Sinn se leva d'un bond, tout comme ses guerriers enivrés mais prêts à en découdre.

Des Arouks revanchards avaient pisté les Kross et avaient patienté, attendant qu'ils soient ivres et somnolents pour attaquer. L'obscurité les avait aidés à se faufiler dans le campement, se dispersant pour être efficaces et faire un maximum de dégâts en peu de temps.

Lorsque Sinn et ses hommes sortirent de la grande tente, la majeure partie des assaillants Arouks avaient déjà quitté les lieux. Ceux qui étaient encore là, se savaient condamnés mais pour gagner l'immortalité dans la mort, ils devaient laver l'honneur de leur clan en massacrant de redoutables ennemis.

Charlotte tomba nez à nez avec un grand gaillard couvert de sang. Malgré l'obscurité et la pluie diluvienne, son allure animale ne lui laissa aucune illusion sur ce qui allait lui arriver... elle était sa proie. Ce sauvage fendit sa lame et percuta violemment son collier en acier, et le choc l'envoya à terre.

Le guerrier qui ne voulait pas perdre trop de temps avec cette proie facile, flanqua un coup de pied magistral dans la tête qu'il n'avait pas pu décoller des épaules, puis il s'enfonça encore dans le campement, cherchant à tuer du plus gros gibier.

Étourdie, Charlotte roula sur le ventre et comprit que le coup d'épée avait fait sauter l'un des maillons de sa lourde chaîne. Délivrée de son fardeau, la gothique se rampa sous l'un des gros chariots, car le combat n'était pas fini et des gens totalement fous accouraient pour prendre part aux affrontements.

Sonnée, affolée et perdue, Charlotte hésitait à sortir de sa cachette, mais elle ne pouvait pas rester là et attendre que quelqu'un la découvre, car sa planque n'était pas très sûre. La gothique sentait son cœur cogner très fort et ses tempes douloureuses pulsaient ce rythme infernal. Elle regarda partout pour s'assurer que la voie était libre, puis elle sortit de son abri pour courir et se dissimuler successivement derrière des tentes et des chariots.

La taille du camp semblait immense, et s'y diriger en pleine nuit était très compliqué au point qu'elle craignait de tourner en rond. Charlotte qui se tenait accroupie derrière l'enclos d'animaux étranges, un mélange entre cheval et lézard bleu gris très poilu, entendit des gémissements.

La jeune femme chercha à voir entre les planches et repéra une jeune fille ensanglantée. L'enfant tendit la main dans sa direction, implorant de l'aide, l'autre était portée à sa gorge. Charlotte hésita se demandant ce qu'elle pouvait faire pour la pauvre victime, mais elle choisit de rester avec elle, comprenant sans peine sa peur et sa solitude.

La gamine, âgée de dix ou douze ans, avait une large plaie au niveau du cou. Charlotte attrapa un morceau de tissu crasseux qui traînait là et le plaqua sur la blessure. La gothique qui puisait dans ses connaissances de premiers secours saisit le turban que la fillette avait dans les cheveux et s'efforça de faire un bandage compressif.

Charlotte n'avait pas la moindre idée de ce qu'elle devait faire ensuite, ni même si l'enfant allait survivre, alors elle ne pouvait rien faire d'autre que de lui tenir la main pour la réconforter. D'ailleurs des voix se rapprochaient de plus en plus et Charlotte sut qu'elle allait être découverte si elle restait là, mais ça voulait dire abandonner la petite fille à son sort, alors leurs mains jointes se serrent plus fort, s'accrochant l'une à l'autre dans un profond désespoir.

Rapidement, des femmes et des guerriers arrivèrent cherchant des blessés. Charlotte fut violemment écartée de la fillette et un coup de poing magistral l'assomma pour le compte.