⛧│ 13. Tensions
𝅘𝅥𝅮 The Sisters Of Mercy - This Corrosion
Polly
Les bras rigoureusement croisés sur ma poitrine, je me tiens en marge de cette assemblée restreinte dans la salle de classe. Mon regard est rivé sur l'homme qui a été la cause de notre rassemblement en ce lieu. J'analyse chacun de ses mouvements qui alimentent la suspicion avec laquelle je le considère désormais. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que sa présence sur les lieux du drame n'est pas un hasard.
— Je suis soulagé que vous soyez venu, malgré ce que vous pensez de mon récit.
Mon regard s'élève avec lassitude vers le plafond. Il va encore tenter de nous retourner les méninges pour nous faire avaler son histoire à deux balles. Or, si Daisy et Nick sont tombés dans son piège, je compte rester campée sur mes positions. Ce qui est ironique à quelque part, si on se remémore les événements survenus l'année passée. Avec l'Angleterrien, nous sommes les deux seuls à être en mesure de croire à cette histoire de prophétie. Or, je m'y refuse.
Cette légende de sorcière est ridicule et complètement fausse.
Mon regard glisse jusqu'à l'Angleterrien qui demeure impassible. Sans l'ombre d'un doute, je discerne la frayeur qui s'est emparée de son être. Cette terreur qui me possède également. Une insondable hostilité réciproque nous éloigne irrémédiablement l'un de l'autre, et pourtant, une force mystérieuse et indéfinissable nous relie d'une façon étroite. Ce secret que nous avons conservé – pour ma part, en tout cas – pour nous.
— Certains d'entre vous ont changé d'avis à mon sujet et j'en suis bien soulagé. Et je crois que ce deuxième meurtre donne encore plus raison à ce que je vous ai raconté...
— Un deuxième meurtre ? s'étonne Nick, avec un rapprochement de sourcil. Celui-ci n'était donc pas le premier ?
Il me faut un court instant de recueillement pour me souvenir qu'il n'a pas été présent lorsque nous avons découvert la première dépouille. Il a déserté les lieux depuis longtemps. Un détail que Daisy ne tarde pas à lui confier. Je ne peux dissimuler mon sarcasme intérieur en voyant à quel point elle est près de lui. Elle en pince pour lui ! C'est aussi flagrant que ma rancune furieuse à l'encontre de McFly.
Cependant, il ne s'agit pas du deuxième meurtre, mais du troisième. L'échange entre les policiers me revient à l'esprit et le trouble avec acharnement. Est-ce un détail que je dois partager avec eux ? L'hésitation m'empêche de prendre la moindre décision. Car encore aujourd'hui, aucune disparition mystérieuse n'est à signaler, hormis la présence de cadavre découvert jusqu'à présent.
— Ceci est certainement le travail de la police, mais je doute qu'ils parviennent à trouver l'auteur de ces atrocités, déclare Frédéric.
Ces propos ne me plaisent guère. Ils nourrissent la crainte qui gronde sauvagement en moi. L'insaisissable sentiment de déjà-vu qui s'empare de mon âme me plonge dans une angoissante impression de frayeur, que je tente, tente de repousser.
— C'est peut-être vous, lâché-je contre toute attente.
Aussitôt, je deviens l'objet de tous les regards, pourtant cela m'indiffère. Je me dirige vers monsieur Spencer, possédé par le tourbillon de la confusion.
— C'est vrai. Après tout, vous étiez présent sur la scène de crime ce soir. Tout comme vous étiez au lycée, le soir où le premier meurtre a eu lieu et après notre départ, vous avez kidnappé Jakob.
Le visage du professeur blêmit. Parce que je l'ai percé à jour ou car il est outré de mes propos ? Je n'en ai pas la moindre idée. Pourtant, cela ne parvient pas à bouleverser ma croyance inébranlable, qui reste fermement ancrée en moi, quant à sa responsabilité dans ces meurtres terribles.
— Polly, tu entends ce que tu dis ?
— Parfaitement, monsieur Spencer. En revanche, je refuse d'entendre vos histoires de sorcières que vous nous racontez pour nous baratiner et dissimuler tout soupçon sur vous...
