau était pâle, et ses yeux étaient d'un gris brillant. Il en conclut qu'elle était britannique.
Lucretia possédait une chevelure blonde, coiffée en arrière, légèrement bouffante. Ses cheveux étaient séparés en deux masses par une raie médiane et réunis en tresses descendantes le long de la nuque. Sa robe était blanche, et un châle rouge recouvrait une partie de celle-ci. Tiberius devina qu'elle était italienne, comme lui.
⏤ On parlait des différents collèges du pays, lui informa Licinia.
⏤ Je suis hâtée à l'idée qu'on puisse apprendre la magie ensemble, s'enthousiasma Lucretia.
⏤ Quel dommage de vivre en Grande Bretagne... Souffla Mary. Je ne pourrais guère appartenir à la même assemblée que vous.
⏤ Tant que tu ne vas pas à Poudlard, on ne t'en veut pas, la rassura Lucretia.
⏤ Chers amis ancien et nouveaux, annonça Marcus qui s'avançait vers les marches de la villa pour se montrer en évidence. Merci d'honorer votre présence dans la demeure des Decimare. En tant que nouveau consul, je tiens à commémorer cela avec vous, mes amis les plus chers, qui m'ont toujours soutenu. Appréciez. Jouissez. Profitez. C'est tout ce que je vous demande.
Des applaudissements retentirent en sa faveur, alors que les invités discutaient avec joie de la bienveillance de Marcus.
Licinia fut ravie des bonnes nouvelles qui étaient parvenues à sa famille. Les choses s'amélioraient de plus en plus et elle savait que rien n'allait perturber cette satisfaction.
Marcus parlait avec quelques sorciers grecs de ses nouvelles idées politiques, lorsqu'il vit un jeune homme de Palestine qui devait avoir la vingtaine, s'avancer vers lui. Il était de grande taille, ses cheveux noirs étaient coiffés en arrière et ses fossettes ainsi que son sourire diplomate, accentuaient le charisme qu'il dégageait.
⏤ Marcus Decimare, dit-il avec bienveillance. C'est une joie de me trouver à l'un de vos banquets.
⏤ Ezra Aknin, je constate que les Dieux ont exaucé mes prières.
⏤ Je ne refuserais au grand jamais l'invitation d'un homme si avisé que vous. Vous ne m'avez par ailleurs toujours pas expliqué pourquoi votre stratégie aux échecs était supérieure à la mienne.
⏤ Ce sont les expériences de vieilles batailles et de stratégies de guerre qui ont affiné ma stratégie. Je pourrais vous l'enseigner d'avantage si vous vous engagiez militairement.
⏤ À première vue, j'aurais refusé au profit du statut de député palestinien, mais si une guerre civile éclate dans mon pays et que je me retrouve pris au dépourvu, l'expérience des batailles me serait d'une aide précieuse.
⏤ Prions les Dieux pour votre réussite, l'encouragea Marcus en posant sa main sur son épaule.
⏤ C'était un beau discours père, déclara une voix féminine à leur hauteur.
Ezra dévia le regard et un sourire se forma de lui-même. Il admit sans grande difficulté que la jeune sorcière qui devait être la fille de Marcus était ravissante. Sa beauté physique entrait en jeu, toutefois il sentit qu'elle avait une vertu en plus qui la déterminait des autres femmes. Elle semblait au premier regard, assez joyeuse et curieuse du monde qui l'entourait, or le pressentiment qui annonçait qu'elle renfermait en elle une grande conviction, dominait bien plus ses pensées. Cette sorcière avait à l'intérieur d'elle une façon de réfléchir hors du commun.
Et Ezra ignorait à cet instant présent que cette réflexion que conservait Licinia allait changer sa vie à tout jamais.
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