Chapitre 25 :

Lumi ouvre les yeux pour se retrouver au milieu d'un sentier bordé d'une multitude de tournesols blancs, sous un ciel noir couvert d'étoiles. Elle réalise que c'est un rêve en reconnaissant sa robe blanche habituelle. En scrutant les alentours, la jeune fille remarque que le décor lui est familier, en plus de cette ambiance étrange. Peut-être a-t-elle déjà fait ce rêve il y a quelque temps ? Difficile de s'en souvenir avec sa mémoire actuelle, et cela ne semble pas particulièrement important, de toute manière. Alors qu'elle s'apprête à avancer, elle s'interrompt en se rendant compte qu'elle n'est pas seule. Il y a quelqu'un d'autre, quelqu'un qu'elle connaît bien.

— Ambre ?

Habillée d'une robe noire, Ambre est immobile au milieu du chemin, le regard dans le vide. Son corps grésille, comme s'il peinait à se maintenir dans ce monde. Ça surprend Lumi, est-ce que c'est bien son amie ? Ça semble être le cas, sinon sa mémoire n'aurait pas créé un PNJ inabouti, en dépit de toute sa flemmardise pour accomplir les objectifs oniriques. Mais si c'est bien Ambre, alors c'est une surprise, voire quelque chose d'exceptionnelle, qu'elle ait intégré son rêve. Contente, Lumi s'approche de la blondinette, elle ne cherche pas à savoir comment c'est possible, elle veut juste pouvoir s'amuser encore un petit moment. Ambre finit par la remarquer et écarquille les yeux, comme si elle l'avait reconnue. Sauf que sous le coup de la surprise, son corps se met à se déformer de plus en plus, signe qu'elle risque de se faire éjecter d'un moment à l'autre. Paniquée, la recluse intervient aussi rapidement que possible. Elle pose ses mains sur les épaules de son amie et essaye de la guider.

— Ambre ! Ambre ! Calme-toi, ne panique pas ! Applaudis ou tape le sol avec ton pied !

La blondinette montre une expression perplexe, ce qui peut être compréhensible vu combien les indications sont étranges. Lumi s'en aperçoit et lui explique vaguement la raison.

— Ouais, c'est bizarre, mais ça te permet de te stabiliser, fais-le !

Ambre s'exécute et se met à applaudir avec beaucoup de difficultés. Après quelques secondes, son corps reprend sa forme normale, ce qui ne manque pas de la surprendre. Grâce à ça, la blondinette arrive à mieux cerner le paysage autour d'elle, ainsi que son amie, elle n'arrivait à voir qu'un écran de poussière. Lumi se montre perplexe, elle penche sa tête sur le côté et questionne son interlocutrice :

— C'est toi, Ambre ? C'est genre, vraiment toi ?

La blondinette acquiesce faiblement. Elle n'arrive pas à parler, c'est comme si sa mâchoire était anesthésiée ou trop fatiguée. Lumi montre un grand sourire à l'idée de pouvoir côtoyer son amie dans un endroit aussi familier que les rêves, pourtant, elle se doute qu'Ambre ne doit pas être habituée aux rêves complexes et ce n'est pas bon signe. Pourtant, la recluse ravale sa tristesse et tient la main de son amie et la guide.

— Super ! Viens, on va se balader un peu, alors.

Ambre réussit à serrer la main de son amie et à ce contact, elle sent qu'elle peut se mouvoir plus facilement. En marchant, ses jambes deviennent de moins en moins rigides, même si elle n'est pas à son aise. Les deux amies s'avancent sur la route, entourées de tournesols. Pendant le trajet, Lumi fait la conversation pour que son amie ne se sente pas anxieuse. Cette dernière se sent perturbée ; sa mémoire est floue, trop floue, la dernière chose dont elle arrive à se souvenir est une vague discussion dans la tente avant de s'être endormie. Essayer de se rappeler un détail lui demande beaucoup trop d'efforts et la fatigue, alors elle préfère abandonner, en se disant que ça ne doit pas être bien important.

