L'Autre
[Jean x Mikasa]
4106 mots.
Univers alternatif, personnages légèrement OOC. Sorry not sorry.
***
« Bon courage mon chat, je t'aime. »
Mikasa mit en veille son téléphone avec un sourire aux lèvres, malgré cette tristesse qui lui collait à la peau depuis si longtemps. Elle prit une longue bouffée d'oxygène et pénétra dans l'amphithéâtre gigantesque de sa faculté. Elle avait dû partir et laisser sa vie derrière elle pour faire ses études dans cette ville inconnue, avec ces visages austères et tendus, avec cette agitation sourde et bouillonnante. Mais la jeune femme était une enfant des forêts, et le bourdonnement de la foule lui filait le cafard. Elle s'assit au bout d'une rangée, seule avec ses affaires scolaires. Le professeur arriva dans la foulée et débuta la réunion de rentrée. Devant elle, une fille aux cheveux blonds avait l'air aussi solitaire qu'elle.
Elle s'ennuyait beaucoup, seule. Alors, elle avait décidé d'observer discrètement les photos qu'elle avait fait avec son petit-ami, la dernière fois qu'ils s'étaient vus. Elle avait rencontré Jean au lycée.
« Mikasa, c'est ça ? Pourrais-tu m'aider en maths, il faut absolument que je rattrape mes notes avant la fin du premier trimestre... »
Quand il lui avait adressé la parole, elle ne savait pas son prénom. Elle avait déjà vu ce grand jeune homme au détour d'un couloir. Il devait être dans une autre classe que la sienne. Ses yeux brillaient d'une lueur agréable, et elle avait accepté de le retrouver après les cours, à la cafétéria du lycée. Après tout, si ses compétences en mathématiques pouvaient être utiles...
Ils s'étaient retrouvés à une table, et pendant de longues heures, elle lui avait expliqué le chapitre sur les vecteurs, sur la manière de les calculer, de les juxtaposer... Il posait parfois des questions pour relancer ses explications, et passait le reste de son temps non pas à écrire, mais à la regarder. Son regard avait été la première chose qui l'avait captivée. Ces prunelles brun clair reflétaient tant d'émotions que ça lui avait coupé le souffle. Il avait de beaux yeux, oui. À la fin de la journée, elle lui avait donné son numéro, dans le cas où il aurait des questions sur le cours de mathématiques, évidemment. Puis ils avaient commencé à parler, d'abord une fois tous les deux jours, puis tous les jours. Elle avait le réflexe de lui dire bonjour dès qu'elle se levait, et de lui souhaiter une bonne nuit dès que ses yeux se fermaient. Ils mangeaient ensemble, jouaient aux cartes ou aux échecs, se retrouvaient autour d'un café...
À l'époque, ses amies la taquinaient beaucoup à propos de ce rapprochement. Sasha était la plus enthousiaste de toutes, et s'amusait à la laisser seule avec lui dès qu'elle en avait l'occasion. Il lui arrivait également de lui envoyer des mots en cours, pour la taquiner davantage. Puis, les vacances d'hiver étaient arrivées. Ils avaient décidé de se voir, pour déterminer qui était le meilleur à Mario Kart. Cette compétition était inutile, servant juste de prétexte pour le voir... Mais ça la rendait heureuse. Sa présence seule égayait son petit monde. Alors ils avaient joué une bonne partie de la journée, chez lui. Cependant, voyant qu'il la dominait sur les routes du jeu vidéo, elle avait entreprit de chahuter avec lui, et ça avait fini en combat de judo dans son canapé. Le contact de son corps avec le sien avait fait exploser son cœur dans sa poitrine. Heureusement, il était trop concentré à vouloir la mettre à terre, il ne voyait pas les rougeurs qui décoraient ses joues blafardes. Lorsqu'il avait fini les fesses par terre, ils avaient tous les deux explosé de rire face à leur bêtise.
