Partie 5

Elle me souriait et j'aurais tué n'importe qui aurait essayé d'assombrir son expression de bonté et de gentillesse pure.

— Il y a beaucoup de puissance en toi, chuchota-t-elle.

Elle me tapota la tête.

— Avant toutes choses, je pense qu'un repas et un bain sont nécessaires, ensuite nous parlerons de ton avenir, d'accord ?

Je hochai la tête avec enthousiasme à la pensée de remplir mon estomac. Elle claqua des doigts et une autre femme, plus jeune, entra et s'inclina devant elle.

— Gilda, mon petit, je te charge de t'occuper de notre invitée. Tu la conduiras à la cuisine et aux bains et tu lui donneras des vêtements propres.

Le ton restait aimable mais drapé d'autorité qui excluait toute contestation.

— Oui, ma Dame, répondit la jeune femme, une pointe d'étonnement dans la voix.

— Ne t'en fais pas, notre jeune amie est muette et cela m'étonnerait qu'elle reste très longtemps parmi nous.

— Bien, ma Dame. Tu viens ?

Elle me tendit la main et je me levais, incertaine quant à l'attitude à adopter face à ma bienfaitrice au statut sans doute mille fois supérieur au mien. À mon plus grand étonnement, elle se leva et posa un baiser sur mon front, avant de me faire pivoter en direction de Gilda, elle-même médusée.

— Aller, va, souffla-t-elle.

Mon escorte s'inclina tandis qu'elle disparaissait par une autre porte. Quand elle se redressa, elle me dévisagea un instant avant de soupirer. Elle me tendit la main et je l'attrapai. Elle me guida de cette manière jusqu'à une immense pièce. De longues tables bordées de bancs en bois traversaient l'espace dans sa longueur. Gilda me fit asseoir à une extrémité, près d'un mur.

— Attends-moi ici, je reviens.

Je hochai la tête pour marquer ma compréhension et la suivie des yeux tandis qu'elle s'éloignait vers un comptoir au bout de la pièce. Je supposai que nous étions dans une salle à manger, ou plutôt une cantine. Il n'y avait personne pour le moment, mais j'imaginais bien l'endroit plein de monde à l'heure des repas.

« Elle a quand même dit que nous ne resterions pas longtemps. »

« Je sais, j'ai entendu. »

« Sa magie est puissante, il faut nous méfier. »

« Difficile quand le simple son de sa voix nous empêche de penser. »

« Je pense que c'était un test. La chanson avait pour objectif de t'appeler, voir si tu pouvais l'entendre. Je ne pense pas qu'elle recommencera. »

« Tu sais beaucoup de choses sur la magie. »

« J'ai longtemps fréquenté les gens qui la pratique.... Je crois ?»

— Et voilà de quoi faire cesser tes gargouillis ! nous interrompit Gilda.

Ce qu'elle déposa devant moi avait tout d'un festin. De larges tartines de pain blanc, un verre de lait chaud. J'écarquillai les yeux quand je trouvais dans un pot quelque chose d'inconnu. Intriguée, je portai le récipient à mon nez. Une odeur sucrée et piquante me remplit les narines.

— D'où viens-tu pour n'avoir jamais vu de confiture ? rit la jeune femme en face de moi.

Je relevai les yeux et retint une réponse amère.

— Ça se mets sur le pain, ça a meilleur goût comme ça, m'expliqua-t-elle.

Il n'y avait pas de méchanceté dans sa voix, seulement de la curiosité naïve. Elle me montra comment utiliser l'instrument qui plongeait dans le pot pour en étaler sur le pain avant de me tendre une tranche.

— Mange.

Je ne me fit pas prier et croquai dans la tartine. Je mâchai avec délice. C'était la meilleure chose que j'avais jamais mangé. Je ravalais avec difficulté un gémissement de plaisir. Mon expression devait être suffisamment parlante car Gilda sourit en secouant la tête.

— Eh bien, je crois que tu n'as pas fini de te régaler, ici.

La première bouchée avalée, j'en pris aussitôt une deuxième, plus grosse. J'avalais le contenu du plateau avec de plus en plus d'avidité. Ma gardienne m'attrapa le poignet alors que j'attaquai une troisième tartine et je me dégageai par réflexe.

— Doucement, tu vas te rendre malade ! m'avertit-elle, les mains en évidence.

Je me rendis compte qu'elle se comportait avec moi comme avec un animal apeuré. Tous ses gestes étaient mesurés.

« Elle a raison, tu sais. »

« Mais j'ai faim ! Ça fait des semaines que j'ai pas eu autant à manger ! »

« Essaye de te comporter un peu plus comme un être humain et un peu moins comme une bête affamée, ça nous rendra service. »

Je tentai tant bien que mal de réduire la cadence, ce qui devint plus facile avec un ventre qui tanguait sous l'afflux brutal de nourriture en quantité.

Quand j'eus avalé la dernière miette, je posais les deux mains sur mon ventre gonflé et grognai.

— Je t'aurais prévenue, souffla Gilda. Aller viens, un peu de marche jusqu'aux bains te fera du bien.

Elle se leva et me tendit la main. À nouveau je la suivis dans les couloirs jusqu'à pénétrer dans une pièce pleine d'humidité.

— Enlève tes... vêtements, laisse-les là, ils sont bons à jeter.

Je baissais les yeux sur les morceaux de tissus cousus ensembles qui couvraient mon corps. Bon à jeter selon eux !

« N'oublie pas que tu vas être amener à les fréquenter. Et puis je ne cracherais pas sur un bain et des vêtements propre à ta place, de vrais vêtements. »

Je soupirai et me déshabillai lentement. Gilda me dirigea vers une petite porte. Dernière se cachait un bassin d'eau d'où s'élevait de la vapeur. Je mis un moment avant de m'habituer à la température de l'eau mais finit par m'immerger avec délice. Un mouvement dans l'eau me fit sursauter. Gilda m'avait rejoint, entièrement nue.

« Jolie. »

« Eh ! »

Je fermai les yeux aussitôt. Autant la nudité de la jeune femme ne me dérangeait pas tant que ça, autant je préférais que la voix ne la reluque pas à son insu.

« Bon je suppose que je peux te laisser quelques minutes sans que tu fasses de bêtises. » ricana-t-il avant de s'effacer de ma conscience.

— Ça va ? m'interrogea la concernée, étonnée par ma réaction.

Je rouvris les paupières et hochai affirmativement la tête.

— Désolée, mais j'ai pensé que comme tu n'avais sans doute pas l'habitude de ça non plus, il valait mieux que je t'aide. Si ça te gêne, je peux attendre de dos ou dehors. »

Je fit non de la tête, saisissant son poignet pour lui signifier de rester. Elle hocha la tête et entreprit de m'expliquer ce qu'étaient les différents produits sur le bord du bassin. Je l'écouta en l'examinant plus attentivement. Plus jeune que je le pensais, elle avait peut être trois ou quatre ans de plus que moi. Avec ses longs cheveux blonds tressés, ses yeux verts et sa peau pâle et sans défauts, elle ressemblait aux poupées que je pouvais parfois apercevoir sur le marché.

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