— Oh, la ferme !
Je demeure interdite et me fige à l'entente de cette voix féminine impromptue qui s'élève derrière moi. Je pourrais presque entendre McFly retenir son souffle face à cette attaque soudaine. Et j'aurais préféré que ça vienne de lui. Ça aurait été plus facile de le confronter, ça m'aurait fait un rival en moins à confronter. Malheureusement, je suis obligée d'ajouter une autre personne à ma liste noire. Me faire des ennemis n'est pas un plaisir. C'est une terrible nécessité qui me permet d'éviter les coups de poignards dans le dos, venant des personnes à qui j'ai accordé ma précieuse confiance. Et à ce jour, ils sont peu à l'avoir obtenue. Je peux les compter sur les doigts d'une seule main.
Aussitôt, une quiétude glaciale s'empare de la pièce, tandis que je me retourne pour fixer Daisy d'un regard chargé de fureur. Cette pétasse arbore un air confiant qui forge le sentiment méprisant s'insinuant subrepticement sous ma peau. Le regard avec lequel elle laisse émaner une alliance d'assurance et de colère désarmantes. Je constate surtout ses pupilles dilatés qui ne confirment qu'une chose : la junkie a encore consommé.
— Ferme-la au lieu de dire des conneries ! répète-t-elle d'un ton plus tranchant. Frédéric n'est pas le meurtrier. Tout ce qu'il a dit est vrai, je l'ai vu.
Je croise à nouveau les bras sur ma poitrine, penche la tête sur le côté.
— Ouais, ouais, je sais. Ce sont surtout des hallucinations parce que tu as consommé encore une saloperie qui grille tes neurones. Ou du moins, les neurones qu'il te reste.
Mes mots sont l'allumette qui la fait exploser. Elle se précipite vers moi, la main en l'air, prête à m'assener un coup. Mon réflexe est de sortir les poings. Je suis déterminée à me défendre et à lui rendre la monnaie de sa pièce.
— Espèce de sale petite...
Prise au piège dans les bras de Steven et de Marty, je suis incapable de bouger, tandis que Spencer et Nick parviennent à museler Daisy, qui se débat avec fureur. Je l'ai mise en colère ? Voici les conséquences fâcheuses qui découlent de mon irrépressible réaction lorsqu'on ose me défier, qu'il s'agisse d'un jeu ou non. J'espère qu'elle a retenu la leçon.
— Ça suffit ! gronde Frédéric en me jetant un regard sévère qui ne me fait ni chaud ni froid.
L'autorité, cette entité qui s'oppose à ma liberté, est mon adversaire acharné. Que tous se le rentrent dans le crâne une bonne fois pour toutes.
— Daisy, tu te calmes tout de suite. Quant à toi, me lance-t-il en pointant un doigt accusateur. Cesse de raconter des propos atroces à mon sujet. Je ne suis pas le meurtrier. Jamais je n'aurais été capable de commettre un tel massacre !
Steven et Marty m'ont délivré de leur emprise oppressante, néanmoins, je ressens encore le poids de leur regard sur moi. Ils guettent mes agissements au cas où je récidiverais mon attitude. Or, ce n'est pas moi qu'il faut surveiller, mais Daisy. C'est elle qui a foncé la première sur moi. Tout ce que j'ai fait était de me défendre.
La tension s'estompe progressivement, au fil du défilement inexorable des secondes. Je ne peux détacher mon regard de cette peste qui, d'un regard plein de ressentiment, continue de m'embraser. Monsieur Spencer libère un lourd soupir, retourne à son bureau et ouvre le dernier tiroir. Je retiens mon haleine devant l'apparition de ces trois lourds livres à l'allure vénérable.
— Ce matin, juste avant l'arrivée d'un agent de police, j'ai trouvé ces livres.
Mon cœur s'agite sous l'impulsion d'un affolement naissant. Parce que la présence de la police est évoquée et me rappelle sans cesse que mon passé peut ressurgir à n'importe quel instant. En vérité, la simple vue de ces ouvrages suscite en mon être une inquiétante émotion, aussi troublante qu'une obscure prémonition.
