Chapitre 65
Sinn guida son warex dans le dédale des allées du campement des civils. La monture de Charlotte le suivait d'un pas lent. La jeune femme avait une mine renfrognée depuis leur discussion, qui avait dérapé.
Sinn espérait pouvoir reprendre leur conversation en effeuillant la jeune femme, quand ils seraient sous la tente seigneuriale. Lui qui n'avait de compte à rendre à personne, pensait prendre la main de Charlotte pour qu'ils la rejoignent ensemble et s'y ébattent autant qu'il leur plairait. Au matin, tous les Kross allaient savoir que Charlotte, l'étrangère, était devenue l'une de ses favorites et qu'elle était intouchable.
Sinn voulait mettre autant d'ardeur dans leur prochain corps à corps, car l'intensité de leur rapprochement avait comme figé le temps. Étrangement, plus rien n'avait compté qu'eux deux durant ce moment. Et la tendresse dont Charlotte avait fait preuve, lui avait prouvé qu'elle partageait ce sentiment.
Malheureusement, quand Sinn fut assez près de sa destination, il se raidit sur sa selle.
Draz, Efraïm, Riyès et Erakris avaient une discussion animée devant sa tente.
Sinn guida son warex vers l'enclos. Il mit pied à terre et s'assura que Charlotte l'imitait. Quand il attacha la longe, il se pencha pour lui murmurer :
— Reste là !
— Y'a un souci ? chuchota-t-elle, réalisant que Sinn s'était assombri.
— Mon frère et mon beau-frère sont là, répondit-il.
Il tourna les talons pour se diriger vers le petit groupe, en affichant un air grave. Le bien-être post-coït était officiellement derrière lui.
Les quatre guerriers s'étaient tus en voyant Sinn approcher, ils ne pensaient sans doute pas le voir au campement des civils, mais Draz afficha un léger sourire en le regardant.
— Efraïm, Draz, les salua Sinn. Que me vaut votre présence ? ajouta-t-il pour les couper dans leur salutation.
— Les Albâtres ont décidé de t'apporter leur soutien, expliqua Efraïm.
— Vous êtes l'époux de ma sœur, ajouta Draz. Nous cultivons l'esprit de famille, affirma-t-il, souriant.
Sinn se tourna vers Erakris :
— Votre discussion m'a paru agitée, déclara-t-il.
Erakris et Riyès contractèrent les mâchoires pour contrôler leur irritation.
— J'ai proposé la tente seigneuriale à Draz, mais Erakris était contre, expliqua Efraïm. Draz est le frère de ton épouse, et il est de sang royal, c'est le moins que l'on puisse faire pour le remercier de faire participer les Albâtres à ce conflit.
Sinn plissa des yeux et dévisagea son frère :
— Ils n'ont encore participé à rien, cracha Sinn. Si c'est pour profiter du confort du campement civil, vous n'auriez pas dû quitter notre territoire !
— Notre trajet a été long et difficile, intervint Draz. J'espérais laisser un jour ou deux de repos à mes hommes, avant de rejoindre l'avant-poste.
— Nous sommes en poste depuis deux longs mois, répliqua Sinn. Et mes hommes ne s'en plaignent pas.
Draz continuait d'afficher un léger sourire, ce qui énerva Sinn. Efraïm tourna le regard en direction de Charlotte :
— Une rumeur courait quand nous sommes arrivés, déclara-t-il. Il paraît qu'un jeune adolescent t'a perturbé.
Sinn eut un rictus. De loin les vêtements et les cheveux courts de Charlotte pouvaient tromper, mais ce n'était pas ce qui irritait Sinn. Le seigneur des Kross n'apprécia pas que son frère ose remettre sa virilité en cause, par son sous-entendu. Chez les Kross l'homosexualité masculine n'était pas tolérée et ces hommes perdaient tout le respect des guerriers et du peuple Kross.
— Il est « elle », objecta Sinn. Mais l'étrangère n'est pas le propos.
Sinn vit que Malé et Kahléa avaient rejoint Charlotte et que toutes les trois jeunes femmes s'enfonçaient dans le campement. Sinn supposa que Charlotte leur avait demandé de la guider jusqu'à Sori.
Sinn fixa Draz :
— Vos hommes se sont suffisamment reposés, qu'ils prennent le chemin de l'avant-poste, déclara-t-il. Mes guerriers pourront profiter d'un peu de repos bien mérité.
— Vous nous accompagnez ? demanda Draz. Où vous allez profiter du confort de votre tente pour baiser l'étrangère ?
Bien que Sinn ait surtout envie de faire brûler la literie, puisque Draz y avait dormi, il s'efforça de ne pas montrer son dégoût.
— Cela vous ennuierait, cher beau-frère ? demanda-t-il d'un ton faussement courtois.
— Vous semblez accorder plus d'honneur à vos catins qu'à ma sœur, répliqua Draz.
— L'honneur que vous accordez à votre propre sœur, doit suffisamment combler mon épouse ! répliqua Sinn, le ton acerbe.
Draz s'empourpra, en comprenant que Sinn savait pour leur relation incestueuse. Quant à Efraïm, il semblait tomber des nues :
— Allons mon frère, tu ne peux bafouer ta femme en tenant ce genre de propos ! objecta Efraïm.
— Et toi, tu ne peux bafouer ton seigneur et frère, en offrant sa demeure à ta guise, cracha Sinn. Reste à ta place Efraïm, gronda-t-il.
Sinn se tourna vers Draz :
— La seule raison qui fait que Houria est toujours en vie, expliqua Sinn. C'est que mes fils aiment leur mère. Le jour où ils découvriront quelle femme elle est, elle perdra la vie... de mes mains !
Draz contracta les mâchoires de rage. Il crevait d'envie de tuer l'homme qui déshonorait sa sœur depuis bien trop longtemps. Seulement, il savait que le projet de Houria devait être maintenu coûte que coûte.
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