Elle pouvait encore sentir son odeur.
Quelques jours plus tard, il lui avait proposé de visiter sa ville. Quand elle vint à sa rencontre, il la salua en bégayant. Elle avait trouvé son air gêné adorable, et un sourire était venu décorer ses lèvres. Et ces mots avaient franchi la barrière de ses lèvres. Un simple « je t'aime », devant la banque postale de ce petit village, en face de la boucherie. Un simple « je t'aime », qui lui avait coupé le souffle. Un simple « je t'aime », dans un cadre ordinaire, qui lui avait paru extraordinaire. Quand elle passait devant ces étalages, le bonheur étreignait à chaque fois son cœur.
Elle s'était contentée de déposer sur ses lèvres un baiser chaste. Il n'avait duré qu'une fraction de secondes. Elle n'était pas habituée à ça, mais était fière d'avoir eu le courage de le faire. Puis, elle avait pris sa main et ils avaient marché, le sourire aux lèvres.
Ce jour restait l'un des plus beaux de sa vie. Ce n'était pas une déclaration comme dans les films ou dans les livres. Il n'y avait ni cheerleaders, ni de comédie musicale. Ce n'était pas tragique, et il n'y avait pas de musique douce. Seulement les bruits de la ville : les voitures qui passaient, les tracteurs qui bouchaient la circulation, et les aboiements des chiens dans la ruelle adjacente. Mais pour Mikasa, cela restait le plus bel endroit du monde. L'endroit de son premier baiser.
Elle avait vécu avec lui les premières étreintes et les premiers baisers maladroits. Elle avait connu les premières caresses hésitantes et les premiers regards d'amour. Elle avait écouté et poussé les premiers gémissements. Elle avait appris les premiers gestes d'une gymnastique à deux.
Elle songea à tout cela d'un air rêveur, et souriait presque face à tous les souvenirs qu'elle avait avec lui. Cela faisait bientôt quatre ans, après tout. Elle repensa aux balades, aux pique-niques, aux baignades dans les lacs, aux activités, aux films qu'ils avaient vus, à tous leurs voyages. Elle n'arrivait toujours pas à concevoir que cela faisait si longtemps. L'asiatique avait toujours l'impression qu'il lui avait dit « je t'aime » hier, devant cette Poste et cette boucherie.
Cette année allait être compliquée, elle le savait. Il avait choisi un métier manuel, alors qu'elle quittait leur région pour continuer ses études. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle souhaitait faire. Mais le sport avait toujours été sa plus grande passion, alors c'était naturellement qu'elle s'était dirigée dans cette voie-là. 400 kilomètres les séparaient. À cette pensée, elle baissa la tête vers son téléphone.
« Tu me manques déjà. »
C'était bizarre, sans sa présence. Elle marchait dans des couloirs qu'il ne parcourrait jamais, elle roulait sur des routes qu'il n'emprunterait jamais, elle entraînait dans un club où il n'irait jamais. Le soir, lorsqu'elle rentrait dans sa petite chambre d'étudiante, elle était seule dans ses draps. Alors, elle s'endormait avec un de ses t-shirts dans ses bras, humant cette odeur qu'elle aimait tant.
« Tu me manques encore plus. »
Les semaines passaient à la vitesse d'un court-métrage au ralenti. Les feuilles des arbres se teintaient en rouge et tombaient sur les trottoirs. Les étudiants mettaient des vestes par-dessus leurs pulls. Elle allait entraîner son groupe de débutants en manteau.
