(2) Chapitre 11
Les ténèbres ont peu à peu envahis la galerie, dessinant de grandes ombres sur le sol de pierre. Ombre, dans son grand manteau noir, semble presque se fondre dans l'obscurité. Sa peau blafarde ressort étrangement, lui donnant l'air d'un fantôme. L'air s'est refroidi, et je dois resserrer ma cape autour de mes épaules pour me tenir chaud. La douce lueur qui inondait la galerie n'est plus qu'un lointain souvenir lorsque la ténébreuse murmure, en s'adressant autant à elle même qu'à moi :
- Tu ne la sens pas, cette incroyable puissance qui se cache dans l'obscurité ? La noirceur des ténèbres possède ses secrets, elle aussi... et c'est le rôle des ténébreux de les découvrir, de les dompter, les maîtriser..."
La jeune femme semble perdue dans ses pensées, les yeux dans le vague. Ses mains s'agitent dans la nuit, faisant venir à elle les ombres. Soudain, elle se tourne vers moi, un sourire indéchiffrable sur les lèvres. Un long frisson glacé me parcourt l'échine. Ombre n'a rien de rassurante, avec sa capuche rabattue, ses mains tendues vers moi, et ses cheveux corbeau volants derrière elle. Sans même le vouloir, je recule d'un pas.
- Voyons ce dont tu es capables, souffle-t-elle en me fixant intensément.
Je sens la froideur des ombres me lécher la peau avant même de distinguer les formes terrifiantes qui s'agitent autour de moi. Je fais de nouveau un pas de recul, mais je réalise vite que je n'ai aucun moyen de fuir l'obscurité qui menace de m'engloutir. Sans laisser la peur me gagner, j'essaie d'appeler Ombre, mais mes paroles se perdent dans le silence.
- Résiste ! Empêche les ombres de t'atteindre !
La voix de ma mentor me paraît venir de très loin, comme si un mur me séparait d'elle. J'essaie néanmoins de faire le vide dans mon esprit, afin de puiser en moi la force nécessaire à la création d'un champ de force.
Un éclair d'énergie illumine soudainement la pièce, puis le bouclier de lumière se solidifie pour former une bulle protectrice autour de moi. Je distingue la jeune ténébreuse à quelques pas seulement de moi, ses yeux bleus plongés dans les miens. Ses joues sont rougies par l'effort, certainement comme les miennes.
Puis tout s'écroule.
Je sens les ombres s'introduire dans mon dôme lumineux sans rien pouvoir faire. Je ferme les yeux, me concentrant pour puiser encore plus de puissance en moi, mais je ne parviens pas à repousser les ténèbres glacés. Je sais que d'un instant à l'autre, ma bulle volera en éclat. Des larmes de détresse roule lentement sur ma peau brûlante de fièvre. Je serre les dents si fort que j'en ai mal, mais je refuse de céder. D'abandonner. Sentant que je ne peux pas résister au attaque d'Ombre, je réduit la taille de mon champ de force, qui vient se dresser bien plus proche de mon corps. Dans cet espace exiguë, je me sens bien plus vulnérable.
Une nouvelle vague d'ombre s'abat.
Mes muscles se contractent.
Mon champ de force se craquèle.
Je serre les poings.
Et tout explose.
La force de l'explosion me propulse violemment contre un mur, que je heurte de plein fouet. Le dos et la nuque endoloris, je me relève, à bout de force. Il faut quelques secondes à mes yeux pour retrouver une vision nette, que l'impacte avait brouillé. Ombre libère les ombres d'un mouvement du poignet, puis s'approche de moi. Je tente de retrouver un rythme de respiration régulier lorsqu'elle arrive devant moi, les sourcils froncés. Je lève les yeux vers elle, inquiète. J'ai été pathétique.
- Tu as un grand potentiel, Kora. Je n'ai pas besoin d'être discerner pour m'en rendre compte, me chuchote-t-elle en se penchant à mon oreille.
Je souris faiblement face à cette remarque encourageante. Je tente de la remercier, mais ma respiration sifflante m'en dissuade.
- Cela dit... Peu importe le potentiel si il n'est pas exploité. Je veux que l'on travaille comme ceci régulièrement.
Elle ne me demande pas mon avis, et au ton sec de sa voix, je vois bien qu'elle n'attend aucune réponse. J'acquiesce tout de même, par simple esprit de contradiction.
- Je te laisse regagner ta chambre, me dit la jeune femme, en me saluant de la tête. À demain.
Je la regarde disparaître dans la nuit, avant de me hâter vers l'escalier s'enfonçant au cœur des ruines. Je rejoins le couloir principal en quelques minutes, malgré la douleur et la fatigue qui alourdissent chacun de mes pas.
À notre arrivée parmi les Invisibles, Astrale et moi n'avions que très peu de liberté, et nous n'avions pas le droit d'errer seules dans la planque. Les règles plus souples auxquelles nous sommes maintenant soumises me rassure, d'une certaine manière. Elles témoignent de notre évolution au sein de l'organisation, bien que nous ne soyons que des pions. Pourtant, je me prends à croire que cela puisse s'améliorer rapidement.
