Phase 1.6☞Secret • Amber Clivertson
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A M B E R
Je me réveillais, ce matin, encore une fois en sursaut, au Palais, à cause d'un cauchemar. Deux semaines s'étaient écoulées depuis le début de la Sélection et je n'avais pas revu le Prince depuis notre partie d'échec.
Mily arriva dans ma chambre, me salua puis alla ouvrir les fenêtres. Une douce fraîcheur entra, et me fit frissonner. Je me levais et me dirigeais vers la salle de bain. À la suite d'une bonne douche, je décidais de mettre une tenue de sport, que j'avais emmenée avec moi.
Je descendis les marches deux par deux et m'engouffrais dans les couloirs interminables du Palais. Le Prince m'avait indiqué la direction de la salle de danse, que j'avais demandé. Étonnamment, je la trouvais assez facilement. Elle était grande, pourvue de miroirs sur deux des quatre murs, et du parquet ornait le sol.
Je m'échauffais rapidement et m'étirais, de façon à pouvoir danser avec plus de souplesse. Je choisis ensuite une chanson que j'adorais particulièrement et la mis à fond pour ne me concentrer que sur elle.
J'inspirais profondément et fermais les yeux. Je sentais la musique m'emporter de plus en plus, chaque seconde. J'ouvris mes yeux et m'élançais dans des pas de danse improvisés. Je me sentais libre et lâchée de toute emprise négative, de tous problèmes, et seule. Incroyablement seule. Et aujourd'hui, ça me faisait le plus grand bien. J'avais l'impression de ne plus être totalement moi quand je dansais, de me laisser guider par mes émotions. Je n'apparaissais plus comme une "criminelle"...
Enchaînant tours et sauts, je me laissais porter par le rythme, oubliant même où j'étais, le palais, le luxe, le Prince. Le Prince !! Je m'arrêtais subitement quand je l'aperçus, debout devant moi, à me fixer lentement. Je me sentais terriblement mal à l'aise.
Je rejoignis le Prince qui entama la discussion.
- Amber !! Vous êtes splendide quand vous dansez. J'ai adoré, vous avez vraiment du talent !
- Bonjour Aidan, merci du compliment. Je ne m'attendais pas à vous croiser ici !
- Eh bien, j'ai entendu la musique en passant devant la porte et ma curiosité fut plus présente que je ne le pensais. Je me suis finalement décidé à entrer.
- Je vous comprends parfaitement, j'ai le même petit défaut. Cela peut souvent nous jouer des tours, d'ailleurs.
- C'est certain. Amber, je trouve votre musique assez triste. A-t elle une signification particulière pour vous ?
- Oui très, elle a un côté plutôt sombre. Je trouve qu'elle reflète une partie de mon histoire. Elle fait surtout référence à ma mère. Elle me manque tellement... et la chanson dit vrai. Je me suis blessée en la blessant. Et que si j'avais, ne serait-ce qu'un jour de plus, je la serrerai dans mes bras aussi longtemps que je le pourrai. Cet amour maternel parti, j'ai dû apprendre à faire sans... La vie est faite de regrets et on ne pourra jamais changer cela...
Je sentais les larmes à mes yeux, et essayais, du mieux que je pouvais de me reprendre.
- Pouvez-vous enfin me dire ce qui vous tourmente tant depuis votre arrivée au Palais ? Votre passé ? Je n'aime pas vous voir comme ça et je voudrais pouvoir vous aider un minimum. Je sais qu'il est difficile de se confier à une personne. Et, à vrai dire, je suis déjà passé par là... Vous savez, ça soulage vraiment.
Je ne pouvais plus vivre avec ce poids sur la conscience. C'était trop dur. J'avais besoin de me libérer, sans trop m'ouvrir. Je décidais finalement de lui faire confiance, ce qui ne m'était pas arrivé depuis longtemps. Je pense que cela date de l'époque où j'étais encore avec Bryan. Bryan...
- Vous avez raison, il vaut mieux que vous sachiez mon passé, peu importe ce qu'il est. J'ai peur que vous ne compreniez pas certaines choses, et je ne veux pas la compassion des gens, ou le contraire...
- Ne vous inquiétez pas pour ça, parlez librement Amber. Je ne vous jugerai pas, c'est le présent qui compte.
Je m'assis par terre, sur le parquet chauffé, et fus rejointe par Aidan, face à moi, quelques secondes plus tard.
