If I Fight, You Fight (Freddy/Ugo)
If I Fight, You Fight : One Step At A Time
Jab. Cross. Jab. Cross. Garde. Crochet du droit. Garde. Uppercut.
Sang et coups directs dans la tête ou dans les côtes, joue qui rencontre le sol, et Ugo se demande comment il réussit à gagner ce combat, alors que son corps couvert de sueur et de rouge lui fait souffrir le martyr. D'ailleurs, son corps se demande aussi comment il a réussi, parce que se traîner jusqu'à son appartement est plus compliqué que d'esquiver au bout d'un huitième round.
Ugo ferme la porte de son appartement, après trois étages compliqués où il a dû s'accrocher solidement à la rampe pour ne pas s'arrêter au milieu du chemin, son sac de sport tapant contre ses côtes abîmées par tous les jabs qu'il a reçus aujourd'hui. Il a le temps de sortir une poche de glace du congélateur, avant de courir jusqu'aux toilettes pour recracher tout ce qu'il a pu avaler aujourd'hui, comme avant et après chaque combat. Un surplus d'adrénaline, et son angoisse reprend le dessus sur la mince confiance en lui qu'il arrive à afficher.
Les marques sur ses poignets à cause du scotch enroulé autour de ses gants sont loin d'être les pires blessures de sa vie de boxeur, et Ugo sait très bien que les conséquences ne viendront que plus tard dans sa vie. Pour l'instant, il applique de la glace sur sa joue et son œil bien rouges, un pansement sur son arcade sourcilière fragilisée. Il ne lui reste plus qu'à manger un peu en essayant de ne pas tout revomir, et essayer de dormir malgré les nouvelles douleurs.
Ugo se demande parfois pourquoi il boxe et pourquoi il s'obstine avec tout ça, alors qu'il a fait suffisamment d'études pour être heureux ailleurs. Même si son corps lui crie d'arrêter ça avant qu'il ne soit trop tard, chaque jour qui passe, même s'il sait très bien que chaque combat lui retire une année de plus à vivre, rien ne peut l'arrêter ou l'empêcher de boxer. Il va encore avoir du mal à dormir, et Ugo ne sait pas si ça vient plus de sa tête en vrac ou de ce qu'il s'y passe à l'intérieur...
Le club dans lequel il boxe tous les mois, toutes les semaines quand c'est physiquement possible, le laisse tenir une série. 14-0, même si tous les boxeurs qu'il affronte ne sont pas toujours professionnels. Personne ne l'a mis K.O pour l'instant, et ça lui va très bien. Ce serait presque un boulot amusant, si ça ne signifiait pas risquer sa vie à chaque combat, et savoir qu'il ne vivra pas très longtemps s'il continue.
Pas de coach ou de salle pour s'entraîner et s'améliorer, tout se fait tout seul, tout à l'instinct. Ugo se débrouille comme ça, et ça lui convient de ne pas avoir à être redevable à quelqu'un. Ce sont ses poings, pas le talent de quelqu'un d'autre. Il se prend les coups, il crache son propre sang, et personne n'aura jamais le droit de s'approprier tous ses efforts, au combien ils peuvent être vains.
Son corps a à peine le temps de se remettre de son dernier combat que le club organise une journée de gala pour mettre en avant la boxe au sein de la variété sportive de la région. Ugo n'a pas attendu longtemps avant de s'inscrire, il connaît ses forces et ses faiblesses, il peut gagner, même si son corps a encore des limites visibles et des stigmates des anciennes luttes. Ses mains tremblaient au moment de signer, mais c'était hors de question de reculer devant un nouveau défi.
Ugo n'avait juste pas prévu de devoir enchaîner plusieurs combats d'un coup, avec seulement quelques minutes de break. Il a un bon cardio, mais rien ne peut le préparer à un tournoi surprise, à enchaîner les coups et les blessures, ce n'était pas censé être plus qu'une exhibition avec maximum deux duels... Il se retrouve à appliquer lui-même une gaze contre son visage déjà blessé quand ses gants daignent bien s'enlever.
Son arcade est bien amochée et son œil est à moitié fermé quand il se retrouve en finale, mais Ugo ne compte pas abandonner, ce n'est pas pour livrer un beau spectacle, juste pour aller au bout de ses limites et se prouver qu'il peut faire partie des meilleurs de la région. Ce serait plus facile s'il connaissait son adversaire, mais sa carrure et son accent lui indiquent qu'il ne vient pas d'ici. Pas de nom, pas de surnom. Peu importe, il doit gagner dans tous les cas. Seul, face à son destin.
Rien n'aurait pu le préparer pour ce qui l'attendait, pas même ses dix-sept affrontements gagnés. Aucune allonge n'a l'air de pouvoir l'atteindre, aucune esquive n'a l'air de pouvoir fonctionner. Quand il n'est pas en train de se faire enchaîner dans le coin du ring, sous un torrent de coups à l'arcade et aux côtes, c'est qu'il est en train de cracher du sang au son de la cloche. Quatrième round, pas sûr qu'il puisse tenir le rythme très longtemps, son œil refuse de s'ouvrir, même un peu...
Le gars en face est juste trop rapide, trop puissant, trop vif, trop fort, comme s'il n'avait fait aucun combat de la journée avant celui-ci... C'est une dérouillée, et Ugo ne sait plus où se mettre quand sa joue heurte le sol, et son protège-dents part de lui même rejoindre une petite mare de sang. C'est l'un de ces jours où il regrette son parcours et d'avoir enfilé les gants pour la première fois...
Le pire, c'est qu'il l'a bel et bien touché et frappé cet inconnu, mais pas une seule éraflure ou blessure ou petite goutte de sang est à déplorer sur son stupide visage de numéro un. Et il y a ce regard sur lui alors qu'il se relève en plusieurs fois. Ugo prend sur lui pour ne pas aller tout de suite vers les vestiaires, il faut savoir rester digne et accepter la défaite, même avec la moitié du visage couvert de sang et de bosses. Il ne parle même pas de ses côtes le faisant presque plier sous son poids quand il enfile sa veste.
Ugo rentre chez lui à la force d'il ne sait quoi, parce qu'il n'a plus la moindre motivation après sa première défaite. Il va passer plusieurs semaines ici, avec une poche de glace sur l'œil, sur la joue, à essayer tant bien que mal de ne pas avoir mal en respirant à cause des hématomes sur la poitrine. Ugo va essayer de récupérer suffisamment d'énergie pour les prochains combats, mais il n'est pas sûr de pouvoir en refaire énormément si la récupération ne suit plus. Il était déjà fatigué au premier combat, maintenant il est plus qu'écroulé sous la douleur et l'épuisement.
Le lendemain, après une nuit tout sauf facile, à essayer de dormir sans trop bouger pour ne pas réveiller la douleur qu'il ressentait dans chaque muscle de son corps, il y a des battements sur sa porte, et Ugo n'est pas sûr que ce soit le réveil qu'il espérait. Il prend sur lui pour se lever et aller ouvrir, même s'il chancelle encore et que sa tête tourne toujours un peu.
Il y a un homme blond à sa porte, et Ugo n'a pas la moindre idée de qui ça peut être, mais son regard lui dit quelque chose. Pas exactement le genre d'invité dont il a l'habitude, même s'il n'invite pas grand monde.
