Il était désormais 19h35. Je devais me préparer pour partir, j'avais une quinzaine de minutes de marche avant d'arriver à l'auberge et je ne voulais surtout pas arriver en retard. J'enfilais mon long manteau et mon écharpe par-dessus ma robe en laine. Je chaussais une paire de bottes en cuir et je sortis. La nuit était tombée et je profitais du silence de la rue, déjà bien désertée par tous les passants. Le calme couplé aux flocons qui virevoltaient doucement avant de s'écraser au sol m'apaisaient profondément. Je souriais en me rappelant tout ce que j'avais traversé d'aussi étrange qu'inattendu ces derniers jours.
Perdue au fil de mes pas, je me rendis compte que j'étais arrivée devant l'auberge. J'entrai alors à l'intérieur pour me réchauffer. Je fus accueillie par une jeune demoiselle qui me demanda si j'avais réservé. Je lui dis que j'avais rendez-vous avec un inconnu et que je ne savais pas si on avait réservé quelque chose pour moi. Je m'attendais à un regard interloqué ou des questions sur mon étrange révélation mais elle se contenta de m'adresser un grand sourire et de me prier de la suivre à l'étage. De plus en plus curieuse, je la suivis sans poser plus de questions dans l'étroit escalier qui montais à l'étage. Arrivé en haut, elle s'arrêta devant une porte marquée 5 et me dit :
- « Monsieur vous attend, je reste à votre disposition si vous avez besoin de moi. Je vous souhaite une excellente soirée. »
Je la remerciai rapidement et je poussai la porte. J'arrivai dans une pièce bien éclairée avec un lit, un bureau et deux larges fauteuils. Dans un des deux fauteuils de cuir rouge, un jeune homme était assis. Il était brun aux yeux verts et me regardait avec un regard assez indescriptible, empli de curiosité, de défis et d'amusement. Il était vêtu d'un pantalon brun et d'une chemise blanche par-dessus laquelle il avait enfilé une longue cape noire. Alors que je restais immobile dans l'entrée de la chambre, le jeune homme me dit :
- « Bonsoir. Je suis vraiment heureux de vous rencontrer. J'ai attendu ce moment depuis l'instant où vous avez résolu ma première énigme. Mais je vous en prie, ne restez pas ainsi, venez vous assoir et retirer votre veste. »
Un peu perdue au milieu de cette étrange scène, je commençai néanmoins à m'approcher et je m'installais dans le fauteuil tel qu'il m'y avait invité. Je le regardais d'un regard curieux et je pris enfin la parole :
- « Qui êtes-vous ? Pourquoi m'avais vous fait venir ? Qu'est-ce que toute cette histoire ? Pourquoi des énigmes ? »
A ces mots, le jeune homme partit d'un rire franc et me dit :
- « Tic-tac-tic-tac.... Vous n'avez le droit qu'a une seule question. Laquelle choisissez-vous ? »
Il ne me fallu pas plu de quelques secondes pour lui répondre :
- « Qu'est ce que toute cette mise en scène ? »
Le jeune homme me sourit et me tendit une enveloppe, sortie de ce qui semblait être une poche dans la doublure de sa cape. Interloquée, je m'empressai d'ouvrir l'enveloppe et commençai à lire ce qu'il était écrit.
« Ainsi, vous avez choisi la question à laquelle je m'attendais. Bravo, cette question était la plus sage et la plus efficace, cela appuie votre raisonnement réfléchis et votre capacité intellectuelle particulièrement développée. Toute cette histoire n'avait qu'un but, tester les aptitudes d'une cliente à reprendre la boutique. En effet, je me fais vieux et je ne peux plus m'occuper seul de la librairie. En effet, ma chute n'était qu'un accident, j'ai malencontreusement perdu l'équilibre sur mon échelle et j'ai chuté. Vous avez brillamment passé chacune des étapes qui vous ont conduit à rencontrer mon fils aujourd'hui. Je vous félicite de vos déductions. A bientôt surement. »
Cette lecture m'avait quelque peu secouée, il me paraissait très incongru d'avoir réalisé une telle mise en scène pour trouver un repreneur digne de cette librairie... L'idée ne me déplaisait pourtant pas, raison pour laquelle mes réticences se dissipaient. Je finis par lever la tête de la lettre et par sourire en disant :
- « C'est d'accord. Je reprendrai la librairie. Je m'adresserai à vous des demain matin. Je vous remercie de cette mise en scène qui m'a, je l'avoue, fort diverti et fait travailler mon intellect comme je ne l'avais fait depuis des années. »
Juste après ces mots, le jeune homme se leva, me salua d'un signe de tête et sorti rapidement de la pièce. Je rentrai donc chez moi avec un poste de libraire en tête, que j'allais d'ailleurs pourvoir dès le lendemain. Et c'est ainsi que mon rêve inavoué de tenir ma propre boutique de livre s réalisa. Malgré une légère modernisation du lieu, je tiens aujourd'hui encore la boutique. Je vais avoir 68 ans cet été et cette aventure restera gravée dans mes souvenirs. J'envisage d'ailleurs de faire vivre cette drôle de quête au futur repreneur de cette librairie, qui garde bien des secrets entre ses murs...
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