Dans le cadre de sa deuxième année, elle devait faire un stage dans une association. Spécialisée dans les sports de combat, le krav maga était une évidence pour elle. Alliant self-défense et combats au corps-à-corps, ce sport comprenait tous les coups, toutes les possibilités. Elle avait du pied-poing, des projections, des techniques au sol, des clés. Tout ce qu'elle aimait. Elle n'avait pas hésité à contacter la structure de la ville, qui l'avait acceptée avec joie. Ainsi, deux fois par semaine, elle pénétrait dans ce gymnase pas chauffé et mal éclairé, devant ces personnes souvent plus vieilles qu'elle. Elle les faisait courir, sauter, se battre. Mais elle aimait ça. Elle aimait ce gymnase froid et sombre, ces débutants innocents dans leur pratique et pas toujours logiques, ces routes qui devenaient désertes après 22h. Malgré l'absence de Jean, Mikasa aimait sa routine solitaire.
En parlant de solitude, elle ne l'était plus vraiment. Une fille de son groupe était venue lui parler. Elle s'appelait Annie, et était en spécialité boxe avec elle, à la faculté. Au fil des assauts, elles étaient devenues amies. Elles se cassaient la gueule en gymnastique artistique, elles souffraient ensemble en demi-fond et elles maniaient les raquettes de badminton comme des poêles à frire. Leur art athlétique était plus percutant que la danse ou la natation.
Les entraînements s'enchaînaient, elle apprenait à connaître ses licenciés. Parmi eux, un adolescent faisait peur à toutes les femmes qu'il combattait, tant il y allait fort. Il s'appelait Levi, si ses souvenirs étaient bons. Après tout, elle n'était pas très douée avec les prénoms. Il mettait de la puissance dans ses coups, chose qui était absolument proscrite lors des exercices. Après l'avoir repris dix fois, elle en eut assez.
« Très bien, gamin. Tu veux du combat ? Je vais t'en donner.
- Euh, j'ai 25 ans, gamine. »
Oups. Son professeur, qui l'assistait dans son cours, rigola face à son air gêné, et ils se mirent en garde. Sans surprise, il avait commencé avec ses poings. Elle savait qu'il n'était pas très souple, ni très mobile. Elle tournait autour de lui et l'assaillait dès qu'une brèche se faisait dans sa garde. Ses licenciées féminines admiraient le combat avec envie, savourant leur vengeance. Puis, au bout de deux minutes, elle en eut assez de sa garde fermée au niveau de son visage et totalement découverte sur ses côtes. Elle se rua sur lui, le prit par les hanches et le bascula vers le sol. Il enleva ses gants de boxe à la hâte pendant qu'elle le frappait ; et le combat se termina la seconde d'après. Elle l'aida à le relever, pendant qu'il lui souriait.
« On remet ça quand ? »
Elle le trouvait étrange. Vraiment étrange. La jeune femme lui avait flanqué la dérouillée de sa vie, mais il en voulait encore. Elle fronça les sourcils.
« Si tu promets de ne plus faire mal aux autres, quand tu veux.
- Ok, c'est un deal. »
Les autres femmes la remerciaient pour son geste, mais il était déjà parti combattre quelqu'un d'autre. Son tuteur de stage posa une main sur son épaule, lui déclarant qu'il y avait toujours des gens qui venaient pour le goût du sang. Erwin avait cette capacité à déceler les vraies intentions des personnes qui l'entouraient. Elle hocha la tête et continua de donner des conseils aux combattants autour d'elle.
Le soir, elle appela Jean dès qu'elle sortit du gymnase. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas entendu sa voix, et elle lui manquait déjà.
« Quoi ? T'as dit à un type de 25 ans qu'il était un gamin ?
- Mais je te jure, on aurait dit un adolescent... Je ne lui donnais pas plus de 16 ans moi !
- Wow, t'es trop drôle mon chat. T'es la plus forte aussi. Il ne fera jamais le poids face à toi. »
Un grand sourire se dessina sur ses lèvres. À ce moment-là, le fameux gamin passa devant elle, adossée à la portière de sa voiture, pour rejoindre la sienne. Il plongea ses pupilles sombres dans les siennes, et lui adressa un rictus amusé.