Ugo n'a pas vraiment l'impression de choisir de le laisser entrer, vu qu'il se retrouve assis en face du blond, sans lui avoir posé une seule question. Il ne doit pas avoir l'air très beau, avec un oeil fermé pour cause de blessure, et cette partie du visage encore couverte par les pansements, mais l'homme n'a pas l'air de réagir à ça, son regard énigmatique a plutôt l'air perdu sur les traces des coups donnés sur ses phalanges.
Ugo n'est pas vraiment sûr de ce qu'il est censé dire ou faire, il n'a pas envie de parler du combat de la veille, et encore moins des conséquences de tout ça. Pourtant, la seule chose dont il est sûr pour le moment, c'est que l'inconnu se tient debout devant lui, ses doigts parcourant ses blessures encore fraîches comme s'il l'avait invité à le faire... Il retient ses tremblements quand des mains tout autant abîmées que les siennes glissent le long de sa joue, s'il atteint ses côtes, il le frappe.
Ugo n'est pas loin de lui demander de partir, quand le gars prononce enfin quelques mots, ses doigts s'éloignant finalement de son visage.
"J'étais au tournoi, jolis combats hier, il va falloir travailler ta garde et ton allonge, mais tu as du potentiel. Réussir à tenir autant de rounds en si mauvais état, et face à ce genre d'adversaire, c'est pas mal pour un challenger. Heureux de voir que tu tiens encore debout d'ailleurs, sacré crochet qu'il t'a mis à la fin. Je m'appelle Freddy au fait."
"Pourquoi venir me voir ?"
"Je veux te prendre sous mon aile, pour tirer le meilleur de toi-même. C'est bien de se battre dans des tournois de quartier, mais je peux t'offrir le championnat de France, il y a trop peu de bons boxeurs ces temps-ci pour laisser passer cette chance."
Ugo est loin de vouloir accepter, il a encore en tête les souvenirs de sa première défaite, et son corps ne voudra sûrement plus suivre très longtemps de toute façon...
"Avec moi, tu ne perdras plus jamais un seul match, si tu suis ce que je te dis de faire."
Il y a une telle confiance qui ressort de ces mots, Ugo n'est pas sûr de pouvoir lui faire confiance ou de même vraiment savoir ce qu'il se passe, mais quelque chose au fond de lui veut y croire, il veut suivre cet inconnu jusqu'au bout du monde sur la simple base de ses mots.
"Je vais y réfléchir, merci. Pour le moment, je ne suis pas en état de faire quoi que ce soit."
Freddy note quelque chose sur une carte de visite, et lui tend le papier sans même se demander une seule fois s'il veut vraiment continuer la boxe après la dérouillée qu'il s'est prise seulement quelques heures plus tôt. Les traumatismes physiques sont là, Ugo n'a pas besoin de chercher plus loin pour les subir.
"Refroidis ton corps à la dure pour guérir plus vite."
Ugo le regarde partir, la carte de visite entre ses doigts. Il se sent seul maintenant, confronté à un nouveau défi, et ça ne lui plaît pas du tout. Putain.
Il suit vraiment les conseils d'un gars qu'il connaît à peine, et ce n'est pas parce qu'il a l'air de savoir des choses sur la boxe qu'il devrait aller s'entraîner avec lui ou combattre pour lui... Ugo retient tout un tas de bruits quand il trempe sa première jambe dans une bassine de glaçons et d'eau glaciale, s'il survit à ça, il considérera vraiment la proposition... Il ne va expliquer à personne comment il s'est retrouvé une bonne heure à tremper dans des glaçons pour apaiser la douleur dans ses mains, l'eau de la douche tout aussi froide pour le reste de son corps...
Apparemment, ce Freddy sait vraiment de quoi il parle, même s'il a l'air trop sûr de lui.
Il se donne une semaine de bains de glaçons et d'entraînements modérés dans le quartier avant de finalement retoucher à cette carte de visite qui attend sur sa table basse. C'est à l'autre bout de la ville, pas étonnant qu'il n'ait jamais entendu parler de cette salle de boxe. Son corps va mieux, il ne lui faut que quelques pansements pour son arcade et des bandages sur ses mains pour les tremblements, alors s'échauffer en courant pour aller jusque là-bas devrait aller. Freddy veut voir le meilleur de lui-même, et même si Ugo n'est pas bien sûr de ce que c'est, il est prêt à le lui offrir.
Le premier pas dans la salle de boxe est comme un nouveau souffle, sauf qu'il n'a aucune idée de ce qui l'attend maintenant qu'il est prêt à entamer une autre lutte du destin. Ugo se retrouve à observer les photos et les trophées derrière les vitrines en attendant que quelqu'un vienne lui parler, et c'est sûr qu'il est impressionné par les succès qu'il y voit. Il a sous-estimé Freddy. Alors il a été boxeur pro avant d'avoir sa salle. Pas vraiment surprenant mais c'est bien de l'apprendre, il aime savoir que son nouveau coach s'y connaît.
Ses yeux s'attardent sur certaines photos de victoires, des poings en l'air et des sourires. C'est ce genre de choses qu'il recherche en venant ici, s'il est parfaitement honnête avec lui-même. Le reflet de Freddy dans la vitre le sort de ses pensées, il ne sait pas quoi lui dire, il pensait que sa présence suffirait pour commencer le travail.
"Alors, bel et bien sûr de vouloir être mon nouveau poulain ?"
Le sourire de Freddy est censé lui apporter confiance, il le sait très bien, mais Ugo ne se sent pas capable de laisser échapper le moindre mot pour confirmer, un simple mouvement de tête lui suffit. Même si, apparemment, ce n'est pas vraiment le cas pour Freddy... Il esquive son crochet du droit par réflexe, il ne vient pas de passer une semaine entière dans de l'eau glacée pour se refaire frapper au même endroit.
"Je ne veux pas d'un loser, je veux un champion. Une réponse, c'est haut et fort, du fond de ton cœur."
"Oui, je veux m'entraîner ici, avec vous."
"C'est mieux comme ça."
"C'est vraiment ça votre crochet du droit ?"
"Je t'aurais touché si je l'avais voulu." Freddy sourit, et ça lui suffit comme réponse
Il n'aura pas le droit à la visite de la salle pour le moment, Freddy préférant l'amener dehors pour continuer leur discussion, probablement pour éviter les regards indiscrets.
"Alors, pourquoi tu boxes, si tu caches tes mains comme ça, si tu as peur d'être vu et entendu, si tu n'as pas envie de faire des coups bas sur le ring pour gagner ?" C'est loin d'être une question auxquelles il peut répondre
"J'ai pas de réponse claire et précise, j'aime juste boxer et ça me rend heureux, même si ça fait mal la plupart du temps." Ugo n'aurait sûrement pas pu trouver pire comme réponse, mais il est honnête
"Il va falloir travailler sur ta confiance en toi, mais ta réponse me convient."
"Quand est-ce que je commence ?" Le sourire de Freddy ne l'amuse pas tant que ça
"Maintenant, et aucune plainte ne sera tolérée. Tu veux boxer et te faire un nom, et je suis prêt à t'aider, alors suis ce que je te dis et ne t'arrête pas qu'à tes propres attentes."
"Il y a eu d'autres boxeurs avant moi, sous votre aile ?"
"Non, tu es le premier. Allez, on n'a pas toute la journée devant nous."
Ugo ne sait pas comment réagir à la voix soudainement triste de Freddy et à son regard assuré le fuyant, mais le changement de sujet est vif et son sac de sport finit vite entre les mains de son nouvel entraîneur. Freddy lui indique une direction avec son index, et il ne lui faut pas longtemps avant de comprendre qu'il va devoir courir s'il veut éviter de se faire écraser par son coach en camionnette, décidément très étrange. Ses jambes sont toujours un peu faibles, mais il ne compte pas le décevoir.
