Phase 3.2☞Iris Courtney

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Les coulisses grouillent de monde. Techniciens, invités, cameramen, nous, les Sélectionnées... Tout le monde doit actuellement stresser, et nous nous demandons comment cela va se passer.

Et si nous faisions une gaffe ? Et si nous disions quelque chose que le Roi n'appréciera pas spécialement ? Toutes ces questions se bousculent dans ma tête. J'ai peur -et je sens- que cela va mal se passer. Bethany Bow et Elizabeth Tanner vont me poser des questions auxquelles je n'aurai pas de réponses, à tous les coups. Aidan Schreave, tu auras intérêt à me sortir de ce trou, si c'est le cas.

Nous devrons montrer notre talent, ou plusieurs de nos talents. Aidan m'a dit qu'il avait fait « installer » un chevalet, et de la peinture sur le plateau. Il veut absolument que je montre mon talent de peintre à tout Illéa. Selon lui, j'ai des doigts en or, et tout le monde devrait me connaître en tant que peintre, en plus que d'être une Sélectionnée de l'Elite. Il a gardé tous les dessins que je lui avait fait ; le dragon, son portrait, le paysage du jardin que j'avais dessiné et ensuite donné, et j'en passe...

Assise sur un canapé rouge des coulisses, je me triture les doigts, stressée par tout. Ma coiffure, ma robe, l'ambiance, les questions... «Tracasse pas, Iris, ça va bien se passer, au pire, tu es détestée par le pays tout entier. Au moins pire, tu te tapes la honte en faisant une gaffe. Au meilleur, tu es adorée par le pays! » Merci, la voix dans ma tête...

Le meilleur moyen de me détendre, est de dessiner. Mon carnet de dessin sur les genoux, je tente de me redessiner, dans ma robe bleue, innocente. Je m'applique pour dessiner les détails de la robe, et j'affine mon trait de crayon quand je fais mes mèches de cheveux tombantes sur mes épaules.

Une tête rousse s'approche de moi, en souriant.

- Hey ! Ça va ? Me demande Julia.

Je pose mon carnet et je me tords les doigts.

- Stressée. Beaucoup trop stressée, je ris. Et toi ?

- Mmmh, pas vraiment. C'est pas comme un exam, hein ?

Je ris légèrement.

- Le stress est semblable, pour moi. Enfin... Là, c'est de l'appréhension mélangé à du stress... Mauvais mélange!

- Du moment que ça n'explose pas, ça va (elle sourit). Mais, il faut te détendre, princesse, dit-elle en me faisant un clin d'œil.

Je souris timidement, et mes joues s'empourprent. Au fin fond de moi, j'espère toutes les écraser pour accéder à la couronne, aux côtés d'Aidan. Je souhaite ne jamais quitter ce palais, je souhaite rester auprès d'Aidan.

- Blague à part, je n'ai pas peur que ça explose. J'ai plus peur des questions posées! Tu n'es pas stressée, toi?!

Julia rit, puis me sourit.

- Le seul jour où j'ai vraiment été stressée, c'est le jour du concours d'entrée à l'école de médecine. Après, j'appréhende un peu.

- C'est normal d'appréhender. Si ce n'est pas le cas, tu as un sacré soucis, alors! Lui dis-je en souriant, taquine.

- J'ai peut-être un problème; je n'ai jamais vraiment été nette!

Je tends ma main, en me retenant de rire.

- Bienvenue au club, Julia Hamilton.

La rousse me prend la main, et la secoue.

- Je vous remercie, mademoiselle Iris Courtney!

- Tout le plaisir est pou...

Je suis coupée par le générique du programme.

- L'émission commence, visiblement, dis-je un peu plus stressée qu'avant.

- J'adore le jingle... Enfin, il faudra t'y habituer, ma grande. Si tu es choisie, toutes les semaines, je pourrais te voir à la télé, me dit Julia.

- Toi aussi, Julia, habitues-toi. On a autant de chance toutes les deux!

- Oui, une chance sur cinq, c'est sûr. Que vas-tu présenter au talent?

