⛧│ 8. Découverte macabre
𝅘𝅥𝅮 Halsey - Nightmare
Daisy
— Daisy, s'il te plaît ! me lance Frédéric en s'élançant derrière moi.
Mais je l'ignore et poursuis ma route dans les couloirs déserts du lycée avec la détermination qui claque dans chacun de mes pas. Comme Nick l'a fait quelques minutes plus tôt.
J'aurais dû partir en même temps que lui.
— Foutez-moi la paix !
Je n'ai pas cru à son histoire de sorcière. Personne ne l'a cru, excepté Steven, ce gamin trop naïf qui n'a rien connu de la cruauté de ce monde. Des démons, j'en ai déjà côtoyé dans mon existence et contrairement à ce que racontent les légendes urbaines, ils ont une apparence bel et bien humaine. L'un d'entre eux ne cesse de souiller chaque seconde de mon existence en obsédant mon esprit sans relâche. J'ai croisé sa route à l'époque où j'étais une jeune femme vulnérable. J'ai cru qu'il me tendrait la main pour m'extirper des profondeurs abyssales dans lesquelles je m'étais englué. Il m'a entraîné dans les méandres les plus sombres, alors que je croyais avoir touché le fond absolu de mon désespoir avant notre rencontre. Par sa faute, je suis devenue dépendante. Par sa faute, je me retrouve à lutter contre un autre fantôme qui refuse me quitter.
Tandis que la voix de Frédéric continue de résonner dans le vide, mon pied trébuche sur un objet non identifié, et mon corps bascule dans le vide avant de s'écraser lourdement sur le carrelage. Une mer de confusion m'engloutit lorsque je sens le contact glissant et visqueux d'une texture inconnue sur mes mains.
Bordel, mais qu'est-ce qui traîne parterre ?
Au moment où je me relève, les lumières éclairent le couloir qui était plongé dans la pénombre jusqu'à présent et mon regard s'abaisse sur l'objet de ma chute. Je me raidis et me décompose. J'ai l'impression que mes jambes sont coupées. Devant la vision qui s'offre à moi, je libère un cri de terreur d'une puissance insoupçonnée. Mon cœur s'emballe dans une cadence effrénée, ma sérénité se brise en mille éclats. L'horreur s'imprime à l'intérieur de mes rétines pour empêcher mon cerveau de l'oublier. Une angoisse profonde me tenaille les os, jusqu'à mes vertèbres, et je me sens déstabilisé, comme si je perdais prise sur la réalité.
— Daisy, qu'est-ce que...
— Oh la vache !
D'autres voix s'élèvent dans le couloir. J'ignore qui m'a rejointe, qui hurle avec moi. Je ne peux détacher mon regard du cadavre mutilé qui gît devant moi, du sang qui a maculé le sol de ses teintes écarlates. Face à cette scène d'une atrocité inouïe, je demeure incapable de trancher entre l'horreur d'un corps éviscéré et celle d'un tronc décapité.
Je me tais à l'instant où Frédéric encadre mon visage entre les paumes de ses mains. Ses prunelles couleur de noisette se plongent dans les miennes, et je discerne dans son regard une terreur aussi vive que la mienne. Il parvient cependant à se contenir.
— Daisy, arrête de crier. Je sais que c'est juste épouvantable, mais écoute-moi.
Son souffle haletant s'écrase contre mon visage. Mon corps est secoué de tremblements. Il me soustrait délicatement à la vue du cadavre, me ramenant ainsi auprès de mes compagnons, dont les visages blêmes trahissent une même terreur.
— Polly, Marty et Steven, vous fichez le camp, si on vous découvre ici alors que vous n'êtes pas supposés être présent, vous et moi, on risquera de gros problèmes. Je vais appeler la police et ils nous découvriront, toi et moi. D'accord ?
Des larmes perlent à mes paupières, je ne peux supporter davantage cet endroit. Je veux rentrer chez moi. Je veux quitter cette île, partir loin d'ici.
— Pourquoi ? je demande d'une voix étouffée.
— Tu es tombée sur ce type, son sang. Tes traces sont là. On inventera une excuse pour expliquer ta présence. Mais je resterai avec toi.
Je désire goûter à la douceur apaisante de ses paroles, mais la terreur qui gronde en moi avec une intensité sauvage s'y oppose. L'effroi m'aveugle et bride mes autres sens. Frédéric se retourne vers les trois autres en fouillant dans la poche de son pantalon.
— Fichez le camp et ne parlez à personne de ça.