Courir vers le soleil, il en a entendu des consignes d'entraînement bizarres quand il était à l'école, mais celle-là est vraiment particulière. De toute façon, Ugo fait ce que Freddy lui dit, il veut s'améliorer et ça ne passera que par des efforts.
Il a sûrement traversé la moitié de la ville, Freddy derrière lui au volant de sa camionnette, manquant de l'écraser plusieurs fois. Ce serait mentir de dire qu'il n'est pas fatigué à la fin de cette course, mais il comprend pourquoi il a fait tout ça en sentant à peine ses côtes. C'est bon pour le cardio, et il en a besoin pour tenir sur la durée. Le soleil commence à se coucher sur le front de mer, les nuances de bleu et d'orange se mélangeant alors qu'il reprend son souffle, Freddy le rejoignant en souriant.
"Comment c'était, coach ?"
"On va y aller un pas après l'autre, un coup après l'autre, un round après l'autre."
C'est la première fois qu'il fixe profondément le regard bleu clair de Freddy, et Ugo ne sait pas quoi penser de tout ça, il est juste totalement prêt à le suivre aussi loin que possible. Freddy le raccompagne chez lui pour éviter qu'il ne fasse un malaise sur le chemin, et Ugo n'a jamais profité des histoires de combats autant que pour celles de son coach...
If I Fight, You Fight : One Punch At A Time
Ce n'était pas l'image qu'il se faisait d'une équipe professionnelle, mais Ugo sait que ce monde nouveau lui réserve encore énormément de surprises. Il n'est pas en confiance avec lui-même à cause des souvenirs toujours bien ancrés en lui de sa première défaite, mais il sait qu'il va devoir faire confiance aux gens auxquels Freddy croit. Un polynésien comme soigneur, talentueux apparemment, même si Ugo aimerait se blesser le moins possible parce qu'il ne sait pas quoi penser de lui. Une ancienne militaire comme Sparring-Partner. C'est quand il a vu Karima qu'il a compris pourquoi personne ne lui avait jamais parlé de cette salle, même si Ugo n'oserait pas affronter Karima.
Freddy ne lui laisse pas vraiment le temps de penser à ça, Ugo a à peine serré leurs mains qu'il s'est retrouvé à s'échauffer pour se mettre en jambe à coup de corde à sauter et de gainage, pour enchaîner directement avec des directs dans un sac. C'est plus facile à faire quand il est seul, personne pour juger le moindre de ses mouvements et des remarques sur son positionnement à chaque coup sur un point précis à viser, mais il a un coach maintenant et il va respecter ses demandes, pour s'améliorer et ne plus jamais perdre.
Ugo a l'impression de tout réapprendre, de reprendre les bases de ce qu'il avait assimilé par lui-même toutes les années précédentes depuis son adolescence, mais Freddy n'accepte pas ses remarques quand il essaie de lui dire qu'il sait déjà faire quelque chose. C'est le boss, alors il faut se remettre immédiatement au travail.
Dans tous les cas, Ugo s'accroche pour continuer de devenir le meilleur possible, et peu importe le nombre d'heures qu'il passe par jour dans cette salle à taper dans le même sac, ou le nombre de kilomètres à courir devant la camionnette de Freddy; il ne compte pas abandonner avant de se faire un nom.
Deux mois passent et Ugo a l'impression de s'être plutôt bien intégré à cette salle, même si Freddy est sur son dos par rapport à son alimentation (surtout sur sa fréquence d'alimentation, ça lui arrive de sauter un repas et ça ne devrait pas être tant un problème que ça s'il mange les bonnes choses et le bon nombre de calories), ainsi que sur son rythme de sommeil, il fait de son mieux mais certaines choses tournent toujours dans son esprit, c'est comme ça, même quand la lune remplace le soleil.
C'est compliqué de tout le temps suivre la dureté de son entraînement, même s'il le fait sans se plaindre, parce que ses côtes lui font toujours très mal au moindre faux mouvements, et Freddy n'est pas au courant, peut-être parce qu'il s'en fiche, peut-être parce qu'il ne s'en est toujours pas rendu compte, peut-être parce qu'il veut le voir combattre la douleur.
Ugo est en train de déjeuner avec Karima devant un affrontement, pour une fois qu'il ne saute pas ce repas, quand Freddy lui annonce la nouvelle. Il a son premier combat sous sa garde, et il ne sait pas si c'est une bonne chose, mais il se sent prêt. Il ne s'est pas entraîné pour simplement passer du temps avec des nouvelles connaissances. Premier combat vraiment professionnel, et il a envie de croire à une première victoire.
Ugo redouble d'efforts pendant les entraînements, même si ses côtes ne sont toujours pas rassurantes. Il observe chaque mouvement de son adversaire à chaque rediffusion de ses combats, et même si c'est sûrement juste un affrontement comme un autre pour son adversaire, Ugo sait très bien qu'il ne doit pas perdre, sinon Freddy ne le garderait probablement pas, et il ne veut pas retourner dans son club miteux, ou arrêter sa carrière tout de suite.
Il ne veut pas non plus que ses côtes soient la source de sa retraite anticipée, même s'il sait que ça ne peut que l'handicaper. Il ne dit toujours rien à Freddy pour éviter que son coach ne l'engueule très fort et le laisse de côté pour entraîner un nouveau poulain, il vient à peine de commencer et il ne veut pas s'arrêter maintenant.
Son sang pompe plus vite dans ses veines et son cœur bat contre sa cage thoracique. Ugo ne pensait pas être aussi stressé à l'approche de son premier combat, mais il y est. C'est le jour où il ne doit pas échouer, ou abandonner, ou baisser de régime. Il ne sait pas comment faire face à la pression, mais c'est hors de question de perdre. S'il échoue, ce sera à la fois son premier et son dernier combat. Les mains de Freddy glissent lentement autour de ses poignets pour l'aider à enfiler ses gants correctement, son coach essaie de le motiver, mais quelque chose ne va toujours pas avec lui.
Ugo ne pensait pas que son habitude resterait aussi avec son nouveau départ, mais le voilà en train de cracher ses tripes dans le fond de la cuvette, et Freddy a en partie assisté à ça, parce qu'il lui fallait quelqu'un pour lui retirer ses gants... S'il ne foire que maintenant, avant de monter sur le ring, tout devrait bien se passer. Freddy tapote son dos quand il est toujours au-dessus des toilettes, et c'est peut-être ça; la plus grande source de motivation, savoir que son coach est toujours derrière lui malgré la situation peu valeureuse. Freddy est une présence réconfortante et il se sent en sécurité près de lui. Et ses mots sont tout le temps justes.
Un coup après l'autre. Il renfile ses gants en espérant que ce sera la dernière fois pour ce combat, et Freddy se charge même de mettre en place correctement la capuche. Il n'est pas seul dans cet affrontement, il doit y penser. Quelques échanges de coups avec Karima, quelques sauts sur place pour garder les jambes dans le rythme, ne pas laisser l'organisme se refroidir pendant que l'arbitre vient les voir pour leur rappeler les règles, même s'il les connaît suffisamment. Dans sa tête, c'est le vide et le silence complet, il n'y a que ses yeux rivés sur la porte, en attendant d'être sur le ring, face à son adversaire.