Je pose ma main sur mon menton, pensive.

- Hummm... Je ne sais pas... De la peinture sans doute. Et toi ?

Mon amie sourit.

- Ah ! Picasso incarné ! Je vais patiner, mais je pense que tu le savais déjà.

- Tu patines ?!

- Ah, tu n'as jamais passé ton nez à la fenêtre sud du Boudoir entre 10h et 15h.

- Je t'avouerai que non... J'ai toujours le nez dans un livre, ou bien penchée sur mon cahier de dessin, avoué-je.

- Et bien moi, à part mes livres de médecine et de gynécologie, c'est rare que je lise...

Une idée me parcourt l'esprit un quart de seconde.

- Ça te dit qu'on fasse un truc ? Tu m'apprends le patin et je te donne des conseils de bonnes lectures, ou je t'apprends le dessin ?

Julia sourit à pleine dents.

- Ça me va, Princesse. On croise les doigts pour ne pas qu'on saute ! Je sens qu'on va bien s'entendre toutes les deux.

-Je le sens aussi.

Nous discutons encore quelques minutes, puis un technicien s'avance vers moi, et déclare que c'est à mon tour dans quelques minutes.

- A plus tard, Julia!

Je tourne les talons, me précipitant vers l'entrée du plateau. J'entends la voix de Julia me dire :

- Courage, ça va aller. A tout à l'heure, Iris !

+++

Je patiente cinq minutes, et c'est à moi. J'inspire, j'expire, et je rentre sur le plateau télé, sous les acclamations du public. Aidan vient me chercher, et me conduit, en me tenant délicatement la main, jusqu'au siège que nous partageons. Je m'assieds, saluant par la même occasion les présentatrices.

- Comme nous sommes heureux de vous voir ici, Iris! Vous êtes sublime, me dit Elizabeth, avec entrain.

- Je confirme, répond Aidan, avec un regard malicieux.

- Oh, et puis, votre robe, Iriis ! Un grand bravo à votre femme de chambre... commence Bethany.

- Et amie, Amara, je réponds en souriant. Et merci à vous de tous ses compliments, et c'est grâce à Aidan si je suis ici, en votre compagnie. Donc j'aimerai vous remercier, Aidan. Merci de m'avoir gardé.

Il me presse la main, et un « de rien » se dessine sur ses lèvres. Je me détourne de son regard hypnotiseur, puis je porte mon attention sur Elizabeth qui parle.

- Alors, commençons les questions tant attendues ! Prête pour un marathon de questions en tout genre, Courtney ?

- Je crois que je n'ai pas vraiment le choix, hein? Dis-je en riant.

Le public se mêle à mon rire, les présentatrices et Aidan aussi.

- En effet, vous n'avez pas le choix, dit Bethany. Première question : quel est votre meilleur souvenir de toute cette aventure au sein du Palais ?

Je réfléchis un instant. Je serai tentée de dire que l'annonce de la mort de cette peste d'Anna a été mon meilleur souvenir, mais je m'abstiens. Mais, un souvenir en particulier me vient à l'esprit. - Mon meilleur souvenir... C'est à la fête du 26ieme anniversaire du couple royal. C'était une superbe soirée !

Aidan et moi nous regardons discrètement, avec un sourire complice. Ce fut le soir où nous nous étions embrasser comme des gamins dans un coin sombre du couloir.

- Oh, à ce propos. Certaines rumeurs prétendent que vous vous êtes éclipsés durant la soirée, et que vous vous êtes embrassés -et peut-être même plus-. Confirmez-vous cette rumeur? Aidan, Iris ?

- Mai... commence Aidan.

- Mais non, pas avant le mariage, enfin, dis-je en coupant Aidan, malencontreusement.

Le public rit, faisant passer l'animatrice à une autre question.

- Iris, aimez-vous notre bel, et chaleureux Prince Aidan Schreave ici présent ?

Je le regarde, d'un œil tendre et admiratif. Je ne me saurais jamais sentie capable d'aimer à nouveau quelqu'un à ce point. Pourtant, ce qui sort de ma bouche, le regard toujours sur Aidan, est autre.