— Qu'est-ce que c'est ? demande Nick en se rapprochant d'un peu plus près.
— L'héritage que les sœurs Wardwell ont laissé derrière elles. Ou du moins, une partie de leur héritage.
J'aimerais croire qu'il s'agisse d'une réplique d'anciens ouvrages. Toutefois, une partie dans les tréfonds de mon âme sait que ces livres sont bien réels, que leur authenticité est indubitable. Nick en saisit un pour découvrir son contenu.
— Qui a écrit ça ?
— Sarah Wardwell. L'aînée des cinq sœurs, si je ne me trompe pas. C'est elle qui aurait eu cette vision et l'aurait retranscrite là-dedans, explique le professeur.
Monsieur Spencer lui tend le deuxième livre.
— « Les chamans me l'ont montré et je me dois de le tracer ici. C'est un signe, je le sens au plus profond de mon âme. Nous cinq, sœurs unies par le sang, serons bientôt emportées par les tourments de la mort. Le jour où la Prophétie s'éveillera, nous ne serons plus de ce monde, aussi sûrement que la lumière du jour succède à l'obscurité de la nuit. C'est dans l'instant où elle aura déniché cinq âmes à la hauteur de sa valeur qu'elle émergera de sa longue léthargie. Cinq âmes pures, détentrices d'un pouvoir assez grand pour mettre fin au fléau qui a assombri notre univers depuis l'aube de la Magie. C'est aux heures les plus noires, quand les disciples de la Magie Interdite auront atteint un niveau inédit de ténèbres, que la Prophétie révélera enfin ceux qui sont destinés à accomplir leur devoir. », nous lit Nick.
Un silence de quelques secondes s'écoule, ce qui me permet de laisser infuser en moi cette multitude de données que je viens d'entendre.
— Hum, qui sont les chamans ? demande McFly d'une voix hésitante.
Je le dévisage avec les sourcils relevés. A-t-il aussi décidé d'y croire, lui aussi ?
— Dans l'univers clos et solidaire de la tribu, les chamans, investis d'un pouvoir spirituel, incarnent la fonction sacrée d'intermédiaires entre les humains et les esprits, tissant un lien subtil entre les deux sphères. Ce terme puise sa source de la langue toungouse, où il désigne autant le prêtre que le médecin ou le magicien, lui répond Nick d'une traite.
L'Angleterrien demeure silencieux, en parfaite harmonie avec notre mutisme collectif. Ce type est une véritable encyclopédie !
— Merci pour toutes ces informations, souffle McFly avec un sourire crispé.
— On raconte aussi que les chamans sont les tout premiers sorciers datant de la préhistoire. Et au temps des Gaulois...
— C'est bon, j'ai eu ma réponse, l'interrompt l'Angleterrien.
J'aperçois Steven se mordre la lèvre inférieure pour retenir le sourire amusé qui menace d'étirer ses lèvres.
— Donc, si l'on en croit ce qu'a écrit Sarah Wardwell, la Prophétie s'est manifestée que maintenant, car le Mal est en activité ?
Le professeur répond à Daisy par un hochement de tête. Une décharge de frissons parcourt la longueur de ma moelle épinière. La portée implicite de cette phrase éclaire avec finesse l'énigme qui enveloppe la ville d'une brume impénétrable. Si le Mal a daigné se réveiller, c'est qu'une créature démoniaque est à l'origine de ces assassinats atroces et monstrueux. En dépit de ma volonté de nier l'inéluctable, les pièces du puzzle qui s'enchaînent avec une logique implacable m'obligent à me confronter à la réalité crue ; un tout nouveau cauchemar entame son règne.
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• Hey beautiful people ! 🤗
Ouh, mais ça chauffe entre Polly et Daisy ! •
•......•
• Votre avis sur ce chapitre ?
• Pourquoi Polly n'a rien dit sur l'échange qu'elle et Steven ont surpris entre les deux policiers ?
• Vous avez un personnage préféré jusqu'à présent ?
• Quels sont vos pronostics pour la suite ?
•......•
☆ Le prochain chapitre sera toujours du PDV de notre Grincheux préféré ☆
Kissouilles !
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