Il y a plus de monde qu'il ne le pensait en laissant traîner ses yeux sur les gradins, mais le plus important reste l'autre boxeur, il ne doit pas se laisser déconcentrer par l'importance du combat. Son adversaire est déjà en train de passer entre les cordes, et Ugo essaie de se concentrer uniquement sur la voix de Freddy derrière lui, lui soufflant de ne pas perdre sa concentration et de conserver une bonne garde. Après, ses gants s'entrechoquent aux deux autres, l'arbitre leur demande de ne pas faire d'anti-jeu aujourd'hui, et c'est parti.
Jab, cross, uppercut, garde. Il y a la voix de Freddy, toujours près de lui, pour lui dire quoi faire et comment esquiver les attaques adverses, même si son instinct prend souvent le dessus pour se protéger et éviter les coups dangereux pour ses côtes. Troisième round, sa joue est éraflée et saigne, mais il tient mieux le choc que son adversaire. Freddy continue de lui dire quoi faire et n'hésite pas à crier sur l'adversaire pour chaque coup en traître, même s'il se fait réprimander par l'arbitre, au point que Tehe et Karima doivent l'empêcher de monter sur le ring, mais Ugo n'est pas bien sûr de ça, il est plutôt occupé à enchaîner jabs et uppercuts.
Sixième round et il gagne par K.O., l'autre boxeur ne se relevant pas après un bon crochet. Ugo essuie rapidement le sang coulant sur sa joue avec son bras, avant que Freddy ne monte définitivement sur le ring pour le tenir contre lui, et l'aider à soulever son autre bras. Première victoire alors, pas mal. Nez et joue touchés, petite coupure à la lèvre, mais il s'en remettra. En tout cas, Teheiura s'occupe rapidement de ses blessures, il ne lui dit juste rien pour les côtes toujours sensibles quand il se retrouve entre ses bras et ceux de Karima. Ugo ne leur dit rien non plus pour le rougissement sur son visage qui n'est pas entièrement dû aux coups qu'il s'est pris.
Les entraînements ont l'air d'avoir été efficaces, le cardio est bon, l'allonge est correct, il peut mettre plus de puissance dans ses coups, mais il a encore le temps de travailler avec Freddy.
Pour le moment, Freddy ne lui parle pas boxe, et c'est bien l'une des premières fois que c'est le cas, alors Ugo en profite. Ils se retrouvent tous les quatre dans le bar le plus proche pour fêter sa première victoire. Ugo ne sait pas si c'est très judicieux, mais ça l'amuse de passer un peu plus de temps avec eux, ça resserre les liens. Il ne boit pas tant que ça, mais il passe un bon moment, en voyant Karima embrasser une petite serveuse, et en écoutant Tehe lui parler de sa Polynésie, pendant que Freddy reste près de lui. Il a vu pire comme soirée.
Ugo est peut-être encore sous le choc de sa victoire et de l'alcool, mais ça lui tient à cœur de rester avec son coach, pour apprendre à le connaître, le comprendre un peu plus. C'est Tehe qui amorce pour que Freddy se livre un minimum, et Ugo ne fait qu'écouter en buvant ses paroles, comme à l'accoutumée.
Freddy raconte comment il a abandonné ses études d'ingénieur pour se consacrer exclusivement à la boxe, comment il est devenu champion de France à plusieurs reprises, plusieurs années d'affilée, comment il est devenu entraîneur pour passer le temps. Ugo n'est pas sûr d'avoir toutes les informations, mais il est trop fatigué pour chercher à en savoir plus. Il attrape l'occasion en vol de demander à Freddy de le ramener chez lui pour éviter une grosse session de footing tardif, et son coach accepte, alors c'est vraiment une bonne journée.
Il y a une proximité gênante entre eux, mais ils refusent tous les deux d'en parler, ou alors Ugo est le seul à la ressentir. Dans tous les cas, il ne se passe rien, à part la main de Freddy sur sa joue pour mettre de nouveaux pansements sur ses nouvelles blessures.
Retour à l'entraînement dès le lendemain, et Ugo ne sait pas pourquoi il se sent comme ça, mais ça lui fait plaisir d'être avec Freddy, de simplement frapper dans le même sac et d'enchaîner des séries de corde à sauter et de tractions. Tout passe mieux quand il sait qu'il rend son coach fier de lui.
Les semaines défilent et se ressemblent, entraînements, dîners ensemble, combats. Ugo se plaît dans cette organisation, même s'il aimerait que Freddy laisse de côté cette relation entraîneur/élève quand ils ne sont pas à la salle ou en préparation de combat. Ugo n'ose pas lui en parler, par peur de ruiner ce qu'ils ont déjà fait ensemble. Pour l'instant, tout avance en sa faveur grâce à ses efforts, et c'est très bien comme ça.
Il y a plus drôle que de se faire désinfecter la pommette, surtout pendant qu'il essaie de suivre un combat, mais Tehe ne lâche pas l'affaire et ne veut clairement pas le laisser regarder tranquillement. C'est à ce moment peu flatteur où son soigneur compresse sa joue que Freddy décide de débarquer avec un téléphone contre l'oreille, tout sauf heureux de sa discussion apparemment. Freddy repart vite, c'était juste un aller-retour pour prendre quelque chose pour noter, et Ugo est obligé d'échanger un regard d'incompréhension avec Tehe.
Ugo a l'impression qu'il n'aura pas de réponse avant une éternité, alors il ne cherche pas à savoir, Freddy ne veut sûrement pas qu'il lui pose tout un tas de questions, comme Ugo n'aimerait pas qu'on lui en demande trop sur sa vie privée. S'il doit se concentrer sur quelque chose, c'est bien sur ses entraînements et le futur combat qui approche.
Il est en 8-0, et perdre n'est plus une possibilité. Ugo est toujours autant impliqué dans ses échauffements et les échanges de coups, mais il a l'impression que ce n'est pas le cas de Freddy. Il trouve son coach beaucoup plus distant depuis cet appel, et il a plus l'impression de s'entraîner tout seul qu'autre chose. C'est majoritairement avec Karima qu'il travaille sur son allonge et son jeu de jambes qu'avec celui qui est censé lui apprendre tout ce qu'il y a à savoir.
Le prochain combat du 9-0 ne se passe pas aussi bien que les autres, et Ugo sait très bien que ce n'est pas de sa faute. Freddy est dispersé, ses consignes et ses observations n'étaient pas tout le temps les bonnes, et Ugo est simplement satisfait et apaisé de savoir que son instinct peut prendre le dessus. Les coups de poing inutiles qu'il s'est pris dans ses côtes toujours fragiles sont uniquement de la faute de Freddy, peu importe à quel point son affection pour son coach peut l'aveugler. Il descend du ring trop amoché par rapport à un combat normal, et Freddy le salue à peine avant de partir prendre un coup de fil...
Il y a bien Tehe et Karima pour le féliciter et s'occuper de ses blessures, mais quelque chose en lui ne peut pas s'empêcher de penser à Freddy...
Ils passent la soirée ensemble, à trois, même si Karima part rapidement retourner draguer sa serveuse préférée, Candice, une chouette fille s'il en croit tout l'amour qu'il peut voir dans les yeux de sa sparring-partner. L'ambiance n'est pas incroyable. Il n'y a plus que Tehe pour lui tenir compagnie, et Ugo est obligé de lui poser la question qui lui brûle les lèvres depuis plusieurs jours déjà, même s'il sait qu'il n'a aucunement le droit de demander et de savoir quelque chose de privé sur son coach.
"Tu sais ce qui dérange Freddy ?"
