Chapitre 18

Emma était partagée entre deux impressions. La première, comme si elle rencontrait une célébrité, Barack Obama marchant tranquillement vers elle. La seconde, eh bien, c'était Barack Obama, de l'époque qu'il était encore président ; un seul faux pas et elle serait foutu en prison.

D'un côté, la joie, qui lui parcourait le corps comme un courant électrique et faisait battre son cœur à toute vitesse. De l'autre, la peur, qui lui comprimait la gorge et lui donnait envie de pleurer.

- Eh, ça va, souffla Levis à son oreille. Ce n'est pas vraiment lui. Dis-toi que c'est un peu comme une photo qui parle et qui bouge.

Emma dut se faire violence pour s'empêcher de lui balancer une claque. Elle ne savait même pas ce qu'il y avait d'offensant dans sa remarque, mais c'était plus fort qu'elle, elle avait tout le temps le besoin de le gifler.

Devant elle, Korie et Tobias étaient enfin arrivés. Tobias, les mains dans les poches et la tête basse, regardait successivement Emma et Korie, l'air de se demander lequel allait se péter un câble le premier, littéralement ou métaphoriquement. Korie, lui, avait les yeux fixés dans ceux d'Emma, figés comme une statue de métal rouillé. Emma ne bougeait pas moins, le cerveau ravagé par toutes sortes de pensées confuses et sans aucune logique.

- Bon, allez ! s'écria Levis en tapant dans ses mains, les faisant tous sursauter. Faudrait se bouger un peu, non ? Allez, tout le monde après moi !

Levis tourna les talons et s'engagea vers la sortie du parc, qui menait directement sur les rues achalandées de Manhattan. Les trois autres, après une seconde d'hésitation, le suivirent. À chacun de ses pas sur le trottoir, Korie produisait un couic couic de plus en plus agaçant, qui réussit presque à remettre les pensées d'Emma en ordre. Au bout d'une minute, elle perdit enfin patience. Elle se retourna vers Korie, mais pencha la tête pour fixer ses pieds nue, incapable de le regarder.

- Qu'est-ce qui fait ce bruit ? C'est énervant !

- Je rouille, dit Korie sur un ton d'excuse. C'est parce que j'ai sauté dans la baie d'Hudson.

Emma écarquilla les yeux avant de les relever vers le robot.

- Tu es tout aussi con que le premier.

Korie demeura stoïque, sans savoir s'il devait le prendre pour un compliment ou une insulte. Levis souffla d'impatience en tapant du pied.

- Plus longtemps on restera là, plus on a de chance de se faire repérer par la police.

- C'est vrai, intervint Tobias, qui commençait à stresser autant que son ami. Faut se trouver une planque. Une ruelle, n'importe quoi...

- Une ruelle ? s'écria Emma. Là où se cachent les tueurs et les violeurs ?!

- Hé, on a un robot avec nous ! Ce sont les méchants qui auront peur de nous.

- Ouais, mais il est en train de rouiller, dit Emma en croisant les bras sur sa poitrine.

- Je suis performant à quatre-vingt-seize pour cent de ma capacité, intervint Korie. Cependant, la journée a été éprouvante au niveau de ma batterie.

Levis haussa les épaules, pas vraiment intéressé par son discours, et se remit à marcher sur le trottoir, entrainant les autres à sa suite.

- Elle a quoi, ta batterie ? demanda Tobias. Me dis pas qu'elle rouille, elle aussi !

- Elle est parfaitement protégée contre l'eau. Cependant, avec tous mes efforts déployés au cours de la journée, j'ai dépensé neuf pour cent de sa capacité, alors qu'habituellement, j'utilise deux ou trois pour cent en vingt-quatre heures. J'ai maintenant un total de quatre-vingt-dix pour cent. À ce rythme, j'aurais besoin d'une recharge dans neuf jours.

- Et elle dure combien de temps, normalement, ta batterie ?

- Quarante jours, en moyenne.

- Ouah... C'est éprouvant de fuir la police ! pouffa Tobias.

Un peu devant eux, Levis et Emma s'arrêtèrent de marcher. Levis se retourna pour leur faire face, mais Emme resta obstinément de dos.

- Ici, ce serait bien ? demanda Levis en pointant une ruelle.

Tobias suivit des yeux le doigt de Levis, pour ensuite remarquer la ruelle en question, qui était à deux mètres d'eux devant eux. C'était tout juste un chemin entre deux immeubles de béton et de brique, tout juste assez large pour des bennes à ordure et autre sac vidange qui en débordait et une grille pour en barrer l'accès. Des cordes à linge pendaient au-dessus de leur tête et, tout au fond, pour une raison inconnue, deux chaises longues. Tobias haussa les épaules, convaincu.

- Pourquoi pas. C'est mieux que rien.

