Chapitre 20
Ils suivirent le chemin goudronné en observant partout, à la recherche d'animaux. D'autre visiteur et touriste se promenaient autour d'eux. Parmi eux, une fille d'environ seize ans, une glace à la vanille à la main, passa tout près de Korie. Il lui lança un regard intéressé, avisant ses longues jambes fines que des shorts très cours lui permettait de voir, mais tourna rapidement la tête alors que l'image de Valérie s'imposait. Mais Tobias avait vu. Il s'approcha de Korie, un sourire aux lèvres, et murmura à son oreille :
- Embrasse-la.
- Quoi ? s'étonna Korie.
- Confond-la avec quelqu'un d'autre.
Korie ouvrit la bouche, mais la referma aussitôt. Il venait de comprendre : les paries. Ils étaient bien ici pour ça, de toute façon. Korie souffla, puis s'exécuta. Il donna son sac à Tobias et s'avança vers la fille en question, qui lui tournait le dos. Il lui tapota doucement l'épaule du bout du doigt, et dès qu'elle se retourna, il plongea sur ses lèvres pour un chaste baiser. Il se retira une seconde après, la dévisagea, et fit de son mieux pour avoir l'air catastrophé, alors que la blonde était restée figée, les yeux écarquillés.
- Oh, merde, je t'ai pris pour quelqu'un d'autre ! s'écria Korie. Vraiment désolé !
Il s'éloigna aussitôt pour revenir vers Tobias et Levis, un sourire triomphant au visage, mais une main lourde se posa sur son épaule avant qu'il n'ai pu faire un pas.
- Je rêve ou tu viens d'embrasser ma copine ?!
Korie leva des yeux écarquillés vers le douchebag qui lui faisait face. Il avait un air menaçant de bulldog, les poings serrés et les biceps gros comme des pastèques. Korie glapit de panique et courut pour sa vie, suivie de Levis et Tobias. Ils s'engouffrèrent dans un bâtiment au mur décoré de boa et de crocodile, inscrit « Tropic Zone » au-dessus de la porte. Ils s'appuyèrent dessus pour la bloquer, et tous trois pouffèrent de rire en même temps.
- Je croyais pas que tu le ferrais vraiment ! s'esclaffa Tobias.
- Si j'avais vu le mec avant, je te jure, je l'aurais pas fait !
Korie souffla pour tenter de reprendre un rythme cardiaque un peu plus normal, observant le nouveau paysage en face de lui. Ils étaient dans la demeure des animaux tropicaux, et juste devant eux, derrière une énorme baie vitrée, des oiseaux volaient si vite qu'il arrivait à peine à les distinguer. Il lui fallut un moment pour se rendre compte qu'il s'agissait plutôt de chauvesouris. Une main à son cœur, qui battait de plus en plus lentement, il s'approcha pour les regarder. De leur côté de la fenêtre, les murs imitaient une grotte de pierre humide. Une sorte de plat était suspendu au plafond par une corde et plusieurs chauvesouris étaient agrippées dessus, mangeant ce qui semblait être des morceaux de mangues.
- Génial, fit Levis. J'adore les chauvesouris.
- Beurk, répondit aussitôt Tobias en secouant la tête. Je déteste.
- Non, mais tu dois avouer que ce devrait être super cool de voler hyper vite comme une chauvesouris !
- Nah. À choisir, je préfère les hiboux. Ils sont plus classes.
Levis et Tobias semblèrent sur le point de démarrer un débat, mais Korie s'interposa à temps. Il les entraina un peu plus loin, où une autre vitre montrait des perroquets sur fond de forêt tropicale.
- Allez, Tobias. T'as déjà épuisé toutes tes idées ?
- Ouais. Défais tes lacets.
- Euh... tes idées sont bizarres.
- C'est juste une excuse pour que tu tombes devant tout le monde.
Korie secoua la tête, songeant que la soirée allait être longue, puis se pencha pour tirer sur les lacets de son pied droit. Il se remit debout et s'avança pour continuer la visite, s'approchant d'une vitrine montrant un énorme python. Il passa près une vieille dame, qui essayait tant bien que mal de calmer un gamin surexcité, et s'affala de tout son long devant eux. Il atterrit à quatre pattes, épargnant son appareil photo qui était toujours pendu à son cou, mais il s'était sévèrement cogné les genoux. Il grogna de douleur, mais se redressa rapidement. La femme le dévisageait, les yeux écarquillés.
- Tu vas bien ? demanda-t-elle d'une voix aigüe.
- Ouep. Plus de peur que de mal !