« Au plaisir, coach. »
Elle lui souhaita une bonne soirée, et suivit sa petite silhouette des yeux. Il était petit pour son âge. Elle rentra elle-même dans sa voiture et claqua la portière.
« Si ça se trouve, il va être obsédé par l'idée de te battre.
- Arrête, il est déjà suffisamment bizarre comme ça. Il manquerait plus que ça...
- Ahaha, je te taquine !
- Bon, je vais rentrer à la maison. Bisous, je t'aime.
- Moi aussi je t'aime, sois prudente sur la route.
- Toujours. Allez, bisous. »
Elle raccrocha et démarra sa voiture. La nuit, les rues de la ville étaient désertes. Les lumières des bâtiments formaient des dessins incohérents dans l'horizon sombre vers lequel elle roulait.
***
Des souffles saccadés et des bruits d'impact résonnaient dans le gymnase éclairé de quelques lumières artificielles. Le praticable était rempli d'ateliers de gymnastique aussi diversifiés les uns que les autres. Mikasa observait son ami Reiner tenter de faire un saut de main, mais il s'écrasait pitoyablement au sol à chaque tentative. Son excuse ? Il était trop musclé. Elle continuait de lui répéter qu'il ne faisait qu'utiliser sa force de manière contradictoire. À ses côtés, Berthold, un autre garçon de son groupe, y arrivait avec une facilité déconcertante.
« Bon, Mikasa, tu m'aides pour le salto ou je dois attendre demain ? »
Elle roula des yeux et reporta son attention vers Annie. La blonde haïssait la gymnastique. Si bien qu'elle devait l'aider à faire la rotation en l'air, et à la propulser vers le haut. Au bout de deux saltos arrière, la blonde refit une pause. Elle était mal à l'aise dans les airs, et haïssait cette sensation de chute alors qu'elle avait la tête vers le bas. Au contraire, l'asiatique adorait ces petits instants en suspension. Elle n'était pas très douée, et se réceptionnait toujours sur les genoux, mais elle aimait tant les acrobaties que ça ne la frustrait pas.
Au bout d'une heure d'acrobaties, les muscles de ses jambes et de son ventre lui suppliaient d'arrêter. Elle se sentait tendue et courbaturée, mais si bien. Elle salua ses amis d'un geste de la main et s'empressa de rentrer chez elle, un sourire aux lèvres. Peu lui importait les douleurs musculaires, tant qu'il l'attendait. Elle eut à peine le temps d'arriver devant sa porte qu'elle s'ouvrit précipitamment.
Derrière celle-ci, l'homme qu'elle aimait l'attendait. Il lui adressa un grand sourire avant qu'elle ne lui saute dans les bras. Dieu, qu'elle aimait ses sourires. Cela lui allait si bien. Il l'embrassa fougueusement avant de fermer la porte de son appartement. L'odeur de Jean la conforta dans sa bulle d'amour et de douceur, comme une vieille amie. Rapidement, elle se retrouva allongée, la tête sur ses cuisses, pendant qu'il caressait son visage glabre.
Elle lui raconta sa journée, ses progrès en gymnastique et les galères de ses camarades. Il l'écoutait, attentif, alors qu'il frôlait, de ses doigts fins, les lignes imaginaires que formaient les traits de son visage. Sa voix finit par disparaître dans les méandres de sa fatigue, et ses yeux se fermèrent face à l'effet des papouilles. Elle ouvrait parfois les yeux et croisait les prunelles noisette de son petit-ami, qui lui souriait. Puis, elle les refermait et replongeait dans cette torpeur pleine de tendresse. Aux portes du sommeil, elle sentit les lèvres du jeune homme se poser sur son front.
« Si tu savais comme je t'aime. »
Cette voix se déforma et prit des intonations plus graves et plus cinglantes. Elle écarquilla les yeux, ce qui provoqua une grimace de surprise chez le plus grand. Son cœur avait fait un grand bond dans sa poitrine, et elle se sentit nauséeuse.
