⛧│ 7. Au complet
𝅘𝅥𝅮 Don Henley - Dirty Laundry
Marty
Mon cœur se serre, tandis que les ombres du passé qui s'apprêtent à m'aspirer me narguent. Je défie cette désagréable sensation qui s'intensifie et prend possession de mon être. Ça n'est plus là. Ça a disparu. On l'a vaincu. Elle et moi.
— Je peux savoir ce que vous espérez trouver ici et pourquoi vous avez tenu à ce que je vous accompagne ?
Je me mords la lèvre inférieure quand j'entends ma voix chanceler, aussi fragile qu'un souffle. Et ça, Grincheux l'a constaté. Oh, bien sûr qu'elle l'a remarqué. Si bien qu'elle se tourne vers moi et avec un sourcil arqué, plonge son regard dans le mien. Je discerne la lueur malicieuse qui brille dans ses iris vairons. Ce scintillement qui m'est destiné.
— Qu'est-ce qu'il y a, McFly, on a peur de se retrouver ici ? rétorque-t-elle d'une voix moqueuse.
Je serre des dents. Elle se plaît à me provoquer, cette peste ! Je compte bien lui rendre ses attaques. Or, la vengeance est un plat qui se mange froid. Je dois dompter mon impatience, guetter l'instant propice pour surgir, au moment où elle s'y attendra le moins.
— Absolument pas ! Je ne comprends pas pourquoi vous avez besoin de moi ici.
Grincheux me répond d'un ricanement que j'interprète comme une nouvelle attaque.
— Vous allez arrêter vos chamailleries ? On dirait des enfants ! s'agace Steven en se tournant vers nous.
Je le dévisage en silence, surpris de le voir dans un état irrité. Ce n'est plus le type collant et joviale que j'ai connu l'année passée. Que s'est-il passé pour qu'il ait changé de la sorte ? Le grincement sinistre du parquet me fait tressaillir, me révélant ainsi la présence d'une autre personne. Mon regard, comme aimanté, se dirige vers les profondeurs de la bibliothèque, où je distingue un jeune homme aux longs cheveux flottant jusqu'à ses épaules.
— S'il vous plaît, est-il possible de chuchoter ? Car le volume de vos voix est trop fort et dérange les autres qui aimeraient...
Je laisse mon regard promener autour de moi et réalise qu'il n'y a personne d'autre que nous. Et ce type doit l'avoir également compris puisque le silence l'engloutit. Cependant, au moment où il entrouvre ses lèvres, la porte d'entrée s'ouvre derrière nous. En me retournant, je découvre l'apparition de la nouvelle copine de Grincheux et de Steven. Sa chevelure flamboyante s'épanouit en une cascade éparse et indomptable.
— Désolée, j'étais dehors pour... Un truc, explique-t-elle d'une voix rauque.
Elle renifle avant de s'essuyer le nez d'un revers de main. Il ne faut pas avoir un diplôme en médecine pour comprendre qu'elle est restée à l'extérieur pour consommer je ne sais quelle cochonnerie. Elle ne tient pas compte du fait qu'elle est devenue le centre de l'attention de tous. Son attention est focalisée sur ce type qui l'observe également. Je réprime un soupir las et lève les yeux au ciel. Il manquerait plus qu'une musique romantique et on se croirait dans un film à l'eau de rose !
— C'est lui qu'on est venu chercher ? demande-t-elle en le désignant d'un mouvement flou.
Un pli se forme sur le front du jeune homme. À l'instant où l'éclairage de la bibliothèque s'éteint soudainement, mon cœur tressaillit avec une douleur sauvage. Une brise glaciale s'infiltre en moi, déclenchant des frissons d'horreur.
— Oh la vache ! Qu'est-ce que c'est ?
Je remarque la nouvelle copine de Grincheux qui se frotte les bras.
— On dirait que le courant est tombé en panne, lâche le jeune homme d'une voix mal assurée.
Ma mâchoire se serre. J'aimerais le croire. Oh, comme je veux le croire ! Une intuition profonde me souffle que cet événement ne concerne en rien l'électricité. Des frissons glacés s'emparent de ma personne, telle une marée de sueur mordante. Je m'efforce de maintenir ma domination sur les spasmes qui s'emparent de mon être. Personne ne doit savoir que j'ai peur. Personne ne doit le découvrir.
