Chapitre 9
« Qu'ils s'entraînent quelques mois, et les voilà capables de nous paralyser, de nous étouffer – de nous tuer. Que l'un d'eux perde le contrôle de ses dons ou de son esprit, et c'en est fini de nous. »
– Ji Sangpo, De la magie.
Yoongi éprouvait la sensation de retenir son souffle depuis de longues secondes quand Jimin écarta le miroir de lui. Son regard pourtant ne vacilla pas, posé sur le vide alors que son esprit diffusait en boucle l'image de son œil assombri.
« Yoongi, demanda l'autre avec douceur, cela vous rappelle-t-il quelque chose ?
— Les seules légendes qui font mention de la couleur de nos yeux ou de nos cheveux disent qu'ils sont clairs parce que le pelage de la déesse Hiemis l'est, et que cette couleur symbolise notre pureté, notre bonté. E-Est-ce que... cette teinte signifie que j'ai laissé l'ombre dominer la lumière ? Est-ce que cela fait de moi une mauvaise personne ?
— Non, je ne pense pas. Vous m'avez sauvé.
— Mais un Phénix qui se respecte ne doit jamais tuer. Notre rapport à l'ombre... non, nous sommes des êtres faits pour baigner dans la lumière. »
Pourtant, lui murmura une petite voix qu'il refusa d'écouter, il recourait en continu depuis des semaines maintenant à une technique d'ombre afin de cacher son saphir. Cela suffisait-il à expliquer le léger changement de la couleur de son iris ? Jamais la moindre légende Phénix n'avait fait mention d'un tel phénomène après l'utilisation de magie noire. Il ignorait à quoi se raccrocher, il lui semblait perdre le contrôle de la situation.
« Je m'assurerai que vous soyez en sécurité à présent, et que vous n'ayez plus besoin d'utiliser votre magie. Vous avez dormi pendant plus de dix heures, le contrecoup de ce sort vous a épuisé, et je ne tiens pas à ce que vous vous surmeniez alors que vous guérissez encore de graves blessures. Ce sont désormais deux hommes qui veillent sur la tente, et... je comprendrais que vous refusiez, mais je pense que vous devriez envisager, à l'avenir, d'apprendre à maîtriser la puissance que vous possédez.
— Pardon ? s'alarma Yoongi. Vous voulez faire de moi une machine à tuer ?
— Il n'en est pas question, réfuta Jimin sans hésiter. Mais... j'ignore si vous vous le rappelez : avant d'exécuter ces deux hommes, vous avez réussi à les immobiliser, d'après vous en manipulant leur ombre. Si vous pouviez y parvenir à votre bon vouloir, vous n'auriez pas besoin de tuer pour vous défendre : il vous suffirait d'immobiliser ces hommes pour les inciter à ne pas vous approcher. Vous comprenez ?
— Oui... je ne sais pas encore. Immobiliser des ennemis est aussi une technique d'ombre et... j-j'y réfléchirai.
— Bien.
— J'espère que vous ne souffrez pas trop, s'inquiéta Yoongi devant l'état déplorable des bandages de son ami.
— J'ai connu tellement pire que je ressens à peine un vague picotement. »
Yoongi réussissait enfin à esquisser un sourire quand on entra dans la tente. Jungkook, l'air grave, passa son regard sur l'un et l'autre des deux hommes. Il s'arrêta sur son supérieur.
« Mon général, si vous vous sentez mieux, j'aimerais m'entretenir avec vous à propos de l'attaque de cette nuit.
— Je suis tout à vous, lieutenant Jeon. Je vous suis. »
Le chef salua son invité et le quitta après s'être couvert les épaules d'une épaisse cape de fourrure.
« Vos bras vont-ils mieux ? s'enquit Jungkook tandis qu'ils marchaient jusqu'à la tente des lieutenants.
— Je me porte comme un charme. Manier l'épée risque d'être compliqué pendant quelques jours, mais je peux bouger les bras sans grande difficulté.
— J'en suis rassuré.
— Voulez-vous bien commencer votre rapport maintenant ? J'aimerais en finir au plus vite. »
Comprenant que le jeune homme souhaitait retourner aussi vite que possible se reposer, Jungkook acquiesça. De toute façon, à cette heure, beaucoup de soldats s'entraînaient ou déjeunaient : peu d'entre eux circulaient dans les quartiers alentour.
« Nous avons été attaqués cette nuit par le général sawaï Son et deux de ses lieutenants. L'un retrouvé mort dans votre tente, l'autre que nous avons réussi à faire prisonnier.
— Très bien. L'avez-vous interrogé ?
— J'attendais votre feu vert.
— Nous irons ensemble.