— Je crois que j'ai déjà fait ce rêve, raconte Lumi. Ma mémoire onirique m'avait dit d'aller tout droit là, mais j'ai pas obéi et je sais toujours pas pourquoi j'ai fait ça. J'agis pas de manière très smart, faut se l'admettre.

La noiraude émet un petit rire pendant que son amie observe le paysage. Il est un peu trouble, mais elle parvient à discerner la multitude de tournesols qui les accompagnent. Ça lui semble joli, malgré ces traits très bruts. Sa mémoire devient de moins en moins brumeuse, Ambre arrive à se souvenir que son amie avait un monde onirique particulier. C'est donc ça les rêves de Lumi ? Ça ne ressemble en rien à des rêves normaux, même ceux qui sont très complexes. Elle a l'impression d'être dans un autre monde tellement l'ambiance est mystique.

— Enfin si, je sais pourquoi j'évitais d'accomplir les objectifs qu'on me donnait, rectifie Lumi. Je ne voulais juste pas mettre des efforts dans quelque chose pour me rendre compte que ça ne valait pas la peine.

Lumi montre une expression beaucoup plus neutre, même sa voix semble moins chantante que d'habitude. Elle ne daigne pas regarder le décor autour d'elle, puisqu'il ne doit pas être plus différent de ses précédents rêves. La jeune fille se montre pensive, bien plus que d'habitude, et elle se lance dans une confidence :

— Tu sais, ta rencontre m'a fait autant de mal que de bien. Même si je pense qu'elle m'a fait beaucoup de mal, car tu m'as rappelé que je ne croyais qu'en des mensonges même si je voulais qu'ils soient des vérités. J'ai même commencé à regretter de t'avoir rencontrer, c'était bête de ma part. Je ne voulais pas espérer inutilement et souffrir derrière.

Son interlocutrice se montre surprise. Est-ce que c'est vraiment son amie ? Même si ses souvenirs sont troubles, elle a tout de même l'impression que ce n'est pas le comportement habituel de Lumi. Ambre essaye de dire quelque chose, mais elle ne peut toujours pas parler, ce qui la chagrine, tout ce qu'elle peut faire c'est marcher et bouger la tête.

— Mais maintenant que je m'en rends compte, je ne sais pas où aller. J'ai voulu traîner ma période d'enfance encore longtemps, mais ça fait je-ne-sais-plus combien de temps que tout le monde remarque qu'il y a quelque chose qui va pas chez moi. Je pense qu'ils ne comprennent pas que je voulais éviter de voir la vérité en face, que j'avais peur de l'avenir, que j'avais peur du changement, que j'avais peur de comprendre que je me dirige peut-être vers une vie de ratée, explique-t-elle en se grattant la tête. C'est bizarre, car en même temps, il y avait cette voix dans ma tête qui me disait que c'était inévitable.

Lumi s'arrête lorsqu'elle aperçoit un papillon virevolter au-dessus d'elles. Elle lève doucement son index, pensant que l'insecte se poserait dessus, mais il finit par voler un peu plus loin. Ambre essaye d'ouvrir sa bouche, mais ça lui est toujours impossible, déjà qu'elle a du mal à marcher avec des jambes qui fonctionnent comme des bouts de bois rigides. Mais elle se fait violence pour tenter de briser cette drôle de barrière pour communiquer avec son amie.

— En vrai, je me demande si je ne voulais juste pas vivre encore dans le déni. Ça m'aurait posé des problèmes avec le temps, mais même si je ne faisais que semblant d'aller bien, ça veut quand même dire que j'allais bien. Après tout, j'ai peur de ce que je ne vois pas et j'ai peur de ce qui pourrait mal se passer.