Je passe rapidement devant plusieurs portes, toutes fermés, avant de prendre à gauche à l'embranchement avec le couloir menant au réfectoire.
- Qu'allons nous faire, maintenant, sans Fintan ?
Je m'arrête nette au milieu du corridor désert, tous mes sens en alerte. Je n'ai pas rêver la voix horriblement roque qui vient de retentir, dans une sorte de lamentation. Je guette un autre sons, n'osant à peine respirer. Même si en soit, personne ne m'a interdit d'être dans ce couloir au milieu de la nuit, je risque d'avoir des ennuis si l'on me surprend à épier une conversation entre Invisibles, et que je plaide mon innocence risque de ne rien changer.
D'autres chuchotements me parviennent alors, depuis la porte entrouverte d'une salle inconnue. Si la raison aurait voulu que je regagne ma chambre sans tarder, la curiosité et le besoin d'en apprendre plus me poussent à me coller au mur, une main devant la bouche pour étouffer le bruit de ma respiration. Le cœur battant, je croise les doigts pour que la porte ne s'ouvre pas avant que je puisse écouter ne serait-ce qu'une bribe de cette discussion.
Personne n'organise de réunion au beau milieu de la nuit à moins qu'elle ne soit confidentielle. Et personne ne fait de réunion confidentielle à moins d'avoir de choses graves à dire.
- Détends-toi, on a surmonté bien des problèmes. Le brise mémoire de Fintan n'en est qu'un de plus.
Je me fige de plus belle à l'évocation du nom de l'ancien conseiller. Je ne comprends pas immédiatement le sens des paroles de l'homme qui vient de prononcer. Mais lorsque la voix rauque lui répond, je comprends soudainement.
- Je ne suis pas sûr qu'elle fera un bon chef, contrairement à lui. Elle ne fait que réfléchir, élaborer des plans impossibles... mais elle n'agit jamais.
La vérité s'impose à moi comme une claque. Le souffle court, je ne peux réprimer le hoquet de surprise qui éclot dans ma gorge, impossible à étouffer. Mes battements de cœurs résonnent dans mes tempes, tandis que mon estomac se tord violemment. Jamais je n'aurais dû entendre ça. Fintan, ancien Conseiller, ami avec l'ensemble du Conseil actuel et pyrokinésiste, chef de l'organisation. Tremblante, me me rappelle du rapport qu'avait trouvé Astrale dans le bureau de sa mère, concernant les brasiers allumé par un elfe dans les cités interdites. L'œuvre de l'Ancien, à n'en plus douter. Mais il y a autre chose... Ce brise mémoire.
Je suis interrompue dans ma réflexion par le bruit des pas des deux elfes se rapprochant dangereusement de la porte. Sans attendre, je m'enfuis dans le couloir, hantée par la voix cassé de l'elfe.
J'interromps ma course devant la porte de ma chambre, exténuée de fatigue. Un milliard de questions fusent dans mon esprit, menaçant de déclencher une migraine.
Je m'apprête à pousser la porte, lorsque je me souviens de la dispute que j'ai eu avec Astrale, près d'une heure plus tôt. Je ne me souviens même pas de pourquoi le ton est monté entre nous. Parfois, je me trouve ridicule... on se dispute alors que l'on devrait se serrer les coudes, maintenant plus que jamais. La connaissant, elle doit encore m'en vouloir. J'espère juste qu'elle m'écoutera ; je dois absolument la prévenir. Avec un soupir, je pousse la porte et pénètre dans la petite pièce.
- Astrale ? je chuchote, avant même de rejoindre mon lit.
La chambre est plongée dans l'obscurité et le silence, troublé par le bruit régulier d'une respiration. Comprenant que mon amie dort, je me glisse jusqu'à ma couchette où je retire ma tunique, trempée de sueur, pour en enfiler une plus légère et plus longue en guise de pyjama. Je suis déçu de ne pas pouvoir lui parler tout de suite, j'ai vraiment besoin de me vider. À regret, je pose ma tête sur mon oreiller abîmé, et ferme les yeux. J'essaie d'ignorer les frissons qui ne cessent de me parcourir, autant causés par l'entraînement avec Ombre que par cette conversation déroutante, jusqu'à plonger dans un sommeil agité.
Hello ^^
Tenez, une mauvais nouvelle : c'est bientôt la rentrée.
À part ça, j'espère que ce chapitre vous a plus ! J'avoue que c'est l'un de mes préféré.
D'ailleurs, je viens juste de lire mes anciens chapitres, dans le tome 1... Et je suis désespérée ! Comment vous avez fait pour lire ça ?! XD
Enfin bref, si un jour j'ai du temps... (chose qui n'arrivera certainement jamais), j'essayerai de tout réécrire.
Bizou <3
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