Sans un mot, ils déguerpissent le plancher. Me voilà seule avec Frédéric qui est tout aussi effaré que moi. Alors que je ne peux plus retenir les larmes, je constate ses doigts tremblants qui composent le numéro d'urgence. Je suis peut-être privée de la moindre réaction, mais une question tourne en boucle dans mon esprit.
Qu'ai-je fait pour me retrouver dans un tel merdier ?
— Mademoiselle Wood.
Je hisse mon regard vers l'homme en uniforme posté devant moi. Il s'agenouille afin d'être à ma hauteur. Ses yeux bleus me sondent avec une délicatesse à laquelle j'aimerais y être sensible. Pourtant, aucune once de sentiment ne parvient à me toucher.
— J'aimerais prendre votre témoignage pour les besoins de l'enquête.
Je referme délicatement les paupières pour plonger dans l'obscurité. Or, la vision indélébile du corps éventré et décapité me force à les rouvrir rapidement. Mon cœur bat toujours la chamade. Mon esprit demeure trop bouleversé par cette découverte. J'aimerais ne pas répondre, me tirer loin d'ici et oublier cet épisode. Malheureusement, la présence de l'agent m'oblige à affronter cette étape. Je déglutis ma peur et me remémore les paroles de Frédéric peu avant l'arrivée de la police.
— Je... Je venais rendre visite à Frédéric... On avait rendez-vous dans sa salle de classe et je... Je suis tombée sur... sur...
Je me raidis, incapable d'achever ma phrase.
— Vous êtes professeur au lycée ou étudiante ?
Je secoue la tête, ce qui provoque la confusion de l'agent. Mon cœur se serre d'appréhension.
— Alors qu'est-ce que vous faisiez dans le bâtiment scolaire à cette heure-ci ?
Les paroles de Frédéric tournent en boucle dans mon esprit afin que je ne les oublie pas. Je les répète alors mot pour mot.
— On avait rendez-vous, car nous sommes... vous voyez, amants.
J'avale de nouveau avec peine, priant pour que cet homme se laisse tromper par mon mensonge. Je porte mon regard sur Frédéric, qui, à quelques mètres de distance, est interrogé et profère les mêmes propos que les miens.
— Y avait-il d'autres personnes à part vous d'eux dans le bâtiment, mademoiselle Wood ?
Si l'on venait à découvrir la trace de ces trois autres, cela mettrait en péril nos témoignages et tous les soupçons se concentreraient sur nous tous.
— Non.
Polly
— Steven, écoute-moi !
Mon frère s'arrête, alors que notre maison se dresse à quelques mètres devant nous. Nos souffles haletants se heurtent dans une danse désordonnée, alors que nos regards se croisent, lourds de terreur et de désespoir. Pour lui, c'est la première fois qu'il assiste à ce genre de scène, mais pour moi, c'est le retour au cauchemar que je pensais avoir laissé derrière moi.
— On ne dit rien à papa.
Il bat des paupières avant de me dévisager avec stupéfaction.
— Comment ça on ne lui dit rien ? Polly, tu as vu comme moi ce corps...
Je plaque ma main contre sa bouche pour le réduire au silence, avant qu'il n'alerte le quartier entier. Je me rapproche davantage de lui.
— Chut ! Comme monsieur Spencer l'a dit, on n'était pas supposé être au lycée. Lui et Daisy nous ont couverts. Alors si papa découvre qu'on a découvert un corps sur le campus, on a des chances de se retrouver dans un beau merdier.
Je libère la bouche de Stev' qui se contente de hocher la tête. Il respire profondément pour se calmer et j'en fais de même.
— Qu'est-ce qu'on va dire à papa ?
— Qu'on était au skatepark.
Ses sourcils se froncent.
— Sans nos skates ? Je te rappelle que Sneiders a confisqué le mien.
Je me mords l'intérieur de la joue, serre des dents. Il a raison.
— On traînait dehors.
Il approuve d'un hochement de tête. Au moment où je m'apprête à reprendre la route, mon jumeau m'interrompt en m'attrapant le bras.
— Tu crois qu'ils nous ont vus ?
L'inquiétude luit dans le fond de ses iris bleus. Et je dois reconnaître que ce même sentiment bat dans mes veines. Mais je n'en montre rien. Pour Steven, j'arbore un air impénétrable afin de demeurer cette figure sur laquelle mon frère peut compter. Comme ça a toujours été le cas.
— Je ne le pense pas.