Il grimaça en se frottant les genoux, puis tourna les talons pour revenir près de Tobias et Levis. Mais il tomba à nouveau, s'accrochant dans ses lacets, cette fois par pur accident. Levis éclata de rire, comme si voir Korie souffrir était le truc le plus drôle qu'il avait jamais vu de sa vie.
- Ça fait mal ! gronda Korie.
Il refit son lacet, trouvant qu'il s'était assez cogné les genoux pour aujourd'hui.
- Bon, laisse-moi une pause... Et on sort d'ici, il fait trop chaud !
Levis et Tobias le suivirent sans insister vers la porte du « Tropic Zone », non sans s'arrêter une seconde devant les lémurs et plusieurs espèces de serpents tous plus énormes les uns que les autres. Enfin de retour à l'air frais, Korie observa nerveusement de gauche à droite, vérifiant qu'aucun douchebag n'était dans les alentour, puis s'avança tout droit vers le grand bassin au centre de la place. Il s'appuya contre la clôture et regarda en contrebas et otaries — ou les phoques, il n'arrivait jamais à faire la différence — qui nageaient gaiment entre les ilots de rochers. Avant que Levis et Tobias ne puissent le lui reprocher, il agrippa son appareil et fit plusieurs photos tout en tournant autour du bassin, cherchant le meilleur angle et essayant différents zooms.
- Oh non, il recommence, soupira Tobias d'un air dramatique. Allez, Korie, je veux aller voir les pandas roux !
- Les pandas sont tout au fond et on a pas choisi le bon moment pour visiter le zoo. Ça ferme dans une demi-heure.
- Et t'aurais préféré quoi, qu'on sèche les cours pour venir plus tôt ? C'est pas ma faute si les heures d'ouverture sont aussi bizarres !
Korie soupira, prit encore une photo et laissa retomber l'appareil contre son ventre.
- J'ai une idée pour satisfaire tout le monde, dit Levis. Enfin, tout le monde sauf Korie, mais lui il compte pas.
- D'où je compte pas ? s'offusqua Korie.
- Un dernier pari. Si tu le fais, on te tannera plus et t'auras gagné mon respect à tout jamais.
Korie se mordit la lèvre. Il ne demandait que ça, que Levis arrête de lui manquer de respect, mais il avait peur de la suite. Au sourire pervers de Levis, ça ne pouvait être que quelque chose de particulièrement insultant.
Korie prit une grande inspiration, puis marmonna un « dis ? » contrit. Le sourire de Levis s'étira encore un peu plus, et il lâcha enfin :
- Saute dans le bassin avec les otaries.
Un silence stupéfait flotta dans l'air entre Korie et Tobias, qui dévisageait son ami avec de gros yeux.
- Tu veux qu'il aille là-dedans ? Ce sont quand même des animaux sauvages !
- Ils sont pas si sauvages que ça, ils ont l'habitude que des humains leur apportent à manger. Les gardiens n'ont pas peur d'eux, alors les otaries ne le prendront pas pour une menace.
- Mais... t'as vu leurs dents ?
- OK, je le fais.
Tobias se retourna vivement vers Korie. Il voulut répliquer que c'était une mauvaise idée, mais il était si stupéfait qu'il n'arriva qu'à marmonner un « eeh... ? » Korie retira son appareil de son cou et le tendit à Levis, qui le prit par la corde.
- Si je vois une seule égratignure dessus, je te tue, dit Korie avec un doigt menaçant sur sa poitrine.
Levis voulut ajouter son commentaire, mais, tout comme Tobias, il était trop étonné que Korie accepte pour dire quelque chose de drôle.
Korie sortit ensuite son téléphone et son portefeuille de ses poches, pui enleva cette fois son blouson : il ne restait sur lui que ses vêtements et ses souliers. Il était prêt à plonger. Il hocha la tête pour lui-même, comme pour se convaincre qu'il ne risquait pas de se faire bouffer par les otaries, puis s'appuya à nouveau sur la rambarde, regardant en bas. Un espace d'environ un mètre séparait la clôture du bassin, et elle devait faire près de deux mètres de haut. Rien de bien méchant. Korie sauta, fit basculer ses jambes de l'autre côté et se suspendit de ses mains dans le vide. Il ne restait que quelques dizaines de centimètres pour que ses pieds touche le fond et il se laissa tomber sans douleur. Il leva la tête pour croiser le regard stupéfait de Tobias et Levis, haussa le pouce et fit un grand sourire pour leur assurer que tout allait bien.
- Il est fou, souffla Levis, trop bas pour être entendu de Korie.
