Chapitre 106

Je viens de me réveiller d'une nuit qui a été très longue pour moi, je n'ai pas arrêtée de réfléchir sur ce que Barry m'a dit. J'ai demandé à n'avoir aucune autre visite de la journée, y compris si c'est le roi, Camille ou ma mère, j'avais besoin d'être tranquille après ça. Je quitte mon lit l'esprit dans le brouillard, j'aimerais me souvenir, mais j'ai l'impression que c'est pour ça qu'il me protège. Si j'ai vécu des moments compliqués avec Gabriel, je comprends pourquoi je l'ai oublié et pourquoi ça ne me revient pas.

Je quitte mon lit, me sentant frustrée, je vais rapidement dans la salle de bains faire quelques soins, y compris sur une ou deux blessures qui en ont encore besoin, puis je quitte ma chambre, direction la chapelle de l'hôpital. Il y en a une pas loin, j'y vais quand je ne me sens pas bien, aujourd'hui j'en ai vraiment besoin. J'y arrive rapidement, la plus proche est dans l'aile royale, je vais m'installer sur un banc et je regarde mes mains, prenant de profondes inspirations en fermant les yeux.

Après quelques minutes de respiration profonde, je relève la tête pour regarder la croix, j'aimerais savoir qui ment autour de moi. Je déteste sentir mon esprit aussi embrouillé, sentir mon cœur tiraillé. Seule ma mémoire peut me dire qui se joue de moi et de mes sentiments, mais rien ne me revient. A chaque fois que je viens ici, j'espère qu'on m'aidera avec ma mémoire défaillante et à chaque fois, j'en ressors sans réponse, perdue.

Je sens de nouveau les larmes monter, elles coulent sans que je ne puisse faire quelque chose, ça devrait me soulager mais pas du tout. Je déteste ce doute que Barry a instauré en moi, je m'en veux toujours pour ce bébé perdu, pour l'accident... J'étais peut-être pauvre et transparente avant, mais je n'étais pas remplie de doutes.

Je regarde la bague que j'ai autour du cou, lisant l'inscription que Gabriel avait demandé à mettre, ''Pour mon cœur. Je t'aime. G''. Je n'arrive plus à savoir quelle réaction j'ai pu avoir en voyant ça, si j'étais touchée et heureuse ou inquiète parce qu'il aurait pu être violent. Je suis perdue.

Du bruit me fait tourner la tête, je vois que Gabriel arrive. Son sourire s'efface quand il voit mes larmes, il essaie de venir s'asseoir à côté de moi mais je m'écarte sans attendre.

-Jess...

-J'ai besoin d'être seule.

-Qu'est-ce qu'il se passe ? Tu ne m'as même pas dit bonjour.

-Il ne se passe rien. Je veux juste être seule.

-Mais pourquoi ? Hier tu étais bien pourtant. Est-ce que tu as souffert de ta rééducation hier, donc tu ne veux pas être dérangée aujourd'hui ?

-C'est ça. Maintenant, est-ce que je peux être tranquille ?

-Si c'est ce que tu veux. Je peux quand même rester, mais m'asseoir plus loin ?

Je suis agacée par sa question, je décide de me lever et quitter la chapelle, je ne serais pas tranquille ici. Gabriel ne me suit pas, heureusement. Je ne retourne pas dans ma chambre, je vais à un autre étage qui a une terrasse, j'ai besoin de prendre l'air.

Une fois dehors, je me dirige au bord de la terrasse et m'assois sur un des sièges installés après avoir pris un chocolat chaud, il fait quand même très froid en ce début novembre. Je regarde le ciel, il est gris, comme mon humeur. J'ai horreur de me sentir aussi perdue, je m'en veux d'être dans cet état. Je m'en veux de ne pas savoir qui croire entre Gabriel, Camille, ma mère et Barry. Quelqu'un ment et la seule façon de savoir qui c'est, c'est de retrouver ma mémoire.

Je reste un long moment sur la terrasse, je termine ma boissons puis je retourne à l'intérieur, allant voir quelqu'un que j'ai toujours refusé de voir : un psychologue. Il est déjà passé dans ma chambre, quelques jours après mon réveil, mais je ne lui ai jamais parlé, je n'avais pas envie de discuter de la fausse couche et des craintes que j'avais avec ma perte de mémoire. Je me dirige vers son bureau, la porte est entrouverte, je toque contre celle-ci. Il est présent, je peux entrer dans le bureau, chose que je fais.

-Oh, mademoiselle Roy ! Quelle surprise, dit-il en me voyant entrer. Vous souhaitez me parler ?

-Bonjour, oui, j'ai besoin de parler à quelqu'un de neutre. J'ai un problème.

-Fermez la porte et installez-vous, je vais essayer de vous aider comme je le peux.

Je vais m'installer sur le canapé, qui est très confortable, le médecin s'assoit sur le fauteuil en face.