La blondinette se montre perturbée. Comment Lumi pouvait déblatérer autant de propos négatifs avec un ton aussi détaché ? Est-ce qu'elle en est vraiment affectée ? Elle se demande même si elle n'est juste pas en train de faire un rêve étrange, même si elle ne fait pas de rêve aussi complexe que ça. En essayant de bouger le corps, Ambre se rend compte qu'elle arrive à bouger un peu les doigts de sa main libre, et même de fermer le poing. Lumi continue son monologue, avec le regard évasif :

— C'était peut-être de ça que parlait Rashomon. Je crois pas qu'il disait que l'être humain était un déchet, je crois juste qu'il disait que l'être humain était le seul à changer la réalité pour des raisons simples. On la change pour qu'elle soit plus supportable et moins morose pour nous, explique-t-elle avant de hausser légèrement les épaules. Enfin, je pourrai jamais en être sûre, j'ai pas regardé la pièce de théâtre. Je n'ai jamais su m'intéresser à ce qui me faisait ni chaud ni froid.

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Lumi marque une pause, elle aperçoit un banc qui ne lui est pas inconnu. Même Ambre semble le reconnaître et écarquille les yeux. Il s'agit du banc en bois de leur première rencontre. Ce qui est très poétique, même s'il ne s'agit pas du vrai, elles auront l'illusion de passer les derniers instants dans ce lieu symbolique. La recluse entraîne son amie et l'aide à s'asseoir avant de s'installer à côté d'elle. À l'horizon, il n'y a rien à voir, juste une pelouse blanche et un ciel noir. C'est déprimant, mais Lumi l'observe avec un sourire presque paisible.

— Désolée pour le décor, j'aurai voulu que ce soit plus coloré ou chatoyant, j'espère que tu trouves ça joli quand même ?

À cette question, la blondinette acquiesce et son interlocutrice se met à sourire faussement. C'est étrange, tout semble différent. Ça aurait dérangé Lumi, mais plus maintenant, elle ressent juste une drôle de paix intérieure.

— C'est bizarre, je me demande pourquoi je me sens autant détendue alors que mon avenir sera nul à chier, rigole-t-elle nerveusement. Peut-être parce que t'es avec moi ? En tout cas, c'est dommage que tu partes, j'ai trouvé ça tellement injuste de vivre un bon moment avant de devoir retourner dans mon quotidien sans intérêt. C'est tellement injuste, mais c'est peut-être le destin des ratés comme moi.

— Lumi.

Ambre laisse échapper un son, elle sursaute puisqu'elle ne se doutait pas qu'elle réussirait à parler. Ça surprend son interlocutrice. Mais elle a l'impression d'avoir brisé une sorte de barrière et elle arrive à se mouvoir beaucoup plus aisément.

— Oh Byby, tu peux parler ?

— Arrête de dire ça, arrête de dire que tu es une ratée, réussit-elle à dire avec toute la conviction qui était bloquée à cause de son mutisme.

— Hein ?

— Tu as peur Lumi. Je sais que tu as peur. Tu t'insultes et tu te rabaisses, car tu as l'impression que ça peut te soulager d'une quelconque façon, mais en réalité, tu as peur, car tu ne sais pas où tu vas.

— Tu crois ? rétorque Lumi, déstabilisée.

— Ton avenir te fait peur uniquement, car tu es seule à l'affronter. Tu n'avais personne avec qui en parler, tu n'avais personne pour dire quand tu te sentais pas bien, c'est pour ça que tu as tellement peur de trouver une sortie à ce labyrinthe, car tu devais tout faire seule.

Lumi reste muette, à son tour. Elle montre de la surprise. Ambre serre la main de son amie pour montrer toute sa certitude.

— Je te l'avais promis, tout ce que je t'ai dit n'est pas du vent : je veux t'aider. Je veux t'aider à avancer comme je peux, on va essayer de s'aider mutuellement. Même si je me trouve en France, sache que tu ne seras pas seule, répète Ambre. Crois-moi, les kilomètres ne changeront rien.