- Parait-il qu'il y ait deux genres de riche, fit Tobias d'un air philosophe. Ceux qui font tout faire par leur subalterne, et ceux, comme Korie, qui font n'importe quoi parce qu'ils se croient tout permis.
- Ça résume assez bien les faits...
Korie, sans attendre une seconde de plus, courut vers l'escalier qui menait au bassin. Il savait sur lui les regards stupéfaits des touristes, appuyés à la clôture de verre, et il savait qu'il n'avait pas beaucoup de temps avant d'attirer l'attention d'un gardien. Sans réfléchir à ce qu'il faisait, il grimpa l'escalier quatre à quatre — qui de toute façon ne contenait que quatre marches, justement —, se pinça le nez et sauta à l'eau.
En coulant dans le fond du bassin, il ouvrit les yeux. Les otaries nageaient vers lui d'un air intrigué, leurs corps bruns et lisses endurant comme des sirènes dodues. Korie pouffa de rire à la comparaison, s'étouffa avec l'eau qui lui entra dans la gorge et remonta à la surface. Un peu moins d'une dizaine d'otaries lui tournaient autour, et il tendit la main pour en flatter un. La sensation fut similaire à de l'algue et il grimaça en l'éloignant ; l'otarie plongea sur lui pour le mordre. Korie écarquilla les yeux et se retira vivement.
- Korie ! Sors de là !
Korie leva la tête vers Levis et Tobias. Ils pointaient du doigt leurs droites et Korie regarda dans cette direction : des gardiens. Trois hommes en habit de policier courraient vers lui. Korie jura entre ses dents.
- Bye, les otaries ! À la prochaine !
Une otarie tenta de le mordre au bras et Korie comprit qu'il n'était pas le bienvenu ici. Il se retourna pour nager vers l'escalier et l'un d'entre eux réussit à le mordre au mollet. Il grogna de douleur, but la tasse, s'étouffa, et agrippa enfin l'escalier pour sauter de l'autre côté. Il grimaça en sentant la peau et son muscle le bruler, mais l'instinct de survie avait pris le dessus. Korie regarda de gauche à droite : les gardiens l'encerclaient, ils seraient sur lui d'une seconde à l'autre.
Hors de question que mon père apprend ça !
- Korie, viens là !
Sans réfléchir, Korie se précipita vers la voix de Tobias. Ils étaient juste devant lui, deux mètres plus haut, appuyés contre la clôture. Tobias et Levis tendaient chacun une main vers lui et Korie sauta pour les attraper. Ils le hissèrent à la force de leurs bras jusqu'au-dessus de la rambarde, et tous trois coururent pour leur vie. Et malgré la douleur à son mollet qui se faisait de plus en plus aigüe, Korie riaient comme un fou, les larmes aux yeux, le corps alourdit pas ses vêtements mouillés.
- Ah, c'était génial ! hurla Korie.
- T'es complètement cinglé ! renchérit Levis.
- Je sais !
Les trois gardiens courraient encore vers eux, mais les ados atteignirent l'entrée du zoo à une vitesse qu'aucun d'eux n'avaient jamais franchi. Ils déboulèrent dans le sentier de Central Park, continuèrent tout droit jusqu'au trottoir longeant la cinquième avenue et prirent une direction au hasard. Les piétons les regardaient de travers, mais tous riaient à en avoir les larmes aux yeux, sans prêter la moindre attention à l'image qu'ils renvoyaient.
- C'est bon, ils nous suivent plus, dit Tobias. Bon sang... Korie, t'es mon idole.
- Merci, répondit Korie avec un grand sourire.
Ils s'arrêtèrent enfin de courir, à bout de souffle. Korie tourna la jambe pour voir le derrière de son mollet gauche, où une trace de morsure bien nette y figurait. Seul un mince filet de sang dégoulinait jusqu'à sa chaussette, mais il ne le sentait presque pas. C'était superficiel.
- Il faut soigner ça avant que ça s'infecte, dit Tobias. Viens chez moi, c'est tout près. Heu... non, non, allons à l'hôpital, c'est plus sûr.
- Je vais pas aller à l'hosto pour si peu, dit Korie dans une grimace. Chez toi, c'est parfait !
- Heu... c'est que...
Korie se douta de ce qu'il allait dire une seconde avant qu'il ne le fasse. Il leva une main pour le faire taire, préférant ne rien entendre de ses arguments du genre « ton appart est plus beau que le mien ».
- Je m'en fiche, de quoi ça à l'air, chez toi. Allons-y.
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Hehe... Miö et Télio qui s'incrustent. C'était plus fort que moi 😅
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