"Freddy est encore occupé avec une rupture difficile, Grégoire, gentil garçon, un peu comme toi. Son esprit est plus concentré sur des moyens de le récupérer plutôt que de t'entraîner correctement. Désolé pour ça, Freddy n'est pas le plus intelligent des hommes, mais il fait de son mieux."
"Ah, ouais."
Ugo est à peine surpris d'apprendre tout ça, juste déçu du comportement de Freddy, de ne passer qu'au second plan, de n'être que la roue de secours de ses pensées. Il est jaloux, mais il ne veut pas se l'admettre.
Ugo est vraiment énervé quand il retourne à la salle le lendemain, Freddy n'est pas là et ce n'est pas qu'un énorme retard, toujours probablement occupé à vivre dans le passé qu'à l'aider à améliorer ce qui lui fait toujours défaut. Ugo ne sait même pas pourquoi il continue de faire des efforts si c'est juste pour se retrouver seul face à un sac de boxe, pourquoi est-ce qu'il ferait l'effort de venir à l'heure si son coach ne vient pas du tout ? Pourquoi est-ce qu'il voudrait s'entraîner aussi durement, selon un programme qui n'intéresse même pas celui qui l'a mis au point ? Ugo se fout de ce qu'il pourrait lui dire ou non, il s'entraînera selon ses propres règles sans se soucier de ses limites tant que Freddy ne sera pas revenu à la raison.
Tout ça le perturbe alors que ce n'est pas son histoire. Son sommeil est dérangé et il n'a plus d'appétit. Il en veut vraiment à Freddy, et quand son coach daigne enfin se montrer pour lui annoncer son futur combat, quelque chose en lui commence à craquer. Ugo se retient de lui avouer ses quatre vérités au visage, mais ça le frustre vraiment d'être celui qui doit être responsable entre eux deux alors que Freddy avait promis de l'aider, c'est juste un retour à la case départ, comme quand il était encore tout seul.
C'est quand il voit qui est son prochain adversaire que quelque chose se brise vraiment en lui. Il a fallu qu'il tape le nom de ce gars sur internet pour voir son niveau pour comprendre que Freddy se fout totalement de lui. Ugo n'est pas encore de taille pour affronter le numéro un de France, le même gars qui l'a dérouillé au tournoi du club. Les sueurs froides et les souvenirs sont toujours là, malgré les victoires et le temps.
Tout son corps tremble à la moindre pensée d'un nouveau combat contre ce monstre, il a tenu cinq rounds la dernière fois, s'il essaie de tenir plus longtemps, il finira à l'hôpital, voire au cimetière plus tôt que prévu... Ugo n'essaie même pas de parler à Freddy, il sait très bien qu'il doit être en train de parler à son Grégoire... Il va devoir affronter le numéro un sans son coach.
Pourquoi lui ? Pourquoi est-ce que Claude Dartois l'a choisi comme adversaire ? Pourquoi est-ce qu'il était là au tournoi du club ? Ugo n'a pas de réponse à tout ça, et c'est ce qui le fait paniquer pendant qu'il fait un duel amical face à Karima, pour s'échauffer. Il laisse son esprit divaguer au lieu d'esquiver correctement, et il se prend un coup assez puissant dans les côtes... Cette fois-ci, Ugo sait qu'il craque complètement, physiquement comme mentalement.
Trop de pression sur ses épaules, pas assez de soutien pour soutenir le poids, il ne peut pas supporter les problèmes des autres sur ses épaules. Ugo sent que quelque chose cloche quand il essaie de reprendre son souffle, et sans les bras de Karima autour de lui, il serait au sol. Il tient quelques minutes, en essayant de résister face à la douleur et la panique, mais il ne peut pas lutter plus longtemps, l'obscurité finit par l'envahir...
Ses yeux s'ouvrent après plusieurs reprises, et ses mains viennent frotter son visage pour essayer de se convaincre qu'il est bien réveillé. Bips à répétition, ambiance blanche tout autour de lui à lui décoller la rétine. Ce n'est ni chez lui ni la salle. Perfusion au bras. Ugo n'attend pas le verdict pour comprendre qu'il est à l'hôpital, sûrement à cause de ses côtes, il fallait bien que ça arrive un jour... Trois côtes cassées, plus de la sous-nutrition, s'il en croit ce que lui dit l'infirmière qui vient le voir. Il a fait fort. Ugo croise les doigts pour que Freddy ne soit pas venu pour lui faire la morale, sinon il devra aussi la lui faire.
Karima et Tehe viennent vite à ses côtés pour lui faire part des nouvelles de tout ce qui s'est passé pendant qu'il était inconscient, et comme il s'en doutait, Freddy n'a pas apprécié, et il est là, prêt à l'engueuler. Ugo plaint les patients de l'hôpital qui vont devoir assister à ce qui va suivre entre eux, même s'il met en risque sa relation avec son coach et la suite de sa carrière.
Effectivement, Freddy débarque et ses deux amis préfèrent vite partir pour les laisser seuls, même si Ugo aurait aimé pouvoir retarder ce moment le plus longtemps possible. Il n'a pas peur de le défier du regard cette fois, parce qu'il est tout autant responsable que lui sur ce coup. Il n'a pas peur des conséquences, il est déjà à l'hôpital et rien ne peut le blesser un peu plus que l'indifférence dont a fait preuve Freddy pour le laisser de côté.
"Pourquoi tu ne m'as rien dit pour tes côtes ?! On aurait pu éviter ce moment en allant faire des examens plus tôt, j'aurais pu adapter ton entraînement et choisir des adversaires moins dangereux ! Il a fallu que tu attendes de tomber dans les vapes au beau milieu de la salle pour que j'apprenne que tu t'es battu tout ce temps avec trois côtes cassées ! Mais tu es fou, pourquoi ne pas avoir pris soin de ta santé ? Tu te rends compte que tu peux gâcher ta carrière et peut-être décaler ou annuler le combat face à Dartois, ça aurait pu être plus grave pour toi si tu avais attendu un combat pour craquer !"
Comme prévu, Freddy se prend pour son père, après l'avoir totalement sorti de sa vie.
"Mon esprit était ailleurs, en train de penser à mon coach en train de me laisser de côté en faveur d'un autre homme. J'aurais pu me concentrer pleinement sur la boxe si j'avais été entraîné correctement ces derniers jours, malheureusement mes côtes ne sont pas les seules victimes de cette histoire, et je ne suis pas le seul coupable de ma présence ici. Je n'ai rien dit pour mes côtes pour justement éviter ce moment. Je me fiche de ce combat, je l'ai déjà perdu une fois, je n'ai aucune chance de l'emporter à l'heure actuelle."
Sa réponse n'a pas l'air de plaire à Freddy, et Ugo peut très clairement le lire sur son visage.
"Je sais que j'ai merdé ces derniers temps et je veux me racheter, mais je ne veux plus jamais t'entendre dire autant de conneries une nouvelle fois. Un combat n'est jamais perdu avant le dernier round, même face au numéro un. Je t'entraîne pour être le meilleur à ton tour et te voir prendre la relève, alors c'est hors de question que tu refuses cet affrontement !"
"Si je suis remis à temps, je ferais ce combat. Cependant, je refuse absolument de le faire si tu n'es pas à mes côtés. Si je me bats, tu te bats aussi."
Une flamme brûle quelques secondes dans les yeux de Freddy, et après ils échangent une poignée de main solide en s'excusant de tout ce qu'il s'est passé dernièrement une nouvelle fois. Ugo a retrouvé son coach, et même s'il a perdu trois côtes pour en arriver là, ça valait sûrement le coup. Il n'est plus tout seul maintenant.
