Chapitre 48

De gros flocons tombaient en tourbillonnant. Le crépuscule avait fait place à la nuit et le calme quasi permanent du campement, appelait au sommeil.

Les Ombres n'avaient plus tenté de franchir la frontière, depuis au moins cinq jours et six nuits, mais les Kross restaient vigilants, parce qu'une attaque pouvait se produire à tout moment.

Sinn, qui tenait un petit sac de pierres chaudes, entra sous sa tente, puis il ferma les rabats pour empêcher le vent d'entrer.

Quelques heures plus tôt, Riyès et Erakris avaient conduit l'étrangère sous sa tente, en lui expliquant que c'était pour sa sécurité.

La lampe à huile brûlait en mode veilleuse, posée entre les deux lits de camp.

Charlotte était déjà couchée et endormie sous une pile de couvertures, son manteau couvrant le tout.

Planté au bout du lit, Sinn soupira de dépit en la regardant dormir, parce que sa présence l'ennuyait. Il avait réussi à tirer un trait sur l'attirance malsaine qu'il avait cultivée pour elle et voilà qu'elle réapparaissait.

« Par les Onis, pourvu qu'elle ne me renvoie pas dans mes mauvais travers. » Implora-t-il intérieurement.

Résolu à tenir bon, il souleva les couvertures et déposa le sac de pierres chaudes au bout de ses pieds nus, puis il remit les couvertures en place.

Il retira son manteau et s'allongea sur son lit de camp, avec l'intuition qu'un monstre restait tapi dans l'obscurité, prêt à réduire son monde en cendres. Malgré l'inquiétude et le flot de ses pensées, Sinn ferma les yeux et s'endormit vite.

Un son qui ne lui était pas familier le tira d'un profond sommeil. Sinn émergea vite, inquiété par ce bruit. Il se redressa pour trouver l'étrangère, au sol, en train de ramper vers la sortie, elle semblait suffoquer.

Sinn se leva sans savoir comment aider cette folle à l'agonie.

Le seigneur des Kross s'accroupit pour la mettre sur le dos, son visage était rouge... Sinn eut l'idée de la faire sortir, mais les rabats fermaient la tente, alors il s'installa au sol pour la prendre dans ses bras, et lui murmura doucement :

— Tout va bien. Respire. Respire... Allez Charlotte, respire !

Sinn la garda contre lui, l'encourageant doucement à reprendre son souffle. Quand il sentit son corps se détendre, il réalisa qu'il était en train de la bercer tendrement.

Sinn posa sa joue contre son front, tout en continuant de lui murmurer des encouragements pour la rassurer, au lieu de quoi, Charlotte se mit à pleurer sans pouvoir s'arrêter.

Le récit de Riyès avait été bref sur les sévices qu'elle avait reçus, mais de toute évidence ça l'avait marquée dans ses chairs et dans son âme.

La détresse figeant le temps, Charlotte finit par se calmer, mais elle ne savait pas s'il lui avait fallu vingt minutes ou un siècle pour tarir ses sanglots. Elle resta blottie contre ce torse chaud et puissant, calant sa respiration sur la celle de Sinn : lente et profonde. Contre toute attente, il l'avait rassurée et lui avait communiqué un peu de son apparente sérénité.

« Merci » souffla-t-elle gênée en s'écartant tout en essuyant son visage. Elle se releva sans un mot pour aller se coucher.

Sinn se leva et quand elle s'allongea en se glissant sous ses couvertures, il se planta près du lit :

— Ça ira ? lui demanda-t-il, d'une voix qu'il espérait aimable.

— Je crois, marmonna-t-elle.

Sinn acquiesça et alla s'allonger en soupirant de lassitude.

— Encore merci pour votre aide, ajouta-t-elle.

Sinn lui répondit d'un simple grognement.

Orkan vint tambouriner contre le rabat « Seigneur, vous aviez demandé à être réveillé une heure avant l'aube ! » clama-t-il pour obéir aux ordres.

« C'est bon » grogna Sinn, tiré de son sommeil qu'il aura souhaité plus profond.

Il se leva et s'étira, ignorant l'étrangère qui s'était assise sur son lit pour enfiler ses bottes, alors qu'il s'aspergeait le visage d'eau glacée.

— Montre-moi ! déclara-t-il en s'essuyant alors qu'elle se levait pour passer son manteau.

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