3. Conter la peur
*ellipse de préparation au dodo*
- Russie...
- Oui, Biélo ?
- J'aurais un petit caprice, là, maintenant, tout de suite, du haut de mes 19 ans...
- Lequel ?
- Tu pourrais me raconter "La Fille du lys et de l'absinthe" ?
- Tu veux en faire profiter (t/p), ou quoi ? Aller, allonge-toi, je te la raconte.
- Je peux écouter ? Ça m'intéresse.
- Donc, gnagnagna, y a un empereur et une impératrice...
- Plus sérieusement s'il te plaît !
- ... qui règnent sur l'empire Rouge. Ils ont tout ce qu'on peut avoir, sauf une chose : un enfant. Un jour, deux petits vieux s'arrêtent devant le palais. Le premier petit vieux dit :
- Tu sais qui vit ici ?
- Bien sûr que je sais, répond l'autre vieux. Un empereur et son impératrice. Ils ont tout ce qu'on peut avoir, mais ils leur manque un enfant, et ils sont très malheureux.
- C'est ça. Seulement, reprend le premier vieux, si la reine buvait de la rosée récoltée au petit matin sur les pétales du lys et de l'absinthe, dans un an et un jour, elle mettrait au monde une belle petite princesse.
- Oui. Mais, continue le deuxième vieux, tout ce qui vient des fleurs retourne aux fleurs. Ainsi, il faut que personne ne parle de cela à la reine. Sinon, son malheur sera encore plus grand.
- Oui, c'est mieux ainsi, termine le premier vieux. Allons-y !
Et ils reprirent leur chemin. Seulement, une vieille mendiante les avait écoutés, et courut annoncer cela à la reine. Sur ce qui attendait la petite princesse, la mendiante n'en parla point. De toute façon, cela n'aurait servi à rien. Dès que la reine eut entendu ce qu'elle voulait entendre, elle ne voulut rien savoir d'autre. La reine fit ce que la mendiante lui avait recommandé, et au bout d'un an et un jour, la reine mit au monde une petite fille ravissante, à la peau blanche comme le lys, et dont les cheveux sentaient bon comme l'absinthe. C'était la plus belle petite fille du monde. Or, plus cette belle petite fille grandissait, plus elle évitait les gens, préférant la compagnie des fleurs. Au bout d'un temps, ses parents songèrent à la marier. Seulement, la princesse refusait d'entendre parler de mariage. À chaque fois qu'un de ses nombreux prétendants abordait le sujet, elle lui disait :
- Non prince, avec moi tu ne serais pas heureux.
Et elle le disait avec une voix si triste, et elle le disait si sincèrement que tous la croyait. Après un certain temps, un prince vint au château. Il venait d'un empire lointain. Comme tous les autres, au moment où il aborda le sujet du mariage, la princesse lui dit :
- Non prince, avec moi tu ne serais pas heureux.
Et elle le disait avec une voix si triste, et elle le disait si sincèrement que tous la croyait. Mais pas ce prince. Il rigola et lui demanda :
- Et pourquoi cela, princesse ?
- Parce que le lys dans le jardin m'a dit : Petite, quand on t'enfilera ta robe de mariée, ton heure viendra. Et l'absinthe m'a dit : Petite, quand on te posera ta couronne de mariée sur ta tête, tu retourneras parmi nous.
Et le prince rit de nouveau, ne la croyant pas du tout. Était-elle folle à lier, cette princesse, pour parler aux fleurs ? Le mariage eut tout de même lieu, au grand bonheur des parents de la princesse. Quand on enfila la robe de mariée à la princesse, elle pâlit. Quand on lui posa sa couronne de mariée sur la tête, elle ferma les yeux, comme si la mort l'avait frappée. Et enfin, quand le prince la prit dans ses bras, la princesse avait disparu. Volatilisée. En fait, elle s'était transformée en fleur. Le prince rapporta dans son pays du chagrin et une petite fleur. Les gens l'appellent la camomille, mais en fait, c'est la princesse avec sa couronne de mariée autour de sa tête dorée.
- C'est une tristement belle histoire. Conclus-je.
Russie hocha la tête en signe d'approbation. Quant à Biélorussie, elle s'était endormie. Il me fit signe de le suivre. Nous retournâmes à la salle à manger. Nous nous assîmes tous deux, nous regardant dans les yeux. Russie trancha le silence.
- Tu sais pourquoi je gâte tant Biélorussie ?
Je secoue la tête.
- Bien. Laisses-moi t'expliquer. De base dans tous mes frères et sœurs, je ne connaissais que Ukraine et Biélorussie. Et Biélo, c'était la plus jeune. Et puis on avait un père... horrible. Et Ukraine et moi, on a tout fait pour qu'elle ne voie pas toutes les atrocités qu'a fait notre père. Et surtout...
- Surtout ?
- ... Qu'elle ne se fasse pas... tu comprends ce que je veux dire ?
Je reste figée, la bouche ouverte, choquée.
- Tu veux que dire que toi et Ukraine, il vous a... non, dis-moi que ce n'est pas vrai...
- Si. Mais on tout fait pour protéger Biélo.
Sa voix commençait à trembler.
- En plus, il était si brutal... elle, qui est si fragile, elle aurait... non, non, non ! Oh, elle aurait... je... heureusement que... mon dieu...
Sa voix, pourtant grave, commençait à prendre des accents aigus. Il faisait noir, mais je pouvais voir des larmes couler sur ses joues.
- Non... oh... oh... NON !
- Calme-toi...
On approchait presque la démence. Il avait peur. Je ne savais pas comment faire pour l'aider. Le souvenir de la brutalité de son père était une cicatrice encore ouverte dans sa vie.
- Je... UKRAINE ! VIENS, VITE !
J'entendis des pas dévaler l'escalier.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
- C'est... Russie... je...
Elle se planta devant Russie, le regardant dans les yeux. Lui avait le regard fuyant.
- Tu lui as parlé de papa ?
Il fit une sorte de soupir terrifié.
- Tu sais bien qu'il ne fallait pas... oh, maintenant tu vas me contaminer avec ta peur ! Fit-elle avec un petit rire crispé.
Elle aussi avait très peur, mais elle ne le montrait pas directement. Elle le prit par les épaules.
- Maintenant, moi aussi j'ai très peur, bravo... mais... oh, je ne sais pas, pense à Amé, par exemple !
Les traits de Russie se détendirent peu à peu.
- Pense que Biélo, grâce à nous, va très bien aujourd'hui !
J'aurais tellement aimé avoir des grands frères ou grande sœur comme eux... prêts à tout pour protéger leur petite sœur. Ils avaient fait de grandes sacrifices pour elle, et je les respectais pour ça. Je ne me pense pas capable de la même chose.
* le lendemain *
PDV extérieur
Un homme était assis à un bureau, en train de traiter tous le dossiers qu'on lui avait donné.
- Est-ce que tu pourrais remplir ces papiers là, s'il te plaît ? Lui demanda un autre homme en lui tendant lesdits papiers. C'est urgent.
- Bien sûr, aucun problème. Lui répondit-il avec un sourire hypocrite.
De toute façon, il n'allait plus le voir dans longtemps...
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