Chapitre 54
La matinée était bien avancée, Sinn et Riyès parcouraient le campement pour évaluer le moral des guerriers. Les favorites distribuaient les repas en affichant un sourire aguicheur, ce qui mettait les hommes de bonne humeur.
Sinn réalisa qu'il n'avait pas vu Charlotte depuis un moment. Il se dirigea vers la tente des blessés pensant qu'elle devait aider Erakris, mais l'Alchimiste était seul.
— Où est l'étrangère ? demanda Sinn à Erakris.
— Elle est partie avec Orkan pour faire la distribution des repas aux hommes qui veillent sur la plaine, répondit l'Alchimiste.
— Et tu l'as laissée quitter le camp ! s'étonna Riyès.
— Ils vont faire l'aller-retour, objecta Erakris. Tout ira bien pour elle, arrêtez de vous inquiéter.
— Je ne m'inquiète pas ! répliqua Sinn le ton dur et l'air renfrogné.
— Si tu le dis, répondit Erakris. Mais tu vas quand même aller inspecter la ligne de front, j'imagine.
— Quel seigneur de guerre je serais, si je ne vérifiais pas la fiabilité de notre ligne de défense ! martela Sinn.
Riyès et Erakris échangèrent un regard amusé, mais s'abstinrent de tout commentaire.
Erakris appela son frère qui avait tourné les talons :
— Si tu la croises en chemin, dis-lui que t'es content de la voir !
Bien que l'air soit toujours aussi glacial, il n'avait pas neigé depuis plus d'un mois, mais l'hiver semblait ne pas vouloir finir.
Installée à l'arrière du chariot qu'Orkan conduisait, le visage rosi par le froid, Charlotte contemplait le paysage enneigé. Tout le monde s'accordait à dire qu'il restait encore trois mois avant l'arrivée du printemps, donc ils avaient encore le temps de souffrir d'engelures et des infections de saison, pourtant elle éprouvait un étonnant sentiment de paix face à la beauté sauvage de cette contrée.
Le duo était resté trois heures dans la plaine, car Orkan qui avait insisté pour que les guerriers mangent chaud, avait ravivé deux foyers pour y suspendre et faire mijoter les marmites de ragoût.
Les gamelles vidées, les ventres remplis, les deux cuistots rentraient avec la satisfaction du devoir accompli, tout en baignant dans le silence solennel de la morte-saison.
Orkan, laissait assez de longe pour que le warex avance à son rythme, d'un pas lent et prudent car il peinait à tracter le chariot dans les traces gelées du sentier.
Le petit convoi emprunta la petite crête d'une colline jusqu'au moment où l'animal glissa et paniqua. La roue du chariot ripa dans le vide et entraîna l'attelage en le couchant sur le flanc éjectant les passagers. Ils dévalèrent la butte enneigée au son des tintements des marmites qui cognaient le sol à chaque rebond.
Charlotte fit plusieurs roulades dans la neige et arriva en bas, à plat ventre. Étourdie par ses acrobaties, elle resta allongée et porta une main à sa pommette entaillée d'où s'échappait un filet de sang. Heureusement le froid anesthésiait partiellement la douleur et freinait le saignement.
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