« Tout va bien ?! »
Elle essuya les perles de sueur qui dévalaient ses tempes, et déglutit difficilement. Mais que se passait-il dans sa tête ? Pendant un moment, elle avait cru... Que c'était l'Autre.
« Oui, désolée Jean, je ne sais pas du tout ce qui m'a pris... »
Le concerné l'observait avec un air inquiet, et caressait sa joue d'une tendresse incroyable.
« Mikasa... Rassure-moi, t'es pas enceinte ? »
Elle fronça les sourcils, et sa demande la rendit muette un instant. Puis, elle explosa d'un rire guilleret, et il rougit face à ça.
« N-Ne te moque pas ! Pas que je n'en ai pas envie, mais je ne sais pas si c'est le bon moment tu vois, mais ne crois pas que je n'ai pas envie de ça avec toi, j'en meurs d'envie, mais on est loin et ça pourrait être compliqué...
- Jean, calme-toi ! Je ne suis pas enceinte ! »
Il poussa un petit rire devant son exaspération, et elle vint l'embrasser tendrement. Il la rendait heureuse, avec sa folle capacité à s'emporter pour rien et ses manies dont elle ne pouvait plus se passer. Jean la rendait heureuse.
Alors pourquoi son cerveau redirigeait toujours son attention vers l'Autre ?
« Moi aussi je t'aime, tu sais ? »
Il lui pinça doucement le nez en guise de réponse, alors qu'ils s'observaient en souriant. Elle s'en voulait tellement d'avoir laissé passer l'Autre dans cet instant si doux. Elle lui en voulait tellement, à ce sorcier haut comme trois pommes. Si seulement il pouvait la laisser ne serait-ce que trois secondes.
***
Elle redoutait ces moments où elle passait la porte du gymnase. Elle savait bien qu'elle le trouverait à gauche des bancs, dans le coin au fond de la salle. Si seulement il pouvait partir et ne plus jamais réapparaître. Elle croisa ses prunelles grises, et il vint vers elle en souriant. Une panique sourde s'insinua dans sa cage thoracique, lui murmurant qu'elle avait apprécié ce sourire-là, et qu'elle adorait ce regard aussi profond qu'un abîme. Elle s'assit sur un banc et commença à enfiler ses protège-tibias.
« Prête à en découdre, à ce que je vois.
- Comme d'habitude.
- Ton copain est encore chez toi ?
- Oui, il vient me chercher tout à l'heure.
- Comme c'est mignon. »
Pourquoi, alors qu'il savait qu'elle était en couple, continuait-il de l'observer comme ça ? Elle se redressa pour lui faire la bise, et comme d'habitude, il posa ses lèvres sur ses joues blanches pour y déposer deux baisers. Il était beaucoup trop proche. Elle préférait quand elle le frappait.
L'entraînement débuta, et comme chaque entraînement, il faisait en sorte d'être face à elle lors de l'échauffement. Elle ne comprenait pas comment il faisait pour anticiper ses déplacements et ses placements. Il l'observait lorsqu'elle faisait des squats, il l'observait quand elle donnait des coups de poing, il l'observait lorsqu'elle courrait. Elle essayait de se convaincre que tout le monde la regardait, vu qu'elle faisait partie de l'équipe enseignante. Mais elle savait bien que son regard n'avait rien à voir avec les autres.
Elle fut soulagée d'arriver à la partie technique. Elle prit quelques minutes pour montrer les quelques techniques de défense contre une attaque au couteau, et passa dans les groupes pour parfaire et corriger la technique des uns et des autres. Comme d'habitude, elle esquivait le coin où il travaillait. Elle voulait éviter au maximum son contact, car elle savait que ça la détournait de Jean. Elle avait détesté se l'avouer, mais elle était très attirée par l'Autre. Mais elle ne pourrait jamais l'aimer comme elle aimait Jean.