— En ce qui concerne l'attaque, nous avons perdu quelques soldats, mais peu en comparaison avec les dégâts que nous leur avons infligés. Il s'agissait de troupes trop jeunes, pas assez préparées. Nous avons autant que possible blessé pour rendre inoffensif plutôt que pour tuer, mais nous avons dénombré beaucoup de cadavres sawaï. En dehors du lieutenant, nous n'avons pas fait de prisonniers, nous avons estimé que ce n'était pas nécessaire.
— Vous avez eu raison. »
Jungkook le remercia d'un mouvement de la tête avant que son visage ne s'obscurcisse.
« Maintenant, si vous permettez, j'aimerais savoir ce qui s'est passé dans votre tente.
— Les deux Sawaï ont tué le garde puis ont tenté de kidnapper Yoongi. Je me suis battu contre eux. Ils sont morts et j'ai été blessé. »
Jungkook le considéra avec perplexité alors qu'ils entraient dans sa tente. Jimin s'assit sur le premier lit qu'il vit, quant à son hôte, il prit une chaise.
« Laissez-moi émettre quelques doutes quant à votre récit.
— Vous pensez que je vous ai menti ? demanda Jimin avec un calme déstabilisant.
— Non. En revanche, j'aimerais que vous me répondiez honnêtement : les entailles sur vos bras ont bien été provoquées par les sabres des adversaires, en revanche eux ne présentaient pas de blessures qui justifieraient leur décès. Vous avez dit qu'ils étaient morts, mais... qui les a tués ?
— La réponse n'est-elle pas évidente ?
— Alors qu'il ne maîtrise prétendument pas la magie ?
— Je suis las de votre perspicacité, lieutenant Jeon, soupira Jimin. J'avais espéré réussir à vous le cacher un peu plus longtemps.
— Pour la sécurité de tous, nous devrions...
— N'oubliez pas qui décide ici, le coupa son supérieur d'un ton autoritaire. Yoongi a agi dans un réflexe désespéré, lui-même s'ignorait capable d'une telle prouesse, et il en est encore fragilisé. Comme vous, j'ai hésité à prendre des mesures... mais je suis convaincu que parce que nous sommes ses alliés, nous n'avons rien à craindre de lui. Il ne nous a jamais attaqués et il ne le fera pas. Il m'a sauvé la vie : le général Son s'apprêtait à me mettre à mort quand il les a immobilisés, lui et son subordonné, avant de les exécuter. Son pouvoir ne m'a pas atteint, il ne visait que nos ennemis.
— À trop faire confiance, nous risquons beaucoup : si Yoongi lui-même ignore son potentiel, comment savoir qu'il ne nous exécutera pas par mégarde la prochaine fois ? Et si l'un de nous l'effraie par accident, attaquera-t-il maintenant qu'il s'en sait capable ?
— Vous vous inquiétez pour rien. Yoongi n'est pas plus dangereux que Samran. Ce sujet est clos. »
Jungkook se mordit la langue pour éviter de répliquer, acte qui lui avait déjà coûté plusieurs fois de sévères remontrances. Jimin avait raison, il devait apprendre à rester à sa place, même si la situation le frustrait plus que jamais.
Son général parut se détendre.
« Bien. À présent, lieutenant, j'aimerais savoir quelle est l'étendue des dégâts matériels provoqués par nos ennemis. »
Son cadet lui lista tout ce qui était à reconstruire ou bien à racheter, budget auquel se rajoutait le rapatriement des corps des défunts auprès de leurs familles, afin qu'elles organisent les veillées funèbres. Jimin écouta avec attention et respect, acquiesçant à intervalle régulier.
« Puis-je compter sur vous et le lieutenant Kang pour vous occuper de tout cela ? s'enquit Jimin.
— Bien sûr, mon général. Nous avons déjà commencé à reconstruire ce que nous pouvions et nous avons rédigé un message à l'intention du membre de l'Assemblée Kim Namjoon. Nous espérions que Samran pourrait le porter, pour qu'il arrive au plus vite.
— Très bien, je m'en occuperai. Autre chose ?
— Oui, une dernière chose : les espions du lieutenant Kang surveillent toujours les Sawaï, et j'étais aussi venu vous dire qu'ils venaient de nous informer que le gros des troupes s'apprêtait à quitter la forteresse, de toute évidence pour rentrer bredouilles à la capitale. Nous pensons qu'ils n'abandonnent pas Yoongi, qu'au contraire un messager est peut-être déjà en route pour Hurna afin de prévenir le Prince et de prendre une décision au plus vite.
— S'ils devaient envoyer de nouvelles troupes, elles n'arriveraient pas avant le mois prochain, réfléchit Jimin, ce qui tombe bien étant donné que nous sommes toujours attendus au sud.
— Vous comptez encore vous y rendre ? s'étrangla Jungkook en bondissant de sa chaise. Alors que les Sawaï sont à un cheveu de décider d'envahir le territoire pour reprendre Yoongi, dont on vient de découvrir qu'il possède une magie considérable ?
