XXXVI
C'était le bal d'Halloween.
Les élèves arrivaient par dizaine au bal, tous vêtus de sublimes tenues. Beaucoup avaient des vestes, des tee-shirts ou des chapeaux aux couleurs d'Halloween ou effrayants. Les professeurs s'installaient eux-aussi dans la salle, sur les quelques fauteuils qui leur étaient réservés. Il y avait des sièges partout, bien sûr, mais l'objectif était avant tout de danser et de s'amuser. Le bal était censé commencer à dix-neuf heures. Cependant, à dix-neuf heures dix, Elysia n'était toujours pas arrivée.
Dans le dortoir de Lola, Romane, Théia et Ondine, Elysia se tenait debout au centre de la pièce, avec un bon groupe assis face à elle. Romane, Anaïs, Louana, Mary et Sarah. Théia, et fort heureusement, Ondine étaient déjà au bal. Elles observaient leur directrice, qui faisait les cent pas.
— Le problème, c'est qu'ils continueront de vous harceler tant que vous ne direz pas que vous êtes en couple, déclara Romane. Moi, mon facteur, il a abandonné les tentatives de séduction quand il a appris que je flirtais avec Luke.
— Hum. Cela ne marchera pas pour tous, déclara Elysia en croisant les bras. Même si je trouve quelqu'un avec qui me mettre en couple par la force du destin, ils continueront. Et en plus, ils me harcèleront pour avoir des informations sur mon couple.
— Sauf que là, au moins, vous aurez le contrôle des informations qui fuitent. Vous pourrez leur fournir régulièrement des informations, et à force, ils se lasseront, et vous laisseront tranquille ! dit Mary.
Elysia secoua la tête de gauche à droite. Elle s'était préparée pour le bal, évidemment, et avait mis sa robe la plus osée. Aurélien lui avait dit de se venger ? Bien, elle le ferait. La directrice portait une robe entièrement noire, qui lui couvrait la poitrine jusqu'au cou, et s'arrêtait jusqu'à ses poignets. Le tissu était assez transparent au-dessus de sa poitrine et des bandes noires permettaient de donner du relief à la tenue. Un bustier noir épais venait compléter le haut de la robe ; une espèce de short assorti y était accroché, et supportaient trois bandes de tissu de la même matière noire transparente, qui venait protéger un peu la pudeur de la jeune femme. Néanmoins, on pouvait tout de même clairement voir ses jambes. Les trois bandes tombaient ensuite jusqu'au sol et se terminaient en une traîne, sauf pour celle face à elle qui demeurait plus courte pour ne pas qu'elle tombe en marchant dessus.
Pour en ajouter, elle avait fait deux tresses avec ses mèches de devant, et les avaient liées derrière sa chevelure avec une pince couverte de pierreries. Elysia portait aussi de sublimes escarpins argentés, qui étaient de la même couleur que le bracelet de cheville qu'elle avait mis. Sa tenue serait jugée indécente pour beaucoup, rien que parce qu'on voyait toutes ses jambes du haut de ses cuisses jusqu'à sa cheville.
— Même si je suivais votre plan de me mettre en couple pour mieux contrôler les rumeurs, avec qui voudriez-vous que je me mette ? Je ne connais aucun homme célibataire, de mon âge, qui pourrait accepter de se lancer là-dedans avec moi sans broncher.
— Moi j'ai bien quelqu'un en tête, mais ça va pas vous plaire, lança Lola, un sourire amusé aux lèvres.
Elysia fronça les sourcils. Elle tourna la tête vers elle, et grinça :
— Dis toujours.
— Aurélien Courpere, votre meilleur ami depuis plus de dix ans. Il est beau, gentil, attentionné, et acceptera volontiers de simuler un couple avec vous, car il est fou amoureux de vous !
— Alors. Déjà, Aurélien n'est pas amoureux de moi, et ensuite, je refuse.
— Pourquoi ? s'exclamèrent toutes les filles en chœur.
— Parce que ! C'est mon meilleur ami, je ne vais pas lui demander de sortir avec moi pour de faux, c'est bizarre !
Lola secoua la tête, dépitée. Sarah dit :
— Si c'est votre meilleur ami, il comprendra que vous ayez besoin d'aide.
Elysia resta muette. Quelques instants passèrent dans le silence, avant qu'Anaïs ne lâche :
— En plus, vous pourrez tenter de lui faire un bisou. Vous passerez un bon moment.
— Anaïs ! s'exclama Elysia, stupéfaite. Mais enfin ! Je ne vais pas faire un « bisou » à Aurélien.
— On sait jamais !
Elysia secoua la tête. Elle poussa un soupir ; elle ne savait pas quoi faire. Elle finit par déglutir, et par déclarer :
— J'ai fait une erreur.
— Laquelle ?
— Je... J'ai embrassé Aurélien tout à l'heure.
