Gaëlle. [Partie 1]

« Dieu ou non... Je te démonterai... Pièce par pièce ! »

De phrases chocs, les dialogues de Gaëlle ne manquent pas. Aussi sélectionner celles qui permettraient de la représenter a été compliqué et puis en relisant le tome 4, je me suis dit que celle-ci était la meilleure.

Comme vous avez pu le constater avec cette citation tirée du tome 4, Gaëlle a du cran et du courage à revendre, surtout lorsque les rares personnes qu'elle apprécie sont en danger. Que la personne à qui elle fait face soit un sociopathe psychorigide, maniaque et obsessionnellement névrosé (alias Thorn) ou un Echo métamorphe aux problèmes d'élocution, elle foncera dans le tas !


La genèse du personnage

Gaëlle est née dans le clan des Nihiliste du Pôle. Elle aurait été noble, élevée avec une cuillère en argent dans la bouche, elle serait même peut-être devenue comme les sœurs d'Archibald, si la vie n'en avait pas décidé autrement. Enfin, dans ce cas-ci plutôt la mort... Alors qu'elle était encore enfant, son clan est décimé par une maladie. Tout un clan. Par une maladie. Je crois que j'insiste suffisamment et que vous connaissez bien le pôle pour savoir que cela ressemble fortement à un assassinat. D'ailleurs, Gaëlle elle-même n'est pas dupe : un massacre pareil ne peut être que l'œuvre d'un des autres clans de la Citacielle. Personnellement, je parierai sur les Mirages qui ont le plus à perdre.

Je ne l'ai pas encore expliqué, mais les Nihilistes ont la capacité de voir au travers des illusions et d'annuler toutes les petites fourberies de l'esprit. Il lui suffit de regarder avec son œil noir nihiliste une illusion et celle-ci disparaît. Il faut qu'elle regarde ailleurs pour que celle-ci réapparaisse. Il en va de même pour un autre pouvoir : si elle regarde un Invisible, celui-ci redevient visible. Évidemment, chacun des nobles possèdent un monocle particulier qui occulte le pouvoir de leur œil afin de ne pas annuler les illusions et autres tout le temps. Ce monocle l'occulte, cependant, il permet à celui qui le porte de voir au-delà illusions, de l'invisibilité... Bref, au travers de tous les pouvoirs de famille.

Christelle Dabos pour écrire ce personnage dit s'être inspirée de Maugrey Fol-œil dans Harry Potter. C'est évident que l'œil bleu de Maugrey, capable de voir au-delà de la matière ressemble beaucoup au pouvoir que possède notre mécanicienne et à la couleur de son œil normal. De mon point de vue, ce n'est pas le seul point commun : les manières brusques, bougonnes et brutes de décoffrage ont quelques choses aussi de Maugrey. C'est leur parcours qui a façonné l'être méfiant qu'ils sont aujourd'hui, mais ce qui en fait des alliés précieux qui ne se laissent pas abuser.

Le parcours de Gaëlle n'a pas en effet été une sinécure et c'est un euphémisme. A partir du moment où sa famille a été décimé, Gaëlle pour sauver sa vie doit dissimuler le fait qu'elle est une Nihiliste. Elle est obligée de se couper et surtout de se teindre les cheveux pour cacher la blondeur caractéristique des nobles.

Petite anecdote, le second personnage dont s'est inspiré Christelle Dabos est la mécanicienne dans « Atlandide » (un vieux Disney méconnu, mais qui gagne vraiment à être découvert !). En effet, les deux sont mécaniciennes, ont des cheveux noirs courts et sous des dehors rudes, une vraie tendresse. Leur apparence sont assez similaires en fait...

Après ce changement d'apparence, c'est un complet changement d'identité que doit faire Gaëlle. Au diable les bonnes manières ! Elle crache, elle jure et elle n'en a rien à faire des robes et des fanfreluches... La mécanicienne grandira très seule, mais elle peu compté sur Mère Hildegarde qui la prendra sous son aile. La « Famille » de Mère Hildegarde est composé de rejeté comme elle. L'Arcadienne protège des membres de clans déchus (comme Papier Mâché par exemple), les plus faibles dans la chaîne alimentaire de la cour... Gaëlle avec sa famille massacrée rentre parfaitement dans les profils accueillis par Mère Hildegarde.

C'est cette dernière qui l'emploiera et lui donnera donc un travail soit une situation, ce dont elle avait désespérément besoin. Techniquement, Gaëlle ne travaille pas pour le Clairedelune, mais pour Hildegarde. Cependant, en dépit de l'aide de l'Arcadienne, Gaëlle ne recevra aucun soutient d'aucune part. Elle s'est construit, a affronté la dureté des coulisses du Clairedelune et a grandi seule (c'est fou comme le thème de la solitude revient souvent dans la Passe-Miroir...).

