3. Seven
Enfin, le moment est venu. Je ne cesse de me dire que c'est une mauvaise idée. Et je le dis même tout haut quand on arrive sur les lieux de ce combat. Le hangar est bondé. Je sens la main de Rose qui se glisse dans la mienne. Elle le sait. Elle sait que la foule m'angoisse, que j'ai chaud, que j'ai la tête qui tourne. Si elle ne me tirait pas vers l'avant, je me serais repliée sur le sol en prenant ma tête entre les mains pour essayer de faire en sorte que ça disparaisse.
Cette angoisse vient de mes dix-huit ans quand j'ai vécu le drame numéro cinq. Je ne supporte pas qu'on me colle. Je ne supporte pas que la foule soit autours de moi. Les gens sont excités, ils hurlent, tapent des pieds, sautent. Je souffle un bon coup quand nous sommes enfin à une place où je peux sentir l'air sur mon visage.
— Seven, regarde-moi, me demande Rose. Tu ne crains rien. Je suis avec toi.
Elle serre ma main un peu plus fort. Le barman qui nous a embarqué dans cette histoire nous regarde et sourit.
— Je comprends mieux pourquoi elle a la langue bien pendue la petite, blague-t-il en donnant un coup de coude à Rose.
Ma meilleure amie comprend immédiatement de quoi il parle. Il pense que nous formons un couple. Il n'aurait pas dû. Elle va jouer à son propre jeu et il va perdre.
— Je suis sûre que ça t'intéresserait de prendre part à nos petites parties de jambe en l'air. On avait en tête de trouver un bel étalon pour pimenter un peu les choses, susurre-t-elle près de son oreille.
Un sourire se dessine sur ses lèvres et immédiatement, je sais qu'il se fait des scénarios. Il s'imagine déjà batifoler au lit avec deux belles plantes et prendre son pied comme jamais. Deux filles ensembles, ça leur fait toujours de l'effet.
— Diego, viens m'aider au lieu de rester là la bouche ouverte, crie Jax qui sort de nulle part.
— Après le combat, je te donnerai notre adresse, lui murmure sensuellement Rose avant qu'il obéisse aux ordres de son "chef".
— Un jour, tu vas te faire coincer à un de tes jeux, Rose. Heureusement pour toi, tu tombes tout le temps sur des garçons pas trop méchants.
— Il le mérite aussi. Tout de suite, on se tient la main et on serait lesbiennes. Tu me ...
Je n'entends pas le reste de la phrase de Rose puisqu'une musique criarde vient envelopper l'usine. Il n'en faut pas plus pour que la foule se mette à hurler une nouvelle fois. Face à nous, un espace vide se crée et un homme d'au moins deux mètres saute au milieu. Il est tatoué de la tête au pieds. Il ne porte qu'un vulgaire short et montre ses dents recouvertes d'or. Le stéréotype d'un homme de banlieue. Tout ce qui me donne envie de vomir.
La foule se tait et Jax le rejoint. Non, c'est lui qui va se battre ? Il n'a aucune chance face à son adversaire. Tout ce qui va lui arriver, c'est qu'il va finir aux urgences avec une commotion cérébrale.
Un petit sourire espiègle se glisse sur son visage quand il s'aperçoit que je suis là. Je secoue la tête et essaye de regarder ailleurs. Je ne veux pas qu'il croit qu'il me fait de l'effet en étant torse nu avec sa musculature de dieux grecs, avec son caleçon qui dépasse légèrement de son pantalon qui lui tombe sur les hanches. Il fanfaronne en faisant un tour de piste. Mais immédiatement, le géant fonce sur lui et lui adresse un coup de poing en plein visage.
— Non, je crie en plaquant ma main contre ma bouche. C'est sorti tout seul et il n'y a pas que Rose qui m'est entendu.
Les coups fusent. Aucun des deux n'a le dessus sur l'autre. Jax crache du sang juste à côté de moi.
— T'inquiète, j'ai l'habitude. Je vais m'en sortir.
Il a juste le temps d'éviter un coup pied et de reprendre son combat. La foule se met à crier encore plus fort alors que Jax aplatit son poing sur le nez de son adversaire et qu'un craquement se fait entendre. Les mains moitent et le cœur qui palpite, je me concentre sur ma respiration pour éviter la crise de panique. Rose ne fait plus attention à moi, elle crie, tape du pied, suit la foule en délire. Je dois sortir prendre une bouffée d'air pur, cependant mes pieds ne bougent pas. Je veux connaître l'issue du spectacle.
J'ai l'impression que ça dure des heures alors que cinq minutes plus tard, le géant est à terre. Son visage est pratiquement méconnaissable. Son nez est cassé. Il lui manque trois dents. Il n'a même plus de force pour se redresser. Tant de violences, pourquoi ? Pour voir un homme donner une liasse de billets à Jax. La bêtise humaine ne m'étonne même plus.
— C'était d'enfer ! s'exclame Rose. Quand je vois ça, ça me donne envie de m'envoyer en l'air.
— Moi, ça me donne la nausée.
— C'est parce que tu n'as jamais essayé. L'adrénaline que ça procure, c'est fou, balance Jax en montrant ses muscles comme s'il était le héros qui avait tout sauvé.
— Un truc de mecs.
— Tu sais les trucs de mecs, ça peut faire monter aux rideaux et voir les étoiles.
— Bagarreur et en plus, .....
Je ne pourrais pas vraiment expliquer ce qui s'est passé ensuite. Je dois dire que je n'ai que de vagues images. Un homme est venu vers Jax. Il a parlé d'une certaine Amy qui semblait être sa copine, mais Jax avait fait quelque chose avec elle. J'ai senti de la chaleur sur mon visage. Ma vue s'est brouillée. Je me suis sentie partir et l'odeur du béton m'a envahi les narines. La douleur a été plus intense. Puis plus rien. Le noir.
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