Chapitre 49
Charlotte comprit tout de suite qu'il voulait parler de ses stigmates, alors elle se raidit en serrant les bras autour de sa taille :
— Non, couina-t-elle, honteuse.
— Tu vas devoir mettre des mots sur ta souffrance, la prévint-il. Tu l'as emprisonnée dans tes chairs... Tu n'es peut-être plus attachée à ce chevalet de torture, mais si tu veux t'en éloigner pour de bon, tu vas devoir parler de ce qu'il t'a fait.
— Parce que vous avez été séquestré et torturé vous aussi ! s'agaça-t-elle, se sentant agressée par ses propos.
— Bien sûr que non, répondit Sinn. Mais j'en connais un rayon sur la torture, soupira-t-il. Carron, mon père, était un maître en la matière et disons qu'il m'a façonné à son image.
Il enfila son lourd manteau et délia les liens des rabats, avant de sortir il se tourna vers elle :
— Erakris viendra te chercher... en attendant, réfléchis à ce que je t'ai dit.
Dehors, il faisait encore nuit, mais il ne neigeait plus. Le seigneur des Kross se dirigea vers la tente de son frère, en chemin il répondit aux salutations des guerriers qui veillaient à la sécurité du camp, tandis que d'autres se réchauffaient autour de petits feux.
Les rabats étant mal noués, il entra sans s'annoncer et trouva Erakris endormit dans son lit. Sinn flanqua un coup de pied dans son matelas.
Erakris grogna de mécontentement, mais il s'assit et se passa les mains sur le visage pour se réveiller.
— Un problème avec Charlotte ? demanda Erakris la voix éraillée par le sommeil.
— Non, répondit Sinn. L'étrangère a paniqué cette nuit, mais j'ai pu la calmer...
— L'assommer, ça n'compte pas comme de l'aide, se moqua Erakris, en se levant.
— Merci pour l'idée, la prochaine fois c'est ce que je ferai, s'amusa Sinn, un sourire en coin.
— Tu veux quoi à part me priver de quelques heures de sommeil ? demanda l'Alchimiste.
— Il faudrait que tu lui trouves une occupation, répliqua Sinn. Le fait qu'elle soit enfermée toute la journée pourrait la rendre folle à lier.
— Très bien, accepta Erakris. Orkan aura une assistante pour distribuer les galepains (galette entre pain et brioche).
Sinn approuva du chef, puis il tourna les talons pour quitter la tente :
— Et après ? demanda l'Alchimiste. Après tout ça, qu'est-ce que tu feras d'elle ? insista-t-il.
Sinn dévisagea son frère :
— Franchement, je n'en ai aucune idée !
Riyès et les civils arrivèrent vers midi. Les favorites furent contentes de revoir Sinn, mais elles déchantèrent en comprenant que leur confort allait être minimaliste.
Leur seigneur ne les avait pas fait venir pour satisfaire son appétit sexuel, mais pour les mettre au travail dans le campement.
Sinn les confia à Erakris qui avait besoin d'aide pour soigner les blessés, car l'Alchimiste avait envoyé Nane'té dans le campement des civils parce qu'une épidémie de grippe sévissait et parce que la jeune femme semblait trop souvent distraite pour rester si proche des combats.
Les autres civils allaient participer à l'approvisionnement en bois et à l'intendance générale du campement.
Charlotte portait un gros panier en osier et cherchait à distribuer les galepains. Elle faisait le tour des guerriers qui se regroupaient autour des petits foyers pour se réchauffer. Elle avait beau expliqué qu'elle se contentait de distribuer les galettes, qu'elle ne les avait pas préparées, mais tous refusaient ce qu'elle leur tendait.
En fin d'après-midi, Sinn, Riyès et quelques guerriers revinrent de la frontière, après avoir étudié les lieux, où ils n'avaient trouvé aucune trace des Ombres.
Malgré les refus et les regards haineux, l'étrangère continuait sa tentative de distribution.
Sinn mit pied à terre et se dirigea vers elle. Ils se regardèrent un bref instant, puis Charlotte comprit qu'il attendait qu'elle lui tende un galepain, ce qu'elle fit. Sinn le rompit et en donna la moitié à Riyès. Cet acte fut perçu par ses guerriers comme un ordre silencieux.
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