9. Pour le bien du clan

Chapitre modifié et remis en ligne le 19/12/2020

EDIT : Chapitre republié le 08/09/2022

EDIT : chapitre republié le 13/07/2023

Une fois revenue au château, Mary saisit le premier prétexte pour fuir la présence du laird MacNabe et de son fils. Elle se réfugia dans sa chambre jusqu'au repas du soir. Elle passa l'après-midi à s'interroger sur les intentions du Grégor et de son père. Elle ne voyait aucun inconvénient à s'occuper de Kyle Elspeth et Muriella ni à gérer la maisonnée du laird MacNabe. En revanche la perspective de partager la couche de Fergus la rebutait. S'il était réellement impuissant et ne la touchait pas, elle pourrait supporter cette union mais si ce n'était pas le cas... elle ne savait comment elle réagirait. D'un autre côté, si elle pouvait épouser le fils plutôt que le père, nul doute que le devoir conjugal lui paraîtrait moins pénible car Grégor était très loin d'être repoussant. Elle admettait même volontiers qu'il avait un physique très séduisant. En revanche ses manières la mettaient mal à l'aise et ce qu'il lui avait dit en début d'après-midi l'avait fortement ébranlée. Le laird avait-il vraiment conclu un accord avec son fils ? Les deux hommes prévoyaient-ils de se la partager ? Ou s'agissait-il des plans de Grégor ? Avait-elle mal interprété ce que le guerrier lui avait dit ?

En tous cas, une chose était sûre : Mary refusait d'être la maîtresse du fils de son époux. Il était hors de question qu'elle soit partagée entre les deux hommes. Elle ne voulait pas être considérée comme un objet que les deux hommes s'échangeraient au gré de leurs besoins ou de leurs envies. De plus ses convictions, sa morale et sa fierté lui interdisaient de tromper son époux, même si celui-ci s'avérait conciliant et disposé à fermer les yeux sur l'adultère. Un tel arrangement lui semblait si improbable et inique que lorsque vint l'heure de descendre prendre le repas du soir, Mary s'était auto persuadée qu'elle avait mal compris les propos de Grégor - quel homme accepterait d'être cocufié par son propre fils ? - et qu'il envisageait de changer de place avec son père pour l'épouser lui-même. Malgré tout, l'idée d'un mariage avec l'héritier du laird MacNabe la perturbait. Même si elle le trouvait séduisant, il y avait quelque chose chez cet homme qui lui faisait peur. Visiblement elle était loin de lui être indifférente ; il avait montré de manière claire et évidente qu'il la désirait et pas seulement pour batifoler puisqu'il lui avait fait comprendre qu'il était prêt à l'épouser dès qu'il serait laird.

Après qu'elle l'ait repoussé et lui ait fait comprendre qu'elle ne pourrait pas trahir ses vœux, le fils MacNabe avait sûrement réfléchi. Grégor lui avait paru intelligent et avoir un certain talent en matière de persuasion car il était doué avec les mots ; il avait dû parler à son père pour infléchir sa décision. Après tout, si elle épousait Grégor, elle serait toujours à même de s'occuper de Kyle, Elspeth et Muriella et donc Fergus MacNabe obtiendrait également ce qu'il souhaitait, à savoir une femme pour s'occuper de ses trois plus jeunes enfants et une alliance avec le clan MacLean. Mieux que cela, il aurait en plus l'assurance que son fils ait une épouse et des héritiers. Mary avait souvent entendu dire que c'était une des préoccupations des lairds qui voulaient que leur lignée se perpétue. S'il avait présenté les choses ainsi à son père, Grégor avait dû obtenir gain de cause. Elle descendit donc dans la grande salle, un peu rassérénée, persuadée que son père allait lui annoncer que les fiançailles seraient finalement conclues avec Grégor MacNabe.

Mais Mary déchanta bien vite lorsque son père l'informa que la cérémonie de fiançailles avec le laird MacNabe aurait lieu le lendemain après-midi. Dès que Lachlan MacLean eut fait son annonce, l'appétit de la jeune fille se désagrégea. Grégor MacNabe n'avait pas réussi à obtenir sa main, si tant est qu'il ait essayé de l'obtenir. Elle allait donc devoir épouser le vieux laird et lui ouvrir son lit, perspective qui lui répugnait profondément. La pensée de sentir les lippes humides ou les mains sèches et rêches du laird sur son corps la faisait frissonner de dégoût. Imaginer son corps flasque et replet sur le sien lui donnait envie de hurler, de se débattre. Lorsqu'elle sentit un pied caresser sa cheville et son mollet, elle se figea, n'osant y croire. Mais lorsque le pied remonta le long de son genou et de sa cuisse en s'insinuant sous sa jupe, elle se leva précipitamment du banc avant que le pied aventureux n'atteigne son entrejambe. Elle prétexta une brusque nausée pour s'éclipser et remonta en courant dans sa chambre.

C'est là qu'Iseabail MacLean vint la retrouver à la fin du repas. Elle toqua à la porte de la chambre de sa fille et entra sans attendre d'y être invitée.

- Comment te sens-tu Jamesina ?

- Pas très bien.

- Que se passe-t-il ? Tu as un comportement étrange depuis cet après-midi.

Mary baissa la tête, se tordit les mains pendant quelques secondes avant de relever brusquement les yeux et de lâcher :

- Je ne veux pas me fiancer, mère.

- Nous en avons déjà parlé Jamesina. Tu sais que notre clan doit trouver de nouveaux alliés et tes fiançailles avec le laird MacNabe sont garantes de notre alliance avec son clan.

- Vous ne comprenez pas ! Ces MacNabe sont... sont... amoraux !

Iseabail haussa un sourcil interrogateur puis vint s'asseoir à côté de sa fille.