- J'avais 12 ans, j'étais insouciante et assez irresponsable. Ivre de joie, j'étais toujours soutenue par mes parents, étant leur plus grande fierté, et très fusionnelle avec mon frère. Je profitais de chaque jour avec le peu de choses que je pouvais avoir. Ma mère était agent immobilier et mon père tenait un hôtel. Ils formaient un beau couple et étaient encore très heureux ensemble, malgré leur vie assez difficile. Le temps passait lentement et une certaine routine s'installa. Jusque là, on pouvait même dire que tout était rose. Mais, comme toutes les bonnes choses, le bonheur ne dure qu'un temps. Un accident est toujours imprévisible, et c'est ce qui est arrivé. Le pire est que j'en suis responsable. Je me rappelle de ce qu'il s'est passé, de tous les détails, de la peur, des cris et de la tristesse. J'aimerai ne plus y penser. Mes cauchemars, mes pleurs à répétition... Tout cela est épuisant, insoutenable...
Je m'arrêtais un court instant de parler, les larmes coulaient à flots sur mon visage et humidifiaient mes joues, au fur et à mesure que je me dévoilais. Aidan s'était rapproché de moi, ma main dans la sienne, entourée de ses bras, pleins de tendresse. Pour une fois, je me sentais en sécurité, écoutée et consolée. Il ne dit pas un mot et me laissait continuer.
- Mon père ne m'a jamais pardonné... Il m'a raillé de sa vie comme si j'étais morte avec ma mère. J'ai plusieurs fois essayé de lui parler, de me rapprocher de lui, même de m'excuser. Mais il n'a jamais rien voulu entendre. Je me suis, petit à petit, refermée sur moi-même, souffrant de la mort de ma mère, mais aussi du manque d'affection et de soutien de mon père. Heureusement, Steven ne m'a jamais laissé tomber, malgré les circonstances. C'était le seul qui me comprenait vraiment et à qui je n'avais pas peur de me confier. Je grandissais de jours en jours, toujours invisible aux yeux de mon père, et n'espérais plus rien de lui, à part son pardon.
Quand j'eus 16 ans, je demandais à mon père si je pouvais l'aider, de n'importe quelle manière. Il avait besoin d'argent et me proposa de devenir réceptionniste dans son hôtel pour limiter les dépenses pour le personnel. J'acceptais finalement, ayant le sentiment de pouvoir être utile à mon père.
Entre temps, je fis la rencontre de Bryan, un garçon brun de 17 ans, de caste 5. Nous avons appris à nous connaître et passions tout notre temps libre ensemble. Il connaissait mon passé sans me juger. Nous étions très proches et amoureux, mais jeunes; trop jeunes pour comprendre l'importance d'une relation comme la notre. Je croyais en cet amour de jeunesse même s'il était parfois peu stable. Je pensais pouvoir avoir confiance en lui, mais ce fut de courte durée quand j'appris ce qu'il avait fait. Je n'étais déjà pas en bon terme avec mon père et cela n'a pas arrangé les choses. Étant un 5, Bryan avait besoin de beaucoup d'argent, pour aider sa famille, et avait sauté sur l'occasion pour voler dans la caisse de l'hôtel, un jour où je l'avais invité. Je le quittais peu de temps après, pensant que sa relation avec moi n'était animée que par l'argent. Cela ne fît qu'accroître la haine de mon père envers moi, ce qui, selon lui, ne serait jamais arrivé si notre couple n'avait pas existé.
Un peu plus tard, j'ai entendu parler de la Sélection pour le Prince du royaume. J'ai donc reçu un formulaire. C'est mon père, à ma plus grande surprise, qui a insisté pour que je le remplisse. Il m'a dit qu'il pensait à mon avenir et que ce serait préférable que je le fasse. J'ai toujours supposé que c'était, sans doute, un moyen de se débarrasser de moi et de me faire quitter la maison. Et il a sûrement dû être content quand la limousine m'emmena au Palais.
Un silence régna pendant quelques instants.
- Vous vous êtes confiée à moi, et cela me touche énormément. Vous avez fait face à votre passé, grâce à un grand courage.
En retour, je voudrais faire un don à votre hôtel pour aider votre père, mais aussi à l'hôpital de votre région, car vous la représentez, ici-même. De plus, ce sont des lieux qui devraient être plus riches que ça, et non le contraire.
- Je vous remercie Aidan, et j'apprécie votre geste généreux.
- Peut être aurais-je la chance de vous revoir danser aussi bien qu'aujourd'hui, un jour.
- C'est bien possible, s'il vous arrive encore d'entrer sans frapper par curiosité.
Il se mit à rire discrètement.
- Serait-ce un reproche ?
- Aucunement, venez quand il vous plaît !
- Je n'y manquerai pas, je vous laisse sur ce beau sourire que vous affichez, et que je préfère. Il ne faut pas vous inquiétez, votre secret est bien gardé. À bientôt Amber.
- Merci, et au revoir Aidan.
Le Prince partit et je rassemblais mes affaires pour remonter dans ma chambre et me remettre de mes émotions.
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