— Oui, parce que l'Assemblée n'a encore envoyé aucun ordre contraire, et que ces forcenés restent ceux qui décident de nos mouvements lors de conflits comme ceux qui nous opposent aux Tyfodoniens.
— Nous devons leur exposer l'urgence de la situation ici !
— Ils s'en serviraient pour nous décrédibiliser en nous faisant passer pour des incompétents, et je ne veux même pas imaginer ce qu'ils envisageraient de faire de Yoongi. Plus que tout son origine et son don doivent rester secrets.
— Je comprends, il est vrai qu'ils risqueraient de vouloir faire de lui une arme à leur service.
— Tout comme ils l'ont fait avec moi, affirma Jimin qui se savait obligé de céder à leur bon vouloir s'il ne voulait pas subir leurs foudres. Je préfère qu'ils ne sachent rien de Yoongi, ainsi nous conservons une longueur d'avance sur eux.
— Très bien, céda le cadet.
— Merci pour votre compréhension, lieutenant. Quant à ce qui se passe au sud, j'ai reçu à plusieurs reprises des messages de Namjoon pour m'exposer la situation, les forces en présence, les mouvements, et je pense que notre intervention pourrait n'être que très brève, ce qui nous permettrait de ne pas nous éloigner d'ici plus de trois semaines. De plus, nous pourrons ramener le prisonnier à la capitale en chemin, ce qui ne pourra qu'améliorer notre image. Nous devons toujours nous assurer de retourner les pièges que nous tend l'Assemblée contre elle. Ainsi, nous pouvons espérer que tôt ou tard, ses membres finissent par abandonner ce combat ridicule.
— Espérons qu'ils trouvent bientôt quelqu'un d'autre à harceler, dans ce cas, car je commence à perdre patience, affirma Jungkook d'un air sombre.
— Je vous comprends mieux que quiconque... Lieutenant, reprit Jimin après un silence, quand pensez-vous que nous puissions partir pour la frontière sud ? Quand les troupes pourraient-elles être prêtes ?
— Les troupes ? Demain matin, sans aucun doute.
— Celles du lieutenant Kang suffiront-elles à remettre le camp en ordre pendant notre absence ?
— Bien sûr. Nous n'avons relevé que peu de dégâts importants, les ennemis n'ont pas utilisé de catapultes ou d'autres engins lourds. Je pense qu'ils espéraient nous prendre par surprise, comme nous l'avons précédemment fait pour eux.
— Dans ce cas, ajoutez dans votre message à l'intention de Namjoon que dès demain, nous quittons le camp. »
Les yeux de Jungkook s'écarquillèrent de stupeur alors qu'ils se posaient pour la énième fois sur les bandages ensanglantés de son chef. La lumière d'un jour pourtant clair ne parvenait pas à pénétrer tout à fait dans la tente, mais le jeune homme lisait sans difficulté la fatigue sur les traits de son aîné, qui paraissait plus affalé qu'assis sur le lit.
« Vous n'êtes pas sérieux, si ? balbutia Jungkook.
— Si, très.
— Mais... et vos bras ? Et les douleurs de Yoongi ?
— Tout ira bien pour moi. Quant à Yoongi, s'il le désire il pourra s'asseoir dans une des charrettes de ravitaillement pour éviter que monter ne le blesse davantage.
— Pitié, pas à moi : la chirurgienne m'a prévenu que votre bras droit avait été gravement touché, vous ne pouvez pas...
— Si, je le peux, et je le ferai. Mais rassurez-vous : dans un premier temps, il ne s'agira que d'une paisible chevauchée jusqu'à la capitale, où en plus nous nous reposerons avant de gagner le camp n° 5. Nous n'y serons pas avant une semaine. D'ici là, je serai à peu près remis de ma plus grave blessure, et mes égratignures auront disparu.
— Vous ne serez pas en état de combattre.
— Je comptais bien, lieutenant Jeon, vous laisser tout le loisir de le faire à ma place.
— V-Voulez-vous dire que... vous souhaiteriez me laisser cet honneur ?
— Nous nous occuperons ensemble de la stratégie, mais vous mènerez les hommes au combat. Je resterai en retrait afin de vous soutenir sans trop m'exposer. Je pense que vous avez la capacité de vous débrouiller à merveille, avec ou sans moi à vos côtés. »
Les yeux de Jungkook brillaient de reconnaissance et de fierté. Il n'avait combattu seul qu'au cours des rares batailles pendant lesquelles son chef avait dû s'éclipser, et chaque fois avec Taehyun à ses côtés. Cette fois, il combattrait seul avec ses unités, et même si Jimin continuerait de l'épauler d'un point de vue stratégique, Jungkook comprenait l'immense honneur qu'il lui accordait.
Le général savait qu'il avait froissé à plusieurs reprises l'égo de son lieutenant ces derniers temps, aussi bien en privé que devant ses hommes, de sorte qu'il souhaitait lui montrer que malgré tout, cela ne l'empêchait pas de l'estimer et de lui vouer une confiance quasi aveugle.
