Cela faisait maintenant quelques temps que j'étais devenue un pilier. Quand je ne partais pas en mission avec Tengen, je passais mon temps à m'entrainer ou à correspondre avec les autres piliers. Je discutais particulièrement avec Mitsuri, Shinobu et Sanemi. Sakura arrivais aussi à répéter des messages, que je lui donnais, à Himejima.

C'était un beau matin d'automne, les feuilles rousses virevoltaient dans le vent, les écureuils faisaient leurs dernières réserves avant l'hiver. Je suis sorti dehors, portant mon kimono blancs aux fleurs de cerisier. Tengen était assis sur les marches, ses cheveux blancs tombant sur son kimono pourpre. Il tenait à la main ce qui semblait être une lettre. J'ai déposé un baiser sur son front et je me suis assise à côté de lui.

Shizumi - Bonjour, bien dormi ?

Tengen - Oui et toi ?

Shizumi - Oui, très bien. Elle vient de qui cette lettre ?

Tengen - C'est Kyôjurô qui me l'a envoyé. Apparemment, il aurait besoin de notre aide pour une mission qui dure depuis déjà un bon moment.

Shizumi - Trois piliers pour un démon... C'est pas vraiment rassurant. On sait si c'est une lune démoniaque ?

Tengen - Je ne crois pas. De ce que me dis Kyôjurô, le démon serait juste très fort pour se cacher.

Shizumi - Très bien, alors allons l'aider.

Nous sommes rentrés et nous nous sommes changés. Nous avons mis nos uniformes, Tengen s'est attaché les cheveux, il a mit son bandeau et a fait sa fleur autour de l'œil. Tandis que je mettais ma broche et mes bracelets. Nous avons pris nos armes et nous nous sommes mis en route.

Tengen - Normalement, si on marche à une bonne allure on devrait arriver demain en fin de journée.

Shizumi - C'est si loin ?

Tengen - Oui ! A l'opposé de chez nous. Il va falloir traverser tout le territoire de Shinobu.

Shizumi - J'espère qu'on ne sera pas trop fatigué en arrivant.

Tengen - J'y ai pensé et du coup on s'arrêtera dans une auberge de Glycines sur le trajet.

Shizumi - Wouah, t'as pensé à tout.

J'avais un sourire malicieux sur les lèvres et il me le rendit.

Tengen - Bien sur, je sais bien que ma petite femme a besoin de se reposer.

Shizumi - Hé ! Je ne suis pas si petite que ça d'abord !

Tengen - Si, tu es toute petite comparé à moi.

Shizumi - C'est pas moi qui suis petite, c'est toi qui est trop grand.

Il rigola et je me joins à ses éclats de voix.

Nous avons continué notre route, marchant sur le sentier grenu bordé de feuilles mortes. Je ne cessais de penser à cette mission, à ce qu'on allait affronter. Il n'était pas rare que des démons se cachent, mais de là à réussir à ne pas se faire attraper par un pilier... C'était assez étonnant pour un démon inférieur.

Le trajet ce fit sans problème et nous étions arrivés à l'auberge de Glycines à la tombée de la nuit. L'établissement était éclairé de petites lumières orangés. Dans le jardin se dressaient de grandes glycines, dont le violet commençaient à briller dans la pénombre. Dans la cour, une jeune femme était en train de ramener son fils à l'intérieur. Quand elle nous a vu, elle a souri et elle est venue vers nous.

Dame - Bonsoir. Vous venez passer la nuit ?

Shizumi - Bonsoir. Oui c'est ça. Est ce qu'il vous reste au moins une chambre ?

Dame - Oui bien sur, suivez moi je vous prie.

Nous l'avons suivis à l'intérieur. Et alors qu'elle nous amenait à notre chambre, le petit garçon qu'on avait vu, a couru dans le couloir. Il a trébuché et je l'ai rattrapé avant qu'il ne tombe. Sa mère l'a gentiment réprimandé.

Dame - Kiko, combien de fois je t'ai dis de faire attention ? Qu'est ce qu'on dit ?