— Ce n'est pas le courant, c'est la Prophétie, déclare Steven d'un ton assuré.
Grincheux libère un râle tout en levant les yeux en l'air. Ne croit-elle réellement pas à cette histoire de Prophétie ou cherche-t-elle à convaincre les autres qu'elle n'y croit pas, alors qu'au fond d'elle, c'est tout le contraire ? Car avec ce que nous avons traversé, nous sommes les seuls à croire en des choses dépassant toutes croyances concevables. Et nous conservons tous deux un secret empoisonné qui nous consume à petit feu.
Une vague de soulagement m'envahit lorsque l'électricité daigne faire son retour, et que la tiédeur renaît dans l'atmosphère. J'étudie Grincheux, son frère et leur nouvelle copine, constate qu'ils reluquent l'autre type. Sans trop comprendre ce dont il s'agit, je les imite.
— Tu dois venir avec nous, annonce Steven.
Le jeune homme cligne des yeux et le dévisage.
— Qu'est-ce que tu as dit ?
— Tu dois venir avec nous.
Je constate un voile de méfiance passer dans les yeux verts du type.
— Aller où ?
Tiens, c'est justement la question que je me pose ! Où doit-on aller et pour quelle raison on récupère des gens ?
— Retrouvez quelqu'un qui expliquera mieux ce qui s'est passé.
Le type n'a pas le temps de répliquer que Steven lui attrape le bras.
— Ma sacoche ! s'écrie-t-il en tentant de se défaire de l'emprise de Steven.
Sans un mot, la copine de Grincheux s'élance vers le fond de la bibliothèque et revient avec ladite sacoche.
Ok, elle en pince pour lui.
Mais je conserve cette observation pour moi, jugeant que ce n'est ni le moment ni l'endroit pour la partager. Au moment de quitter la bibliothèque, je me heurte à Grincheux qui comptait franchir la sortie en même temps que moi. Malheureusement, le cadre de la porte n'est pas à assez large. Elle m'adresse seulement un regard sombre qui traduit ce qui se cache derrière son silence.
Entre elle et moi, c'est retour à la case départ.
Mon souffle est suspendu face à la vue imposante du bâtiment scolaire qui se dresse devant moi. Cette représentation tangible de la réalité me catapulte dans une ère révolue, emplie de souvenirs. Une ère qui m'inspire des frissons de malaise.
— Vous êtes certains qu'on est autorisé à entrer dans le lycée ? je demande en m'arrêtant pour contempler l'édifice avec une admiration malsaine.
Grincheux observe par-dessus son épaule et me sonde avec mesquinerie.
— Arrête de faire ta chochotte, McFly.
Le sang bouillonne avec force dans mes veines. Elle s'acharne à réduire en miettes ma capacité à me maîtriser, tel un ouragan qui emporte tout sur son passage. Or, je refuse de lui donner ce qu'elle désire. Après tout, comme elle l'a dit une fois, on n'a pas tout ce qu'on veut dans la vie.
— Je dis ça pour vous, pour éviter d'avoir des ennuis.
Elle vire complètement son visage vers le mien, penche sa tête de côté et simule un air ému.
— Oh, comme c'est mignon, McFly qui se soucie de nous.
— Au moins, j'ai le sens de l'empathie, contrairement à toi, Grincheux.
Aucun mot ne franchit ses lèvres, pourtant son regard s'enflamme d'une ferveur intense.
Touchée !
Je savoure intérieurement de ma petite victoire, tout en sachant qu'elle peut me répondre à n'importe quel moment.
À mon entrée dans les couloirs vides et familiers du lycée, un serrement douloureux étreint mon cœur. Tous mes sens demeurent en alerte. Si mes souvenirs sont bons, le concierge est supposé traîner dans les environs et pourrait débarquer à tout moment. Une averse de souvenirs s'abat sur mon esprit, troublant le rythme régulier de mon cœur. Ma première rencontre avec Grincheux, notre bourreau commun : Alex Rivers et sa bande, le proviseur Jareau. Ce funeste accident qui a marqué le début de ce cauchemar effroyable ayant laissé des traces indélébiles sur mon âme.
— Le concierge est toujours là ? je demande en chuchotant, tout en scrutant les environs.
Avec prestance et détermination, Grincheuse avance, les yeux rivés sur l'horizon.
— Ce n'est pas lui qu'il faut craindre. Plus maintenant, me répond-elle.