Il s'engagea dans l'allée, puis ils s'arrêtèrent derrière une poubelle, à peine cachée de la vue des piétons. Encore heureux que ce soit New York, pensa Tobias en grimaçant alors qu'il s'appuyait contre le mur. On pourrait se faire un gang bang que les passants n'en auraient rien à foutre.

Devant lui, Levis fouilla dans le sac en plastique qu'il se trimbalait depuis déjà un moment. Il en sortit une bouteille au liquide jaunâtre et la tendit à Korie. Alors qu'il continuait à chercher dans le sac, Korie essayait d'ouvrir la bouteille, mais il avait les doigts si raides qu'il n'arrivait à rien. Emma l'observa avec une pointe de pitié, dansant d'un pied sur l'autre en se demandant ce qu'elle devait faire.

Résignée, elle arracha la bouteille des mains du robot et retira le bouchon. En lisant « antirouille » sur l'étiquette, elle pouffa de rire en même temps de la rendre à Korie.

- OK, c'est pas des blagues, tu rouilles vraiment !

- Pourquoi aurais-je menti ? demanda Korie en inclinant la tête.

Emma ouvrit la bouche pour répondre, mais les mots moururent dans sa gorge. Encore une fois, les émotions reprenaient le dessus. Elle avait beau se répéter en boucle « ce n'est qu'un robot ! », elle était incapable de ne pas voir le vrai Korie qui se cachait sous ses traits. Même ce petit sourire gentil qui lui envoyait... bon sang. Il lui ressemble tellement.

Voyant qu'il n'obtiendrait pas de réponse, Korie laissa tomber le sujet et prit plusieurs grandes gorgées d'antirouille. Cela eut le mérite de ramener Emma au moment présent, qui grimaça de dégout en détournant le regard.

- Tu vas faire comment pour évacuer le liquide, après ? demanda-t-elle, autant par curiosité que pour se forcer à penser à autre chose. Est-ce que t'as vraiment tout l'arsenal dans le pantalon, aussi ?

Heureusement pour tout le monde, Korie était trop occupé à boire son jus pour répondre. Quand il eut vidé la bouteille, il la rendit à Emma, toujours planté en face de lui, puis se tourna vers l'une des poubelles qui les encerclait et pencha la tête vers les déchets. Il se mit ensuite à recracher tout le contenu de la bouteille, qui avait maintenant une étrange teinte orange.

- Mon Dieu, c'est dégueu ! s'écria Emma en se couvrant les yeux et grimaçant.

Levis éclata de rire alors qu'il sortait un drôle de petit tournevis de son sac, qu'il pointa sur Korie comme s'il s'agissait d'un pistolet.

- Eh ouais, Emma. Korie est une cause perdue, qui n'a plus rien dans le pantalon. Si tu y tiens vraiment, il va te falloir un dil...

Levis n'eut pas le temps de finir sa phrase que la gifle fusait déjà. Tobias pouffa, sans en faire plus de cas ; il avait vu cette scène des milliers de fois.

- Arg ! s'énerva Levis. Purée ! Arrête !

- Il est normal qu'une femme soit violente envers les hommes ? demanda Korie, qui avait enfin terminé de vomir sa rouille dans la poubelle.

- Cette une bonne question, que tu me poses là ! dit Levis en se frottant la joue. Tu vois, il fut un temps où il était connu qu'un homme pouvait être violent envers les femmes. Ensuite fut un autre temps où les femmes lancèrent leur révolution pour l'égalité des sexes. Et enfin, fut notre époque actuelle où « égalité » veut dire en réalité « soumission des hommes ». Et les femmes se vengent en giflant tous les hommes à portée de claque.

- Je ne comprends pas, dit Korie en plissant les yeux.

- Fais pas attention, intervint Tobias. Levis raconte n'importe quoi pour s'empêcher d'insulter Emma. Tu vois, c'est un peu comme quand il dit tout le temps « purée ».

- Ah, t'aurais des insultes à me faire ?! s'écria Emma en se tournant vers Levis, les poings sur les hanches.

- Non ! s'énerva Levis. J'ai rien à dire du tout ! J'ai juste une chose à faire... c'est de te démonter ! dit-il en pointant à nouveau son tournevis sur Korie. La puce, comme tu disais dans le message à Tobias, tu veux vraiment la retirer ? Si oui, je suis ton homme !

- Tu veux... quoi ? bredouilla Emma en perdant ses airs de meurtrières.

- Je retire ta puce, ou c'est nous qui nous retirons, dit Levis, ignorant la question d'Emma. Avec ce truc dans le crâne, la police peut se ramener n'importe quand. On n'est déjà chanceux d'avoir survécu à la journée.