À ces paroles, Lumi montre de nouveau ce sourire étrange : un sourire triste, masqué par un sourire poli qui se veut rassurant. Elle n'y croit pas. Il est facile de deviner qu'elle considère ces mots comme une promesse qu'on peut briser avec le temps. Mais Ambre a une dette à payer : elle lui doit beaucoup, pour tout l'encouragement qu'elle a reçu et pour tous ces mots qui l'ont aidé dans sa quête de rédemption envers son ancienne camarade. Alors la blondinette bouge son bras et montre l'auriculaire de sa main :

— Lumi, ça te dit qu'on fasse une promesse ?

— Hein ?

— Faisons une promesse, ensemble. On va se promettre qu'on se reverra dans cinq ans, en ayant avancé dans notre quête respective.

— Hein ? répète Lumi avec un peu plus de surprise dans sa voix.

— Tu vas te mettre un CFC¹ dans la poche, je vais apprendre à me pardonner et on va fêter ça ensemble chez moi, à Paris.

— Pourquoi cette promesse ? rigole nerveusement la noiraude. Ça me met trop de pression, je sais même pas faire des trucs simples, je suis pas sûre de réussir à avoir un apprentissage vu comme je suis limite un cas perdu.

— C'est faux. Je ne sais pas ce que pense les gens de toi, mais je t'ai suffisamment côtoyé pour savoir que tu as beaucoup de ressources pour aller quelque part dans la vie.

— Je sais que tu dis ça pour être gentille, je la connais la vraie-

— Je te l'ai déjà dit Lumi, la coupe Ambre. Je ne sais pas être gentille. Si je te dis que tu as les ressources nécessaires pour avancer, c'est que je le pense vraiment.

Dans ces paroles, la parisienne ressent le regret de devoir partir demain. Mais elle ne regrette rien, elle est même contente d'avoir pris cette décision et d'avoir eu le courage de sauter le pas.

— Les choses seront différentes à partir de maintenant. Je suis là pour t'encourager et tu ne seras plus seule pour affronter la fin du labyrinthe.

Lumi écarquille les yeux. Qu'est-ce qui se passe ? La jeune fille se sent moins effrayée à l'idée d'affronter le futur, est-ce juste ses paroles qui l'ont boostée ? Est-ce juste la peur d'avancer seule, dans son adolescence, qui la pétrifie ? La détermination contagieuse de la parisienne remplie Lumi d'un nouvel espoir, la recluse vient sceller son petit doigt avec celui d'Ambre, elle veut y croire. En fin de compte, elle a envie de sortir de sa chrysalide et affronter tout ce dont elle a peur. Elle ne veut plus vivre dans cette vie pathétique dont elle a horreur.

— Alors, on se fait cette promesse de s'aider et de se voir dans cinq ans. Cette fois, c'est moi qui t'accueillerais pendant les vacances et qui te ferais la visite, sourit Ambre.

— D'accord, répond Lumi en lui rendant son sourire.

— Ce n'est pas la fin, mais le début de quelque chose.

Lorsque la promesse se conclut, le jour commence enfin à pointer le bout de son nez, et le ciel se teinte d'un bleu pastel, balayant toute cette noirceur qui s'était accumulée ici bien trop longtemps. Les tournesols s'imprègnent de cette lumière et changent de couleur passant d'un blanc vide à un jaune dorée et se mettent à danser au gré d'un doux vent qui fait son apparition, ravis d'avoir retrouver leur éclat. Ce changement d'ambiance déstabilise Lumi, elle n'arrive pas à y croire, c'est vraiment son monde onirique ? Elle était habituée à un décor plongé dans des nuances de gris, elle ne peut pas croire que son rêve puisse faire un paysage aussi beau, aussi reposant. Émue et surprise, la recluse se met à sourire, avec son amie à ses côtés. Au-dessus de leur tête, le petit papillon virevolte encore un moment avant de s'envoler, loin en direction de la lumière.