« Mikasa ! Mike a dû partir, maintenant Levi est tout seul. Tu peux le faire travailler ? »
Elle maudit Erwin pendant une fraction de secondes. Pourquoi elle ? Ne pouvait-il pas demander à Hanji ou à Moblit ? Elle se dirigea vers le nain en soupirant. L'homme l'attendait en souriant.
« Merci de me faire travailler, que ferais-je sans toi ? »
La noiraude le supplia mentalement d'arrêter de sous-entendre des choses comme ça, et saisit le couteau en plastique qu'il lui tendait. Rapidement, il effectua la technique adaptée à toutes les attaques qu'elle enclenchait. Il n'était pas tendre, et elle était plutôt fière de cette réactivité. Néanmoins, dès que son corps était trop près du sien, cette odeur masculine imposait sa présence dans sa tête et perturbait ses sens. Dieu qu'elle détestait être à côté de lui. Dieu qu'elle aimait ça.
« Rah, ça m'énerve, je n'arrête pas d'aller sur toi alors que je dois m'éloigner.
- T'en fais pas, ça viendra avec la pratique.
- C'est qu'au fond, j'aime bien ça. »
Son visage se tordit en une grimace gênée, alors qu'il continuait d'enchaîner la technique. Venait-il vraiment de dire qu'il aimait aller sur elle ? Elle se répétait de ne surtout pas rougir, alors qu'il n'attendait que ça. Elle essayait de songer au regard attendri de Jean, à ses caresses tendres et à son sourire enjôleur. Mais dès qu'elle reprenait le contrôle de ses pensées et des battements de son cœur, elle recroisait ces sibyllines œillades, et elle relâchait prise.
Elle se positionna dos à lui et colla la lame en plastique dans le bas de son dos, heureuse de ne plus avoir affaire à ses regards. Malheureusement, et contre toute attente, il commença à bouger les hanches et à danser. Elle fixa son dos pendant quelques secondes, abasourdie par ses coups de reins et ses déplacements. Il dansait bien en plus, le bougre. Juste après ces gestes, il se retourna, bloqua le couteau loin de lui et la désarma avec une facilité déconcertante.
« Il faut savoir surprendre l'adversaire pour avoir le dessus, n'est-ce-pas ? »
Ses mots résonnaient encore dans sa tête lorsqu'elle rejoignit son cher et tendre, sur le parking mal éclairé. Elle l'embrassa et espéra qu'il ne remarque pas son trouble. Mais elle n'avait rien fait de mal, n'est-ce-pas ? Malgré ce fait, elle culpabilisait comme jamais. L'Autre était toujours là. Quand elle l'embrassait, quand il l'enlaçait, parfois même quand ils faisaient l'amour. Il s'était faufilé dans les méandres de son cerveau pour mieux s'imposer. Mikasa ne savait pas comment le déloger de sa tête. Elle posa la main sur la cuisse du conducteur, qui sourit en regardant la route.
Comment pouvait-elle l'aimer autant, alors que l'Autre lui avait jeté un sort ? Elle ne comprenait pas l'entière complexité de ses sentiments, qui semblaient s'entremêler sans jamais s'entrechoquer.
***
Cela faisait déjà cinq mois que c'était comme ça, et la jeune femme ne pouvait plus faire face à cette situation. Jean était loin, et l'Autre était bien là. Elle était même parfois heureuse de pouvoir le combattre et de lui faire bouffer la poussière, juste par vengeance. Oui, elle lui en voulait terriblement de la mettre dans cet état. Elle lui en voulait tant d'avoir de si beaux yeux, d'arborer ses muscles comme il le faisait et d'avoir cette odeur qu'elle haïssait respirer avec avidité.