Les cinq jeunes femmes restèrent quelques instants muette, avant de se mettre debout en criant « Ouaiiis ! ». Louana et Mary se mirent même à danser à deux, enchantées, tandis que Lola et Anaïs se serraient dans leurs bras, comme si la France venait de gagner la Coupe du Monde pour la troisième fois. D'ailleurs, j'ai toujours le seum au sujet de notre défaite la dernière fois. Pas vous ?
— Mais ! marmonna Elysia en croisant les bras. Arrêtez, c'est horrible.
— Enfin ! On attend ça depuis notre arrivée à l'Académie !
Romane avait sorti un chapeau de fête et un sifflet de fête. Elle passait entre ses amies en soufflant dedans, provoquant l'hilarité des filles. Elysia se tapa le front : bon sang, elle aurait dû être plus stricte. Cela lui aurait évité des scènes du genre.
— OK, et donc, je suis censée aller le voir après ça et lui dire « Est-ce que tu es d'accord pour qu'on fasse semblant d'être en couple ? ».
— Oui, répondit Louana. J'ai une idée pour vous aider, reprit-elle plus sérieuse.
— Vous nous faites confiance ? demanda Lola, souriante.
— Non, répondit Elysia.
— Parfait ! s'exclama Romane en accourant, pour pousser la directrice vers la porte. Promis, on va gérer !
Elysia s'arrêta net. Elle ouvrit la bouche, prête à répliquer, mais finit par balbutier :
— Pas de bêtises, pas de choses illégales ni irrespectueuses, d'accord ?
Les cinq filles sourirent en guise de réponse. Elles dirent toutes en chœur, angéliques :
— Promis !
Elysia hocha la tête. Elle les remercia du bout des lèvres, avant de les informer qu'elle partait au bal. Elle quitta ensuite la pièce, suivie de près par Lola, qui dit :
— Attendez ! Alors, avec Aurélien ?
Elysia haussa les épaules. Elle souffla :
— J'ai eu une pulsion en le voyant. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris, mais... Bon sang, je ne peux pas être tombée amoureuse de lui. Ça ne doit être que physique.
— Elysia... Cela fait des années que nous sommes tous persuadés que vous l'aimez. Vous ne voyez pas comment vous le regardez, ou les gestes que vous avez envers lui. A votre place, je réfléchirais à ce que je ressens.
— C'est mon meilleur ami.
— Vous pensez que ça l'est. Vous n'avez jamais réfléchi au fait que cela pourrait être plus ?
Elysia resta silencieuse. Elle haussa les épaules, puis la remercia, avant de partir le pas pressé. Elle parcourut quelques couloirs jusqu'à rejoindre les escaliers. Cependant, alors qu'elle les descendait prudemment à cause de ses talons, elle entendit une voix s'écrier :
— Madame, Madame ! On vous cherche depuis dix minutes !
Un élève arrivait en courant. Il grimpa les marches quatre à quatre, et s'arrêta face à elle pour lui expliquer :
— Des élèves ont fait entrer des journalistes dans l'Académie. Je ne sais pas qui, mais Monsieur Courpere et Madame Philomène vous cherchent, et les autres professeurs tentent de les renvoyer, mais ça ne marche pas !
— Où est Ondine ? demanda Elysia. Il faut la protéger des journalistes.
— Elle est dans la salle, les journalistes ne s'intéressent même pas à elle ! Et les gardes d'Okeanos les ont laissé passer !
Elysia sentit ses épaules s'affaisser, dépitée. Nérée avait organisé cela, c'était impossible autrement. Elle sentit une bouffée de colère lui monter dans la poitrine, mais il fallait qu'elle reste calme, car chacune de ses paroles pouvait se retourner contre elle. Elle réfléchit quelques instants, et demanda :
— Comment ça se passe, en bas, alors ?
— Les journalistes sont entrés à au moins vingt, et ils sont directement entrés dans la salle de réception. M. Courpere est parti verrouiller toutes les portes, et ensuite, il a fermé les portes de la salle de réception pour éviter que les journalistes n'aillent se promener dans l'Académie, car ils refusaient de partir.
Elysia marmonna un juron. Elle remercia le jeune homme, et dévala les escaliers le plus rapidement qu'elle le pouvait. Elle allait tuer les journalistes. Cependant, avant de poser le pied sur la dernière marche, elle s'arrêta net. Il lui fallait un plan, quelque chose à faire. Aurélien lui avait dit de se venger ; de leur prouver qu'elle était forte.
Mais elle n'était rien. Rien de plus qu'une directrice aux ancêtres puissants. Alors, où était sa puissance ? En tant qu'Elysia, et non pas seulement en tant que directrice, de quoi pouvait-elle disposer pour effrayer ces hommes et les pousser à partir ?
C'était une question intéressante.
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