Partie 24
Cet incident scella notre amitié. Elle y gagna la protection contre ses tourmenteurs, qui n'osaient plus l'approcher. J'y gagnais une autre personne de confiance. Bien sûr les autres murmuraient dans notre dos, mais je n'y prêtais pas attention, et je lui appris à ne pas le faire non plus. Gilda et Wendy étaient ravies de la relation que nous entretenions. Tout doucement, la confiance et l'affection s'installèrent au rythme des conversations, des rires et de nos séances d'étude.
Le printemps s'installait à l'Abbaye quand elle me murmura son prénom un soir. Nous étions installées sur mon lit, penchées sur un livre de contes, enroulées dans la même couverture.
— Je peux me confier ? demanda-t-elle.
— Tu veux me dire quelque chose ?
Elle hocha la tête et se pencha pour me murmurer à l'oreille.
— Maya.
Je sursautai et m'écartai pour la dévisager.
— Que... pourquoi ?
— Tu es mon amie. J'ai ma confiance en toi, déclara-t-elle.
Devant mon manque de réaction, elle se ferma et commença à se lever.
« Réagis ! » me somma Ulrich.
J'agrippai son poignet et la ramenai près de moi.
— Astrid, chuchotai-je à son oreille.
Je me reculai un peu avant d'ajouter :
— Je m'excuse d'avoir réagi comme ça, je n'ai pas l'habitude que les gens me fasse assez confiance et m'aime pour me confier leurs prénoms. Le tien est très joli, Maya.
Elle rit doucement et se serra contre moi.
— Moi et toi nous ressemblons.
— Oui... soufflai-je.
Nous dormîmes ensemble cette nuit-là. J'avais découvert entre autre chose que ma nouvelle amie était très tactile et en demande d'affection. Elle faisait également des cauchemars, mais refusait d'en parler. Il n'était pas rare qu'elle vienne me trouver la nuit pour se blottir contre moi. Je me contentai de la serrer dans mes bras jusqu'à ce que ses larmes sèchent et qu'elle se rendorme.
Une caresse sur mon front et un parfum familier me tirèrent du sommeil. Je battis des paupières et un visage familier envahit ma vision.
— Vous allez être en retard, me sourit la Dame Blanche.
Je soupirai, remontai les draps sur ma tête en soupirant. Elle rit, tira dans l'autre sens et posa son front contre le mien.
— Deviendrions-nous paresseuse avec le temps ?
— J'avoue que nous nous sommes couchées tard.
Elle m'embrassa sur le front et se redressa.
— Ça me fait plaisir que vous vous entendiez, toutes les deux. Mais il ne faut pas négliger votre sommeil pour autant.
— Je sais, c'est juste que... elle fait des cauchemars et j'ai l'impression de ne pas pouvoir l'aider.
Le visage de Wendy s'assombrit et elle passa la main dans les cheveux de Maya qui ne broncha même pas.
— Crois-moi, ce que tu fais est déjà beaucoup. Je ne connais pas toute l'histoire, mais ça a été très difficile pour elle. Mes contacts l'ont trouvé dans un camp de prisonniers à la frontière sud. Je me tournai vers ma nouvelle amie et agrippai sa main sous les couvertures.
— Elle est spéciale aussi, hein ?
— Pas comme toi tu es spéciale, mais oui, me confirma la magicienne. Dans quelques années, si tout se passe bien, elle sera à nos côtés.
Les caresses répétées de ma protectrice avaient finalement éveillé Maya qui s'agita avant d'ouvrir les yeux. Elle sursauta en découvrant la Dame Blanche penchée sur elle et bafouilla. La magicienne sourit, appuya sur ses épaules pour la maintenir allongée et posa un doigt sur ses lèvres.
— Bonjour, jolie demoiselle. Il n'y a pas besoin de s'agiter comme ça, tout va bien.
— Mais vous... je...