« Ce sera avec plaisir, et vous pouvez croire que je ferai de mon mieux pour ne pas vous décevoir, affirma Jungkook en baissant la tête pour lui témoigner son respect.
— Je n'en doute pas, j'ai totalement confiance en vous. Le lieutenant Kang et vous possédez tous deux une valeur égale, mais des qualités très différentes. J'ai toute confiance en lui pour surveiller l'ennemi et infiltrer des territoires à risque, et en vous pour devenir un grand chef de guerre. Je le répète, donc : ne vous inquiétez pas pour moi, puisque celui qui me protègera, ce sera vous.
— Et je me chargerai de cette mission avec joie, mon général. »
Jimin lui sourit, ce qui provoqua une allégresse indescriptible dans le cœur de son cadet, qui ne le montra pas néanmoins, conscient qu'il devait rester digne et non se laisser aller à de grandes effusions de bonheur.
« Mon état vous préoccupe-t-il moins à présent ? le taquina Jimin. Puis-je voir ce message que Samran doit transmettre à notre ami ? »
Jungkook opina et se hâta d'ajouter que Jimin et lui rejoindraient la capitale d'ici moins d'une semaine. La missive terminée, il la présenta à son supérieur qui la valida. Les deux hommes se saluèrent, et ce ne fut qu'à cet instant que l'aîné fronça les sourcils.
« Lieutenant, vous portez encore votre armure... rassurez-moi, vous avez dormi après la bataille, n'est-ce pas ?
— J'ai aidé nos braves soldats à remettre en ordre ce qui pouvait l'être à la lueur des torches, et à tour de rôle nous nous sommes tous accordé environ trois heures de sommeil.
— Reposez-vous donc, et dites à vos hommes d'en faire autant : un long voyage nous attend, et si les dégâts ne sont pas trop importants, les soldats du lieutenant Kang s'en chargeront dans les jours qui viennent. Mieux vaut qu'ils soient en forme. »
Parce qu'il n'avait plus la force de lutter contre son supérieur et que l'épuisement l'alourdissait un peu plus à mesure que passaient les heures, Jungkook accepta sans discuter. Ils quittèrent tous deux la tente : le cadet pour prévenir ses troupes qu'elles devaient se reposer en vue du lendemain, et l'autre pour appeler son aigle.
Ceci fait, Jimin retourna à ses quartiers d'un pas fier, le dos droit malgré ses bras assaillis par une douleur pulsative et sa tête qui lui semblait avoir été heurtée par un rocher. Il avait besoin de s'allonger, mais hors de question de paraître faible. Il savait à quel point ses traits doux, ses lèvres épaisses, pouvaient lui donner des airs innocents, de sorte que depuis l'académie militaire, il ne laissait que rarement son large sourire apparaître et plisser ses yeux en amande. Il veillait à toujours garder un visage impavide voire sévère, du moins en présence de soldats. Pour ce qui était de Jungkook et Taehyun, ils se connaissaient assez pour que le physique ne change pas leur perception des uns et des autres.
Quand il entra, il trouva Yoongi assis sur la méridienne, la mine perdue. Les lumières qu'il avait créées brillaient encore à la place des bougies disposées çà et là. En dépit de la fin des combats et de la paix qui régnait, l'atmosphère était devenue étouffante.
« Yoongi... tout va bien ?
— Je dois absolument retrouver ma sœur. Elle saura peut-être ce qui se passe. Hiemis lui a peut-être parlé de cela aussi, n'est-ce pas ? Aurait-elle eu une vision qu'elle n'aurait pas su interpréter ? C'est possible.
— Oui, ne vous en faites pas, nous la retrouverons et vous pourrez lui poser vos questions, approuva Jimin qui savait que son invité avait besoin d'être rassuré. Mais pour l'instant, nous avons une autre priorité : les Scorpions ont quitté la frontière, la forteresse est revenue à son effectif normal. Quant à nous, nous devons en profiter pour partir accomplir notre mission au sud.
— Le combat contre les Tyfodoniens...
— Les Tigres, si vous préférez. Mais effectivement, nous sommes tenus de nous y rendre, et de cette manière nous serons absents pendant que les Scorpions le seront aussi, ce qui réduit les risques d'attaque. En revanche, vous devez venir avec nous, vous serez mieux protégé contre eux qu'ici, tout près de la frontière.
— Je comprends.
— Nous partons demain.
— Demain ! Mais... et vos bras ?
— Ils guériront en chemin.
— Pas si vous montez.
— Je peux encore monter.
— Bon sang, que vous êtes têtu !
— Je vous rends le compliment, Yoongi. »
Le Phénix esquissa un sourire à cette réplique puis prit une moue embarrassée.