If I Fight, You Fight : One Round At A Time
Depuis son lit d'hôpital inconfortable dans lequel il a passé plusieurs jours, à juste alterner entre ennui et IRM, Freddy lui a parlé de son futur adversaire, Claude Dartois, le boxeur qui a coupé court sa première série de victoires, et qui va s'attaquer à sa deuxième série. Ugo n'a pas spécialement apprécié son séjour à l'hôpital, des douleurs inconnues se réveillant un peu partout dans son corps, mais au moins, ses liens avec son coach sont redevenus comme avant, voire un peu plus forts.
Evidemment, il a des entraînements adaptés par rapport à sa condition physique et ses côtes se remettant lentement en place, et Freddy est beaucoup plus présent pour lui, pour à la fois vérifier que tout va bien et qu'il ne fait pas une rechute, ainsi que pour s'assurer que les réflexes sont toujours là. Ugo va devoir parler avec Tehe pour en apprendre plus sur tous les changements qui se sont produits pendant qu'il était loin du sport.
En tout cas, c'est sûr qu'il n'avait pas fière allure en revenant à la salle en fauteuil roulant, qui plus est, poussé par Karima, mais Ugo sait très bien qu'il aurait pu éviter ça s'il avait été plus tôt à l'hôpital, et s'il avait réfléchi un peu plus sur le choix de ses combats au lieu de laisser des promoteurs faire.
Il a toujours le numéro un en ligne de mire, il ne sait pas s'il doit dire à haute voix qu'il veut le battre, mais Ugo est prêt à tenter le diable, malgré son corps en miette pour le moment. Une heure de vélo de salle, une de tapis de course, récupération, entraînement face à Freddy pour retrouver les points d'accroche avec ses poings. Son coach est un peu plus proche de lui qu'avant son séjour d'une semaine chez les radios, et Ugo ne peut que s'en réjouir, même s'il a une nutritionniste sur son dos maintenant. Clémentine. Décidément, Freddy sait très bien s'entourer.
Peut-être que la plus grosse nouveauté n'est pas tant les bons repas équilibrés qu'il n'a plus à se forcer à préparer, ou le fait de vraiment réfléchir à chaque mouvement pour soulager ses côtés, mais surtout de prendre des bains de glaçons avec son coach. Ugo a gardé l'habitude pour faire taire la souffrance, et apparemment, Freddy veut tout vérifier de ses douleurs pour empêcher qu'un mauvais coup se reproduise.
Freddy est peut-être trop proche de lui, mais c'est qu'il a dû finalement accepter sa rupture, et qu'il cherche à se rattraper à sa manière. C'est amusant de passer autant de bains gelés avec lui, même si être nu près de son coach n'est pas exactement professionnel... Il y a souvent les doigts de Freddy sur ses côtes pour vérifier que tout est en place là-dedans, ou sur ses phalanges pour vérifier qu'il n'y ait pas d'infection sur ses plaies à force de donner des coups dans des sacs.
Ils en oublieraient presque qu'ils vont affronter le numéro un d'ici quelques semaines. Ugo ne sait pas s'il refoule l'évènement, ou s'il l'attend de pied ferme. Dans tous les cas, il s'entraîne durement pour être prêt le Jour J.
Freddy ne leur autorise pas beaucoup de sorties pour bien être prêt au moment du combat, mais ils ont quand même la joie de se retrouver pour un repas tous ensemble à cinq. Ugo sait qu'il est surveillé sur choix alors il suit une bonne conduite nutritive pour que Clémentine ne lui plante pas une fourchette dans la main.
Avec énormément de surprise, ils ne parlent presque pas du combat face au plus grand combattant qu'il aurait pu croiser sur sa route pendant le repas. A la place, il y a plutôt le regard de Freddy sur lui quand il tourne la tête vers lui, et Ugo sait qu'il sent ses joues brûler à chaque fois qu'il le voit le regarder. Leur relation a vraiment évoluée du pire vers le meilleur en très peu de temps, et même si c'était dur à suivre au début, maintenant il sait qu'il ne veut plus lâcher Freddy.
Karima part rejoindre sa serveuse préférée, Ugo mentirait s'il disait que voir sa sparring-partner laisser tout de côté pour une simple fille le surprenait. Clémentine a des plats à préparer pour d'autres à la diet comme lui et doit aussi les quitter, c'est coup sur coup mais au moins il reste toujours Tehe pour éviter qu'il ne se retrouve seul en tête-à-tête avec son coach.
Il ne lui faut pas beaucoup de temps pour comprendre que Tehe ne s'en va lui-aussi que pour les laisser seuls. Traître.
Ugo ne se replie aux toilettes que pour faire face au fait qu'il vient de se retrouver volontairement lâché par tout le monde pour qu'il soit seul avec Freddy, absolument pas pour essayer de trouver une autre signification à ses joues rouges et aux stupides battements de trop dans sa poitrine. Il a à peine le temps de se mouiller suffisamment le visage pour retrouver ses esprits que la porte des toilettes s'ouvre, et son cœur rate encore un battement en priant intérieurement pour que ce ne soit pas Freddy...
Eh bien, ce n'est pas Freddy, mais ça ne le rassure pas plus que ça.
Ugo ne voulait pas avoir une discussion ici, encore moins pour parler de boxe après un repas où ils avaient réussi à tous éviter le sujet, mais apparemment, l'agent de promotion de Dartois l'a suivi jusqu'ici pour lui parler. C'est la deuxième fois de sa vie qu'il se retrouve avec une carte de visite entre les doigts, et il préférait celle de Freddy, peut-être que c'était plus facile de faire confiance à quelqu'un avec un œil en moins. Mister Maistret a l'air très intéressé par lui, et Ugo ne sait pas quoi lui répondre, il est seulement concentré sur le combat, pas sur ce que ça englobe.
On lui propose de laisser la ville derrière lui et de se concentrer réellement sur son avenir, en rejoignant la même agence que son futur adversaire pour s'entraîner avec lui et apprendre de lui, au lieu de perdre son temps ici. On veut qu'il prenne la relève. C'est complètement dingue.
Ugo ne sait pas comment se sortir de cette situation, il n'a pas une seule réponse cohérente à exprimer et il est plus embarrassé qu'autre chose parce que l'offre est intéressante, mais il ne veut pas s'éloigner de Freddy...
Et c'est évidemment à ce moment-là que Freddy se décide à rentrer dans les toilettes, pour les voir comme ça, négociant contre des lavabos. Ugo aimerait pouvoir disparaître et simplement pouvoir quitter la pièce sans avoir à en affronter les conséquences. Tout ça parce que Teheiura l'a abandonné... Freddy et Laurent ont l'air de se connaître, même s'il aurait du mal à dire que c'est très amical. C'est vraiment perdu et gêné qu'il se retrouve entre les deux, alors au moment où Freddy veut l'embarquer pour le sortir de là, il n'hésite pas une seule seconde.
Il attend quelques minutes avant de commencer à poser des questions, ils ne sont plus dans le restaurant alors il n'y a pas d'oreilles indiscrètes, et il veut des réponses. Les secrets entre eux n'ont plus lieu d'être.
"Alors, tu connais ce Laurent, et Claude Dartois ?"
"Claude a été mon premier apprenti, quand j'ai arrêté la boxe. C'est vrai."
