Le pas léger, Alexei arriva devant l'école de son petit-frère. Depuis la décision du conseil de famille, il flottait sur un petit nuage de bonheur. Il n'avait pas cherché à savoir pourquoi ils avaient choisi de changer d'avis et de lui accorder la tutelle de Nicolas sans condition. Il préférait se dire que c'était parce qu'ils avaient constaté que le jeune garçon se sentait vraiment bien avec eux et que ce serait contraire à son intérêt de les séparer.

Il sourit légèrement quand le jeune blond le rejoignit, une petite carte à la main. Il lui expliqua joyeusement qu'une certaine Agathe l'avait invité à son anniversaire ce week-end. Le mannequin sourit doucement. Il avait beaucoup entendu parler de la jeune amie de son frère, il avait hâte de la rencontrer. En y repensant, il ne lui avait jamais demandé s'il pouvait inviter des amis à la maison. Il n'osait sûrement pas le faire. Il se fit la remarque d'en discuter avec lui à un moment. Alors qu'il allait rentrer chez lui, une jeune femme l'interpella, tenant par la mains deux petites filles brunes. L'une d'elles semblait avoir l'âge de Nicolas et l'autre devait être un peu plus jeune. Il pencha la tête sur le côté en s'arrêtant, attendant qu'elle se présente.

— Je suis Stéphanie, la maman de Agathe. Vous devez être le tuteur de Nicolas, c'est ça ?

— Oui, je suis Alexei, son grand-frère.

— Je m'en serais doutée, vous vous ressemblez beaucoup !

Alexei se retint de lever les yeux au ciel. Est-ce qu'il était vraiment obligé de supporter les mêmes banalités avec tous les parents ? Il se força à remercier poliment la mère de famille avant de lui demander ce qu'elle voulait.

— Oh ! Je voulais savoir si Agathe avait donné son invitation à Nicolas ? Et si vous saviez s'il pouvait venir ?

— Ah, oui, il vient de m'en parler. Il devrait pouvoir venir, répondit-il en souriant poliment.

— Fantastique ! Je vous vois samedi après-midi, alors ! Il y a mon numéro sur l'invitation si jamais vous avez besoin de renseignement.

— Parfait, à samedi.

La mère s'éloigna en les saluant avec un grand sourire et Alexei recommença à respirer un peu plus librement. Les parents d'élèves étaient vraiment sa hantise, à tout moment il avait l'impression qu'ils allaient lui sauter dessus pour lui demander de garder leurs enfants ou de ramener des gâteaux pour l'anniversaire d'un tel ou d'un tel. Il demanda le carton d'invitation à son petit-frère pour enregistrer dès maintenant le numéro de Stéphanie et le prendre en photo au cas où il se perdrait quelque part dans la maison. Ils rentrèrent tranquillement en discutant de la journée de l'enfant et de l'anniversaire, auquel il avait apparemment hâte d'être.

En poussant la porte de la maison, Alexei fut heureux de retrouver son mari. Ce dernier s'était libéré un peu plus tôt et avait préparé le goûter en attendant qu'ils rentrent de l'école. Aussitôt, Nicolas s'empressa de lui raconter sa journée et de lui parler de Agathe. Le blond sourit doucement. C'était attendrissant de voir la complicité qu'il y avait entre eux. Il se servit un verre de jus d'orange et le sirota tranquillement, triant le courrier sur la table de la cuisine en les écoutant discuter. Une enveloppe attira son attention. Seul son prénom était inscrit dessus, elle n'avait aucun timbre et pas non plus l'adresse de l'expéditeur. Il fronça les sourcils. Ce n'était pas normal. Il savait que ça pouvait arriver dans son métier de recevoir ce genre de courrier, mais il faisait tout pour être discret sur l'endroit où il vivait. Il déglutit légèrement et se tourna vers Christian. Ce dernier capta son regard paniqué et demanda à son beau-frère d'aller faire ses devoirs maintenant qu'il avait englouti son goûter. Nicolas hocha la tête et fila dans sa chambre, laissant les deux adultes seuls dans la pièce.

— Qu'est-ce qui se passe ?

— Il y a une lettre bizarre. Je crois que quelqu'un a trouvé où j'habitais.

— Tu as reçu des messages étranges dernièrement, lui demanda le châtain en lui faisant signe de s'asseoir près de lui.

— J'en reçois tous les jours, Chris', c'est comme ça quand on est sur les réseaux sociaux. Mais pas qui laissent penser que quelqu'un... pouvait venir jusqu'ici.

— Sérieusement, c'est pas normal que vous ne soyez pas un peu plus protégé.

Alexei haussa les épaules. Il avait fini par prendre l'habitude. Les réseaux sociaux n'étaient pas sains, surtout quand on s'assumait pleinement dessus. Alors il avait pris l'habitude d'ignorer les commentaires négatifs et les insultes pour ne se concentrer que sur le positif. Il prit place sur la chaise près de son dominant en lui tendant l'enveloppe. Christian comprit la demande implicite et l'ouvrit à sa place avant d'en sortir le contenu. Ils découvrirent avec surprise qu'elle contenait plusieurs pages du magazine du club où Alexei posait. Sur chacune, Christian se trouvait avec lui, mais son visage avait été gribouillé au feutre rouge. Il n'y avait rien d'autre. Pas de mot, pas d'explication.

Même s'il lui était arrivé de partager quelques photos du magazine sur ses réseaux, Alexei n'y avait jamais mis celles où Christian apparaissait. Il tenait à garder sa vie privée, privée. Il prenait toujours soin de ne pas montrer où il vivait, de ne pas montrer qu'il était marié, de ne pas montrer son frère. Autrement dit, ces photos n'étaient accessibles qu'aux membres du club. Membres qui étaient soigneusement sélectionnés par Jean et Christian. Cela voulait-il dire qu'un des membres était jaloux de Christian ? Ça n'avait aucun sens. Pourquoi faire ça ? Alexei inspira, luttant contre la panique qui montait en lui. Il savait qu'il ne devait pas s'inquiéter pour Christian, mais il avait peur. Il n'y comprenait rien.

— Qu'est-ce que c'est que ce bordel, murmura-t-il en essayant de calmer ses mains tremblantes, qui a fait ça ?

— Je n'en sais rien, mais ça ne m'inspire rien de bon, lui répondit Christian en posant une main sur sa nuque, rien de bon du tout.