« Moi c'est Min Yoongi, général Park Jimin. »
Jimin, qui était venu s'asseoir sur le matelas près de la méridienne, ne put s'empêcher de rendre son sourire à son ami. Min... pas étonnant qu'il l'ait dissimulé. En effet, ce patronyme avait été porté par plusieurs grands personnages Phénix, à commencer par le général Min Seongok, celui que les Élémentaires avaient longtemps surnommé « le traître » pour avoir incité son armée à frapper les Aigles, avec qui les Scorpions s'étaient alliés pour les aider à les combattre.
Or, très vite, des voix s'étaient élevées contre cette version de l'histoire, et l'on pensait encore aujourd'hui que, de manière plus vraisemblable, le général Min avait été provoqué d'une façon ou d'une autre par un des deux empereurs : il avait décidé d'attaquer pour protéger les siens. Ce fut, malheureusement, ce qui convainquit les Quatre Peuples : les Phénix possédaient des pouvoirs trop dangereux, ils devaient disparaître. Les troupes de neuf cents mages avaient failli l'emporter contre deux armées ennemies qui regroupaient au total près de douze mille hommes.
Peu enclin à adresser à Yoongi la moindre remarque au sujet de son nom, Jimin se contenta d'opiner.
« Eh bien vous me voyez enchanté de faire votre rencontre, Min Yoongi. »
Le soulagement qu'il lut sur le visage du Phénix lui indiqua à quel point il avait craint sa réaction. Or, comme Jimin le lui avait déjà expliqué, il n'était pas ses ancêtres, et il ne partageait avec eux qu'un peuple qui avait d'ailleurs beaucoup changé – en premier lieu de nom. Il se moquait de la loi sur la magie, dont il fallait souligner qu'elle apparaissait encore dans la Constitution du Continent rédigée par le Conseil des Quatre Peuples.
Ce texte n'avait jamais été abrogé, pas même après le massacre génocidaire des Phénix. On s'était acharné contre eux, et cette seule loi prouvait que si l'existence de Yoongi était révélée à l'Assemblée, les hommes politiques risquaient de l'invoquer pour faire subir au Phénix tout et n'importe quoi, affirmant qu'il devait être emprisonné... et Jimin savait que ces vautours ne se gêneraient pas pour torturer le pauvre garçon sous prétexte d'étudier son corps et la façon dont fonctionnaient ses pouvoirs.
Une bouffée d'angoisse le prit à cette idée : il refusait que quiconque touche à Yoongi. Depuis leur rencontre il s'était fait un devoir de le protéger des Sawaï, à présent il devrait aussi le protéger de son peuple à lui, des Arixiens.
« Merci, général, je suis moi aussi enchanté de vous avoir rencontré.
— Appelez-moi Jimin, vous n'êtes pas un de mes soldats, après tout.
— Très bien... Jimin. »
Entendre son prénom prononcé sous cette tente, symbole de son statut, déstabilisa le jeune chef. Pourtant, la sensation lui plut. De cette manière, il se sentait un peu plus proche de celui qu'il considérait désormais comme un ami et allié plutôt que comme un étranger susceptible de lui attirer des ennuis.
« Vous savez, reprit Jimin, dans l'armée arixienne, nous avons une petite tradition : chaque fois qu'un combat est gagné, important ou non, les troupes le fêtent le soir suivant avec un petit banquet. Mes deux lieutenants m'y représenteront, et aucun soldat ne raterait l'occasion de boire et manger en chantant et en riant. Pour ma part néanmoins, j'ai toujours préféré profiter de l'occasion pour m'entraîner, et je me demandais si vous accepteriez de vous joindre à moi ce soir.
— Parce que vous comptez vous entraîner à vous battre avec vos jambes ? demanda Yoongi, sceptique devant l'état déplorable des bras du général.
— Allez-vous tous me le rappeler encore longtemps, que mes bras sont en piteux état ? Croyez-vous donc que je ne suis pas au courant ? Que je ne ressens aucune douleur ? Bon sang, Yoongi, réfléchissez un instant, je vous propose juste de vous entraîner..., soupira Jimin.
— Oh... mais m'entraîner à quoi ?
— Je pense sincèrement que vous devriez travailler votre magie, mais...
— Non, s'il vous plaît, je... elle m'effraie. Je ne veux pas l'utiliser.
— C'est justement la raison pour laquelle je m'apprêtais à dire « mais je pense que vous refuserez », répliqua Jimin avec un rictus. Donc je voulais vous proposer de vous entraîner à l'arme blanche, celle de votre choix si vous ne ressentez plus de douleurs dans le dos.
— Elles ont presque disparu, cela ne devrait pas me poser trop de problèmes pour une première séance. Mais... possédez-vous beaucoup d'armes ici ?