Le petit Kiko m'a regardé avec ses yeux bleus et innocents.

Kiko - Merci madame.

Shizumi - De rien, ne cours pas dans les couloirs la prochaine fois.

Kiko - Oui.

Et il est repartit, en courant, évidemment. J'ai sourit et Tengen aussi tandis que la jeune femme soupirait d'amusement.

Une fois dans la chambre, j'ai regardé Tengen. Il avait toujours son sourire, mais qui cachait autre chose. Un sourire remplis de tristesse, de mélancolie et de regret. Le même sourire que j'avais. Je me suis rapproché de lui et je l'ai pris dans mes bras. Après un instant d'hésitation, il m'entoura aussi. On avait pas besoin de mots, de paroles, pour se comprendre. Je ressentais ses regrets mais aussi l'amour qu'il me portait et lui ressentait les miens. Nous sommes allés nous coucher, pour nous reposer avant la journée chargé qui nous attendait.

Alors que le soleil perçait à peine à l'horizon, nous avons dit au revoir au petit Kiko et à sa mère et nous avons repris notre route. Finalement, nous avons réussis à arriver en début de soirée. La ville n'était pas aussi animé qu'autour de chez nous, mais quand même.

Tengen - Et bien, y a un de ces peuples. J'ai repéré Kyôjurô, et toi ?

Shizumi - Hmmm, pas encore.

Il y avait trop bruit pour moi, alors je me suis concentré sur mes autres sens. J'ai regardé dans la foule mais il n'y avait aucune trace de sa tignasse enflammée. J'ai humé l'air et je l'ai trouvé. Sur les toits, flottait une odeur de plat chaud et je doutais que quelqu'un ait laissé son plat dehors. J'ai regardé Tengen et nous sommes allés sur les toits. Je l'ai directement vu, debout, quelques maisons plus loin. En deux-trois sauts nous étions à côté de lui. Il s'est tourné vers nous, son éternel sourire au visage.

 Kyôjurô - Ah ! Vous êtes là. Comment vous allez ?

Tengen - Très bien !

Shizumi - Oui, pareil. Et toi ?

Kyôjurô - Autant qu'on le peut je dirais.

Tengen - Bon, c'est quoi cette mission ? Tu m'as dit que ce n'était pas une lune démoniaque, mais c'est quel genre de démon alors ?

Kyôjurô - Je vais vous expliquer ce qui est arrivé. On m'a donné cette mission après qu'une dizaine de pourfendeurs soient revenus bredouilles. Ils n'avaient même pas réussi à le voir, ni le repérer. Au bout de la deuxième nuit, j'ai réussi à le suivre mais j'ai l'ai perdu dès qu'on atteignait la forêt. Et toutes les nuits suivantes, je perdais sa trace à la lisière.

Shizumi - Je vois. Et tu penses qu'avec nos sens on devrait pouvoir le suivre ?

Kyôjurô - C'est ça.

Tengen - Évidemment qu'on va t'aider ! On va former un flamboyant trio !

Suite à ça, nous avons commencé à surveiller la ville. Restant attentif au moindre bruit, au moindre mouvement. Les habitants sont allés se coucher et nous étions les seuls dehors. Alors que je me sentais somnoler, je me suis réveillé par la voix forte de Tengen.

Tengen - Ça y est je l'ai repéré !

Ni une, ni deux, Kyôjurô et moi nous nous sommes précipité derrière lui. Plus on avançait, et plus les bruits étaient forts. J'avais maintenant repéré le démon et j'entendis les cris étouffés de sa victime. Nous avons atteint la lisière de la forêt, et comme Kyôjurô nous l'avait dit, il n'y avait aucune trace du démon. J'ai humé l'air et seule une odeur éventé de chaire régnait dans l'humidité.

Shizumi - Quelqu'un l'a repéré ?

Kyôjurô - Non.

Tengen - Moi si !

Le blond avait le même air abasourdi que moi. Tengen nous fit signe de lui laisser de l'espace.