***

Ambre et Lumi patientent sur le quai de la gare. Il n'y a personne d'autre qu'elles à cette heure, même le soleil ne s'est pas encore pointé. Un long silence persiste, brisé par les petits chants des moineaux qui viennent se balader sur les rails. Dans quelques minutes, elles vont devoir se quitter, cette pensée attriste Ambre. Ce n'est pas un adieu, mais les au revoir font toujours mal. Elle jette un coup d'œil vers la recluse, qui ne s'agite pas plus que ça et son visage ne montre aucun signe de tristesse. Lumi bâille juste de temps à autre, épuisée de s'être levée aussi tôt aujourd'hui. Cette dernière tourne le visage avec le sourire.

— Tu as bien dormi ? questionne Lumi.

— Hein ?

— Tu as bien dormi ? Tu as fait un beau rêve ?

— J'ai bien dormi, je crois que j'ai fait un rêve, mais je ne suis plus sûre.

Lumi montre un sourire qui ne laisse pas transparaître la tristesse qu'elle ressent. Elle le savait. Elle savait qu'Ambre n'arriverait pas à se rappeler du contenu d'un rêve aussi complexe. C'était évident. Elle a pourtant voulu y croire. Malgré cela, elle chérira ces souvenirs d'été chers à son cœur. Ce sera quelque chose de précieux, quelque chose qui a une valeur inestimable. Ce n'est pas très grave, après tout. La conversation s'évanouit assez vite et Ambre se souvient de quelque chose. Elle fouille vite fait dans une poche de sa valise.

— Hé Lumi, je t'avais fait une promesse.

— Hein ? sursaute son interlocutrice surprise.

— Enfin, je t'avais dit que je te brosserai les cheveux, explique Ambre en sortant un peigne. Tu me laisses toucher tes cheveux ?

La recluse laisse échapper un rire nerveux, mais elle accepte. Les deux amies s'assoient sur un banc et Ambre peigne la grosse masse de cheveux de son amie. C'est dense, rempli de nœuds, presque chaotique, mais une fois qu'elle a tout démêlé, le peigne passe facilement. Même si les cheveux sont un peu cassés, la parisienne peut voir qu'ils cachent un potentiel magnifique. Armée de deux élastiques, la blondinette fait des couettes basses à Lumi qui tripote sa chevelure. Ambre fouille dans son sac en bandoulière.

— Je suis désolée, je n'ai pas eu le temps de te trouver un meilleur cadeau, s'excuse Ambre. Je te promets de t'offrir quelque chose de plus joli, à l'avenir.

La parisienne montre deux barrettes, une avec un tournesol et une autre avec un poussin dessus. Elle les clippe sur les cheveux de Lumi, qui sourit en se regardant dans le reflet d'une vitre. C'est joli, elle les gardera précieusement dans un coffret dans sa chambre.

— Tu es jolie comme ça, complimente Ambre.

— Merci beaucoup, c'est très gentil. Tu sais bien coiffer les cheveux.

Le calme de Lumi serre le cœur d'Ambre. Elle aurait voulu la voir plaisanter, se lancer dans un monologue, ou n'importe quoi d'autre. Pourtant, la noiraude ne montre qu'un faux sourire, très touchée par ce départ. La blondinette n'aurait jamais cru être autant peinée à l'idée de laisser derrière elle une personne qu'elle n'a connu que le temps des vacances. Sans trop savoir comment s'y prendre, elle prend Lumi dans ses bras, ce qui surprend cette dernière.

— J'ai jamais été très forte pour montrer mon affection, mais c'est pour te dire que je me suis attachée à toi. Ne sois pas triste que je parte, on aura l'occasion de revivre des moments comme ça.

— Je te crois, sourit Lumi.