— Nous combattons essentiellement au jingum, un sabre à un seul tranchant et à lame incurvée. Le mien est fin et léger tandis que le lieutenant Jeon par exemple a choisi un modèle plus large, donc plus lourd. Sa force lui permet de le manier de façon efficace. Nous possédons aussi divers modèles de lancer, depuis des lames jusqu'à des étoiles, ainsi que différents types de dagues et de poignards, mais aussi quelques arcs, des lances, etc. Pour aujourd'hui, nous pourrions voir avec quoi vous vous sentez à l'aise et vous apprendre les bases du maniement de l'arme que vous choisirez. Je souhaiterais que vous soyez capable de vous défendre en cas d'attaque, et si vous refusez d'utiliser votre magie... eh bien vous pourriez garder une arme sur vous.
— J'aimerais beaucoup, merci pour cette offre, géné... Jimin, se rattrapa-t-il.
— Je vous en prie. J'ai hâte de vous voir en action. Attention cependant : je suis un professeur exigeant.
— Ce qui tombe bien, puisque je suis un élève appliqué.
— Parfait. En attendant le crépuscule, reposons-nous. »
Yoongi approuva, et son ami se sentit rassuré de le voir s'allonger en remontant la couverture sur lui. Il paraissait beaucoup plus serein à présent. Jimin pour sa part ferma les paupières une fois enfoncé dans son lit, et le sommeil ne tarda pas à le gagner à son tour.
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Après avoir mangé un peu puis discuté de la façon dont se déroulerait la séance, Jimin et Yoongi firent halte dans l'armurerie au crépuscule. Il s'agissait d'un bâtiment près de la zone d'entraînement, bien gardé même en cas de réjouissances comme celles de ce soir-là. À l'intérieur, des torches éclairaient des rangées entières d'armes en tous genres triées selon leur poids et entretenues avec un soin tout particulier. Une ambiance étrange résultait de la lumière vacillante des flammes qui se reflétaient sur les lames et du gris qui dominait, tantôt celui du métal, tantôt celui des murs de pierre.
« Avez-vous réfléchi à ce que vous préféreriez ? s'enquit le général.
— Non. Je pense de toute façon qu'il me faudra une arme légère. La prison... e-enfin, je sens bien que tout le temps passé immobile a fragilisé ma musculature. Je ne pense pas pouvoir manier ces lances et ces haches de combat, affirma-t-il avec un regard aux équipements les plus lourds.
— Je pense aussi. Malheureusement, même nos jingum les plus légers finissent par peser leur poids si on les manie un long moment. L'idéal serait de commencer par une arme avec laquelle vous pourriez vous entraîner sans trop de problèmes pendant au moins une heure par jour. Or, si vos bras tétanisent au bout de dix minutes, et qu'au bout de vingt vos douleurs dans les reins ressurgissent...
— Oui, je comprends, acquiesça Yoongi alors que son ami avait laissé sa phrase en suspens.
— Allons voir du côté des dagues, je pense que ce serait plus approprié, surtout s'il n'est question que de vous défendre d'un ou deux assaillants : vous ne serez jamais sur un champ de bataille, les seules personnes qui vous atteindront auront le même objectif que le général Son, vous kidnapper. Ce qui compte, c'est que vous puissiez les repousser aussi longtemps que possible en attendant que quelqu'un puisse vous rejoindre et vous aider.
— C'est juste. »
Jimin se dirigea vers les dagues, suivi par Yoongi comme par son ombre. Parce que l'endroit servait surtout de réserve, il s'avérait mal éclairé, de sorte que le Phénix distinguait à peine les armes face à lui. Las d'essayer de plisser les yeux pour y voir au mieux, il fit naître au creux de sa paume une lumière qui baigna le lieu de sa lueur rassurante.
« Vous avez de la chance que j'aie demandé aux gardes à l'extérieur de ne pas entrer sans mon accord, soupira Jimin, mais ils se poseront des questions à propos de cette lumière.
— Je pense qu'au contraire, ils ne la verront pas.
— Pas même à travers le jour sous la porte ?
— Non. Ils ne verront rien de plus que ce qu'ils voient d'habitude : un des exercices les plus formateurs pour apprendre à maîtriser son pouvoir, chez les Phénix, est le fait de créer une boule de lumière enfermée dans une sphère d'ombre. Cela demande de la précision, de la concentration, de la rigueur, et l'utilisation simultanée de deux magies opposées. Tous les enfants passent par cet entraînement quand ils développent leurs pouvoirs, c'est le plus efficace.
— Incroyable, alors quiconque ouvrirait la porte...
— Se trouverait face à l'ombre. Il faudrait qu'il avance pour se trouver avec nous dans la lumière, compléta Yoongi. Mais peu importe. Pouvez-vous me conseiller une arme ?
— Je pense qu'il serait préférable que vous possédiez une dague, dont le port permanent ne vous handicapera pas, en revanche j'hésite à vous proposer une arme d'estoc.
— Je préfère éviter.
