Chapitre 6

Lorsque la porte s'ouvrit sur le majordome, Anthony sourit, gêné.

— Bonjour, je désirerais voir mademoiselle Jane je vous prie.

— Mademoiselle est sortie milord.

— Savez-vous quand je peux repasser ?

Le majordome tourna sa tête vers l'intérieur de la maison avant de regarder de nouveau le vicomte.

— Je crois bien que vous ne pourrez jamais repasser milord. Bonne journée.

Il commença à repousser la porte dans l'espoir de la fermer mais Anthony glissa son pied et poussa de toutes ses forces pour la rouvrir. Il lança une pièce de monnaie en l'air, que le majordome rattrapa in extremis.

— Malheureusement, je serai occupé à ce moment là. Ce n'est pas grave, je vais l'attendre dans l'entrée.

— Milord, vous ne pouvez...

— Ce n'est rien André. Je vous remercie, déclara une voix féminine.

Les deux hommes se retournèrent vers l'escalier et le dénommé André s'inclina avant de partir. Anthony eut un sourire et fit quelques pas jusqu'à la première marche de l'escalier. Jane descendit légèrement et le regarda, de la manière la plus froide qu'elle pouvait.

— Normalement, lorsque l'on vous dit qu'il ne faudra jamais revenir, il y a un message sous-entendu.

— Je le sais mademoiselle, mais il fallait à tout prix que je vous voie.

— Pour me sortir une réplique cinglante et me faire souffrir une nouvelle fois ?

— Non, murmura Anthony, pour m'excuser du tort que j'ai pu vous causer. Tenez, des fleurs pour appuyer ma présence.

Tandis qu'il lui tendait le bouquet dans l'espoir qu'elle le prenne, une des marguerites tomba en avant, à moitié fanée. Jane ne put s'empêcher de pouffer. Chose qu'elle dissimula derrière sa main.

— Elle aurait dû tenir mais je pense les avoir maltraitée sans le vouloir, je m'en excuse, déclara le vicomte embêté.

— Je trouve votre geste très agréable. Merci pour ce... bouquet.

Jane prit les tiges et huma les pétales en fermant les yeux. Le vicomte déglutit difficilement en l'observant faire. Dieu que cette femme était élégante. Ses cheveux se mariaient parfaitement bien avec les couleurs vives de son bouquet. Il ne regrettait pas de les avoir achetées. Il toussa pour se clarifier la gorge.

— J'organise une sortie à la campagne pour sortir de la chaleur oppressante de Londres et...

— Je trouve que l'air est plutôt agréable en ce mois de mai.

— Pas pour tout le monde. Enfin, je souhaiterais vous inviter à cette sortie ainsi que votre amie Margaret d'Albany. Bien entendu, mon camarade, le duc de Gordon y sera.

— Oh. C'est vraiment gentil à vous mais... Il faut que je vois avec Daniel.

— Oui... Votre fiancé. Il est invité aussi.

— Cela devrait simplifier les choses j'imagine,rougit Jane.

Pourquoi diable rougissait-elle ? Elle n'en savait rien mais cet homme la mettait dans tous ces états. Que ce soit la colère ou bien la joie. Il la chamboulait. Spécialement lorsqu'il la dévisageait comme il le faisait à l'instant, attendant une réponse positive.

— J'enverrai des cartons pour que ce soit bien entendu officiel. N'hésitez pas à lui en parler pour qu'il n'accepte aucune autre invitation. Et ainsi, que vous alliez là où vous ne voulez pas.

Le vicomte attrapa la main de Jane et la baisa avant de remettre son haut de forme et de partir. La jeune femme, le regarda partir, les lèvres entrouvertes. Tout ceci s'était passé si rapidement qu'elle n'avait pas eu le temps de dire un seul mot. Sa main contre la sienne, le frôlement de son pouce sur sa peau. Cela lui avait donné la chair de poule.

— Marie !

— Oui mademoiselle ?

— Pourriez-vous mettre ceci dans un vase je vous prie et l'apporter dans ma chambre ?

— Bien entendu mademoiselle.

***

La cloche retentit pour annoncer le dîner alors que Jane finissait de mettre ses boucles d'oreilles. Seule devant son miroir, elle repensait à l'entrevue avec le vicomte d'Aldborough. L'effort qu'il avait accompli pour venir lui demander pardon alors qu'elle s'était, elle aussi, mal comportée était courageux.

— Jane !

Elle secoua sa tête et descendit rapidement les marches avant de s'incliner légèrement devant son fiancé. Daniel attrapa sa main et la serra avec un sourire.

— Vous êtes très en beauté ce soir ma chère.

Elle lui sourit et le remercia gentiment. Tous s'installèrent à la table en merisier tandis que les plats étaient servis. Elle discutait des prochains bals avec son fiancé lorsque lui revint en mémoire l'invitation du vicomte.

— Le vicomte d'Aldborough organise une sortie à la campagne de quelques jours dans son domaine. A l'extérieur de la ville.

— Ah oui ? Comment le sais-tu ? demanda son père.

— Il est venu se présenter ici et nous en avons discuté. Il m'a expliqué qu'il allait envoyer des cartons d'invitation. Margaret est invitée ainsi que vous milord, dit-elle en se tournant vers son fiancé.

Elle lut de la colère dans les yeux de Daniel mais ne compris pas pourquoi. C'est lorsque son père haussa le ton qu'elle se rendit compte de l'erreur qu'elle venait de commettre.

— Il est entré dans la maison ? Pourrais-tu m'expliquer ce qu'il faisait chez nous ?

— Eh bien... Pour nous inviter comme je vous l'ai expliqué père.

Un silence s'installa avant que son père ne tape du poing sur la table, faisant sursauter tout le monde autour.

— Ne me prends pas pour un sot Jane. Pourquoi le vicomte serait-il venu en personne dans notre demeure pour te parler de sa sortie campagnarde ?

— Je ne sais père, répondit Jane désemparée.

— Menteuse, cria-t-il en se levant de sa chaise. Comment oses-tu mentir dans les yeux de ton père ? Quelle image donnes-tu à ton fiancé ?

— Baron, dit Daniel de Normanby, je suis persuadé que le vicomte a voulu faire une bonne action en passant voir votre fille et l'inviter. Si son amie ainsi que moi-même sommes invités, je ne vois aucun soucis à ce que nous y allions. Cela nous permettra de voir du monde et ainsi prouver nos fiançailles. Ces quelques jours nous feront du bien au moral.

— Si vous le dites marquis, répondit le baron en se rasseyant, je vous fais entièrement confiance.

Daniel inclina la tête vers le père de Jane avant de prendre la main de sa fiancée et de la serrer. Jane n'osait regarder autre chose que son assiette. Elle aurait bien voulu apprendre à mentir dans sa jeunesse pour réussir à dissimuler des choses à son père. Si son fiancé n'avait pas été présent Dieu seul sait ce qu'il aurait pu faire. Elle se promis en elle-même de ne plus faire d'erreur de ce genre pour éviter d'autres complications. 

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