- Ça se pourrait bien... dis-je avec un sourire taquin.

- Et vous, Aidan ? Renchérit l'animatrice.

- Ça se pourrait bien, dit-il les yeux rivés sur mes lèvres.

Tandis que nous continuons de nous regarder «amoureusement», les présentatrices ont repris la parole.

- D'autres rumeurs circulent sur votre passé, Iris. Des rumeurs disent que vous auriez changé votre nom de famille à cause d'un amo...

- Stop, s'il vous plaît, dis-je d'une voix à peine audible.

- Oui mais... Répondez-nous, Iris, s'il vous plaît.

- Non...

Je suis au bord des larmes, et Aidan le remarque, car il me presse fort la main et son regard se durcit.

- Mademoiselle Bow, Iris vous a dit non. Alors, ce sera non. Et puis, ce ne sont que des rumeurs. Il s'agit que de «on dit ci, on dit là», alors cela ne veut rien dire, dit Aidan d'une voix dure.

Pourtant, ces rumeurs sont vraies...

+++

- Bien, le tour d'Iris arrive à sa fin. Il ne reste plus que la partie du talent à montrer. Le plateau est à vous, Iris. Aidan nous a fait comprendre que vous étiez un excellente peintre.

- Et bien, cela me flatte. Donc, je vais peindre, mais, vous voulez que je peigne quoi ? Un truc rapide à faire, pour ensuite laisser la place à mon amie, Julia.

Ils semblent tous réfléchir, quand un homme dans le public se lève, et crie quelque chose de presque incompréhensible:

- Un bateau de pirates, se baladant en mer en pleine nuit !

Je cherche l'homme du regard, et quand je le repère, je lui lève mes deux pouces. Je me positionne devant le chevalet, et peins, emportée par l'imagination. Au bout de vingt minutes, environ, mon tableau est fini. Tout le monde l'admire, me félicitant.

- C'est super, Iris. Un autre talent caché, peut-être ? Me dit Bethany.

- Hum... Je sais faire la roue, en chantant du Pavaroti ? Dis-je en riant.

- Et bien, allez-y, Iris, je n'attends que ça depuis longtemps : vous voir faire une roue, déclare Aidan, d'un œil rieur.

Je le défie du regard, enlève mes chaussures, et je m'élance en chantant pour faire une roue. Manque de pot, mon pied glisse sur une décoration en papier par terre, et je finis les fesses par terre, à regarder le public, et Aidan, hilares. Je me relève, comme si de rien n'était et je me rassois sur mon siège.

On échange quelques banalités, et on m'invite à quitter le plateau. Je me rends donc dans les coulisses, où je croise Zacchariah. Il me sourit et me presse la main.

- Tu as tout déchiré, Iris! Tu ne t'es pas fait trop mal en tombant?

Je souris à mon tour.

- Plus de peur que de mal, comme dirait une amie...

Pourtant, mon pied me faisait mal, et j'avais du mal à marcher, ce qui n'échappe pas, bien-sûr, à Zacchariah.

- Oula, mais c'est que tu boîtes, toi. Allez, viens, je te ramènes dans ta chambre. Je t'apporterai de la glace à mettre sur ton pied.

Il me soulève le bras pour le mettre autour de son cou pour sortir des coulisses, mais après, dans les couloirs du Palais, vident, il me porte dans ses bras. Il y a bien des années, déjà, une Sélectionnée avait eut une liaison avec un garde et ils s'étaient pris des coups de fouets en public, pour acte de trahison. Marlee, elle s'appelait, d'après Zacchariah.

- Je n'ai pas envie d'un quiproquo de la part du Roi, donc j'évite de te porter lorsque nous sommes entourés de paires d'yeux.

- Je comprends, t'en fais pas.

Il me dépose dans mon lit, et pose mon pied enflé sur un coussin.

- Merci pour tout, Zacch. Tu es un vrai ami.

Il me sourit, se penche vers moi, dépose un doux baiser sur mon front, puis part, sans que je puisse y dire quelque chose. 

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