Je me redressai et appuyai ma tête sur l'épaule de Wendy, perturbant encore plus Maya qui bégaya encore d'autres paroles incohérentes.
— T'inquiète, elle ne mord pas et elle ne transforme personne en grenouille, plaisantai-je.
— Dit donc toi, rit la magicienne en m'écartant d'un mouvement d'épaule.
— Uh... souffla Maya.
Wendy comprit vite que sa présence et surtout son comportement, perturbaient ma nouvelle amie plus qu'autre chose. Elle m'embrassa sur le front et se leva.
— Je vais vous laisser tranquille, j'ai des choses à faire, nous annonça la Dame Blanche. Tâchez de ne pas être trop en retard, hm ?
Elle repartit et ferma la porte entre ses appartements et ma chambre.
— Mais... c'était...
— Ouais, c'était elle.
— Comment ? réussit à articuler mon amie en se redressant.
— Elle m'apprend la magie, expliquai-je. Et nous avons des points communs qui nous on rapprochés. Elle est très gentille en vrai.
— J'ai entendu des rumeurs que vous êtes proches...
— Honnêtement, je ne sais pas laquelle de nous deux a ensorcelé l'autre, ricanai-je. Peut-être un peu des deux.
Elle me jeta un regard surpris et je rit franchement :
— Je plaisante, Maya. Personne n'a utilisé de magie obscure sur personne. Il y a juste certaines relations qui sont... qui sonnent si juste que parfois on pourrait croire que c'est de la magie.
— Je comprends, je crois...
J'hochai la tête. Je me doutais bien qu'elle ne comprenait pas la totalité de ce que cette relation impliquait. Même moi je n'en avais pas totalement conscience. Pourtant nous étions deux à songer à ces questions.
« Hm, il faut dire que j'ai été légèrement occupé ces derniers temps. »
« Sans blague. »
Tandis que je me levai et m'habillai, Maya dans mon sillage, je sentis Ulrich sourire dans un coin de ma tête. Durant les mois précédents, il avait retrouvé de plus en plus de souvenirs. Si il avait longtemps médité sur certains actes qu'il avait commis, il avait fini par renoncer à se tourmenter à propos de sa vie passée. Avec le retour de sa mémoire, il avait acquis une nouvelle indépendance à mon égard. Il allait et venait librement, que je sois éveillée ou endormie, dans un rayon d'une centaine de mètres.
Il avait mis sa nouvelle liberté à profit, examinant les rouages de l'Abbaye, comprenant sa hiérarchie, écoutant les rumeurs sur les autres branches de l'Eglise. Il me faisait des rapports chaque fois qu'il le pouvait et j'avais ainsi acquis une excellente connaissance de ceux qui gravitaient autour de la Dame Blanche. Ceux qu'elle appréciait ou non, ceux qui étaient de son côté, ceux qui ne l'étaient pas et surtout, ceux qui représentaient une menace.
« Tu admettras que ne pas mettre un espion invisible et que personne n'entend à profit serais du gâchis. »
« C'est une certitude. La connaissance est la meilleure arme du monde. Surtout quand nos adversaires l'ignorent. »
« Surtout quand ils ignorent que tu es une adversaire. »
« Et qu'ils ignorent ta présence. »
« Exact. »
« Où vas-tu aujourd'hui ? »
« La Dame Blanche a une réunion avec ses conseillers, il semblerait que nous ayons des nouvelles du Cardinal. »
« Hm. Elles ne sont jamais bonnes. »
« Non, je crains que les plans de notre amie voyaient à trop long terme. »
« Sois vigilant. »
« Ne t'inquiète pas j'ouvrirai grand les yeux et les oreilles. »
Il s'effaça tandis que j'atteignais la salle àmanger. Comme d'habitude, Maya et moi prîmes notre repas dans un coin. Nousmangeâmes rapidement et rejoignirent Gilda pour nos cours habituels.
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