Ugo a l'impression que ses trois cassées d'il y a seulement quelques mois n'ont pas servies à grand chose. Freddy lui cache constamment des choses, d'accord il n'aurait pas dû se mêler de son couple, mais là, ce n'était pas nécessaire de lui mentir et de ne lui parler de tout ça que maintenant.
Tout ça n'est sûrement pas nécessaire avant un combat d'une telle ampleur.
Ils recommençaient à avoir une bonne relation, des bons liens, c'est dommage. Évidemment ça fait partie du jeu d'être déstabilisé par l'adversaire, mais non seulement il attendait mieux à la fois de son coach et du numéro un, mais c'est surtout énervant après tout ce qu'ils ont traversé ensemble ces derniers temps.
Ugo n'a pas envie que tout redevienne distant et nocif entre eux, alors il prend sur lui pour ne pas en vouloir à Freddy de lui avoir caché ce détail important, et pourtant ça pèse sur lui d'avoir encore été pris pour un con.
Ugo ne sait pas si Freddy veut se venger de Dartois en l'opposant avec son nouveau boxeur, mais il ne cherche pas à faire partie de ce plan. Il frappe peut-être un peu trop fort dans les paumes protégées de Freddy quand il remplace Karima comme sparring partner. Ce n'est pas évident de parler de tout ça avec son coach, parce qu'ils viennent déjà de sortir d'une crise, et ils ne veulent pas continuer de foncer droit dans le mur alors que ça commençait à se rétablir, en tout cas, ce n'est pas ce qu'il recherche.
C'est Freddy qui prend d'abord sur lui pour l'emmener parler loin des regards extérieurs.
Ugo a vite compris que c'était pour faire un peu plus que chauffer les muscles quand Freddy a commencé à courir à ses côtés au lieu de grimper dans sa camionnette. Il n'est pas surpris que Freddy revienne sur le combat et son lien avec Dartois, pour mettre les choses au point entre eux.
''Oui, Claude a été mon premier poulain, j'ai été l'entraîneur de ton adversaire, mais c'est du passé. Je t'ai caché ça pour ne pas te mettre la pression, tu as débarqué ici avec autant de confiance en toi qu'un poulet à l'abattoir, je n'allais quand même te lâcher cette bombe comme si de rien n'était ! Mon but était de te former, et aujourd'hui tu vas affronter le numéro un, ça n'aurait servi à rien de t'en parler plus tôt."
"Tu comptais au moins m'en parler un jour, ou j'aurais dû l'apprendre avant de monter sur le ring ?"
"Déjà, je ne voulais pas de ce combat, mais je n'ai pas eu le choix, la pression médiatique est trop forte quand ça touche au numéro un pour simplement dire non. Ensuite, Claude était déjà un bon boxeur quand je l'ai pris sous mon aile, une vraie teigne, mais il avait besoin d'un bon entraîneur pour tirer le maximum de son potentiel. Peu importe sa série de victoires et notre temps à travailler ensemble, il a suffi d'une défaite pour qu'il se tourne vers un autre coach. Après j'ai ouvert ma salle, et je t'ai vu te relever je ne sais combien de fois alors que tu te faisais dérouiller face au numéro un. Il fallait que je t'entraîne, sinon j'allais le regretter toute ma vie."
Ugo ne sait pas à quel moment ils ont arrêté de courir pour simplement se regarder droit dans les yeux, mais ils sont au beau milieu d'une rue, à juste être honnête l'un envers l'autre, et ça fait du bien.
"Alors, tu as quelque chose pour m'aider à battre le numéro un, ou tu vas encore me regarder me faire dérouiller par la même personne ?" Le sourire sur ses lèvres est plus intéressé qu'innocent, les mots de Freddy sont agréables, mais il a besoin d'être sûr de pouvoir au moins blesser son adversaire cette fois
"Comme je te l'ai dis, il a suffi d'une défaite pour qu'il me laisse de côté, alors je n'ai pas énormément d'informations sur ses faiblesses actuelles, mais je sais très bien ce qui l'a fait perdre pour la dernière fois de sa carrière. Je ne sais pas si ce match a été étouffé ou tout simplement oublié, mais j'ai besoin que tu me fasses confiance pour ce coup-là."
"Je t'ai toujours fait confiance."
"Cette fois, on laisse nos défaites et nos erreurs dans le passé, je veux me concentrer sur mon poulain, et je veux que tu te concentres sur le plus grand jour de ta vie. Deal ?"
Ugo se sent peut-être trop faible pour continuer d'en vouloir à Freddy, ou alors il est trop attaché à lui, dans tous les cas, il tape dans sa main en souriant. Deal .
"Ensemble, on a une chance de le battre, à deux, en équipe, et je ne veux pas que ce soit gâché par le passé."
Ce qu'il leur restait de temps de préparation s'écoule rapidement, pour finalement arriver au Parc des Princes trois jours avant le combat. Ce n'est pas son premier affrontement dans un stade, mais c'est sûrement la première fois qu'il y aura autant de monde pour simplement le voir se prendre des coups...
Le combat doit vraiment avoir été bien vendu, parce que l'hôtel dans lequel ils séjournent est vraiment classe, beaucoup plus classe que les F1 pour ses trois premiers combats en tout cas. Ugo se retrouve même à signer quelques autographes alors qu'il essayait de retrouver sa chambre parmi tous les couloirs, il a regretté de ne pas avoir accepté les lunettes de soleil de Karima pour éviter ça, malgré tout l'amusement que ça lui a procuré. Il n'est juste pas fait pour les projecteurs, et ça lui va très bien comme ça. Ce n'est pas du tout de quoi il a l'habitude, mais ce n'est pas ça qui va l'impressionner, il est là pour boxer et gagner, pas pour faire du tourisme.
Ugo a repéré la piscine de l'hôtel, et il ne s'y glisse qu'à la nuit tombée, deux jours avant le combat. C'est mieux quand il n'y a personne, et quand il peut être seul avec lui-même pour se poser et réfléchir au chemin de vie qu'il a pris, à toutes les conséquences possibles de ce combat.
Il est tout seul, au fond de la piscine à donner des coups dans l'eau, pour essayer de laisser la pression repartir seule loin des profondeurs, pour essayer de voir si son cardio tient toujours le rythme. C'est en remontant à la surface, quand il n'y a plus une seule trace d'air dans ses poumons, qu'il se rend compte que les lumières sont allumées, et qu'il y a quelqu'un l'attendant au bord de la piscine.
S'il n'avait pas reconnu les cheveux blonds de Freddy, Ugo aurait pu penser que le gardien de nuit voulait l'engueuler pour avoir outrepassé la sécurité. À la place, il y a bel et bien son coach, et il n'a pas l'air d'avoir très envie de faire trempette.
"Tu voulais te noyer avant le combat pour rendre l'histoire tragique et avoir un film à ton nom ?"
"Pas sûr que mon nom fasse vendre sur une affiche de cinéma."
Ils échangent un sourire, et après, Freddy l'aide à sortir de là, en passant rapidement une serviette autour de ses épaules. Ugo est presque obligé de se demander ce qu'il serait sans lui, mais il ne le dira jamais à voix haute. C'est vraiment dans ce genre de moments qu'il se dit qu'il est heureux d'avoir Freddy comme entraîneur, même s'il lui a caché trop de choses par le passé.
Freddy le raccompagne jusqu'à sa chambre, et même si ça aurait pu paraître bizarre de deux gars dans un couloir d'hôtel au beau milieu de la nuit, dont un seulement en short de bain et serviette autour des épaules, eh bien c'est agréable entre eux.