Tengen - Souffle du son, premier mouvement. Tonnerre !

Ses nichirins frappèrent le sol et, avec un grondement, il nous fit tomber dans le trou. Nous atterrîmes sous une grande voûte qui reliait des galeries entre elles.

Kyôjurô - Par où il est partit ?

Tengen - Déjà pas par ici.

Il montra des galeries qui s'étaient écroulées suite à l'explosion. Il y avait beaucoup de bruit et de poussières. Je me suis donc concentré sur mon odorat et c'est alors que je les ai retrouvé. Un fumé putride et humain provenait d'un passage encore ouvert.

Shizumi - Je les ai, par là !

Je me suis élancé dans le tunnel, les garçons sur mes pas. Nous avons finalement atteint le bout et nous sommes arrivés dans une clairière proche d'une grotte. J'ai tendu l'oreille pour vérifier que le démon était bien là.

??? - Et bien, ils sont allés chercher des pourfendeurs plus compétent. Mais même si ils ont trouvé les galeries, ils ne me trouveront pas.

Je n'entendis pas la voix de la femme, surement trop effrayé pour parler. Je me suis tourné vers Tengen et Kyôjurô.

Tengen - Quel idiot...

Shizumi - Je vais y aller. Je suis plus petite et plus chétive. Je vais me glisser derrière lui et je vous l'enverrais.

Tengen - C'est un bon plan.

Kyôjurô - Que veux tu dire par "enverrais" ?

Tengen - Fais lui confiance, tu verras, c'est flamboyant.

Kyôjurô - Très bien.

J'ai acquiescé puis je suis entré dans la grotte. Plus j'avançais et plus il faisait sombre. J'ai réussis à voir deux ombres, l'une très grande et musclé, et une autre plus frêle et tremblante. J'ai sauté et je me suis glissé entre les deux.

Shizumi - Souffle du cerisier, deuxième mouvement. Bourgeon.

Je tournais rapidement mon katana devant moi, coupant les bras du démon en le faisant reculer. Le katana continuait de tournait, faisant comme un bouclier. Je profitai de la surprise de mon adversaire pour arrêter mon sabre et lui donnait un coup de pied. Le démon vola à travers la grotte et fut accueilli à la sortie par les deux autres piliers. Je me suis retourné vers la pauvre femme qui tremblait encore.

Shizumi - Est ce que vous allez bien ? Vous n'êtes pas blessé ?

Dame - Je... Non... Oh mon dieu, qu'est ce que c'était ?

Shizumi - Un démon.

Dame - Un démon ? Mais...

Elle avait l'air de ne pas vouloir y croire. Mais elle ne pouvait pas nier ce qui lui était arrivé.

Shizumi - Oui, ils existent vraiment. Mais vous ne risquez plus rien maintenant.

Dame - Merci infiniment de m'avoir sauvé.

Shizumi - De rien, venez avec moi, on va vous ramener chez vous.

Dame - "On" ?

Shizumi - Je suis accompagné, mais ne vous inquiétez pas, vous êtes en sécurité.

Je l'ai aidé à se relever et nous sommes sortis de la grotte. Elle fus un peu effrayé par Tengen mais vite rassuré par la présence de Kyôjurô. Pendant tout le trajet, la femme n'avait pas arrêté de nous remercier, ce qui plaisait beaucoup à Tengen.

Après avoir laissé la dame chez elle, nous sommes allés aux portes de la ville.

Kyôjurô - Et bien, merci pour tout.

Tengen - Avec plaisir.

Shizumi - Oui de rien.

Kyôjurô - Je suppose que vous allez rentrer vous reposer.

Tengen - Non, on a encore quelqu'un à aller voir.

Shizumi - Ah bon ?

Tengen - On va aller voir ta copine à tresses.

Shizumi - Mitsuri ?! Oui !

Les deux hommes rigolèrent de ma réaction enfantine. Nous nous sommes ensuite dis au revoir et nous avons entamer notre route sous le lever du soleil. Nous devions maintenant nous rendre : au village des forgerons.