Gaëlle a donc vu la Cour et ses dessous. Elle en donnait tous les vices et en prenant de l'âge sa haine à l'égard des Nobles et de la Cour n'a fait que croître. Elle est consumée par le mépris et sa colère (elle appelle Bérénilde « la puante » par exemple, quoique quand on connaît l'image que Bérénilde affiche à la Cour, cela n'a rien d'étonnant...). Elle hait ces nobles incapables de faire quelques choses de leur dix doigts.

C'est ce personnage donc qui apparaît dans le tome 1 de la Passe-Miroir...


La première rencontre.

Christelle Dabos réussit particulièrement bien les scènes d'introduction de ses personnages, ne serait-ce qu'en termes de caractérisation. Celle de Gaëlle ne fait pas exception.

La première chose qu'Ophélie et par extension le lecteur voit d'elle, c'est son regard, un regard si brutal qu'il le tire de ses pensées. Ce sont ses yeux et son regard qui marque le plus Ophélie. Dès le départ, l'auteure attire notre attention sur eux, mais nous ne comprendrons que plus tard la véritable raison de cette insistance.

La seconde chose qu'elle remarque est son monocle qu'elle arbore et qui lui éclipse l'œil gauche (monocle qui je le rappelle est nécessaire pour contenir son pouvoir de Nihiliste et qui lui permet de voir au travers l'illusion que porte Ophélie pour être à Mime).

Tout de suite, elle s'arrête pour observer avec énormément d'instance que cela met Ophélie mal à l'aise. Cela n'a rien d'étonnant. Elle pensait avoir tout vu et voilà qu'elle découvre une femme travestie en homme qui est embauché au Clairedelune. Cela doit interloquer la première fois.

Cependant, Gaëlle ne laisse rien paraître : elle a fait du visage renfrogné l'expression principale de sa gamme de mouvements faciaux, ce qui est un poker face comme un autre.

Ce qu'on retient de cette scène, c'est qu'Ophélie a déjà attiré l'attention sur elle comme le prouve la phrase de Gaëlle (phrase qui rend d'ailleurs Renard jaloux) : « Il a l'air intéressant ». Ophélie doit afficher sous l'illusion de Mime, une belle tête de perdue, ce qui a du susciter la compassion de Gaëlle.

Bref, dans en une phrase, on comprend pas mal de chose sur ce personnage. Personnellement, la première fois que j'ai découvert ce personnage, j'ai vraiment craint que cela devienne une ennemie et qu'elle découvre son secret, puis qu'elle la fasse chanter : sa manière de l'observer, le fait qu'elle la bouscule avant de partir... Mais j'appréciais déjà son ironie et son ton bourru.


Le tome 1 et le tome 2.

Gaëlle sait donc qu'Ophélie est une femme, mais ne comprend pas exactement la raison de sa présence au Clairedelune. Pendant un repas, elle la confronte et met en évidence le fait qu'Ophélie pose pas mal de questions, fouine à droite à gauche... Ophélie et la mécanicienne se méfient l'une de l'autre. L'inquiétude d'Ophélie qu'elle la dénonce, Gaëlle l'éprouve aussi. Étant une Nihiliste sa vie ne tient qu'à un fil et de voir une personne déguisée ainsi fouiner, elle craint pour sa couverture. Les deux femmes ont beaucoup de choses à cacher et donc à perdre.

Cependant, entre cette discussion et le don d'orange, il s'est passé un certain temps durant lequel Gaëlle a eu le temps de réfléchir, d'observer plus en détail le comportement d'Ophélie et de voir que cette dernière ne s'intéressait pas à elle. C'est là que sa compassion prend le dessus. Ophélie a l'air si perdu, si mal en point et si malmené qu'elle ne résiste pas et souhaite lui faire rencontrer Mère Hildegarde afin qu'elle la prenne sous son aile.

La relier à l'Arcadienne est je pense pour elle, le plus beau cadeau et la plus belle aide qu'elle puisse lui donner. Elle a été seule, n'a jamais été aidé... En voyant Ophélie ainsi, elle s'est vue à son âge et a fait pour elle ce qu'elle aurait aimé que l'on fasse des années plus tôt.

Après l'arrestation d'Ophélie, elle vient immédiatement dans sa chambre pour s'expliquer et pour se défendre : ce n'était pas elle qui avait empoisonné les oranges. Elle se moque qu'elle renvoie l'image d'une femme bourrue, mais elle ne veut pas qu'on croit que c'est une traîtresse ou quelqu'un de mauvais. C'est ça ce qui fait que ce personnage est bon. Elle ne connaissait pas Ophélie et à quand même voulu l'aider et ensuite, vient s'expliquer après son arrestation.