Le tourbillon de la confusion m'envahit.
— Sneiders a pris la relève du tyran, enchaîne Steven sans m'observer.
— Sneiders ? C'est qui ?
— Tu le saurais si tu n'avais pas disparu sans laisser la moindre trace.
La vache ! J'encaisse l'attaque de Grincheux. Face à l'absence de réponse adéquate, je préfère m'envelopper dans le manteau du silence et les suivre jusqu'à ce qu'ils pénètrent dans une salle de classe. Un sentiment de curiosité m'assaillit lorsque j'aperçois un enseignant, retranché derrière son bureau. Lorsqu'il relève la tête vers nous, un sourire de contentement se dessine sur ses traits.
Mais qu'est-ce qui se passe ? Qui est ce type ? Pourquoi on est venu le trouver ?
Cette obscure absence d'éclaircissement m'oppresse la poitrine. Je ne supporte plus ces questions qui assomment mon encéphale. Je veux des réponses !
— Ce sont...
— Les autres âmes, répond Steven avec une confiance qui me déconcerte.
Je dévisage tout le monde avec une confusion partagée.
— Mais c'est quoi cette histoire d'âmes ? Quelqu'un peut bien m'expliquer ?
— L'âme vient du latin, anima qui signifie souffle ou respiration. C'est un principe vital et à la fois spirituel qui anime le corps d'un être vivant, qu'il soit humain, animal ou même végétal. Il existe plusieurs représentations symboliques de l'âme, tout comme différentes croyances. Mais dans la croyance religieuse, la notion de l'âme possède une plus grande importance. En effet, quand une personne meurt, son âme quitte son corps et se dirige vers l'au-delà, explique le type de la bibliothèque d'un naturel inquiétant.
Un long silence s'ensuit durant lequel on le dévisage tous avec ahurissement. D'où sort-il toute cette théorie que je serais incapable de retenir ? Il se mord la lèvre et laisse apparaître un sentiment de gêne quand il constate qu'il est devenu le centre de l'attention.
— Comment tu t'appelles, jeune homme ? demande le professeur avec une lueur d'admiration qui scintille dans ses iris noisette.
— Nick Stewart, monsieur. Je suis... De passage ici.
— Et vous, qui êtes-vous ? je demande à l'enseignant, venu à bout de tout ce mystère.
Il déploie devant moi une main qu'il s'efforce d'imprégner d'une apparence amicale. Mais à cet instant, je suis dans l'incapacité de placer ma confiance en qui que ce soit.
— Frédéric Spencer, le nouveau professeur de psychologie du lycée. Et toi ?
Je marque une seconde d'hésitation avant de répondre :
— Marty.
Le dénommé Frédéric décèle mon manque de décision à l'égard de son offre de main, se résigne et nous contemple d'un regard muet.
— Bordel, vous allez finir par nous expliquer ce qu'on fout ici ? s'agace la copine de Grincheux.
Frédéric tourne son regard dans sa direction et lui demande son prénom.
— Mais qu'est-ce que ça peut vous faire de savoir comment je m'appelle ?
— Ça s'appelle de la politesse ! s'insurge Grincheux, contre toute attente.
Dans un échange de regards empreints d'une hostilité féroce, elles s'anéantissent mutuellement.
Finalement, elles ne sont pas si copines que ça.
Un ricanement incontrôlable s'échappe de mes lèvres, provoquant la fureur de ma rivale.
— En matière de politesse, tu es bien celle qui peut parler !
J'ai conscience de jouer dangereusement avec le feu et que je risque de me brûler à tout moment. Mais je me prends un plaisir interdit à m'amuser avec ses nerfs pour regretter mes mots. Elle entrouvre ses lèvres, prête à me balancer une série d'insultes sans doute bien méritée, mais Frédéric intervient en frappant dans ses mains.
— S'il vous plaît, j'aimerais éviter d'assister à un règlement de compte qui pourrait mal se terminer. On se calme et tout le monde prend place sur les chaises.
Dans un silence religieux, on s'exécute conscients de l'électricité statique qui flotte dans l'air. Personne n'a envie d'être présent dans cette salle, c'est un fait. Frédéric nous reluque un à un, dans un silence oppressant, puis s'arrête sur la blonde. Elle libère un râle.
— Si vous tenez vraiment à connaître mon prénom, c'est Daisy. Content ?