- Que veux-tu dire exactement ?

- Ils veulent m'utiliser comme un objet, me partager.

- Te partager ? Tsss... Quelle idée stupide t'es-tu mise en tête ?

Mary raconta alors ce qu'il s'était passé l'après-midi même dans le jardin puis elle termina sur les événements de la soirée.

- J'ai cru que Grégor allait demander à prendre la place de son père mais rien n'a changé. Pire, alors que vous avez annoncé à table que mes fiançailles avec son père auront lieu demain, il a... avec sa jambe... il...

Voyant que sa fille peinait à parler, Iseabail l'encouragea :

- Qu'a-t-il fait Jamesina ?

- Pendant le repas, il m'a touché la cheville avec son pied. J'ai d'abord cru que c'était par inadvertance mais ensuite il m'a souri et il a recommencé à plusieurs reprises et puis... et puis...

- Continue ! Et puis ?

- Il a... il a passé son pied sous ma robe et... et il a voulu me toucher... là ! murmura Mary en rougissant d'embarras.

Le regard de sa mère se durcit et elle pinça les lèvres de mécontentement avant de lâcher :

- Voilà qui est fâcheux ! Ce garçon n'a visiblement aucun respect pour son père et le mariage. A-t-il fait autre chose d'inconvenant ?

- Eh bien... il... il m'a embrassé cet après-midi, avoua la jeune fille. Juste après qu'il m'ait dit qu'il avait un arrangement avec son père.

- Hum... je doute que le laird MacNabe accepte de bon cœur de porter des cornes, que se soit son fils ou un autre homme qui les lui plante sur la tête ! Il a sa fierté malgré tout ! À mon avis cet arrangement est un boniment. Grégor t'a dit cela pour te faire céder.

- Mais que puis-je faire ?

- Pas grand-chose je le reconnais. Je sais qu'il serait plus agréable pour toi de partager la couche d'un homme plus jeune mais je t'en prie, ne cède pas aux avances de Grégor. Ne bafoue pas ton honneur pour quelques heures de plaisir dans les bras d'un homme. N'oublie pas que si tu trahis ton époux et qu'il en a connaissance, la faute en rejaillira sur le clan. Si Grégor devient trop pressant, parles-en à Fergus. Il saura contrôler son fils.

- Ne peut-on pas chercher une alliance auprès d'un autre clan ? Négocier des fiançailles avec un autre laird qui aura plus de moralité ?

- Non Jamesina. Je suis désolée mais il n'y a pas d'autre solution. Ton père et les anciens du clan ont longuement réfléchi à la question et c'est la meilleure solution pour le clan mais aussi pour toi. N'oublie pas que MacKenzie te voulait et Lachlan n'a pu décliné son offre sans déclencher d'hostilités qu'en arguant du fait qu'il avait déjà donné son accord à tes fiançailles avec Fergus MacNabe. Si tu ne t'unis pas à Fergus, ce sera à MacKenzie.

À ces mots, la poitrine de Mary se serra de désespoir et une boule grossit dans sa gorge.

- Alors vous allez me livrer à ces dépravés ?

- Je suis désolée Jamesina, crois bien que je ne voulais pas cela pour toi. Je souhaitais un autre époux pour toi, un homme de l'âge de ton frère, un guerrier qui puisse te protéger, te chérir et prendre soin de toi. C'est pour cela que je voulais que tu accomplisses ta formation dans les Lowlands. J'espérais que tu rencontrerais à la cour un homme un peu plus civilisé que nos sauvages des Highlands. Je n'imaginais pas que la situation se dégraderait au point qu'il faille te marier pour assurer une alliance.

- Il n'y a pas d'autre solution alors ?

- Hélas non. Nous n'avons pas le choix. Tu dois te marier pour le bien du clan.

- Je vais donc devoir épouser un homme plus vieux que mon propre père et tenter d'échapper aux assiduités de son fils pendant toute la durée de mon mariage.

Mary baissa la tête pour tenter de dissimuler sa détresse. Mais elle ne put cacher les larmes qui se mirent à dévaler ses joues.

- Je suis profondément désolée Jamesina. Je te jure que s'il y avait une autre solution, nous ne t'acculerions pas à cette extrémité mais il n'y a pas d'autre alternative. L'intérêt du clan passe avant tout. Et si je ne peux pas empêcher que tu sois l'agneau que l'on sacrifie, je vais faire en sorte de retarder l'échéance.

La jeune fille releva vivement la tête pour demander avec espoir :

- Comment cela ?

- Ta formation n'est pas entièrement terminée. J'ai déjà averti le laird MacNabe qu'il ne pouvait pas t'emmener avec lui avant le printemps prochain. Ta tante Elisabeth m'a aidée en expliquant que tu étais en train de te former auprès d'une guérisseuse et qu'il te fallait encore quelques mois pour terminer ton apprentissage. Le laird MacNabe n'a pas une santé florissante et il est de son intérêt que tu apprennes l'art de guérir. Il a accepté de te laisser ici quelques mois supplémentaires avant de t'épouser et de t'emmener à Bovain Castle. C'est donc vos fiançailles et non votre mariage qui vont sceller l'alliance entre nos deux clans.

- Qu'est ce que cela va changer ? Je devrais l'épouser malgré tout.

- Oui mais il peut se passer beaucoup de choses en presque une année. N'oublie pas que Fergus n'est pas des plus fringants. Il pourrait très bien ne pas passer l'hiver prochain. Que Dieu me pardonne car ce n'est pas une pensée chrétienne, mais s'il mourait, tu serais délivrée de ces fiançailles et entre temps notre clan aura bénéficié de l'alliance avec les MacNabe.

*********

Je vous laisse imaginer la suite...

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top