C'est là que les deux femmes se parlent enfin à cœur ouvert et s'échange leur secret respectif : une amitié vient de naître et surtout Ophélie vient de trouver une alliée puissante. Au milieu des imbroglios de la cour, une femme capable de démêler des illusions, cela ne peut être qu'utile. Cela se confirmera lorsque Roseline sera emprisonnée dans ses souvenirs à cause du Chevalier. Gaëlle n'hésite pas une seconde à se mettre en danger pour Ophélie. C'est là aussi que nous découvrons qu'elle est réellement révoltée par l'injustice. Lorsqu'elle apprend que le seul tort de tante Roseline est d'être lié à Ophélie, son sang ne fait qu'un tour... Sans elle, la pauvre Animiste n'aurait jamais refait surface. Ophélie est un petit oasis de pureté, elle n'a pas grandi à la cour et n'y connaît rien. C'est rafraîchissant pour une femme autant blessée que Gaëlle. Lorsqu'Ophélie lui lance qu'elle l'aidera, elle nous montre encore une fois son côté pragmatique et cynique. Elle ne croit pas que les choses peuvent changer, elles ne voient pas comment les choses pourraient changer. La cour brisera les os d'Ophélie ou elle la corrompra. Elle est très sceptique...

Pourtant un élément capital va se produire à la fin du tome 1 et comme une chute de dominos, les conséquences vont s'enchaîner et le monde que Gaëlle croyait immuable va vaciller et commencer peu à peu à se désagréger.


La mort des Dragons.

La mort des Dragons n'a pas franchement bouleversé Gaëlle, en revanche, elle a bouleversé bien d'autre chose. L'équilibre des clans déjà, la position de Bérénilde... Mais surtout la pérennité de la Cité, car les Dragons utilisent (ou plutôt utilisaient) leur griffe pas seulement sur les pauvres serviteurs qui mettent du temps à s'écarter de leur chemin (Frygga, c'est toi que je vise), mais aussi sur les Bêtes. C'est eux les chasseurs, ceux qui ramènent l'essentiel de la nourriture. Sans eux, c'est la famine assurée ! Pour y remédier, il faut faire appel aux clans déchus qui prennent donc de l'importance. Comme les États généraux, une sorte de grande réunion des clans a lieu cette année-là, c'est l'occasion pour ces clans déchus de faire valoir leur utilité et donc demander à revenir à la Cour. Ce qu'il se passe.

C'est ainsi que des anciens clans débarquent, demandent des contes aux actuels clans qui leur ont spoiler des biens et propriétés... Bref, c'est le chaos et la domesticité en profite pour commencer à faire valoir leurs droits. On ne sait pas exactement ce qui se passe au Pôle entre le tome 2 et 3. Farouk s'investit plus dans les affaires des familles, mais se fait manipuler le bout du nez. Renard est à la tête d'un syndicat... Il y a fort à parier que Gaëlle l'y a poussé, ce n'est pas son genre de jouer les chefs et de sociabiliser avec les gens (ce qui est plus du genre de Renard). Il est en revanche impossible qu'elle soit restée les mains dans les poches ; Il est fort probable qu'elle se soit démenée pour le droit des serviteurs. Comme Mère Hilegarde n'était plus là, ses enfants ont pris la relève. Elle n'hésitait déjà pas à être porte-parole des autres ouvriers de la fabrique de sablier lorsque Thorn les a pris dans ses bagages lorsqu'il se rend auprès de sa tante sur le point d'accoucher.

Pour revenir un instant sur le tome 2 d'ailleurs, c'est dans celui-là que Gaëlle se dévoile et qu'elle utilise au grand jour son Don pour capturer Papier-Mâché. Elle n'est jamais aussi impressionnante, intimidante (oui, carrément badasse disons-le). Son œil bleu électrique et son œil noir se dévoilent, elle ne porte plus son monocle. Pour Ophélie et ayant une confiance visiblement absolu en Renard, bas les masques ! Son don n'est plus une malédiction, c'est une part de qui elle est qui lui permet d'aider ses amis.

Cette révélation sur son pouvoir et donc que du sang noble coule dans ses veines aurait pu mettre une barrière entre Renard et elle... Enfin, cette « barrière » a tenu deux secondes dans l'esprit de Renard avant que Gaëlle ne la balaye et que leur amour prenne le dessus.


Nous voilà à la fin de la première partie de cette analyse de personnage consacrée à Gaëlle dans la Passe-Miroir ! c'est un de mes personnages préférés, il fallait absolument que je la fasse ! J'espère que vous vous portez bien et on se retrouve jeudi pour la  seconde partie !

Des choses à ajouter ?

Que l'écharpe soit avec vous !


Question de fin de partie : si vous deviez posséder un pouvoir du monde de la Passe-miroir ce serait lequel ?



Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top