Le professeur hoche la tête.
— Si nous sommes tous présents ici, c'est pour une raison particulière.
Nous y voilà !
Mon esprit ne peut se détacher de cet individu, aussi énigmatique qu'inquiétant, qui retient toute mon attention. Que sait-il ? Que va-t-il faire de nous ? L'incertitude qui coule dans mes veines alimente l'accélération de mon rythme cardiaque.
— J'imagine que dernièrement, vous avez été témoin d'événements... Bizarre, n'est-ce pas ?
Nos regards s'entrechoquent, témoins d'une perplexité commune, avant de se poser de nouveau sur Frédéric, qui hésite sur la façon d'exprimer ce qui lui trottait dans l'esprit. Pour ma part, mon cauchemar a cessé dès l'instant où j'ai quitté cette ville un an plus tôt. Mais ce qui s'est passé au Café Marc's et dans cette bibliothèque a ranimé ce sentiment de peur que j'ai cru ne plus jamais ressentir. La peur d'avoir la Faucheuse de nouveau à ses trousses.
— Ces événements étranges et déroutants sont à l'origine de la Prophétie.
Une barre plie mon front. J'espère que cet homme nous donnera rapidement une explication plus claire, car je ne comprends absolument rien à son charabia.
— Il y a longtemps, cinq sorcières ont prédit que le mal sera éradiqué de cinq âmes. Les Âmes de la Prophétie. Elles seront choisies par cette divination et un formateur les accompagnera dans ce périple pour les guider. Je suis ce Formateur désigné et vous êtes ces cinq âmes désirées par la prophétie.
Mon œil glisse vers Steven qui engloutit ces propos comme un croyant s'abreuvant à la source de la parole divine. En reluquant Grincheux, son expression demeure toujours imperceptible. Or, je peux presque jurer ravaler ce sentiment de peur et d'inquiétude qui la submerge. La manière dont elle maîtrise difficilement les tremblements de sa mâchoire en est la preuve. Elle n'a parlé à personne de ce secret qui nous lie. Comme pour moi, ces épisodes représentent un fardeau que nous sommes contraints de traîner avec nous tels des boulets ligotés à nos chevilles.
— Ce qui s'est passé dans les bois, Daisy, c'est la Prophétie qui t'a choisie. Tout comme toi, Marty, enchaîne Steven avec un sérieux presque effrayant.
Je cligne des yeux.
— Une minute, vous êtes en train de nous dire que nous sommes des élus choisis par des sorcières pour combattre... Le Mal ?
Frédéric hoche la tête. C'est impossible ! Je dois être en train de rêver ou eux sont en train de délirer !
— C'est complètement absurde ! s'écrie Daisy en se relevant de sa chaise.
Nick en fait de même et se dirige vers la sortie, tandis qu'elle se poste face à la fenêtre.
— Où vas-tu, Nick ? l'interpelle Frédéric.
Il se retourne en se pinçant les lèvres.
— Désolé, mais je ne crois pas à ces histoires de sorcières. J'ai d'autres projets qui m'attendent et je compte tout mettre en œuvre pour ne rien gâcher.
Son regard se pose délicatement sur Daisy, qui, absorbée par la vue qu'offre la fenêtre, lui tourne le dos. Il demeure quelques secondes à l'observer ainsi, avant de finir par quitter la salle.
— Daisy, Polly, Marty, vous me croyez ? demande Frédéric en nous jetant un regard implorant.
Entre mes dents, ma lèvre inférieure s'offre en victime, comme pour apaiser l'agitation de mon esprit. Cette histoire est si surréaliste et pourtant, je suis presque tenté d'y croire. En vérité, confier mon passé à Frédéric pourrait ranimer des souvenirs que j'ai soigneusement enfouis, et ça, je m'y refuse absolument. Ce secret doit demeurer prisonnier dans ma boîte de Pandore et ne doit jamais être libéré.
Jamais.
☆______________________________☆
• Hey beautiful people ! 🤗
Mmmh il y a de l'électricité dans l'air ! •
•......•
• Votre avis sur ce chapitre ?
• Sur les punshlines entre les personnages ?
• Nick est la pièce manquante de ce puzzle ! Un avis sur lui ?
• Mais que va-t-il se passer pour la suite ?
•......•
☆ Le prochain chapitre sera du PDV de Daisy ☆
Kissouilles !
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