Chapitre 10
Jane se retourna et vit le vicomte devant elle, les bras ballants, les sourcils froncés. Elle ferma les yeux et laissa les larmes couler. Tout ce qu'elle avait ressenti ces dernières semaines, tout ce qu'elle portait sur ses épaules. C'était si dur pour elle.
Anthony la voyant, accourut vers elle et lui attrapa les bras.
— Que s'est-il passé ? Ai-je fait quelque chose qui vous a fait du mal ? Je m'en excuse si c'est le cas.
— Non... C'est... C'est juste que j'ai l'impression de ne pas être à ma place dans ce monde. Entre les responsabilités, le mariage, ma vie et... vous, termina-t-elle en levant les yeux vers lui. Pourquoi avez-vous jeté votre dévolu sur moi milord ? Pourquoi souhaitiez-vous que je succombe dans vos bras ?
— Je n'ai jamais voulu ça, murmura-t-il. Au départ c'était un défi pour moi mais j'ai appris à vous connaître. Vous avez ravi mon coeur Jane. Vous êtes celle qui me hante le soir lorsque je me couche, celle à qui je pense le matin en me réveillant.
— Vous... Vous n'avez pas le droit de me dire cela.
— Il faut que je le fasse. Si je vous laisse partir sans vous avoir avouée ce que je ressentais pour vous, jamais je ne pourrais m'en remettre.
Anthony lisait la détresse et l'incompréhension dans le regard de la demoiselle. Il cherchait à capturer ses yeux pour les bloquer aux siens afin qu'elle lise en lui. Il remonta ses mains pour les poser sur ses joues.
— Dites-moi quelque chose, repoussez-moi et j'arrêterai. Je vous le promets.
— Je...
Les yeux de Jane se baissa furtivement sur les lèvres d'Anthony qui étaient plus proches qu'elle n'aurait voulu. Ce dernier, voyant qu'elle ne disait rien, se pencha et posa ses lèvres délicatement sur celle de la jeune fille. Une explosion de saveur explosa au toucher. Elles étaient douces mais aussi fruitées. Il n'aurait su comment l'expliquer mais si l'Amour avait un goût, c'était celui-là. Il le savait à présent.
Jane plissa les yeux, étonnée de cette sensation. Personne ne l'avait jamais embrassée. Excepté par le vicomte lors de leur première rencontre. Elle posa ses mains sur les épaules de ce dernier et se cambra légèrement. Mais l'image de son fiancé lui revint en mémoire et elle recula brusquement en repoussant Anthony.
— Je ne peux pas milord. Je suis fiancée depuis plusieurs années et dans un mois j'épouserai le fils du marquis de Normanby.
Elle regarda autour d'eux voir si quelqu'un les avait surpris avant de se reconcentrer sur le vicomte.
— Vous avez donc gagné mademoiselle Shirley et j'ai perdu. Vous êtes celle qui n'aura pas succombé et qui aura réussi à me torturer de toutes les manières qui soient. Je ne vous dérangerai plus à l'avenir. Vous n'entendrez plus parler de moi et c'est une promesse. J'espère que vous serez heureuse aux côtés de Normanby.
Il s'inclina respectueusement avant de lui tourner le dos et de rentrer dans la salle de réception. Que s'était-il passé pour qu'elle le repousse de cette manière ? Elle s'était laissée aller contre lui, avait même répondu à son baiser. Il prit une coupe de champagne et observa ses invités. Un visage familier attira son attention. « C'était à cause de lui » pensa Anthony en voyant Daniel rire à côté de jeunes filles. Oui, il était la cause de tous ses malheurs et ceux de Jane. Elle se serait donnée à lui, aurait accepté les sentiments qu'elle avait s'il n'avait pas existé. C'est à ce moment là qu'il la vit arriver. S'il ne l'avait vu quelques instants plus tôt, il n'aurait pas su qu'elle était troublée. Mais sa manière de tortiller son éventails, de passer sa mèche derrière son oreille, tout cogitait en elle.
— Milord, je suis désolée mais je vais me coucher, dit Jane à Normanby.
— Nous nous verrons demain dans ces cas-là mademoiselle Jane. Je vous souhaite une bonne nuit.
Il le vit prendre la main si douce de celle qu'il aimait et poser ses lèvres dessus. Il aurait voulu être à sa place et sentir sa peau si douce contre lui. Il ferma les yeux et pinça l'arête de son nez. Il était temps pour lui de boire plus que cela afin d'oublier. Au moins le temps d'une nuit. Pour l'instant, il décida de prendre l'air frais du soir. Anthony sortit sur le perron, descendit les quelques marches qui rejoignaient le jardin et marcha, éclaira par la lune. C'est à ce moment là qu'il entendit un cri aiguë de joie. Son ami avait un genou à terre et tenait les mains de Margaret d'Albany. Il le vit se relever et enlacer la jeune femme prouvant tout l'amour qu'il avait pour elle.
Il soupira et secoua la tête. Même son ami de toujours avait droit au bonheur. Alors pourquoi pas lui ?
***
Les carrosses repartirent un par un à compter du lendemain. Tous les convives saluaient la famille d'Aldborough avant de monter dans les véhicules et rejoindre la ville étouffante. Anthony avait la tête ailleurs et saluait machinalement les personnes.
— D'Aldborough, je vous souhaite une bonne journée et espère vous revoir bientôt.
Anthony serra la main à Daniel de Normanby avec un faux sourire et répondit avec courtoisie. Lorsqu'il la vit, elle, se placer devant lui et s'incliner, son cœur rata un battement. Il s'éclaircit la gorge et prit sa main pour la baiser.
— Je vous souhaite un bon retour mademoiselle Shirley.
— Je vous remercie pour votre invitation et pour votre gentillesse milord.
Elle n'osait pas le regarder, elle mettait tout en œuvre pour éviter de croiser son regard. Il aurait voulu prendre son visage entre ses mains et la forcer à le regarder, la forcer à plonger son regard et à s'ancrer sur quelque chose de rassurant. Mais elle lui tournait déjà le dos et montait dans le carrosse, aidée par son fiancé.
— A bientôt Anthony, s'avança Tom en tendant la main. J'espère que tu seras disponible dans quelques mois.
— Pour ? demanda Anthony en serrant le plus fort possible sa main avec un sourire.
— Je vais épouser Margaret. Et cela, grâce à toi ! Acceptes-tu d'être mon témoin ?
Anthony le félicita et le prit dans ses bras en riant. Son ami aurait la joie d'avoir quelqu'un à ses côtés. Et pas n'importe qui, une jeune femme douce qui savait canaliser les émotions de son ami et le rendre meilleur.
— Ma chère mademoiselle Margaret, je vous félicite pour vos fiançailles, dit Anthony en s'écartant de Tom et en baisant la main de la fiancée.
— Je vous remercie milord. C'est un grand honneur que d'entrer dans la famille du duc de Gordon. Merci aussi pour votre invitation qui se sera conclue par une heureuse nouvelle.
— Quand est prévu le mariage ?
— Le duc a demandé la main à mon père avant le séjour dans votre maison. J'imagine que cela devrait se faire dans le mois qui arrive, annonça-t-elle avec un grand sourire en prenant la main de Tom.
— Je pense être disponible dans le mois qui arrive alors. Je vous souhaite un bon retour.
Les deux amoureux le saluèrent une dernière fois. Tom aida Margaret à monter dans le carrosse où se trouvait Jane et Daniel. Lui monta en selle et le convoi partit au trot, rejoindre la grande ville. Anthony suivit le véhicule où se trouvait Jane le plus longtemps qu'il put.
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