Tous gardèrent le silence pour réfléchir, même Korie qui, avec un ordinateur à la place du cerveau savant faire des calculs à haute vitesse, préféra prendre son temps. D'un côté, oui, il n'irait pas loin avec cette puce. Elle était peut-être court-circuitée par l'eau, mais avec son antirouille qui lui avait fait un beau lavement en profondeur, elle pourrait revenir à la vie n'importe quand. D'un autre côté, pouvait-il vraiment faire confiance à Levis ? Il lui suffisait de couper le mauvais câble pour le mettre hors service et d'ensuite appeler la police pour qu'ils viennent le chercher.

- T'as raison, dit Tobias. Ça s'est joué à un cheveu que la police débarque dans mon appart, tout à l'heure. J'ai pas envie que ça se répète.

Levis hocha la tête pour ajouter de la gravité à ce qu'avait presque vécu Tobias.

- D'accord, dit Korie, résigné. Mais je veux que ce soit Tobias qui le fasse.

- Oh, non ! pouffa Tobias en levant les mains devant lui, comme pour se protéger. Je suis nul, en informatique.

Korie se tourna vers Emma dans l'espoir de la proposer elle, mais elle secoua énergiquement la tête en fixant son regard sur ses souliers.

- Ouais, tu m'aimes pas, mais y'as que moi qui ai une chance de réussir, dit Levis dans un haussement d'épaules et un petit sourire en coin. Tout ce que je connais de la robotique, c'est la première version de toi-même qui me l'a apprise ! (Levis garda le silence pendant une seconde, songeur, avant de relever les yeux vers Korie.) Ça me fait penser que ça t'irait bien comme nom, Korie version 2.0.

- C'est écrit que je suis une version 1.2, sur mon tatouage, dit Korie, sans comprendre.

- Oh, laisse tomber... tu veux que je retire la puce, oui ou non ?

Korie hocha la tête, résignée. Il tourna le dos à Levis puis s'agenouilla, la tête baissée et le regard rivé sur ses mains. Par sa seule volonté, son crâne s'ouvrit comme un coffre à gant poilu, permettant à Levis de voir tous les câbles savamment emmêlés que constituait son cerveau de robots. Levis eut un moment d'hésitation, étonné par la complexité de ce qu'il avait sous les yeux. Il fit sauter nerveusement son drôle d'instrument entre ses mains, qui ressemblait autant à un petit tournevis qu'à un ciseau.

- Tobi, éclaire-moi. Et Korie, vas falloir m'expliquer ce que je cherche. Purée, je me sens comme un neurochirurgien à la recherche d'une tumeur.

- La puce fait deux centimètres sur trois centimètres et fait cinq millimètres d'épaisseur, de couleur grise.

- Tout est gris, là-dedans, dit Tobias en approchant son téléphone en mode lampe-torche.

- Bah, ouais... c'est de la matière grise.

Levis se fendit d'un grand sourire, fier de son jeu de mots. Tobias haussa un sourcil, sans rien ajouter, alors qu'Emma levait les yeux au ciel en pestant contre l'espèce masculine.

- Bon, OK... je me lance, dit Levis.

- Fais attention, souffla Emma.

Levis eut un rictus alors qu'il se penchait au-dessus des câbles, qu'il repoussait doucement du bout de son tournevis à la recherche de la puce.

- Ne me dis pas que tu t'inquiètes pour lui.

- Ce n'est pas la peine de s'inquiéter, dit Korie, les yeux rivés devant lui d'un air absent. Je suis incapable de ressentir la douleur de la même manière que v...

Korie s'interrompit, parcouru d'une décharge électrique désagréable. Levis s'éloigna aussitôt de son cerveau, nerveux.

- J'ai touché un truc que j'aurais pas dû ?

- C'était... douloureux.

- Désolé.

- Je t'avais dit de faire attention, dit Emma en lui donnant une claque sur l'épaule.

- Mais je fais de mon mieux ! Je suis pas un Buchanan, moi ! Tu veux essayer, peut-être ? dit-il en lui tendant le tournevis.

Emma grimaça en reculant d'un pas. Levis lui envoya un petit sourire triomphant, avant de revenir à ses câbles. Il fronça les sourcils, puis leva les yeux vers Tobias, l'air de se demander s'il était le seul à avoir remarqué ce qu'il voyait.

- Y'a quelque chose qui clignote, là-dedans. C'est normal ?

Korie, proche de l'état de veille à somnoler le regard dans le vide, se redressa soudainement, la peur au ventre.

- Dépêche-toi à retirer la puce ! Elle se réactive.

- OK, OK !

Levis se pencha à nouveau vers le cerveau robotique de Korie et, sans ménagement, repoussa les câbles avec ses doigts. Korie ferma les yeux, attendant patiemment que ce moment se termine. Pour une machine, il avait quand même un peu de fierté, assez pour ne pas vouloir montrer que ce que lui faisait Levis lui faisait mal, ou plus précisément lui envoyait des chocs dans chaque recoin de son corps de métal.