Et pourtant, elle aimait Jean. Elle l'aimait de tout son cœur et de tout son être, mais elle ne comprenait pas. Pourquoi ressentait-elle alors cette attirance pour ce nain ? Pourquoi cela devait être si compliqué ? Son frère, qui n'appréciait pas trop son petit-ami, lui répétait de le quitter pour Levi. Armin, son ami d'enfance, lui conseillait d'être prudente et de suivre son cœur. Mais que faire, quand son cœur pointait deux directions diamétralement opposées ?
Jean ne voyait rien. Enfin, s'il avait vu quelque chose, il n'en disait cependant rien. Elle savait qu'elle l'aimait. Elle se voyait finir ses jours avec lui. Ils avaient vécu tant de choses ensembles, prévoyaient d'en faire encore plus. Ils s'imaginaient déjà, investir dans un petit immeuble où il aurait son atelier au rez-de-chaussée. Il pourrait vendre ses articles, avec la vitrine que le bâtiment arborerait. Elle pourrait aller au travail et rentrer le soir pour finir la journée dans ses bras. Chaque matin, ils se réveilleraient l'un contre l'autre, en quête de baisers et de caresses. Chaque matin, ils maudiraient leurs réveils ; et espérèrent le soir pour enfin se retrouver.
Mikasa voulait de ce futur. Mais alors, pourquoi son cerveau la redirigeait toujours vers ces yeux gris ?
Il lui avait dit, il y a quelques jours, qu'il partirait pour aller s'installer ailleurs, là où le travail l'emporterait. Elle avait si hâte qu'il parte. Mais en attendant, ils continuaient de se frapper, encore et encore, en espérant secrètement que ces coups ne deviennent des caresses. Elle en rêvait toutes les nuits, de son corps contre le sien, de ses lèvres sur les siennes. Elle en rêvait jour et nuit. Mais ces songes ne faisaient qu'accentuer cette culpabilité qu'elle ressentait depuis si longtemps.
Puis, un jour, il ne vint plus aux entraînements. Au lieu de se sentir libérée de ses regards sempiternels, elle s'en retrouva désemparée. Comme si son repère n'était plus là. Elle se surprit même à attendre qu'il passe la porte du gymnase. Mais le gamin ne venait plus. Elle en était heureuse, mais elle voyait bien qu'il lui manquait quelque chose. Elle s'en réjouissait. Après tout, elle ne devait plus culpabiliser à cause de ses regards et ses remarques, n'est-ce-pas ?
Quelle erreur.
Il lui fallut quelques mois pour se remettre de leur rencontre. C'était comme si leur contact avait détruit quelque chose en elle, que seule son absence pouvait réparer. L'été était arrivé. Elle avait eu sa deuxième année avec facilité, et passait ses journées avec celui qui la soutenait depuis toutes ses années. Elle marchait à ses côtés, affrontant les orages et les ouragans sans jamais lâcher sa main. Elle ne regrettait pas son choix.
Parfois, un murmure la poussait à se retourner, et elle ne pouvait apercevoir qu'une ombre qui se cachait le long du chemin qu'ils avaient pris. Cette ombre qui serait toujours là, à les suivre silencieusement, pendant qu'ils s'aventuraient sur ce sentier sinueux menant à leur idylle. Elle sentait un regard acier dans son dos, et resserrait la prise qu'elle avait sur la main de son amant.
L'Autre était toujours là.
***
COUCOU. Ouais première intervention, je sais je devrais en faire davantage, mais ce que je raconte est souvent inintéressant. Petite question. Quel choix auriez-vous fait ? Jean ou Levi ?
Parce qu'évidemment, ce One Shot n'était pas une idée. C'était ma vie krkrkr. J'ai fait le choix de Jean (bon évidemment, les personnes en question n'ont pas ces prénoms, mais passons), si vous vous demandez. Mais je serais curieuse de voir ce que vous auriez choisi à la place de Mikasa, à ma place. La sécurité et l'amour, ou quelqu'un qui vous transporte ? Quelque chose de solide, ou une passion exacerbée ?
La bise,
Acchlys.
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