— Je m'en doutais. Nous avons des dagues courtes et d'autres plus longues, et d'autres avec des formes différentes, à l'image de celles-ci. »
Jimin lui présenta un ensemble de deux doubles dagues. Il s'agissait d'armes dont la lame formait un demi-cercle qui rejoignait les deux bouts de la poignée.
« Je suis sûr que ces armes auraient convenu à ma sœur, songea Yoongi avec un sourire nostalgique. Sa grâce et sa force lui auraient permis de les manier avec un indéniable talent. Pour ma part, une lame classique me suffira amplement.
— Je comprends. Nous n'avons que peu de soldats qui possèdent ce genre de modèle et savent le manier. Mais ceux qui en sont capables... bon sang, j'adore les regarder s'entraîner, ils sont fascinants. »
Yoongi n'en doutait pas. Quand son ami lui tendit une nouvelle arme, cette fois, il approuva. Il s'agissait d'une dague à la lame longue d'environ trente centimètres, légère et pratique. Son manche de plus était coloré d'un noir sur lequel dansaient des motifs céruléens, ce qui lui donna la sensation d'appartenir au régiment de Jimin, ou du moins de pouvoir compter sur leur protection.
Une fois que Jimin eut pris une épée d'entraînement en bois, les deux hommes se rendirent dans la cour, déserte à cette heure, ce qui n'empêchait pas d'entendre le brouhaha qui montait du lieu des réjouissances nocturnes. On chantait, on riait, on trinquait. Jimin savait ses lieutenants friands de ce genre de célébrations : Jungkook en profitait pour boire et discuter avec ses troupes, tandis que Taehyun aimait en apprendre plus à propos de chacun, découvrir qui se cachait derrière les puissantes armures et les lames destructrices de ses soldats.
Jimin observait d'un œil presque tendre le bâtiment de la cantine.
« Je n'ai même pas besoin que vous me le confirmiez, il est évident que vous adorez vos hommes, affirma Yoongi touché.
— Les adorer est peut-être un peu fort, mais... je tiens à eux comme à des amis, comme à des frères. »
Yoongi acquiesça sans en attendre plus, et tous deux se placèrent au centre de la cour, où l'on disposait d'assez d'espace pour les duels. Jimin, qui avait gardé pour seuls habits un haut chaud à manches longues et un pantalon de tissu, avait laissé ses propres armes dans sa tente, et il tendit devant lui son épée de bois, qu'il tenait du bras gauche. Certes, il ne s'agissait pas de son bras principal, mais il ne peinait pas le moins du monde à se battre ainsi, et son bras gauche, au contraire du droit, n'avait subi que quelques entailles superficielles.
« Essayez de m'attaquer, ordonna le général en pointant sa lame devant lui.
— Pardon ?
— N'ai-je pas été assez clair ?
— Mais... vous êtes blessé, et j'ai une vraie lame !
— Ne vous en faites pas, vous ne me toucherez pas.
— Et si...
— Je vous ai dit de ne pas vous en faire, répéta Jimin d'un ton ferme.
— Bien. »
Yoongi prit soudain une mine concentrée. La nuit tombait peu à peu, les quelques torches qui brillaient alentour ne suffisaient pas à éclairer correctement les lieux. Le Phénix distinguait plus une ombre qu'un corps, et cela l'inquiétait.
« Il fait trop sombre, protesta-t-il. Puis-je illuminer un peu les alentours ? »
Le général jeta un regard circulaire sur la cour avant d'accepter, et Yoongi fit apparaître de nouvelles lumières à des endroits où elles pourraient passer pour des flambeaux.
À présent qu'il y voyait clair, il pouvait attaquer de façon plus précise. Or, l'état de son ami lui causait du souci, de sorte que son premier assaut s'avéra d'une mollesse désespérante. Jimin ne para même pas avec son épée en bois, il se contenta d'un pas de côté avec une expression perplexe.
« Bizarre, il me semblait pourtant que c'était moi et non vous qui étais blessé au bras, songea-t-il avec ironie.
— En effet. Pour ma part, je le suis au dos, rétorqua Yoongi. Mais vous pensez peut-être que ce n'est pas handicapant.
— Je sais très bien que vous n'en souffrez presque plus.
— Et qui vous l'a dit, Jimin ?
— Vous-même. Mais sans doute votre mémoire est-elle aussi courte que votre lame. »
Et sur ces mots, d'un seul geste du bras gauche, Jimin réussit à désarmer Yoongi, dont la dague finit au sol un peu plus loin. Le tintement du métal sur la pierre froide résonna de longues secondes durant, alors que le Phénix l'observait, la mine stupéfaite.
« Alors être général, c'est être ambidextre, c'est bien cela ?
— Au minimum, approuva Jimin avec humour. Maintenant, allez récupérer votre arme avant de le payer de votre vie : face à un ennemi, il vous faudra être beaucoup plus rapide.