Enfin, il y a bien ce besoin croissant de demander à Freddy s'il croit vraiment en lui, s'il pense réellement qu'il peut gagner. Il a besoin de savoir si Freddy l'abandonnera, s'il perd. Il n'a plus envie d'être seul, et peut-être que c'est Freddy qui a lâché Dartois après sa première défaite. À la place, parce qu'aucun mot de ce qu'il pense vraiment ne veut sortir, il souhaite simplement une bonne nuit à son coach. Il s'en veut évidemment d'être aussi peu courageux, mais c'est sûrement mieux d'avoir une bonne relation avec l'homme qui lui soufflera quoi faire sur le ring.
Autant dire que la veille du combat, il n'est pas exactement en confiance. Il y a toujours la peur des blessures sévères avant les combats, de prendre le coup de trop et de devoir tout arrêter, d'être handicapé à vie, de ne plus jamais rouvrir les yeux.
Ugo est plutôt heureux de ne pas avoir à répondre à trop de questions pendant la conférence de presse d'avant match, comme d'habitude c'est Freddy qui se charge de la plus grosse partie du travail, pour qu'il se concentre uniquement sur le combat. Ugo ne rate pas le regard noir et perçant de Dartois sur lui. Il ne va pas falloir être déstabilisé par ces yeux implacables quand il sera sur le ring.
C'est au seul moment de la journée où il ne suit pas Freddy à moins d'un mètre qu'il se retrouve en face à face avec ce même regard illisible. Et comme prévu, il a le droit à un beau discours sur l'adversité dans la boxe, mais surtout sur le fait que ça ne lui ferait pas de mal de s'entraîner avec le meilleur. Cette fois, par rapport au restaurant, il trouve le courage de renoncer à tout ça par lui-même. Peut-être qu'il le regrettera, mais Ugo ne veut pas trahir Freddy.
Ce n'est pas la nuit la plus tranquille de sa vie, il y a plutôt l'inverse qui lui vient en tête pendant qu'il regarde le plafond de sa chambre. Le sommeil ne vient pas tout de suite, il a le temps de voir quelques heures défiler avant de réussir à fermer les yeux...
Quand il se réveille, il y a Freddy prêt à le sortir du lit par la force s'il ne vient pas lui ouvrir. Réveil compliqué, et l'angoisse monte directement. Jamais un entraînement n'a été aussi stressant, et il ne parle même pas des regards tout aussi inquiets que lui. Ugo est censé gagner, mais il a quelques doutes là-dessus...
C'est quand il se retrouve dans les vestiaires qu'Ugo sent vraiment pourquoi il ne doit pas se planter. Comme l'a dit Freddy, c'est le plus grand jour de sa vie, et il ne doit pas le gâcher. Ses jambes tremblent d'elles-mêmes pendant que l'arbitre lui rappelle les règles, s'il savait qu'il pense complètement à autre chose... C'est peut-être la première fois qu'il y a autant de monde dans les vestiaires, et pourtant il ne s'est jamais senti aussi seul avant un combat. Ugo n'arrive même pas à imaginer ce que ce sera sur le ring.
Il y a les mains de Freddy sur ses joues avant qu'il n'ait le temps de paniquer. C'est surprenant, mais il n'a jamais autant eu besoin de ses discours de motivation et de ses blagues presque drôles.
Et le regard énigmatique est de retour sur lui quand il est en face de lui, au milieu du ring. C'est le grand jour, pour lui montrer qu'il peut être quelqu'un sans avoir besoin de traîner avec le numéro un. Ils tapent dans les gants l'un de l'autre, et la prochaine chose dont il est sûr, c'est qu'il n'est pas du tout seul dans ce choc, la voix de Freddy résonnant dans ses tympans pendant qu'il maintient sa garde et essaie de trouver la bonne occasion pour commencer à attaquer.
C'est sûr qu'il ne partait pas favori, et encore moins en sachant que s'il y a une égalité à la fin du combat, ça jouerait contre lui au niveau des points, mais il ne compte pas descendre de ce ring avant le dernier round. Ugo a vraiment l'impression de faire face à une machine, mais il sait aussi très bien qu'il peut encaisser les coups quitte à se faire briser les côtes une nouvelle fois. Il n'abandonnera pas avant le dernier son de cloche, avant de ne plus pouvoir se relever.
Comme pendant le tournoi amical, il encaisse plus de coups qu'il n'en donne, mais ce n'est pas le sang qui coule le long de son visage qui compte pour le moment, parce qu'il tient toujours debout.
Si on lui avait dit qu'il tiendrait aussi longtemps avec les côtes en feu et le visage cassé... Au début, Freddy lui disait d'attendre jusqu'à huit avant de se relever, pour reprendre son souffle et décourager Dartois, maintenant, Ugo attend jusqu'à huit parce que pendant les sept autres secondes, il ne peut plus bouger. Dans tous les cas, il finit toujours par se relever.
Ugo doit savoir encaisser les coups pour les redonner. Enchaînement dans ses côtes, déjà bien fragiles et prêtes à céder, mais Ugo n'abandonne pas et profite d'une occasion en or pour asséner son plus bel uppercut droit dans le menton de Dartois. C'est à ce moment que retentit la cloche, et que la fin du onzième round prend place.
Encore un round pour l'envoyer au tapis, sinon il perd sur les notes. Freddy est à ses côtés pendant que son visage se fait soigner du mieux possible. Ugo sait qu'il peut tenir ce dernier round, même s'il chancelle quand il se remet debout. Peut-être qu'il ne peut pas gagner, mais il peut tenir jusqu'au coup de cloche final. Freddy a l'air plus qu'inquiet pour ses côtes, mais il ne veut pas d'un abandon.
Il ne tient pas debout parce qu'il a envie de retourner se faire casser la gueule, il tient debout pour prouver qu'il mérite de faire partie des meilleurs du pays. Il tient debout au dernier son de cloche, malgré les coups qu'il s'est encore pris, malgré les coups qu'il a réussi à asséner pour faire faillir son adversaire, même s'il ne gagne pas, même s'il peut à peine voir clairement ce qu'il y a en face de lui, même s'il s'écroule presque dans les bras de Freddy en essayant de respirer correctement...
"Si je me bats, tu te bats."
Il y a une main dans ses cheveux trempés de sueur, et il n'entend que les mots de Freddy avant de s'évanouir...
Le réveil est moins clair, parce qu'il n'est pas sur un ring, et il n'y a pas ses gants autour de ses phalanges abîmées. Ugo a l'impression d'avoir déjà vécu ça, et la perfusion lui dit vaguement quelque chose. Encore là à cause des côtes, sans aucun doute. S'il n'y avait pas Freddy endormi dans une chaise à côté de son lit, il aurait pu croire qu'il était revenu quelques mois plus tôt.
Freddy finit par se réveiller quand il lui touche la main, et Ugo n'est pas sûr de vouloir vraiment savoir ce qui s'est passé après la fin du combat, mais il n'aime pas ne pas être au courant des choses qui le concernent. Le sourire de Freddy est agréable, même si son oeil bien touché voit flou.
9-1 alors, mais au moins Freddy est toujours là, à ses côtés, il ne l'a pas abandonné... Ses doigts restent entrelacés avec ceux de son coach, et ça lui va très bien de ne pas faire plus pendant toutes les heures qu'il passe à refaire des examens et des radios. Retour à la case départ, mais cette fois, les liens entre Freddy et lui se sont encore renforcés...
FIN
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