- Ah ! Je l'ai trouvé ! s'écria Levis.

- Elle est reliée à mon IA par un câble. Coupe-le.

- Dac.

Levis approcha son tournevis de la puce alors que Tobias tenait son téléphone au-dessus de son épaule pour l'éclairer. Ils remarquèrent en même temps que l'IA ressemblait étrangement au mélange d'un cœur avec ses artères et d'une grenade dégoupillée.

Emma, de son côté, regardait la scène en se rongeant nerveusement l'ongle du pouce. Elle voyait bien, à l'air concentré du robot, qu'il souffrait en silence. Elle avait vu la même expression sur le vrai Korie quand il s'était cogné l'orteil contre un meuble et qu'il était trop fier pour laisser tomber une larme de douleur. Le souvenir lui arracha un petit sourire, avant qu'elle ne décidât enfin de bouger et sortir de l'ombre. Emma s'approcha du robot pour s'agenouiller devant lui, se mettant à sa hauteur. Korie leva lentement les yeux vers elle, la tête toujours penchée par en avant pour faciliter la tâche à Levis.

Emma hésita longtemps. Trente centimètres séparaient son visage de celui de Korie, de l'autre Korie. Pendant un instant, elle en oublia presque que ce n'était pas lui.

- Pourquoi as-tu fait tout ce chemin, juste pour me voir ? demanda-t-elle enfin.

Korie fronça les sourcils, étonné de la question. Tobias et Levis lui avaient dit, un peu plus tôt dans la journée, que ce ne serait pas aujourd'hui qu'il aura sa conversation avec Emma. Qu'il fallait lui laisser du temps pour digérer sa présence. Mais si elle posait la question, c'était bien qu'elle voulait la réponse. Donc, quoi répondre ? La vérité, qu'il soupçonnait particulièrement égoïste, ou la couvrir d'un léger mensonge malgré son programme qui se rebellait toujours contre cette pratique ?

Il jugea préférable de choisir quelque chose entre les deux.

- J'ai vu ta photo dans ma chambre. J'avais envie de te rencontrer.

- Et... c'est tout ? Tu voulais rencontrer tous les gens sur les photos de Korie ? Ça te prendrait une éternité, et puisque tu n'as plus que dix jours d'autonomie de batterie, je crois bien que c'est impossible.

Levis, étonné d'entendre Emma utiliser appeler celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, écarquilla les yeux et coupa le câble de la puce d'un même mouvement, alors qu'il hésitait depuis de nombreuses secondes. Korie tressaillit sévèrement, les faisant tous sursauter comme s'ils s'attendaient à ce que le robot explose d'une seconde à l'autre.

- Je t'ai fait mal ? demanda Levis.

- Non, dit Korie, les mâchoires contractées.

- Je dois la sortir de là ?

- Laisse, elle n'est plus bonne à rien.

Korie ne voulait pas avouer qu'il redoutait de la retirer, car il en avait marre de souffrir après les manipulations de Levis dans son système nerveux. Le robot se releva, ferma le couvercle de son crâne au-dessus de son cerveau, puis pivota pour faire face à Levis et Tobias.

- Merci pour votre aide, c'est très apprécié.

- Pas de quoi ! dit Levis avec un grand sourire. (Il baissa les yeux vers sa montre et grimaça.) Bon, moi, faut que je retourne à la maison, prouver à mes parents que je suis en vie.

- Moi aussi, vaudrait mieux que je rentre, dit Tobias.

- Pareil, dit Emma.

Korie les dévisagea tour à tour, sa bonne humeur diminuant d'un cran.

- Vous m'abandonnez ici ?

- Eh, on a des vies, tu sauras, on n'est pas que des personnages secondaires ! Y'a l'école demain matin, des devoirs que j'ai même pas encore commencés... j'ai pas que ça à faire. Mais si tu restes caché, la police te retrouvera pas, alors je vois pas en quoi c'est un problème.

Korie fronça les sourcils, pas tellement enjoué à l'idée d'être livré à lui-même. Mais que pouvait-il faire de plus ? Leur casser les jambes pour les empêcher de fuir ?

- Vous reviendrez ? demanda-t-il, une pointe de tristesse dans sa voix métallique.

Levis, Tobias et Emma échangèrent un regard nerveux entre eux. Aucun d'entre eux n'avait particulièrement envie de le revoir, mais il fallait autant penser à leur sécurité, et ce fichu androïde savait où habitait Tobias. Il pourrait toujours débouler chez lui dans une soudaine soif de sang et tuer tout le monde sur son chemin. Pourquoi pas ? Il fallait s'attendre à tout, venant d'un robot qui disjoncte.

- Ouais, bien sûr, dit Tobias en hochant la tête, sans grande conviction. Demain, après les cours, on reviendra.

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