— Comme cela ? »
Soutenant le regard de son mentor, Yoongi tendit le bras en direction de sa lame, qui coula soudain dans l'ombre comme dans de l'eau, avant de réapparaître à ses pieds pour qu'il s'en saisisse d'un geste nonchalant. Jimin sentit un rictus joueur lui tordre les lèvres. Une nouvelle idée venait de germer dans son esprit.
« Eh bien, je croyais que vous ne vouliez plus utiliser vos pouvoirs.
— Pas de manière offensive.
— Heureux que vous ayez un peu modifié vos conditions, même si je continue de penser que vous devriez maîtriser votre talent. Je suis convaincu que vous pourriez faire de grandes choses avec.
— Je préfère entraîner mes techniques de défense, pour n'avoir plus jamais à tuer.
— Très bien, alors modifions un peu notre exercice : n'essayez plus de me toucher, essayez de m'empêcher de vous toucher. Votre dague et vos pouvoirs sont vos seuls alliés. »
Yoongi approuva, et Jimin aussitôt s'élança vers lui. Il brandit son épée qu'il abattit sans grande violence : le Phénix réussit à parer à l'aide de sa dague qu'il tenait à deux mains. Il sentit néanmoins sa force vaciller. Jimin, plus jeune que lui, était surtout beaucoup plus puissant. Par chance, il n'insista pas. Il recula à peine, juste pour attaquer de nouveau, vif comme l'éclair. Yoongi, conscient qu'il ne parviendrait pas à empêcher cet assaut, tenta une esquive alors qu'il érigeait entre son cadet et lui un mur d'ombre qu'il densifia.
L'arme de Jimin heurta les ténèbres dressées par son adversaire, ce qui ne déstabilisa pas le général qui enchaîna avec un énième coup de taille. Yoongi, qui ne s'y attendait pas et dont le crâne commençait à cogner, ne réagit pas assez vite, et la lame de Jimin s'arrêta tout près de sa hanche.
« Vous êtes mort, asséna Jimin avec légèreté. Perdu.
— J'ai résisté bien plus longtemps que j'aurais pu l'imaginer.
— Deux coups en effet, on part sur de bonnes bases. »
La moquerie ne parut pas amuser Yoongi, qui planta son regard sur son cadet.
« Dans ce cas, à moi d'essayer de vous toucher. »
Jimin s'apprêtait à répliquer quand il s'aperçut qu'il ne parvenait plus à bouger. Il poussa un soupir.
« Là, Yoongi, je trouve que vous vous facilitez un peu trop la tâche. »
Ce dernier, en dépit de ses maux de tête qui gagnaient en intensité, s'approcha avec une mine victorieuse. Il posa la pointe de sa dague contre le cœur du général.
« Vous êtes mort, le singea-t-il. Perdu.
— Je vous trouve mauvais joueur, mon cher.
— Je l'admets volontiers.
— Puis-je bouger, maintenant ?
— J'y réfléchirai demain matin.
— Je ne vous crois pas. »
Yoongi s'apprêtait à répliquer, un sourire suffisant aux lèvres, quand ses douleurs s'amplifièrent au point qu'il relâcha son sortilège. Jimin retrouva sa mobilité, et le Phénix s'agenouilla, une main contre son crâne, les yeux clos et les sourcils froncés.
« Yoongi, que vous arrive-t-il ? s'inquiéta l'autre.
— Ma tête... bon sang, ces maux reviennent tous les jours ou presque.
— Est-ce lié à l'utilisation de votre pouvoir ou bien à votre fatigue ?
— Un peu des deux, je pense. »
Aucun des deux, en vérité, mais Yoongi ne comptait pas encore dévoiler tous ses secrets.
« Voulez-vous que nous nous arrêtions ici pour aujourd'hui ?
— Nous avons à peine eu le temps de commencer.
— Vous avez vécu une journée éprouvante, dois-je vous le rappeler ? Il est naturel que vous soyez fatigué après la nuit que vous avez affrontée. Nous nous entraînerons dans les prochains jours. Pour lors, au moins nous vous avons trouvé une arme. Gardez-la, elle vous appartient à présent, et quoi que l'avenir vous réserve, j'aimerais qu'elle reste avec vous.
— Même si je devais quitter votre territoire ? s'étonna Yoongi qui tentait de retrouver ses esprits.
— Elle est à vous.
— Merci beaucoup, Jimin.
— Trêve de bavardages, rentrons. »
Il aida son aîné à se relever, entourant comme la dernière fois sa taille d'un bras tandis que Yoongi en enroulait un autour de sa nuque. Il vacilla, étourdi par un désagréable vertige. Si Jimin ne l'avait pas retenu, il se serait effondré.
D'un geste de la main qui lui coûta plus qu'il n'accepterait de l'avouer, le jeune mage fit disparaître les lumières créées auparavant. Jimin et lui partirent ensuite en direction des quartiers du général.
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