Chapitre 53
Un mois s'écoula sans que les Ombres ne tentent de franchir la frontière. Cette absence donnait confiance en l'issue du conflit, parce que tous savaient que les Oracles et les Alchimistes travaillaient à rétablir la santé des Yoxans. Sinn quant à lui restait méfiant, car il ne pouvait ignorer que les Oracles avaient prédit la mort de son armée.
L'aube glaciale irisait à peine l'horizon lorsque Charlotte et Sinn quittèrent la tente, ils se dirigèrent ensemble vers les cuisines pour prendre une tasse d'un breuvage noir que Charlotte commençait à apprécier, bien qu'elle soit incapable d'en définir le goût et d'en retenir le nom.
Ils marchaient en silence alors qu'une brise mordante soufflait par moments. Charlotte resserra les pans de son manteau et releva son tour de cou sur la tête pour se protéger du froid. Elle jetait quelques regards en coin à Sinn qui semblait l'ignorer.
— Crache le morceau ! ordonna-t-il.
— Hier, j'ai entendu des hommes dire que la guerre serait bientôt terminée, hésita-t-elle.
— Et alors, lança Sinn, le regard fixé droit devant.
— Alors, répéta-t-elle. Je vis au jour le jour depuis mon arrivée dans ce monde. Si je survis à tout ça, ajouta-t-elle en désignant le camp d'un geste de la main, je me demande ce que je ferai.
— Ce calme n'est qu'apparent, répliqua-t-il. Et la guerre est loin d'être terminée... je t'en ai déjà parlé, il me semble.
Charlotte étudia son profil en réfléchissant :
— À la fonte des neiges, vous entrerez sur le territoire des Ombres pour..., prononça-t-elle dans un souffle.
Sinn s'arrêta pour la dévisager :
— Pour traquer et tuer toutes les Ombres, les jeunes comme les moins jeunes, affirma-t-il.
— Des Oracles et des Alchimistes travaillent à un remède, objecta-t-elle. Ce conflit n'aura plus aucune raison d'être.
— La complexité d'une telle guérison va demander du temps et beaucoup d'échecs. D'ici à ce qu'ils puissent soigner cette contamination, certains souverains auront ourdi des plans pour tirer avantage de la situation, éluda-t-il.
— Pourquoi prendre le risque de faire massacrer tout votre peuple ? s'étonna-t-elle en voyant la perspective de la paix s'envoler.
Les lèvres de Sinn s'étirèrent en un léger sourire :
— Le campement des civils n'est qu'une infime partie de mon peuple, répondit-il. Mon royaume est largement étendu et les Kross sont nombreux, tous ceux qui me suivent aujourd'hui sont volontaires et désireux de participer à l'effort de guerre.
Sinn soupira avant de tourner le regard vers la naissance du jour :
— Cette Terre est vaste, Charlotte, reprit-il. Je pense qu'au printemps tu pourras rejoindre la maître queux et travailler avec elle, ou si le cœur t'en dit, tu pourras partir et explorer mon monde.
— Partir ! répéta-t-elle en fronçant les sourcils d'incompréhension.
Sinn opina avant de reprendre son chemin vers les cuisines, la laissant derrière lui.
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