-Alors, je vous écoute. Que se passe-t-il en ce moment ?

-Je suis en prise avec de gros doutes sur l'homme avec qui je vivais avant l'accident. J'ai... entendu des choses sur lui, et je crains m'être fait une mauvaise idée sur lui.

-Quelqu'un est venu mettre la pagaille dans vos pensées ? Cette personne a profité de votre amnésie ?

-C'est ça, et je ne sais plus qui croire. Ma mère, celle qui est censée être ma meilleure amie, l'homme que je suis censée épouser ou encore un inconnu que je ne connaissais pas encore hier matin.

-Qu'est-ce que votre cœur vous dit ?

-Mon cœur est perdu, tout comme mon esprit. Je commence à croire l'homme que j'ai vu hier, je ne vois pas pourquoi il m'aurait menti.

-Par jalousie, si vous lui plaisez, votre choix d'épouser le roi n'a pas du être simple à gérer.

-Je ne suis pas le genre de femme qui attire beaucoup. Dans les derniers souvenirs qui me reste, je n'avais pas de copain, je n'avais jamais embrassé un seul homme de toute ma vie, je me consacrais au travail et c'est tout.

-Et après, vous avez travaillé dans un palais où vous avez rencontré beaucoup de monde. Vous êtes sortie de ce carcan, encore plus en habitant là-bas directement. Il me semble, de ce que j'ai vu de votre dossier et en discutant avec d'autres personnes dont je tairais les noms...

-Ma mère, Camille et Gabriel, je ne serais pas surprise que ce soit eux.

-Dont je tairais les noms donc, que vous vous êtes libérée là-bas. Vous êtes passée d'une femme sans histoire, faisant le travail demandé, sans trop de contact, à une femme plus ouverte, toujours aussi travailleuse mais avec aussi des envies d'amitiés, de contact, d'amour. Vous vouliez connaitre la vie que vous ratiez en étant renfermée sur vous-même.

-Mais ça me semble tout de même improbable que deux hommes aient craqué sur moi en même temps. Déjà avec Gabriel j'ai du mal à y croire, que nous sommes fiancés.

-Pourtant c'est le cas et votre couple est adoré parce que sain.

-Sain mais nous nous disputions souvent apparemment.

-Ce n'est pas ce qu'il me dit. Sa Majesté a été à vos côtés chaque jour durant votre coma, il n'a pas l'attitude d'un homme avec qui vous vous disputiez souvent.

-Peut-être que l'accident et le coma long lui a fait prendre conscience des choses. D'après un de mes amis il voulait contrôler ma vie.

Le médecin lâche un petit rire, puis change de position sur son fauteuil.

-Vous savez qui avait le dernier mot sur vos soins pendant votre coma ?

-Lui, je suppose.

-C'était votre maman. Quand le roi s'est réveillé, il a tenu à ce que votre mère continue à prendre les décisions les plus compliqués. Sauf si votre état s'était aggravé lourdement, chaque examen, chaque prise de sang, chaque petites choses que les médecins voulaient faire, c'est votre mère qui le décidait, à chaque fois, parce que selon lui, elle était la seule vraiment apte à prendre les décisions. Lui n'aurait laissé personne vous toucher.

-Vous voyez, il aurait contrôlé ma vie et même ma survie !

-Il est amoureux, son jugement est altéré. S'il a laissé votre mère choisir, c'est parce qu'elle connait vos volontés.

-Lui aussi est censé les connaître. On a bien du en parler.

-Parler des volontés médicales et même des dernières volontés, ça n'a rien de simple dans un couple. Votre maman a été malade, a faillit y passer avec le cancer, parler de l'hospitalisation et de la mort c'était plus simple puisque vous y étiez confrontés.

-Mmm...

Je hausse les épaules, ce n'est pas bête ce qu'il dit, mais j'ai du mal à y croire.

-Jessica, puis-je vous proposer quelque chose ? Vous avez le droit de refuser.

-Quoi donc ?

-Je suis psychologue, mais j'ai également une formation dans l'hypnose. En général, je propose ce genre de séance à des patients qui ont subi quelque chose de compliqué et ont oublié le traumatisme ou qui n'osent pas s'exprimer, mais je pense que ça pourrait également vous aider à retrouver la mémoire. Vous trouverez ce qui vous bloque et vous pourrez découvrir qui dit la vérité entre votre ami et votre fiancé.

-Je ne sais pas si c'est une bonne idée.

-C'est une simple proposition, vous n'avez pas à accepter ou refuser maintenant. Je vous laisse le temps d'y réfléchir. Mon bureau sera toujours ouvert pour vous.

-Merci.

Je me lève, ce petit entretien m'a encore perdu, mais je sais que j'ai une solution potentielle avec lui. Je salue le médecin et quitte son bureau, direction ma chambre et le confort de mon fauteuil sur lequel je risque de passer la journée.

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