La voix de l'annonce du prochain train brise ce petit moment. Les deux amies se séparent avec un sourire, le soleil va bientôt se pointer et le ciel d'un bleu froid se réchauffe de plus en plus, annonçant un soleil imminent. Pour Lumi, la journée a été beaucoup trop courte, elle aurait encore voulu vivre des aventures palpitantes, des sorties vers des destinations inconnues, mais elle se résigne à l'idée qu'il y a une fin à toute bonne chose. Si la journée d'aujourd'hui devait avoir une saveur, ce serait un goût aigre-doux. Pour Ambre, ces vacances ont été aussi étranges que bénéfiques. Elle n'aurait jamais cru pouvoir avancer autant dans sa quête et elle doit une grande partie de cet élan à Lumi. L'idée de devoir la quitter l'attriste bien plus qu'elle ne l'aurait cru. Elle s'efforce tout de même à montrer un sourire pour terminer cette journée sur une note douce. Au bout de quelques secondes, le train arrive, sifflant très fort à son arrivée. La blondinette se tient les oreilles, surprise par ce bruit strident, pendant que les premiers rayons du soleil se pointent. D'un coup, Ambre écarquille les yeux, elle laisse tomber ses bras, le long du corps, comme si elle avait oublié ce qu'elle faisait là. Son amie soulève sa valise de manière presque cartoonesque et réveille la blondinette pour qu'elle ne rate pas ses correspondances.

— Byby ! Ton train est arrivé. Faut y aller, ou sinon tu vas finir en P.L.S. à attendre ton avion ou le train.

Ambre la regarde, sans rien dire. Il lui faut quelques secondes avant qu'elle se rende compte qu'elle a bien un train à prendre. Alors elle se hâte pour se mettre en place. Le véhicule s'arrête et ouvre ses portes. Lumi cède la poignée de la valise à son amie, avec un grand sourire pour masquer sa tristesse. En montant les premières marches, la blondinette se tourne vers son amie, un peu perdue dans un premier temps, puis elle part s'asseoir sur le banc. À travers la vitre, la recluse lui fait encore ses adieux, en sautillant sur place, même si elle se montre un peu plus fatiguée. Alors que le train va bientôt démarrer, Ambre se met à sourire, presque émue, et montre le petit doigt à son amie. Elle dit quelque chose, de manière à ce que Lumi puisse lire sur ses lèvres.

À son tour, Lumi écarquille les yeux. Elle se met à rire nerveusement, comme si elle n'était pas sûre de ce qu'elle venait de lire. Est-ce qu'Ambre ne ferait pas référence à autre chose ? Non, ce n'est pas possible, peu importe combien elle pourrait réfléchir, il n'y a rien qui indique que c'est le cas et le message était bien trop précis. La noiraude se montre gênée, avant de trembler des lèvres. Elle tente de masquer tant bien que mal sa surprise. Alors comment est-ce que c'est possible ? Comment son amie a pu s'en rappeler ? Les larmes se mettent à couler sur ses joues, sous les émotions et elle ne peut réprimer un rire sincère, tant toute cette situation est tellement étrange. La recluse montre son petit doigt en retour, les yeux brillants.

Ambre pose la main contre la vitre, suivie par Lumi. Son sourire doux semblait dire "même si une barrière ou la distance nous sépare, je serai toujours là, quelque part." La recluse se demande même si son amie avait un sourire aussi chaleureux depuis leur première rencontre. Le train commence à avancer doucement, Lumi marche au côté d'Ambre, pour l'accompagner durant leur dernier chemin ensemble, avant de se mettre à courir lorsque le train prend de la vitesse. Leurs regards finissent par se quitter et Lumi s'arrête, essoufflée. Elle regarde le train s'éloigner jusqu'à disparaître de sa vision. À cet instant, le soleil vient se montrer, le commencement d'une nouvelle vie.

— Oui, on se verra dans cinq ans, marmonne-t-elle.

https://youtu.be/6d7Ed_b79l4

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