Je n'espère pas que les flics se sont aperçus de notre présence, derrière les buissons, alors qu'ils ont découvert la scène de crime et ont interrogé Daisy et monsieur Spencer. La curiosité nous a poussés à demeurer sur les lieux, alors qu'on avait conscience du risque que l'on prenait. Or, mes mots ne parviennent pas à apaiser la peur chez mon frère.
— Qu'est-ce qu'ils ont voulu dire par « c'est le deuxième corps » ?
Mon souffle se bloque dans ma gorge. Lui aussi a entendu l'un des agents prononcer ces mots effroyables qui ne signifient qu'une chose : quelqu'un d'autre est mort et personne n'a rien su. Aucun signalement de disparition parmi les habitants de la ville, aucun enterrement n'a eu lieu. Le dernier date de dix mois plus tôt, pour le grand-père de Nathan.
Je lui réponds d'un haussement d'épaules, alors qu'intérieurement, je prie pour que ce ne soit pas le début d'une nouvelle vague de meurtres qui s'abat sur Mallory West. J'ai déjà vécu un cauchemar semblable à celui-là, je refuse d'en revivre un autre.
Alors qu'on s'apprête à rentrer chez nous, je m'arrête et laisse la stupeur me frapper quand mon regard se pose comme à son habitude sur la maison voisine. La surprise qui m'envahit me parcourt l'épiderme de frissons déplaisants. Je me suis accoutumé à observer cette résidence désertée, nourrissant en mon for intérieur un espoir vain et mal fondé de la voir revivre. Qu'elle soit habitée par lui.
Et voilà que je découvre par les fenêtres que quelques pièces sont éclairées.
Je surprends l'espoir se gonfler dans ma poitrine et se répandre dans mes veines. Je demeure immobile et examine chaque fenêtre, prête à voir des silhouettes se déplacer d'une pièce à l'autre. Mais il n'y a rien.
— Viens, Polly.
Steven enroule son bras derrière mes épaules et m'attire contre lui. Lui aussi a remarqué que cette maison est de nouveau habitée. Mais désire-t-il la même chose que moi, ce souhait que je n'avouerai jamais à voix haute ? Je l'ignore. Alors je ravale mes espérances et mes interrogations et me prépare à chasser tous ces épisodes qui ont remué ma journée pour affronter mon père.
Je me laisse tomber sur le matelas en laissant un soupir s'échapper de ma poitrine. Papa a cru à notre histoire de balade dans la ville et n'a rien demandé de plus. Voilà un problème en moins. Malgré tout, mon cerveau ne peut s'empêcher de brasser les souvenirs de cette journée. Il dévie vers une personne en particulier.
McFly.
Je peux encore ressentir le choc qui m'a transpercé lorsque je l'ai reconnu dans son uniforme de barman. Dans un instant de suspension hors du temps, mon cœur a cessé de battre. J'ai plongé dans l'océan de ses iris bleus, jusqu'à me perdre dans les souvenirs que nous partageons. Ces souvenirs que je n'ai jamais pu effacer de ma mémoire, même avec toute la volonté du monde. Ces souvenirs qui ont gagné en intensité à l'instant où mes yeux vairons se sont posés sur ce corps méconnaissable.
Marty a-t-il été, comme moi, happé par les ténèbres du passé lorsqu'il l'a découvert ? Est-ce que durant tout ce temps, a-t-il pensé à moi, comme j'ai été incapable de l'effacer de mon esprit ? Devant l'amertume de ces réflexions, mon cœur se serre et les larmes montent à mes yeux. Je retiens un sanglot dans ma gorge étreinte par la douleur.
Afin de reprendre le contrôle de mes esprits, je me redresse, puis bannis les sombres ruminations qui m'ont plongé dans un état de désolation. Et comme à ce qui est devenu une habitude, mon regard dévie en direction de la fenêtre de ma chambre qui me donne vue à la maison voisine. La maison abandonnée.
Or, mon souffle déserte mes poumons à l'instant où je reconnais cette silhouette familière qui me ramène une année plus tôt. Il est réellement de retour.
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• Hey beautiful people ! 🤗
Ouuuh, mais il se passe des choses intéressantes par ici ! •
•......•
• Votre avis sur ce chapitre ?
• Sur ce cadavre retrouvé au lycée ?
• Mais qui est le premier corps retrouvé ?
• Mais qui a emménagé dans la maison face à celle de Polly ?
•......•
☆ Le prochain chapitre sera du PDV de Daisy ☆
Kissouilles !
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